Outer Wilds a une expansion, et vous pouvez y aller

Je vous ai bassiné avec, mais je vous rassure, je bassine aussi tout mon entourage IRL avec Outer Wilds. Je ne dirai absolument rien, puisqu’une immense part du plaisir repose sur la découverte et la révélation, mais disons que le jeu de base semblait tellement parfait et achevé, comment ajouter une extension à une œuvre qui ne laisse rien dépasser presque par définition ?

Eh bien c’est possible.

Je ne vous ai rien dit sur le jeu la première fois, je vous ai raconté à la place comment je l’avais découvert, je vais évidemment vous en dire encore moins. Mais, dans la pure tradition de nos premières sessions à toutes et tous, nous avons organisé un week-end religieux de retrouvailles à cinq fondus du jeu1 pour lancer le DLC, intitulé Echoes of the Eye et, du haut de notre goût d’esthètes de première catégorie ayant poncé le moindre texte, la moindre théorie du jeu d’origine, le faire à plusieurs et décider si l’ajout était à la hauteur de l’original.

Verdict : oui. Nous l’avons fini sur ce seul week-end, mais n’y voyez pas une faible durée de vie : à cinq cerveaux accoutumés à la façon de penser d’Outer Wilds, nous ne sommes jamais restés bloqués très longtemps sur des énigmes (il y en avait toujours un pour avoir l’idée qui relançait l’exploration). Seul, j’aurais certainement mis cinq fois plus de temps. Et l’ajout, tout en offrant des mécaniques décidément différentes de l’original, vient répondre à une question secondaire mais, à la réflexion, troublante, qui pouvait se poser. Echoes of the Eye a une personnalité décidément distincte, ce qui constitue à la fois une prise de risque et une preuve de la créativité renversante du studio. Tout le monde ne sera pas forcément fan de certaines mécaniques (certains pans de gameplay du DLC ne sont pas ma tasse de thé, je l’admets), mais c’est une question de goût, pas d’implémentation, qui est irréprochable.

Comme je ne peux pas vous en dire plus, je vais répondre aux questions que j’ai vu se poser, et que je me posais moi-même avant de commencer le DLC, si c’est votre cas.

Est-ce que c’est bien ? Oui. Mais si vous avez fini le jeu de base, vous savez qu’on ne se baigne pas deux fois dans la même rivière. Vous avez ouvert la boîte de Pandore, vous savez, et Echoes of the Eye ne pourra pas recréer ce même vertige. C’est impossible. Acceptez-le, et dégustez l’extension comme ce qu’elle est : une extension, une manière de prolonger le miracle avant de faire vos adieux définitifs à ce microcosme.

L’histoire prolonge-t-elle dans celle du jeu de base ? Un peu. Mais n’attendez pas une révélation d’envergure : encore une fois, vous savez. Par contre, ça prolonge un truc de manière drôlement futée et bien cool. Et vous vous direz après coup : mais oui, en fait, cette question se posait bien, et maintenant je sais aussi.

Est-ce que je dois reprendre ma sauvegarde d’origine ? Si vous l’avez, oui. D’ailleurs, et les développeurs le conseillent. Mais pas pour la raison que vous pensez sans doute. Sinon, ce n’est pas indispensable, mais c’est dommage de ne pas le faire.

J’ai entendu dire que ça faisait méga peur et j’ai trop peur d’avoir peur. C’est vrai ? Quand même pas. Tu es allé à Sombronces ? Okay : eh bien certains passages sont un peu pire, d’accord, mais on n’est pas non plus dans du survival horror, comme certains tests l’affirment, faut pas déconner non plus.

Si je ne connais pas Outer Wilds, je découvre le jeu avec le DLC intégré ou pas ? Excellente question à laquelle je ne crois pas qu’il existe de réponse claire et franche. Tout de suite après l’expérience, je pensais qu’il valait mieux d’abord faire le jeu de base, puis intégrer Echoes of the Eye, mais je n’en suis plus si certain. Je crois que les deux approches sont faisables. Voyez donc ce que vous avez sous la main et faites avec ce que vous avez. Je pense que ça sera forcément bien.

  1. Dont un qui atterrit sur la station solaire en manuel. Tout le temps.
2021-11-12T16:01:30+01:00jeudi 18 novembre 2021|Geekeries|Commentaires fermés sur Outer Wilds a une expansion, et vous pouvez y aller

Acquérir de l’expérience (ou pas) dans l’écriture [entretien chez Aodez Bora]

Aodez : Aujourd’hui, malgré toute ton expérience, fais-tu encore face à certaines difficultés ?

Lionel : En toute honnêteté, l’entêtement et la persistance déraisonnable commencent à montrer leurs limites après une décennie d’un tel régime. Je ne regrette pas, cela m’a permis d’apprendre beaucoup, mais je crois être parvenu à un stade où il me faut transmuter mon approche. Je ne sais pas encore la forme que cela prendra, si ce n’est que je m’imposerai certainement beaucoup moins de deadlines, voire pas du tout. Je n’en ai plus besoin pour me motiver (ou, plus exactement, cela ne me motive plus).

Merci à Aodez Bora pour son intérêt pour mon travail et ce que je peux en dire ! Un court entretien à l’occasion de la sortie de Comment écrire de la fiction ? sur le parcours de l’écriture, ce qu’on apprend (ou pas), ce qu’on aurait voulu se dire des années plus tôt, à lire sur son site, quete-ecrivaine.com.

2021-06-05T10:42:55+02:00jeudi 10 juin 2021|Entretiens|Commentaires fermés sur Acquérir de l’expérience (ou pas) dans l’écriture [entretien chez Aodez Bora]

Procrastination podcast s04e16 – Les réactions des éditeurs

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Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : “s04e16 – Les réactions des éditeurs“.

(Épisode toujours enregistré en confinement.)
Soumettre un travail à une maison d’édition est une étape nécessaire pour la publication mais qui suscite des craintes, ou se trouve même entourée de certaines idées reçues : cette quinzaine, démythification du processus, et levée de rideau sur la réalité du travail avec les éditeurs.
Lionel commence par rappeler qu’un éditeur est avant tout à la recherche de bons livres et d’auteurs – des personnes avec des choses à dire, et peut-être capable de le faire plusieurs fois ! Estelle renchérit sur l’importance du dialogue et de l’aspect humain ; la recherche se situe des deux côtés de la fameuse « barrière ». Mélanie prolonge sur la fluidité des relations de travail – de part et d’autre.

Références citées
– Éditions La Volte
– Éditions Harlequin
– Éditions Scrineo
– Simon Pinel
– Raphaël Eymery, Pornarina : la-prostituée-à-tête-de-cheval

Procrastination est hébergé par Elbakin.net et disponible à travers tous les grands fournisseurs et agrégateurs de podcasts :

Bonne écoute !

2020-10-19T11:35:16+02:00lundi 1 juin 2020|Procrastination podcast|Commentaires fermés sur Procrastination podcast s04e16 – Les réactions des éditeurs

Procrastination podcast S03E12 : “Créer du suspense”

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Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : “Créer du suspense“.

Des cheveux qui se dressent sur la tête et des ongles qui se rongent jusqu’au bout de la nuit : voici l’effet de suspense qu’un auteur aimerait générer chez son lecteur ! Mais comment procède-t-on ? Pour Lionel, le suspense est un cas particulier de la tension narrative, et le comprendre implique de comprendre surtout d’abord cette dernière. Laurent approuve et renchérit : le suspense est surtout, et avant tout, une sensation qui se crée. Plus technique, Mélanie met l’accent sur la dimension temporelle du suspense, sa mise en place jusqu’à sa résolution ; en cela, c’est aussi, au fond, un élément de connivence et de jeu avec le lecteur.

Références citées
– Alfred Hitchock
– Destiny
– 13 Reasons Why
– Babylon 5
– Heavy Rain
– Amnesia
– Silent Hill
– Prison Break
– Alias

Procrastination est hébergé par Elbakin.net et disponible à travers tous les grands fournisseurs et agrégateurs de podcasts :

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Bonne écoute !

2020-10-19T11:37:38+02:00vendredi 1 mars 2019|Procrastination podcast, Technique d'écriture|4 Commentaires

Ten Year Challenge

Le même univers en développement continu, à dix ans d’écart : à gauche, une nouvelle, « Bataille pour un souvenir », à droite, La Fureur de la Terre, l’imposant volume III de la série « Les Dieux sauvages » (capture d’écran prise il y a quelques semaines – le volume final tournera plutôt autour des 1,4 millions de signes). Entre temps, j’ai appris : de la nouvelle à la novella, puis au roman, puis à la série, repoussant de plus en plus mon horizon et apprenant ce qui est, décidément, un métier très différent. (Écrire une nouvelle ou une série revient à savoir jouer du koto ou du violoncelle : d’accord, y a des cordes sur les deux et on fait de la musique avec, mais à part ça…)

Ça fera peut-être glousser ceux qui liront ça vu les pavés-slash-arme d’autodéfense qui me tiennent souvent lieu de bouquins ces temps-ci, mais : figurez-vous que pendant longtemps, je suis resté terrorisé au fond de moi à l’idée de ne pas arriver à trouver assez de matière pour écrire un roman entier.

Je crois qu’il faut que j’affronte les choses en face. Maintenant… ça va.

 

2019-01-30T10:35:43+01:00mercredi 6 février 2019|Juste parce que c'est cool|6 Commentaires

Pas logique

Or doncques, j’ai une idée de roman d’horreur qui m’est venuebe-afraid, probablement assez idiote ou absurde sur le papier, mais qui, personnellement, me terrifie. Tellement que je ne sais pas si j’aurai le courage de le faire un jour, de m’y plonger entièrement. Et pourtant, au détour du Net, je commence à rassembler de la doc dessus, dès que ça pourrait avoir un rapport, pour y réfléchir, pour déconstruire le mécanisme de cette peur-là. Je pense vraiment que ça pourrait marcher, en plus. Je suis maso, ou bien ça me travaille – probablement les deux. Le truc consisterait à ne pas mourir d’épouvante avant d’avoir fini : écrire un livre, c’est plusieurs mois. J’ignore si je tiendrais lors d’une immersion au long cours dans un truc qui me donne des sueurs froides rien que d’y penser.

Alors que, comme dit précédemment, l’idée, sur le papier, paraît très inoffensive.

(Il y a aussi le fait que publier un livre d’horreur en français de nos jours, ce n’est pas exactement évident.)

Au fait, il y a quelqu’un derrière vous.

2015-02-10T22:08:44+01:00mercredi 18 février 2015|Journal|16 Commentaires

De la motivation au mur

Quand on fait ce métier parfois solitaire, stupidement angoissant – vais-je être bon, soit : vais-je être fidèle à mon histoire, à mes personnages, à mon discours ; vais-je éviter la facilité tout en restant accessible et distrayant ; surtout, vais-je réussir à me rapprocher raisonnablement de l’idéal que j’ai en tête, le bouquin que j’aimerais lire, qui n’existe pas, qui n’existera peut-être jamais mais que, à travers ma personnalité, mon vécu, mon émotion et ma colère, je suis le seul à pouvoir essayer de faire – il est aisé de sombrer dans la contemplation de ses propres névroses et surtout dans le mirage de sa propre importance. Quand on se lance dans l’entreprise profondément mégalomane d’écrire – de créer des mondes, des gens, et de se dire : il y a quelqu’un là-bas, dehors, que ça va intéresser -, l’angoisse du créateur peut agir comme une preuve de statut. Je rame, donc j’existe ; je m’enveloppe de mon écharpe blanche, je me rends sur la falaise où gronde l’orage, et quand la foudre m’aura terrassé, je ramperai, agonisant, vers le clavier pour partager mes dernières paroles. Si ce sont mes dernières, j’ai une excuse pour les prononcer : je vais mourir, vous comprenez, alors vous allez bien me pardonner ça.

Ou alors, on met les doigts dans la prise comme on se branche sur les nuages, on rit comme un damné et on revient pour le prochain fix, en se disant qu’on ne comprend pas grand-chose à qui peut, ou non, s’intéresser à ce qu’on fait, que finalement ça n’a pas d’importance, qu’on ne fait pas ça pour ça de toute manière, on fait ça pour soi et que si on fait vraiment ça pour soi, avec éthique et fermeté, certains autres, des autres, partageront le moment ; qu’on touche probablement des gens qu’on ne rencontrera jamais, mais ce n’est pas grave, parce qu’en réalité, il y a dans votre travail des dimensions, n’en déplaisent aux professeurs de commentaire composé, que vous ne maîtrisez absolument pas – vous les sentez présentes, comme une ombre entrevue du coin de l’oeil, mais vous préférez les laisser inaperçues, car elles participent de la magie, de l’inexplicable qui rôde sous le courant apparemment maîtrisé du récit, et les sentir naître fait partie du plaisir, peut-être bien, même, de la véritable raison pour laquelle vous faites ce métier ; elles sont votre ange, qui guide votre main, une partie de vous qui est pourtant externe, un animal familier, un daemon.

Pour s’envoler au lieu de se laisser ancrer connement les pieds sur terre avec le poids de sa propre importance, on peut se mettre des petits mots doux au mur.

La dernière ligne de la deuxième maxime aurait pu s’écrire “If not, make it, you fucking moron.” Mais bon, ma maman n’apprécierait pas qu’on me parle comme ça, alors je ne vais pas la contrarier.

Voilà qui rejoint sur mon mur, entre autres choses, un fac-simile de la maxime impériale asrienne d’Évanégyre, les sept principes du Jeu Supérieur du pouvoir et de la connaissance de Léviathan, et surtout la litaine contre la peur d’Elizabeth George, et qui ne dit jamais que la même chose, avec mes propres formulations, qui peuvent bien s’appliquer à l’existence entière.

Life isn’t a support system for art. It’s the other way around. – Stephen King

 

2012-10-15T11:04:55+02:00lundi 15 octobre 2012|Technique d'écriture|11 Commentaires

Peut-être de dernières secondes de paix

La réalité est bien entendu plus complexe. Mais cela donne à réfléchir.

Julien Assange, le très poursuivi et controversé rédacteur en chef de Wikileaks est actuellement au centre d’un conflit diplomatique opposant l’Équateur et la Grande-Bretagne. Les premiers lui accordent l’asile politique, ce qui n’est pas du tout du goût des seconds, qui menacent de répliquer par une intervention armée.

Évidemment, ça fâche.

Nous souhaitons être très clairs, nous ne sommes pas une colonie britannique. Le temps des colonies est terminé […] Si l’intervention mentionnée dans le communiqué officiel britannique se produit, elle sera considérée par l’Equateur comme un acte inamical, hostile et intolérable, ainsi que comme une agression contre notre souveraineté, ce qui nous obligerait à répliquer par les moyens diplomatiques les plus fermes. – Source

C’est dans l’air que les inégalités sociales, les disparités de rémunération, les répercussions de la crise économique, les horreurs générées par le capitalisme sans contrôle, la haine envers l’Occident née de la misère forment un très dangereux cocktail qui monte doucement vers l’ébullition et des paroles de “révolution” ou de “guerre” ne se trouvent plus seulement prononcées par les alarmistes.

Quand je vois Assange détenu par un État souverain et qu’un autre menace ni plus ni moins d’une violation de celle-ci pour récupérer un homme qui – à tort ou à raison, c’est un autre débat – a poussé à l’extrême l’idéal de libre circulation de l’information, je frémis. Je me rappelle qu’un autre type est mort assassiné il y a presque un siècle et que, par le jeu des alliances, cet événement tragique mais relativement isolé a plongé l’Europe dans une guerre atroce. Assange symbolise un enjeu majeur du début du XXIe siècle, celui du contrôle de l’information. Car, selon les mots d’Orwell, “qui contrôle le présent contrôle le passé ; qui contrôle le passé contrôle l’avenir ». Cela va bien au-delà des questions de propriété intellectuelle ou du fantasme de geek ; il y a les colossaux enjeux économiques liés au contrôle de l’information personnelle du citoyen (qu’on constate le succès de Google et Facebook, deux régies publicitaires, pour mesurer leur poids), la tentation du contrôle et du fichage des citoyens par les États, même démocratiques, sous couvert d’épouvantails rhétoriques. Assange ne peut pas rester impuni. Sans même parler d’éthique et en constatant les faits seuls, il est la faille dans le système, l’épine dans le pied, une faille qu’il faut écraser, effacer, au risque de saper l’ensemble des édifices politiques actuels.

C’est trop gros, et pourtant. Une part de moi-même ne peut s’empêcher de souhaiter ne pas assister à un fragment d’histoire en train de s’écrire. Que le symbole controversé qu’est Assange et les actions irréfléchies des États ne forment pas le prétexte à l’explosion tant prophétisée du cocktail et déclenchent une cascade de dominos comme en 1914 avec l’assassinat du pauvre archiduc Ferdinand qui ne se serait probablement jamais douté que sa mort conduise des États prétendus civilisés à la guerre. Qu’en 2090, un gosse comme moi cent ans avant ne s’interroge sur la cause incroyablement stupide d’une boucherie, preuve de la sottise humaine – une espèce qui a manifestement besoin de se baigner dans son propre sang pour apprendre des leçons.

Des leçons pour lesquelles sa mémoire semble toujours tristement courte.

2012-08-18T19:13:12+02:00mardi 21 août 2012|Humeurs aqueuses|26 Commentaires

Sortie du monastère

Hello World, auguste lectorat, chéri mon amour.

Tel le pilote abattu en vol, j’émerge des débris de mon appareil, non sans avoir, au cours d’une interminable lutte à mort, finalement brisé la résistance de mon manuscrit lors d’une interminable chute vers le sol. Celui-ci est maintenant rendu aux mains qui l’attendaient et je suis, comme qui dirait, dans l’attente.

Auguste lectorat, tu sais que mon amour pour toi est sans bornes, je vais à présent te révéler les dessous de l’édition. On nous imagine prenant des petit-déjeuners coûteux sur des terrasses de restaurant dont le nom comporte une combinatoire entre un lieu aux connotations délicieusement surannées (atrium / closerie / atelier / abri de jardin Ikea), une fleur (lilas / marguerite / jonquille / nénuphar / drosera carnivore) et/ou une ville lointaine au parfum chargé d’histoire (Prague / Madrid / Vienne / la Motte-Beuvron). En réalité, un auteur envoyant un manuscrit à son éditeur reçoit invariablement une réponse parmi les trois suivantes :

  1. OMONDIEU SAY GENIÂÂL ON VA FAIRE LE NOBEL
  2. Non mais qu’est-ce que c’est que cette bouse, vous vous êtes injecté quoi dans les veines, rendez-moi votre avance, je savais bien que vous n’étiez qu’un faisan, un imposteur, toute votre carrière jusqu’ici n’était faite que d’heureux hasards, je ne veux plus jamais entendre parler de vous, j’ai donné votre manuscrit à manger à mes dobermans, j’ai effacé à la Javel votre nom de mon carnet d’adresses, j’ai immolé vos mails par le feu après les avoir imprimés encore pour les percer de petites aiguilles empoisonnées au curare, vous avez totalement échoué dans votre choix d’orientation mon pauvre type (ça se termine généralement par l’assassinat désespéré d’une conseillère d’orientation de 3e qui n’a rien demandé à personne puisque, de toute façon, elle vous avait conseillé de faire une licence de maths)
  3. Bon, écoutez, c’est pas mal, y a de bonnes choses, mais aussi probablement pas mal de retravail, quand est-ce qu’on peut en discuter ?

Tout auteur rêve de 1. mais pense en réalité qu’il va recevoir 2., aussi pousse-t-il secrètement un soupir de soulagement quand il reçoit 3.

Sauf que – et c’est là le secret, auguste lectorat, le secret sur lequel repose toute l’édition, TOUTE L’ÉDITION TU M’ENTENDS – tout éditeur ayant sollicité un manuscrit à son auteur n’imagine jamais qu’il pourrait dire 1., ni 2. d’ailleurs, aussi n’a-t-il en réalité qu’une seule réponse à son répertoire : 3.

Je suis donc en train d’attendre mon 3. en étant persuadé que je vais recevoir mon 2., mais vois ce que je fais, auguste lectorat, j’exorcise, j’exorcise, j’exilerai ma peur, j’irai plus haut que toutes ces montagnes de douleur.

Du nouveau dans le tuyau

Victor n’est pas resté inactif pendant ce temps et les plus attentifs, pointus, fidèles, précis, obsessionnels – compulsifs (salut camarades, vous n’êtes pas seuls ici) parmi vous auront déjà remarqué les nombreux changements et améliorations qu’il a apporté – gloire à lui, qu’il en soit remercié, alors qu’il vole déjà vers d’autres cieux féconds, la reprise de ses cours :

  • Une boutique ! Buy buy buy ! Trouver les ouvrages n’est pas forcément facile avec les éditeurs indépendants et cette page permettra de trouver leurs coordonnées et sites facilement en un seul et même endroit, ce qui permettra d’alléger ces mentions ailleurs. Je précise que je ne suis affilié à rien ni personne et que nous avons essayé de favoriser les éditeurs et distributeurs les plus pratiques à l’utilisation pour vous.
  • Un nouveau carrousel en page d’accueil. L’ancien avait tendance à baver un peu partout sur les connexions lentes avant de se mettre correctement en place. Le nouveau est plus sleek, plus clean, plus wiz.
  • Diverses réorganisations et améliorations un peu partout : pour la présentation des nouvelles, la bio, les pages livres sont refaites, etc.

Les aperçus de chaque article vont également recevoir des petites zimages fixes en fonction de la catégorie pour plus de clarté sur la page d’accueil. Les voici les voilou :

Il y a encore deux ou trois trucs à polir mais la plate-forme atteint plus ou moins sa forme définitive pour un petit moment. Bonne visite à tous !

2011-02-15T13:04:45+01:00mardi 15 février 2011|Actu|8 Commentaires

La litanie contre la peur

Écrire. […] J’ai peur. […] J’ai tellement de travail. Je suis angoissée. J’ai l’impression de ne pas maîtriser correctement l’histoire. […] C’est la vérité : je ne la maîtrise pas. Mais voici ce que je vais faire : je vais avancer le roman de cinq pages par jour. Je vais croire que je fais ce que je suis censée faire […] : écrire. Je vais croire que les mots sont là, en moi, que les idées sont là, en moi. Je vais croire que je suis pleinement capable de conduire ce projet à son terme. Je vais me rappeler que j’ai toujours eu peur, et que je me suis toujours frayé un chemin à travers la peur, dépassant la peur, pour la transformer en foi.

Elizabeth George, Journal of a Novel, 4 nov. 2001

Cette citation, tirée de Write Away (Mes Secrets d’écrivain en français), figure dans mon bureau depuis des années, quasiment sous mes yeux (photo ci-contre). Et si c’est bon pour Elizabeth George, ma foi, ça l’est pour moi aussi, ça l’est pour nous tous – en tout cas nous qui sommes frappés par cette angoisse et par son symptôme le plus courant, la procrastination. Camarades, nous sommes en bonne compagnie : George, William Gibson (« Je préfère largement le fait d’avoir écrit à celui d’écrire », confiait-il), Fredric Brown aussi, me semble-t-il, et j’en passe.

J’ignore si cette peur disparaît jamais vraiment avec le temps ; à en croire George, il n’en est rien et, selon ma modeste expérience, elle aurait plutôt tendance à empirer. La question n’est donc pas tant de chercher à l’annihiler, ce qui semblerait un combat perdu d’avance, et encore moins d’en concevoir de la culpabilité. Il s’agit de faire la même chose que George : la reconnaître, puis travailler autour, avec, au travers. Et, pour cela, il n’y a qu’une seule chose à faire : sauter dans l’arène, et agir maintenant. C’est une tautologie, mais, pour avoir conscience qu’on a déjà su transcender la peur pour la “transformer en foi”, pour se fonder sur cette expérience afin d’alimenter les suivantes au moment où les craintes montrent les crocs, il faut l’avoir déjà fait. Et cela n’arrivera pas demain, mais aujourd’hui, maintenant, à votre prochaine plage de temps libre, qu’elle dure deux heures ou bien cinq minutes. Si vous n’en profitez pas, demain, vous serez toujours au même point – et peut-être en pire condition, car vous éprouverez la culpabilité de ne pas avoir agi hier au moment où vous l’auriez pu. Robin Hobb affirme, et elle a raison, que “vous n’aurez jamais plus de temps libre qu’aujourd’hui”.

C’est tout simplement la première règle de Robert Heinlein, et le conseil en apparence tout simple que bien des écrivains chevronnés donnent aux plus jeunes (j’ai par exemple entendu Terry Brooks le répéter des dizaines de fois aux Imaginales l’année de sa venue) :

Règle n°1 : Tu dois écrire.

2014-08-05T15:24:32+02:00vendredi 6 août 2010|Best Of, Technique d'écriture|14 Commentaires

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