Un message du ciel

Or doncques, l’Église me spamme ma boîte aux lettres (je ne fais pas mystère du peu de cas que j’accorde à ses missives, ce qui se couple ici à l’agacement de vivre en principe dans une résidence fermée et donc inaccessible aux fâcheux).

Cela dit, je remercierai ici la Providence, car, visiblement, le bon ecclésiastique avait un nom prédestiné pour charger les boîtes aux lettres :

pouriel_eglise

Alléluia !

2015-03-16T21:30:51+01:00lundi 23 mars 2015|Expériences en temps réel|3 Commentaires

5 règles pour (ne pas) démarcher quelqu’un

“Les temps comme les oeufs sont durs », professait ce philosophe de l’exrême qu’est Ken le Survivant (dans son immortelle version française). Cependant, pour faire ses premières armes dans le domaine de la création, il est de plus en plus courant de prendre contact avec d’éventuels professionels via Internet et les blogs.

Je suis honoré et surpris de recevoir de plus en plus de démarches en ce sens, mais j’en reçois aussi un nombre certain qui sont tournées n’importe comment.

Or, les gens publiés sont méchants, c’est connu, ils font partie d’un complot visant à étouffer la véritable création indépendante, puisqu’ils n’aident personne.

Sauf que.

Si je peux aider quelqu’un, je suis ravi de le faire, car “you can never pay back, only pay forward” dans ce métier. Mais faut quand même y mettre un minimum d’efforts. Cela ne vaut pas que pour moi – je suis plutôt cool, en fait, à part mes 10 ans de retard sur mon mail, ce qui constitue une raison parfaitement suffisante pour me vouer à une éternité en enfer -, mais pour toute démarche visant à demander un truc à un type. Et comme le bon sens n’est pas – contrairement à ce qu’affirme ce gros prétentieux de Descartes – la chose la mieux partagée au monde, enfonçons les points sur les i avec des portes ouvertes.

1. Renseignez-vous sur la personne à qui vous parlez

Je suis toujours interloqué quand je reçois des mails m’assurant d’un profond désir de travailler avec ma maison d’édition et, si je ne suis pas la bonne personne, pourrait-on parler au responsable marketing s’il vous plaît ?

Allô ?

J’ai vraiment l’air d’une multinationale ? Est-ce que j’ai seulement l’air de bosser à deux ? Il m’arrive d’avoir des stagiaires une fois par syzygie, certes, mais je n’ai guère les moyens que de les payer en nature, telle est la dure loi du monde de la création. (Je parle de livres, allons. Qu’est-ce que vous imaginez ?)

La moindre des politesses consiste à savoir à qui l’on parle. Solliciter un écrivain pour travailler pour son département artistique est un moyen assez sûr de passer pour un abruti. Pour qu’on vous réponde, assurez-vous de ne pas donner l’impression d’avoir fait un faux numéro.

2. Si vous n’êtes pas personnel, faites au moins correctement semblant

Les temps comme les oeufs sont durs, oui, alors envoyer une brouette de mails tous azimuts permet d’augmenter ses chances, non ?

Ben non. Enfin, pas forcément.

Le milieu de la création est grandement fondé sur des relations de personne à personne, non pas parce qu’on se paie en nature (quoi que fantasment les étudiants en lettres) (c’est pendant les études en lettres qu’il faut en profiter les gens, pas après) (enfin, c’est ce que j’ai entendu dire, j’ai pas fait lettres) (hein) mais parce qu’il s’agit constamment de rencontres d’univers personnels : créateurs, éditeurs avec un discours et une vision, distributeurs amoureux de la culture. Recevoir un mail standard envoyé à 10, 100, 1000 destinataires n’a guère de chances de provoquer l’intérêt.. “Salut, je veux bosser pour / avec vous.” Pourquoi ? “Parce que je suis désespéré.”

Pourquoi vous ? Pourquoi moi ? Démarcher quelqu’un, c’est certes lui demander un service, mais c’est aussi potentiellement lui apporter quelque chose. Bossons ensemble ? Yeah. Mais t’es qui, toi ?

Il ne s’agit pas de réécrire 15 pages à chaque envoi. Mais au moins, s’assurer que ce soit bien ciblé sur la personne, avec un paragraphe changeant en fonction du destinataire, histoire de montrer que vous n’êtes pas aux abois, prêt(e) à tout pour percer), peu importe avec qui. Même s’il faut se faire payer en nature.

Sachez à qui vous parlez. Ça retient l’attention. Ça peut donner envie de lancer la discussion et de s’intéresser, en retour, à vous.

3. Valorisez-vous

Vous êtes chaud(e) patate, motivé(e) à balle, remonté(e) comme un coucou suisse, prêt(e) à conquérir le monde. Vous savez ce que vous voulez. Oui ? Alors dites-le. Il y a, d’après le dernier recensement INSEE, 14,7 pétamilliards de personnes désireuses de bosser dans la création. Avec vous au milieu. Qu’est-ce que vous avez de plus ? Vous êtes vous-même. Vous avez vos idées, votre perspective, votre approche, votre personnalité. Au bout du compte, dans ce domaine, c’est ce qui compte le plus : votre vérité. Alors dites-la, for fuck’s sake. Les diplômes n’ont qu’un poids très relatif dans ce milieu, navré. Des vrais futés, débrouillards, inventifs, en revanche, je peux vous le dire : on en cherche.

N’allez pas jusqu’à exposer clairement que vous allez conquérir le monde, hein, ça fait un peu prétentieux en général et l’histoire a prouvé que ça se termine plutôt mal en général. Mais si vous avez des compétences à apporter, si vous voulez monter un projet avec quelqu’un, mettez-le – mettez-vous – en avant. Vous rêvez de bosser avec Edgar Allan Poe et vous faites du webdesign ? Écrivez-lui en lui proposant un coup de main sur ce front. Parce que, franchement, Edgar, même pas un blog et un Twitter, je te le dis, t’abuses.

4. Sachez ce que vous voulez

Vous ne savez pas ?

Arrêtez tout.

Commencez par là. Qu’est-ce qui vous différencie ? Qu’est-ce que vous apportez ? Il y a forcément quelque chose.

Il y a une constante dans le milieu artistique, du créateur au distributeur : tout le monde ici sait ce qu’il veut et pourquoi il est là. On n’arrive pas là par hasard, et surtout, on n’y survit pas par hasard : c’est une route qui nécessite de la ténacité, de la persévérance au quotidien, au nez et à la barbe de tous ceux qui vous assurent que “personne ne réussit là-dedans, voyons ». Il y a une tolérance assez mince dans ce milieu pour les personnalités poussives ou molles. Soyez proactif, démerdard. Sachez ce que vous voulez – en restant humble. Mais choisissez un cap, un rêve, un objectif. Ayez la niaque. La volonté. Agir. Si vous ne savez pas ce que vous voulez, personne ne le saura à votre place.

Permettez-vous de changer, bien sûr. C’est indispensable.

5. Répondez, même si c’est non

Corollaire de la relation de personne à personne. Les gens ne sont pas des outils, encore moins quand vous leur demandez un coup de patte. La réponse est négative ? Vous avez eu une réponse, déjà, parmi les 14,6999 pétamilliards de mails reçus par la personne. (Cela vaut aussi pour les lettres de refus personnalisées quand vous soumettez un manuscrit.) Plus encore : on vous a posé quelques questions, donné des conseils ?

Répondez, sacré bon dieu.

Le temps d’un créateur, c’est son argent. Si le type vous répond, même pour dire non, il est sympa. Rien ne l’y oblige. Remerciez-le – en deux lignes, juste pour marquer le coup. Ça montre que vous savez vivre, tout simplement. Ce n’est pas de l’obséquiosité. C’est juste se rappeler que c’est comme ça que les relations humaines fonctionnent : en se parlant.

Par contre, une chose est sûre, si vous ne savez pas vivre, ça dispose mal. Et les milieux artistiques sont très, très petits. Une incorrection ou du j’m’en-foutisme peut vous retomber sur le dos sans que vous ne compreniez d’où ça vient. À l’inverse, aux gens sympathiques et motivés, les portes, curieusement, s’ouvrent.

Comportez-vous donc comme si vous aviez votre mère perchée sur l’épaule. Ne jouez pas un rôle. Mais c’est quand même le moment de vous rappeler les leçons de savoir-vivre de votre vieille grand-tante quand elle vous rabâchait de dire “bonjour madame, bonjour monsieur ». On n’est pas des bêtes, bordel, même si on dit bordel.

Pour finir

Tout ça ne fera évidemment pas votre carrière. Mais, par tous les diables, ça peut sacrément aider à vous rendre sympathique. Et ça ne fait pas de mal, à vous, à votre entourage, à votre karma, d’être cool.

En d’autres termes plus agressfis, il faut être sacrément talentueux pour s’octroyer le droit de se comporter comme un connard. Or, comme il est toujours prudent pour un créateur d’éviter de se considérer génial, ça l’oblige à être fréquentable, et ce n’est pas plus mal. La planète ne s’en porte que mieux. Les gens sourient. Tout le monde travaille en bonne entente. Les chats se prélassent au soleil. Signature de la paix dans le monde. Clôture du trou de la couche d’ozone. First contact avec les Vulcains.

2014-08-05T15:21:31+02:00jeudi 16 août 2012|Best Of, Technique d'écriture|10 Commentaires

I phone dead people (phone freaks vol.4)

Cela fait déjà un certain temps qu’un démarcheur inconscient du danger a osé composer mon fatidique numéro de téléphone, entrant sans se douter dans l’antichambre capitonné des sédatifs. À présent que mon combat désespéré contre l’implacable mécanique de la concurrence libre et parfaite s’est plus ou moins soldé par une demi-victoire, dans le coût des réactivations et les services tombés au combat, je crois, ô auguste lectorat, le moment bien choisi pour relater cet entretien. (suite…)

2014-08-30T18:43:29+02:00mardi 27 octobre 2009|Best Of, Expériences en temps réel|2 Commentaires

Pirouette, cacahuète (phone freaks vol.3)

La semaine passée fut fort productive : on ne m’a pas appelé une fois pour me vendre des trucs improbables, mais deux. Enfin, productive du point de vue absurdités et perte de temps, moins de celui des feuillets engrangés. Mais je ne suis pas homme à me soustraire à mon devoir: que tous les démarcheurs téléphoniques voyant un jour mon numéro apparaître sur leur fichier maudit cochent un jour la petite case excentrée, celle qu’ils réservent aux cas les plus difficiles et insolubles, celle qui porte la mention « cinglé ».

Car, oui, j’ai bien essayé de m’inscrire en liste rouge, de demander à ce qu’on me retire des fichiers, de menacer de plaintes à la CNIL, en vain. J’ai découvert qu’il n’existe qu’une seule façon d’être tranquille (à bien des titres) : la folie. Dans laquelle je me trouve pleinement justifié pour deux raisons : d’une, on est censé me foutre la paix téléphonique ; de deux, offrir un moment d’éventuelle détente à mon correspondant est meilleur pour son humeur et mon karma qu’une réponse aussi brève qu’inefficace à base de grognements inarticulés.

Ceci étant dit, intéressons-nous à l’entreprise du jour, l’Office des Propriétaires de je ne sais plus quoi. On m’appelle régulièrement pour me demander si je suis propriétaire, locataire, contribuable, non-imposable et je réponds souvent « non » aux quatre questions à la suite, méfiant de nature, non-euclidien par constitution, me faufilant dans l’azur vierge régnant entre les cases des formulaires URSSAF.

Cette fois, j’ai répondu différemment, mais j’ai raté mon coup.

(suite…)

2014-08-30T18:43:41+02:00lundi 1 décembre 2008|Best Of, Expériences en temps réel|1 Commentaire

Ouvert d’esprit, mais dans le cadre (phone freaks vol.2)

Je ne sais pas ce qui se passe mais depuis que j’ai exposé sur la place publique mes aventures avec le démarchage téléphonique, les appels ont recommencé de plus belle. Encore un coup de la synchronicité. Enfin, ça met à l’épreuve mes capacités d’improvisation, disons.

J’ai d’abord essayé la contre-réponse téléchargeable ici, mais le résultat ne fut pas assez marrant pour valoir la peine d’être raconté.

Je viens en revanche de recevoir un coup de fil qui n’est pas drôle en soi – pas de Station Spatiale Internationale – mais qui est assez surréaliste sur le rôle des genres dans la société.

 

(suite…)

2011-05-01T18:28:22+02:00lundi 25 août 2008|Best Of, Expériences en temps réel|3 Commentaires

Vous avez demandé l’espace, ne quittez pas (phone freaks vol.1)

Où l’on respecte les règles du théâtre classique

Unité de lieu: Chez moi, où je travaille la plupart du temps.

Unité de temps: Une heure, plus ou moins.

Unité d’action: Ce qui suit. J’étais un temps inscrit en liste orange, ce qui interdit théoriquement tout démarchage téléphonique. Mais la plupart des entreprises ne respectent pas cette règle, ce qui est idiot car cela décuple l’irritation du correspondant, coupant à jamais la compagnie d’un client potentiel – qui ne supporte pas qu’on vienne le déranger chez lui quand il a expressément exigé la tranquillité.

La plupart des gens déchaînent alors leur agressivité, raccrochent au nez, passent leurs nerfs sur le pauvre anonyme qui a la malchance d’avoir pour ainsi dire tiré le mauvais numéro. Pour ma part, plutôt que de traumatiser mon démarcheur (qui ne fait que son boulot et qui n’est pas responsable de l’indélicatesse de son entreprise) je préfère… une autre tactique.

Cela va sans dire, mais ce qui suit, ainsi que les autres expériences à venir du même genre, bien que restituées de mémoire, sont totalement authentiques.

iphone_bakelite

Le téléphone sonne. La présentation du numéro affiche: “Indisponible”.
LD: Allô?
Démarcheur: Oui, bonjour monsieur, je suis bien chez monsieur Davoust?
LD, sentant venir le coup: Oui, tout à fait.
Démarcheur: Bonjour monsieur, je suis [Oublié le nom], je représente Bouygues Télécom et j’ai une excellente nouvelle à vous annoncer, les tarifs des forfaits internationaux ont baissé et nous
proposons actuellement une offre limitée dans le temps réservée à un nombre réduit de personnes.
LD, d’un ton enjoué et captivé: Ah bon?!? Comment ça?!!
Démarcheur, prenant confiance: Eh bien, en ce moment, nous vous proposons [Oublié les détails de l’offre, j’écoutais à moitié, mais il s’agissait d’un forfait international à prix
prétendument plancher].
LD: Cela semble extrêmement intéressant, pourriez-vous m’en dire un peu plus?
Démarcheur: [Continue son laïus commercial, Bouygues c’est trop de la balle, confiance, fidélité, qualité de service, cent balles, un Mars.]
LD, toujours très intéressé: Effectivement, c’est vraiment une offre étonnante. Mais… je me demandais…
Démarcheur: Oui, monsieur? Auriez-vous des questions?
LD, gêné: Oui, à propos de la couverture.
Démarcheur: Eh bien, [liste interminable de pays du monde]…
LD: Non, attendez, ce n’est pas ça. J’aurais voulu savoir, jusqu’à quelle altitude tient la couverture?
Démarcheur, surpris: Cela fonctionne en région montagneuse, mais…
LD: En fait, ce que j’aimerais vous demander, c’est si la couverture s’étend jusqu’à l’espace.

(Silence stupéfait au bout du fil.)

LD: Parce qu’en fait, je vous explique, mon frère est cosmonaute et travaille sur la Station Spatiale Internationale. Or, vous voyez, pour nous parler, ce n’est vraiment pas évident, alors votre
offre m’intéresse beaucoup. Je pense qu’on pourrait prendre un forfait chacun, avec le portable qui avec, cela va sans dire, mais votre offre couvre-t-elle la Station Spatiale Internationale?
Démarcheur, après un nouveau blanc: Heu, écoutez, je crois que je vais vous passer mon supérieur, si vous ça ne vous ennuie pas.
LD, toujours enjoué: Mais je vous en prie.

(Petite musique d’attente. Je commence à sourire tout seul.)

Supérieur: Allô? Vous êtes monsieur Davoust?
LD, amusé en plus d’être enjoué: Mais tout à fait.
Supérieur: Oui, je suis navré de cette attente, je vous remercie de votre patience! On m’a signalé que vous étiez intéressé par nos forfaits internationaux mais que vous aviez des questions?
LD: Ah mais oui, je trouve l’offre excellente, je pense très sérieusement à en prendre un et je suis sûr que mon frère en prendra un aussi. Seulement,mon frère est cosmonaute, il travaille sur la
Station Spatiale Internationale, et, pour communiquer tous les deux, c’est vraiment très compliqué. Alors votre offre serait vraiment idéale pour nous deux, vous comprenez, il voyage beaucoup.
J’avais donc une question sur la couverture: est-ce que cela porte jusqu’à la Station Spatiale Internationale?

(Blanc gêné au bout du fil.)

Supérieur: La… Station Spatiale Internationale? Dans l’espace, vous dites?
LD: Oui, tout à fait. Parce que mon frère y travaille toute l’année et c’est vraiment pas commode.
Supérieur: Ecoutez, monsieur Davoust… (Rire gêné.) Je dois vous avouer que cela fait six ans que je travaille dans les télécoms et j’avoue que c’est la première fois qu’on me pose la
question.
LD: Oh mais je comprends, il y a vraiment peu de cosmonautes sur la station, j’imagine bien que ce n’est pas un problème courant.
Supérieur: Je suis vraiment très gêné, je n’ai jamais été confronté à cela et j’avoue que je ne sais pas très quoi vous répondre. Est-ce que vous verriez un inconvénient à ce que j’aille voir mes
techniciens pour leur poser la question, et je vous rappelle ensuite d’ici une quinzaine de minutes?
LD, manquant de pouffer: Aucun problème, bien sûr, n’hésitez pas.
Supérieur: Alors c’est parfait, je vous rappelle.

(Nous raccrochons et j’explose de rire tout seul, certain qu’on ne me rappellera pas et que Bouygues fera enfin disparaître mes coordonnées de ses fichiers. Pourtant, une vingtaine de minutes
plus tard, le téléphone sonne à nouveau, affichant la fatidique mention “Indisponible”.)

LD: Allô?
Supérieur: Oui, monsieur Davoust?
LD, souriant déjà: Tout à fait.
Supérieur: Oui, c’est monsieur [Oublié aussi], de Bouygues Télécom. Je me permets de vous rappeler comme vous m’y aviez autorisé concernant votre question de couverture sur les forfaits
internationaux. Navré de vous avoir fait attendre.
LD: Ah oui! Merci beaucoup! Pas de problème!
Supérieur: Eh bien je suis allé voir mes techniciens pour leur demander si nos offres couvraient la Station Spatiale Internationale. Alors, je suis navré, ils m’ont répondu que non. Mais ils m’ont
bien confirmé que c’était l’avenir.

(Je manque d’exploser de rire une nouvelle fois. J’imagine la tête des techniciens, leurs regards entendus face au jeune winner gominé venu leur poser cette question débile. J’imagine
l’anecdote qui commence déjà à faire le tour de Bouygues Télécom. Je décide de pousser le jeu le plus loin possible, de raconter de plus en plus d’énormités pour voir jusqu’où mon commercial est
prêt à courir. Apparemment, c’est un marathonien.)

LD, déçu: Ah, c’est vraiment dommage! C’est vrai que c’est l’avenir, vous savez, les Américains et les Chinois projettent d’établir des bases lunaires permanentes d’ici dix ans,
je suis supris que Bouygues, qui s’est toujours montré à la pointe de la technologie – c’est vrai, avec le son HF, par exemple – ne s’en préoccupe pas davantage. C’était une offre tellement
intéressante! Mon frère et moi, on aurait été ravis.
Supérieur: Je suis vraiment navré, monsieur Davoust. Mais… (Cherche à poursuivre la discussion, plein de sollicitude) Tout de même, ce n’est pas banal! Puis-je vous demander comment vous
faites pour communiquer avec votre frère, actuellement?
LD, ravi: Eh bien, je suis obligé de passer par le réseau de la NASA, via Internet. Déjà, cela m’oblige à payer chez moi l’équivalent de la ligne d’un petit centre de recherches, ce qui
est coûteux. En plus, il y a toute une procédure à respecter pour se connecter sur le réseau de la NASA, c’est vraiment fastidieux! Je dois régulièrement faire renouveller mon accréditation auprès
du Pentagone! Avec Bouygues, je n’aurais pas ce problème, hein?

(Quelle que soit l’absurdité du bobard, toujours ramener l’attention du correspondant sur ce qui l’intéresse: sa firme et la vente de forfaits téléphoniques.)

Supérieur, fasciné: Je pense bien.
LD, qui noie son démarcheur sous un flot de paroles: En plus, la qualité de la ligne est déplorable! Vous n’imaginez pas! On a régulièrement des parasites à cause des taches solaires, qui
sont très fréquentes à cette époque de l’année. Heureusement, elles sont prévisibles, mais il faut calculer l’heure pour viser entre deux éruptions. Et vous imaginez, calculer le décalage horaire
avec l’espace, c’est pas facile, hein?
Supérieur, qui perd pied: Ah, euh, non, je n’y avais jamais réfléchi.
LD: C’est pour ça que le son HF de Bouygues Télécom serait tombé à point nommé, vous comprenez. La ligne aurait été super.
Supérieur, qui essaie de retrouver ses esprits: Euh, oui, et donc, je ne pourrais quand même pas vous intéresser à un forfait terrestre?
LD: Bah non, je suis navré, comme vos techniciens l’ont dit, l’espace, c’est l’avenir; quand les Américains établiront leur base, je déménagerai aussitôt, alors je prendrai un forfait lunaire. Il y
a bien assez de détails à régler quand on déménage sur la Lune, n’est-ce pas?
Supérieur, dépassé: Ah ben oui, je comprends. En tout cas, merci beaucoup de votre accueil, monsieur…
LD: Mais je vous en prie! Merci à vous de vous être renseigné!
Supérieur: Avec plaisir, monsieur!

2011-05-03T16:53:16+02:00lundi 18 août 2008|Best Of, Expériences en temps réel|7 Commentaires

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