Le contrat d’auteur est-il indispensable ?

contract-lolcatAprès un mois chaotique passé jusqu’au cou dans les corrections de Port d’Âmes (la fin approche !), et donc à relayer plutôt les débats des Imaginales, j’ai récupéré un peu de marge de manoeuvre pour reparler un peu d’édition et d’écriture. Un certain nombre de questions ont été soulevées ces derniers temps, et j’ai à nouveau du retard dessus. Or doncques :

Est-ce que demander un contrat devrait être systématique, même s’il n’y a pas de rémunération à la clef ?

Très clairement, oui. Mais c’est surtout l’éditeur qui a le plus à perdre s’il ne le fait pas. Un éditeur qui ne fait pas signer un document écrit concernant la publication d’un texte s’expose à tout un tas de problèmes potentiels s’il travaille avec un mauvais coucheur.

Voici comment fonctionne la loi dans les pays de droit romain1 : quel que soit le domaine, les textes définissent un certain nombre de conditions “par défaut”. Un contrat précise et encadre les termes d’un échange (ici une publication) ; quand un domaine n’est pas mentionné, par défaut, c’est le droit qui s’applique. S’il n’y a pas de contrat, donc, le droit s’applique tout entier.

Le droit dit que l’auteur est souverain sur son oeuvre, notamment qu’il possède les droits patrimoniaux (= d’exploitation). Si un éditeur ne fait rien signer, alors il est, de facto, en tort : il exploite des droits qui ne lui appartiennent pas. Un auteur contrariant (et peu désireux de publier un deuxième texte un jour quelque part) pourrait donc, théoriquement, attaquer la publication en contrefaçon.

Y a-t-il donc un risque pour l’auteur à ne rien signer ? S’il n’y a pas de rémunération convenue, clairement, non2. C’est l’éditeur qui se met en porte-à-faux et en tort.

Néanmoins, c’est toujours une bonne idée d’en demander un. Ne serait-ce que pour s’assurer que tout le monde est bien sur la même longueur d’onde, entre autres concernant d’éventuelles republications du texte dans d’autres supports (s’il n’y a pas de rémunération, il n’y a pas de période d’exclusivité à exiger, mais parler d’un contrat permet justement de dissiper les malentendus). La discussion sur un contrat sert surtout à mettre au point les exigences et devoirs de chaque partie, et il faudrait toujours avoir cet entretien.

Un contrat pour une nouvelle n’a pas besoin de faire quinze pages comme pour un roman. L’usage répandu dans la profession est celui de la “lettre-entente”, un document recto-verso maximum (parfois seulement recto) qui précise très rapidement les termes de l’accord, et peut mentionner en toutes lettres certains usages pour rassurer les deux parties. Le plus courant étant : “Aucune exclusivité n’est concédée par l’auteur à l’éditeur sur ce texte”. Dans les faits, si aucune exclusivité n’est mentionnée, la loi stipule qu’il n’y en a pas, mais le mettre noir sur blanc permet de rassurer tout le monde en établissant clairement les règles du jeu.

À l’inverse, on voit certains éditeurs, disons, peu renseignés, proposer des contrats de trente pages pour une nouvelle dans une anthologie (voire des traductions directes de modèles américains, ce qui est une aberration, puisque les États-Unis ne sont pas un pays de droit romain et fonctionnent sur le régime du copyright). C’est parfaitement absurde.

À savoir qu’en cas de litige grave, une lettre-entente n’offre guère de protection solide à l’éditeur, puisque ce n’est pas un contrat en bonne et due forme, mais il ne s’agit pas ici de se poser des questions de litiges juridiques : le but premier d’un contrat, c’est se mettre d’accord et s’assurer qu’on a bien pensé à tout pour travailler en confiance, l’esprit libre. Ce qui se fait toujours mieux sur un document.

Il va sans dire que le contrat devrait arriver avant la publication… Afin de s’être concerté au préalable sur les conditions de l’exploitation. Il peut être très désagréable de voir arriver a posteriori un contrat différant des termes d’un accord oral. Cela place tout le monde dans des situations inextricables. En discutant en amont, on s’économise quantité de troubles. Encore une fois, c’est à cela que servent ces documents.

  1. Avec le caveat habituel que je suis ni juriste, ni avocat : l’usage de ce blog est à vos risques et périls et ne saurait constituer un dispositif de flottaison agréé par les autorités portuaires.
  2.  Nous parlons bien d’un cas sans rémunération – si l’auteur touche de l’argent sans protester, alors on peut considérer qu’il a donné son accord pour exploitation, mais toujours dans les conditions encadrées a minima par le droit.
2015-07-27T09:43:24+02:00lundi 29 juin 2015|Technique d'écriture|2 Commentaires

Café littéraire “Pourquoi être écrivain ?” aux Imaginales 2015

Photo ActuSF

Photo ActuSF

Ce café littéraire (“un dernier pour la route !”) modéré par Stéphanie Nicot faisait intervenir Paul Beorn, Patrick McSpare et Lionel Davoust aux Imaginales 2015. La captation en a été réalisée par ActuSF et il est écoutable en ligne ou téléchargeable directement sur cette page.

2015-06-23T22:38:13+02:00mercredi 24 juin 2015|Entretiens|Commentaires fermés sur Café littéraire “Pourquoi être écrivain ?” aux Imaginales 2015

Avant-goût de la prochaine piste de Psycho Starship Rampage

apc40-bgm4Petit renvoi pour signaler que, dans les petites pauses que je m’octroie dans les corrections de Port d’âmes (ça s’approche !), je progresse doucement sur une nouvelle piste pour Psycho Starship Rampage. Une fois le livre rendu, je prendrai à plein temps la casquette Wildphinn pendant un moment (sans délaisser ces lieux, évidemment) afin de parallel compress le kick et de sidechain la basse et autres trucs du genre.

Pour en savoir plus sur le développement du jeu, sur le progrès du son, rendez-vous sur le site jumeau (j’essaie de séparer à peu près, parce que je me rends bien compte que cela n’intéresse pas tout le monde ici – et c’est bien pour cela que j’ai choisi un pseudo de l’autre côté). Mais pour ne pas te pousser au clic, auguste lectorat, je te mets directement ici le plus intéressant (à mon humble avis) : les très courts extraits, originellement partagés sur Instagram.

Y a plus qu’à assembler et fignoler tout ça.

https://instagram.com/p/3jycf1x_iS/

https://instagram.com/p/3moLRqx_iU/

2015-06-19T22:09:56+02:00mardi 23 juin 2015|Alias Wildphinn|Commentaires fermés sur Avant-goût de la prochaine piste de Psycho Starship Rampage

“La Route de la Conquête” finaliste du prix Elbakin 2015 !

Couv. François Baranger

Couv. François Baranger

Je suis enchanté ! La nouvelle est tombée en fin de semaine dernière : les finalistes du prix Elbakin 2015, et La Route de la Conquête fait partie des oeuvres retenues. Merci au jury du prix pour avoir remarqué le livre dans sa sélection ! Je suis très honoré d’être en si belle compagnie – félicitations à tous les finalistes :

Le palmarès complet (source)

Meilleur roman fantasy français :
Meilleur roman fantasy français Jeunesse :
  • Le Livre de Perle, de Timothée de Fombelle, éditions Gallimard Jeunesse.
  • Le Roi des Fauves, d’Aurélie Wellenstein, éditions Scrineo Jeunesse.
  • La Voie des Oracles, tome 1, d’Estelle Faye, éditions Scrineo Jeunesse.
  • Malenfer, tome 1, de Cassandra O’Donnell, éditions Flammarion-Père Castor.
  • Oniria – Le Royaume des Rêves, de B.F. Parry, éditions Hachette Jeunesse.
Meilleur roman fantasy traduit :
  • Comme un conte, de Graham Joyce, éditions Bragelonne (traduction de Louise Malagoli).
  • La Voie des Rois, de Brandon Sanderson, éditions Livre de Poche (traduction de Mélanie Fazi).
  • Le géant enfoui de Kazuo Ishiguro, éditions des Deux Terres (traduction d’Anne Rabinovitch).
  • L’épée brisée de Poul Anderson, éditions Le Bélial’ (traduction de Jean-Daniel Brèque).
  • Les Chevaux Célestes de Guy Gavriel Kay, éditions L’Atalante (traduction de Mikael Cabon).
Meilleur roman fantasy traduit Jeunesse :
  • La boutique Vif-Argent, de P.D. Baccalario, éditions Gallimard Jeunesse (traduction de Diane Ménard).
  • L’École du Bien et du Mal, de Soman Chainani, éditions Pocket Jeunesse (traduction de Leslie Boitelle).
  • La guerre des Mus, de Lisa Fiedler, éditions Flammarion-Père Castor (traduction de Faustina Fiore).
  • Le Magisterium, d’Holly Black et Cassandra Clare, éditions Pocket Jeunesse (traduction de Julie Lafon).
  • Witch Song, tome 1, d’Amber Argyle, éditions Lumen (traduction d’Alderic Gianoly).

“Cette année, nous ne décernerons pas de prix spécial.”

2015-07-07T00:36:58+02:00lundi 22 juin 2015|À ne pas manquer|Commentaires fermés sur “La Route de la Conquête” finaliste du prix Elbakin 2015 !

Café littéraire “Pourquoi les Imaginales maçonniques ?” aux Imaginales 2015

Photo ActuSF

Photo ActuSF

Ce débat s’est déroulé aux Imaginales 2015 et éclaire la création des Imaginales maçonniques et ésotériques, son indépendance en tant que manifestation, ainsi que son partenariat avec le festival proprement dit. Animé par Stéphanie Nicot, il faisait intervenir Daniel Keller, Jacques Oréfice et Lionel Davoust.

Il est écoutable dans son intégralité sur le site de référence ActuSF, qui en a réalisé la captation.

2015-06-18T00:28:08+02:00jeudi 18 juin 2015|Entretiens|Commentaires fermés sur Café littéraire “Pourquoi les Imaginales maçonniques ?” aux Imaginales 2015

Extrait d’une conversation édifiante

solidarity_failExtrait d’une courte discussion avec un spécialiste du droit d’auteur, versé plutôt dans le domaine de la musique et du spectacle vivant. (Caveat : n’étant pas un spécialiste moi-même de ces questions, je cite de mémoire ses mots – toute imprécision dans les termes est de mon fait, mais les principes sous-jacents demeurent probablement.)

Moi : Tu sais la dernière que le CNL nous a pondu ? Les organisateurs de festival vont devoir rémunérer toutes les interventions des auteurs sans exception s’ils veulent être subventionnés. C’est normal dans le cas d’une conférence, d’un atelier, et codifier les usages, pourquoi pas, mais pour une table ronde, qui s’apparente à répondre à une interview, c’est absurde. [Voir l’article idoine ici]

Spécialiste : Effectivement. Mais qui décide de ça ? Je veux dire, il n’y a pas des auteurs dans ces structures ? Ils ne sont pas au courant de ces problématiques ?

Moi, un peu désarçonné : Beuh. Si… Il y en à la SGDL, en principe, et au CNL aussi, j’imagine… À la SOFIA aussi, mais… globalement, nous sommes quand même un certain nombre à être passablement surpris, voire en franc désaccord, avec certaines décisions qui y sont prises.

Spécialiste, qui presse l’offensive : Parce que dans les sociétés de gestion collective de la musique, ce sont les créateurs qui se trouvent à leur tête, justement. Le principe sous-jacent est que les créateurs sont les mieux placés pour savoir ce qui les concerne et prendre les décisions qui influencent et définissent leur travail.

Moi, piteux : Je suis bien d’accord, mais on n’en sent pas vraiment l’influence en littérature… Maintenant que j’ai un pied dans les deux mondes, j’ai quand même l’impression qu’il y en a un qui fonctionne mieux que l’autre. Ctte préoccupation de l’auteur, cela ne transparaît pas des masses dans le milieu littéraire. Je ne sais pas comment l’expliquer. J’ai peut-être une vision déformée, aussi. Mais déjà, j’ai la sensation que l’auteur moyen est complètement aux fraises quand il s’agit de se tenir au courant de ses droits et devoirs, de se préoccuper de ce qui le guette. J’ai vu des écrivains il y a trois ans découvrir totalement les problèmes liés à ReLIRE, et même ignorer la différence entre une liseuse et une tablette ! Tu imagines un musicien ignorer ce qu’est Spotify ou même un baladeur mp3 ?

Spécialiste : Certes, mais peu importe l’auteur moyen : les dirigeants des sociétés et organismes devraient être informés, eux.

Moi : Bien sûr, et je pense qu’ils le sont. Je ne sais pas très bien pourquoi ça coince. Peut-être parce que les marchés sont extrêmement différents ? Peut-être parce que dans le domaine de l’imaginaire, nous fonctionnons d’une manière assez différente des autres marchés, avec beaucoup d’événementiel, que nous sommes très proches de notre public en raison d’une forte cohésion du milieu autour de passions qui nous lient tous ? Même si ça change, quand même, on garde cette étiquette de vilains petits canards. Une certaine frange de la littérature blanche (et de son lectorat) méprise ouvertement les genres comme étant de la sous-littérature (alors que les plus gros succès toutes catégories confondues relèvent de l’imaginaire). Il y a un cloisonnement manifeste, moins sensible en musique. Avec ma casquette d’électronicien, je n’éprouve absolument pas de mépris de la part de musiciens classiques, qui sont au contraire très intéressés par ce que je fais, alors qu’avec ma casquette d’auteur de fantasy, je me heurte à davantage de conservatisme. On n’est plus dans les années 60, plus personne n’oserait dire que le punk ou le rock sont de la sous-musique, par exemple de la part de d’un compositeur de musique “sérieuse”.

Spécialiste : Et ils n’auraient aucune raison de le dire, parce que ces genres les financent indirectement ! Les compositeurs de musique symphonique ou de genres plus confidentiels touchent un pourcentage supérieur, dans la répartition des droits, dans les diffusions, que la variété. Comme c’est plus confidentiel, c’est plus difficile pour eux de vivre ou d’obtenir de la diffusion, donc on rééquilibre solidairement. 

Moi : … sérieux ? C’est génial ! Mais combien de décennies avons-nous de retard ? Les bras m’en tombent, qu’on soit incapable de faire ça en littérature, alors que c’est l’évidence même. On en parlait justement sur Facebook rapport à cette idée de rémunération en festival, d’équilibrer en fonction du nombre de ventes, de rémunérer davantage les auteurs jeunes ou plus confidentiels par rapport aux gros vendeurs, plutôt que d’appliquer une grille universelle à tous – ce qui se dessine actuellement avec le CNL. Mais de là à espérer ne serait-ce que l’ouverture d’un dialogue là-dessus…

2015-06-17T01:35:05+02:00mercredi 17 juin 2015|Le monde du livre|15 Commentaires

Café littéraire “Trolls et Licornes” aux Imaginales 2015

Photo ActuSF

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Ce café littéraire, visant à présenter l’anthologie officielle du festival, Trolls et Licornes, s’est déroulé aux Imaginales 2015, avec Pierre Bordage, Estelle Faye, Olivier Paquet et Lionel Davoust. Animé par Jean-Claude Dunyach, également directeur de l’anthologie. Le débat a été intégralement enregistré par ActuSF et est écoutable sur cette page.

2015-06-05T14:33:46+02:00lundi 15 juin 2015|Entretiens|Commentaires fermés sur Café littéraire “Trolls et Licornes” aux Imaginales 2015

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