Procrastination podcast s08e08 – Écrire sous deadline

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Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : “s08e08 – Écrire sous deadline“.

La meilleure manière de ne pas être coincé avec une date butoir serrée, c’est de ne pas en prendre, mais les impératifs de l’existence ne le permettent pas toujours. Comment survivre face à un délai de production court et une cadence peut-être infernale ?
Mélanie différencie déjà les sprints et les marathons, qui n’exigent pas la même approche, mais surtout : ne pas accepter ce qu’on ne peut pas tenir ! Et pour cela, une clé importante consiste à se rappeler qu’on ne peut pas travailler à 100% tout le temps.
Lionel rappelle que la deadline est fréquente dans une vie créatrice, mais n’est pourtant pas l’état naturel de la création, même si elle peut donner en structure. Quoi qu’il arrive, l’important dans une période de tension, paradoxalement, ce sont les pauses, la marge de respiration à conserver.
Estelle rappelle qu’un auteur en mauvais état écrit mal, ce qui est contreproductif ! Et il est important de connaître son rapport à la pression temporelle, car il est possible d’écrire avec, mais aussi sans. Elle donne quelques astuces pour calibrer intelligemment ses dates butoir notamment quand on commence…

Références citées

  • Douglas Adams

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Bonne écoute !

2024-01-15T08:17:09+01:00mardi 2 janvier 2024|Procrastination podcast|Commentaires fermés sur Procrastination podcast s08e08 – Écrire sous deadline

Procrastination podcast s08e03 De beaux sentiments sans tomber dans les bons sentiments

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Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : “s08e03 De beaux sentiments sans tomber dans les bons sentiments“.

Une certaine concentration actuelle des attentes du marché sur la tension narrative, le conflit, le rythme peut faire crainte la difficulté d’écrire des relations peut-être saines ou pacifiques entre personnages. Peut-on le faire ? Comment écrire de l’enjeu et de la tension sans tomber dans la cruauté et la violence ? Pour Estelle, justement, un premier levier consiste à prendre conscience que celles-ci ne sont pas obligatoires ; au contraire, s’en abstenir permet de marquer du contraste. Ensuite, il convient d’accepter que dans un monde sombre aux événements âpres, les relations ne sont pas forcées de suivre le même motif. Mélanie souligne justement, exemples et choix de narration à l’appui, la puissance que ce contraste entre normalité et cruauté peut acquérir dans un récit. Pour Lionel, la difficulté s’enracine dans une compréhension restrictive ce qui fait un conflit narratif et sa tension, lesquels peuvent sortir du modèle frontal, interpersonnel et intense pour aborder quantité d’autres façons de raconter.

Reférences citées

  • L’Armée des ombres, film de Jean-Pierre Melville
  • The Last of Us, série de Neil Druckmann et Craig Mazin
  • Harper Lee, Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur
  • J. R. R. Tolkien, Le Seigneur des anneaux
  • Star Trek, série créée par Gene Roddenberry
  • Ted Lasso, série de Bill Lawrence, Jason Sudeikis, Brendan Hunt et Joe Kelly
  • Doctor Who, série créée par Sydney Newman et Donald Wilson

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2023-11-01T08:17:00+01:00lundi 16 octobre 2023|Procrastination podcast|Commentaires fermés sur Procrastination podcast s08e03 De beaux sentiments sans tomber dans les bons sentiments

Pièges et difficultés du point de vue omniscient

Le point de vue omniscient (cf inventaire des points de vue) attire souvent dans la narration : c’est vrai que la capacité de pouvoir sauter à l’envi dans la tête de chaque personnage, de prendre autant de distance ou de proximité avec eux qu’on le souhaite est tentant. L’intention louable est la liberté, et la capacité de dramatiser chaque action de la façon la plus efficace. L’intention plus problématique, qui apparaît de temps à autre en atelier, consiste à vouloir esquiver les contraintes des points de vue de narration plus classiques. Or l’expérience tend à montrer qu’en art, quand on veut s’affranchir d’une difficulté, on finit souvent par s’en créer une plus considérable encore.

Je viens ici, auguste lectorat, descendant de ma montagne avec sur mon iPad les tables des peut-être-lois-mais-pas-vraiment-vous-faites-ce-que-vous-voulez (consignées dans Airtable) te dire que, eh bien, le point de vue omniscient n’est pas une idée si géniale que ça dans un grand nombre de projets.

Le point de vue est une des règles du jeu les plus fondamentales que le récit propose (promesse narrative) : il décrit par quel artifice l’information sera transmise. Or, la littérature n’est que de la transmission d’information, puisqu’elle repose sur le langage. Dès lors, le point de vue omniscient entraîne un problème de taille si l’on n’est pas prudent·e (et/ou expérimenté·e) : en autorisant les basculements arbitraires de narration, il peut donner l’impression de tricher avec ses propres règles (ou de n’en avoir aucune), ce qui brise l’implication du lecteur qui ne sait pas à quoi se rattacher et dans quoi s’investir émotionnellement.

Ce qui entraîne une difficulté considérable : il est compliqué, avec une narration omnisciente, de faire monter une tension narrative. En effet, celle-ci repose très souvent sur l’information incomplète des personnages : Jean-Eudes m’aime-t-il ? Y a-t-il un tueur en série au coin de cette rue sombre ? Saroumane est-il du côté des gentils ?

Habituellement, le lecteur ignore les réponses parce que les protagonistes, sur qui la narration est centrée, l’ignorent. Et donc, il les désire, pour savoir comment l’histoire va se dénouer. En revanche, le point de vue omniscient fait voler en éclats la rambarde précieuse qui donne à l’auteur une raison parfaitement acceptable de cacher tout ça : si la narration n’a pas de règle intrinsèque (autre que l’arbitraire) pour cacher les sentiments de Jean-Eudes, la présence de Jack l’Éventreur dans l’ombre ou les allégeances géopolitiques réelles de Saroumane, alors elle devrait les donner, ce qui pète tout de suite le game. Et si elle ne le fait pas, le lecteur se sent floué.

Comme avec tout, c’est bien sûr un effet que l’on peut vouloir rechercher, mais on tombe alors davantage dans le post-moderne ou l’expérience littéraire que dans la fiction pure. (Éventuellement dans la tragédie.) Et d’ailleurs, en général, le point de vue omniscient rattrape le déficit de tension narrative en suscitant l’intérêt d’une autre façon, comme un commentaire sur les événements, souvent humoristique ou satirique. C’est valide, évidemment, mais ça n’est pas du tout la même chose qu’écrire une aventure ou une romance : les enjeux reposent moins sur le destin des personnages que ce qu’ils représentent.

Notons que le point de vue omniscient est résolument distinct du roman choral, dont on a parlé ici (le roman choral emploie une succession de points de vue limités et contenus, donnant au lecteur une vision plus globale du récit, mais toujours incomplète).

2022-09-24T02:58:41+02:00lundi 26 septembre 2022|Best Of, Technique d'écriture|2 Commentaires

Quelques rapides conseils pour écrire du roman à points de vue multiples

Je retombe là-dessus dans mes archives, une réponse à une stagiaire faite en atelier d’écriture, et je me dis, ben, autant l’archiver dans l’éther du vaste monde, en mode noté sur un coin de table, histoire que ça profite si ça peut. Quelles bases recommander pour l’écriture de romans choraux (= à points de vue multiples ?)

On pourrait écrire des manuels entiers sur la question (et nous avons un double épisode de Procrastination sur le sujet dans la saison 4 : part 1 / part 2) mais à mon sens, les premiers éléments auxquels penser sont :

  • Faire en sorte que chaque ligne soit « saine » narrativement (chaque personnage doit avoir une raison d’être là, avoir des conflits et des volontés qui lui sont propres, des actions à réaliser), du début à la fin, avec des promesses narratives « payées » convenablement…
  • … tout en s’assurant de son interdépendance avec les autres ou, a minima, le monde (sinon, pourquoi avoir ce point de vue-là, ou pourquoi avoir les autres si un seul suffirait ?)
  • S’assurer autant que possible que chaque scène « fonctionne » à part entière en faisant à chaque fois avancer l’histoire (voir le jeu des conjonctions de coordination entre scènes)
  • Panacher subtilement les ambiances pour conserver de la variété (par exemple, utiliser les alternances de points de vue pour varier le rythme entre fils narratifs promet de maintenir davantage l’attention à long terme, au lieu, mettons, de mettre toutes les scènes de combat de tous les fils narratifs au même endroit. L’histoire ne le permet pas toujours, mais quand on peut moduler un peu, c’est une bonne chose à réfléchir. Par exemple, si A se bat à la scène n, je peux avoir une scène plus calme avec B en emplacement n+1 pour marquer le contraste… ou bien, résolument, mettre toute la tension au même endroit – ce qui compte, c’est que ce soit des choix conscients)
  • Utiliser un studio d’écriture qui permette une vision globale de son récit me paraît indispensable pour y voir clair (Word en mode plan, ou bien mieux, une application type Scrivener ou Ulysses, mais plutôt Scrivener pour ces raisons)

Un point d’importance à noter sur le roman choral (j’en sais, ahem, quelque chose) : c’est mécaniquement plus long qu’un récit avec un seul personnage (car on multiplie les interactions et les expositions). Et il faut prendre garde à avoir autant de points de vue que nécessaire pour servir l’histoire, mais pas davantage : car à chacun, on augmente mécaniquement le nombre d’interactions, de fils narratifs à maintenir tant pour soi que pour le lecteur, et le risque est de voir l’histoire s’effondrer sous le poids d’une complexité qui ne la sert pas. Mais on peut quand même monter pas mal en nombre (j’en ai entre 6 et 8 par volume de « Les Dieux sauvages », et ce n’est rien à côté du célébrissime extrême de La Horde du Contrevent, où Alain Damasio en fait intervenir une vingtaine).

2022-07-12T09:22:00+02:00lundi 18 juillet 2022|Technique d'écriture|Commentaires fermés sur Quelques rapides conseils pour écrire du roman à points de vue multiples

Procrastination podcast s06e07 – Les flashbacks

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Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : “s06e07 – Les flashbacks“.

Les flashbacks (on analepses) consistent à revenir en arrière dans le temps de l’action pour narrer ce qui se passe avant celle-ci. Parfois un peu décrié, est-ce un procédé facile ou une technique de narration puissante ? (Vous connaissez déjà la réponse : les deux.)
Estelle remet en question la mauvaise presse de la technique, car elle donne l’importance du souvenir, ce qui peut être vital dans certaines thématiques ; pour Mélanie, c’est même du show don’t tell à l’état pur, donnant une incarnation au passé. Lionel est moins enthousiaste, quant à l’effet d’arrêt que le flashback peut donner, et la frustration qui peut en résulter pour le lecteur.

Références citées

– Blade Runner 2049, réalisé par Denis Villeneuve

– Ça, Stephen King (et les adaptations d’Andrès Muschietti de 2017 et 2019)

– Jessie, Stephen King

– Orange is the New Black, série de Jenji Kohan

– Le mont Etna, 3357 m

Procrastination est hébergé par Elbakin.net et disponible à travers tous les grands fournisseurs et agrégateurs de podcasts :

Bonne écoute !

2022-01-18T18:42:46+01:00mercredi 15 décembre 2021|Procrastination podcast|Commentaires fermés sur Procrastination podcast s06e07 – Les flashbacks

Nouveau stage sur un week-end : “Écrire une scène d’action”

J’ai le plaisir de vous annoncer que je remets le couvert en fin d’année ! Cet atelier intensif, inauguré en début d’année de façon un peu étrange (en plein confinement) avait bien plu (merci aux stagiaires !). Il se tiendra donc à nouveau, en présentiel cette fois, à l’école Les Mots (comme de plus en plus souvent – toujours un plaisir !), cet automne.

Comment écrire une scène d’action ?

L’action dans la narration est directement reliée à la notion de tension : qu’elle soit physique ou psychologique, elle place directement les personnages face à des enjeux immédiats et intenses qu’ils doivent résoudre d’urgence. Son dénouement entraîne des répercussions d’envergure – parfois irréversibles – sur la suite du récit. 

Mais retranscrire l’action par des mots seuls dans notre monde actuel saturé d’images représente un véritable défi. Il faut communiquer le danger, maintenir le suspense, faire partager au lecteur la nervosité des personnages, le tout avec une clarté et une concision plus marquées que dans tout autre volet du récit. Une scène d’action réussie constituera un moment fort dont le lecteur se rappellera longtemps – quand son échec entraînera l’effondrement de toute une histoire pourtant bien construite. 

Par la confrontation avec divers archétypes célèbres de l’action romanesque, cet atelier conduira les stagiaires à prendre conscience de toutes les facettes étroitement imbriquées dans l’écriture de telles scènes, et comment rythme et tension peuvent être induits dans la texture même du texte. L’idéal : découvrir comment susciter chez le lecteur des sensations approchant le vertige cinématographique. 

Cet atelier est idéal pour vous si : 

  • Vous cherchez une approche structurante avec des notions théoriques qui vont vous apporter un cadre
  • Vous avez envie de sortir de votre zone de confort et aimez l’inattendu ! 

Méthodologie : 

  • Cet atelier propose des exercices différents à chaque séance pour s’entraîner et découvrir !
  • Cet atelier ne requiert pas d’arriver avec une histoire en tête ou des éléments narratifs déjà construits.

Au programme, en vrac : la fonction de la scène d’action ; ses pièges et ses techniques : rythme, confit, enjeux ; astuces et outils pour les concevoir et les écrire ; du duel… jusqu’à la scène de bataille épique.

L’atelier se tiendra donc à l’école Les Mots, à Paris, le week-end du 10-11 octobre. Attention, places limitées à 12. Pour plus d’informations et s’inscrire, rendez-vous sur cette page !

2020-10-05T20:25:44+02:00jeudi 30 juillet 2020|À ne pas manquer, Technique d'écriture|Commentaires fermés sur Nouveau stage sur un week-end : “Écrire une scène d’action”

Une facilité courante : la construction en analepse

Bon alors, “facilité”, on s’entend, hein :

  • Il n’y a pas de “fautes” en art ; il s’agit ici de questionner son travail, et de se dire : “ai-je bien servi mon projet de la manière la plus efficace pour un public ?”
  • Quand je dis que cette construction est une facilité courante, ce n’est pas qu’elle à bannir, mais que son usage, surtout répété, mérite d’être interrogé dans le but de → rendez-vous au point précédent.

Mais si j’en parle, c’est que je suis frappé par sa fréquence dans les textes de jeunes auteurs (et des moins jeunes, y compris publiés). Et que j’en abusais aussi, moi-même, dans mes premiers jets. Et que, si c’est évidemment une construction tout à fait valide, puisqu’elle existe, elle est drôlement pratique, peut-être un peu trop, et que cela pousse donc à s’en servir avec parcimonie pour éviter ses défauts, car elle en a, et un peu trop aussi.

Mais mettons donc la charrue, puis les bœufs.

Qu’est-ce qu’une analepse ?

C’est un mot savant pour dire, en gros, “flashback. Tout ce qui se passe antérieurement à l’action du récit est une analepse :

Bob partit à la plage, car il avait vu la veille qu’on avait prédit une accalmie dans les invasions de méduses tueuses. Il était content d’avoir son maillot de bain en kevlar.

Où est l’analepse ? Tout à fait, c’est la cause dans ce récit passionnant et d’une grande qualité stylistique : “il avait vu la veille”, toussa.

L’analepse, c’est donc très pratique – ça permet de saupoudrer des explications au passage sans briser le rythme d’un récit, au moment où on en a besoin. Si, la veille, Bob a serré sur Tinder, on s’en tape un peu qu’au passage l’auteur nous raconte qu’il s’est intéressé à la météo. On veut voir le début d’une grande histoire d’amour, et si l’auteur a un cœur, c’est ce qu’il nous racontera, car on a tous besoin d’amour dans un univers envahi par des méduses tueuses.

Qu’est-ce que la construction en analepse ?

C’est un terme à moi, donc n’allez pas me citer en composition de khâgne, sauf si vous voulez me donner l’air malin et à vous pas du tout. Mais : la construction en analepse fonctionne de façon très simple :

  • Je débute ma scène : il se passe une action de ouf, je démarre dans le feu de l’action, yeaaaah
  • … mais il faut expliquer comment on est arrivé là, sinon on va rien piger, donc j’insère une analepse (souvent longue – c’est là que ça commence à coincer)
  • … et je reprends le feu de mon action style on a rien vu

Sauf que si. Par exemple :

Bob partit à la plage armé de son maillot de bain en kevlar, le cœur débordant de tension amoureuse. La veille, il avait matché avec Plectrude sur Tinder, une Franque qui aimait les fruits de mer. La vaillante Teutonne lui avait avoué qu’elle ne craignait aucunement les méduses tueuses, puis, à titre de démonstration et de préliminaires, avait procédé à un gobage de cnidaires urticants pêchés dans l’aquarium de l’appartement de Bob quand il l’avait ramenée chez lui, prélude à davantage de délices culinaires. Il devait la retrouver ce jour-là non loin de la piscine de gélatine… 

… Je résume l’analepse, hein, parce que là ça irait encore, elle est courte (et encore, vu que j’ai presque deux niveaux d’analepse, c’est encore moins digeste, comme vous pouvez le voir) mais, en général, l’analepse en question prend quelques épais paragraphes. Voire pages. Et là le collant blesse. Ou le b(ât)as.

Quel est le problème ?

Encore une fois, ce n’est pas forcément un problème, mais cela peut en poser.

Une analepse vient s’insérer antérieurement à l’action qui vient d’être établie (c’est tout le principe, hein) mais cela entraîne une difficulté : elle donne l’impression d’un coup de frein, on « halte » l’action principale pour raconter autre chose. Regardez la construction plus haut : je démarre sur une action fascinante (ou pas) mais dégringolade, on me suspend pour me donner de l’exposition (car à ce stade, l’analepse est une exposition) et… ben, ça coupe l’élan.

Or, si l’on a posé des questions narratives intéressantes avant le flashback, le lecteur veut que l’action principale continue ; cela peut être une technique pour jouer sur son impatience, mais… il faut être prudent quand on joue avec l’impatience du lecteur. À noter que cela part souvent d’une excellente intention : partir dans l’action, le plaisir, direct, pour faire avancer l’histoire ; mais s’il faut une page d’exposition pour qu’on comprenne, cela entraîne l’effet inverse, genre coup de rênes dans la tronche d’un cheval lancé à fond.

Est-ce à dire que c’est à proscrire à jamais ? Évidemment que non, mais il est bon d’avoir conscience des limites de la construction (de son effet “frein”) et donc de savoir ce qu’on fait – plus l’action principale est effrénée, plus un coup d’arrêt donné tôt sera frustrant. (Plus tard… il peut être “gagné”, au contraire – le lecteur est suffisamment pris pour tolérer un peu d’exposition et de ralentissement et vouloir avoir le fin mot de l’histoire… à vous de juger / doser. Mais c’est presque un autre sujet.) Cela peut aussi trahir dans un premier jet la situation d’un auteur qui part à fond dans son action avant de se rendre compte qu’il ne sait pas comment il en est arrivé là et a besoin de se l’expliquer à lui-même. Aucun problème au premier jet ; mais à la correction, on s’interrogera sur la pertinence de cet “échafaudage”.

Des manières avantageuses de remplacer la construction en analepse

La plus simple à mon goût est tout simplement… de ne pas faire d’analepse. C’est-à-dire d’antéposer tout simplement la narration, soit sous forme de résumé rapide, soit, encore mieux, si c’est intéressant, de donner corps à cette fameuse scène. Dans l’exemple avec Bob et Plectrude, cette soirée romantique a l’air passionnante et j’aimerais la voir détaillée par le menu (fruits de mer), que l’auteur fasse battre mon cœur de fleur bleue en développant le début de cette romance invertébrée. Mais au pire, placer l’exposition avant le début de l’action en échangeant le plus-que-parfait pour les temps de narration classiques fonctionne déjà pas mal pour vraiment pas cher… Essayons :

Le soir même, Bob matcha avec Plectrude sur Tinder, une Franque qui aimait les fruits de mer. La vaillante Teutonne lui avoua qu’elle ne craignait aucunement les méduses tueuses, puis, à titre de démonstration et de préliminaires, procéda à un gobage de cnidaires pêchés dans l’aquarium de l’appartement Bob quand il la ramena chez lui, prélude à davantage de délices culinaires. Le lendemain, Bob partit à la plage armé de son maillot de bain en kevlar, le cœur débordant de tension amoureuse. Il devait la retrouver non loin de la piscine de gélatine… 

Il faudrait polir un peu tout ça parce que c’est pas terrible quand même, mais vous avez compris l’idée : l’exposition / résumé passe finalement mieux ; trois phrases et nous sommes dans le cœur de l’action, à nous demander s’il y aura à un moment un requin pèlerin dans toute cette histoire (plot twist).

Soit dit en passant, c’est une situation à laquelle on est spécialement confronté dans le roman choral (points de vue multiples, comme « Les Dieux sauvages »), parce que l’on est bien obligé de résumer ce qui s’est passé pendant qu’on était concentré sur les autres personnages… c’est là que les techniques d’exposition par le conflit livrent toute leur utilité (pour mémoire, je repropose un atelier à distance sur le conflit en août), et que gérer la transmission de son information en la faisant passer de manière “transparente” à travers l’action, dans les interstices subtils où elle ralentit, par la simple caractérisation des personnages peut être extrêmement efficace. Pas facile, ça non, mais efficace parce que : invisible.

Mais déjà, on peut régler à mon sens deux cas sur trois d’analepses malvenues avec les simples techniques proposées plus haut, et si on en laisse une sur quatre dans le premier jet, c’est convenable (statistiques purement personnelles, ne les appliquez pas sans réfléchir) – comme je dis, ce n’est pas à bannir. Il reste donc… heu… 8% d’analepses à faire passer autrement. Ça n’est pas insurmontable.

2020-05-29T20:45:02+02:00mardi 9 juin 2020|Best Of, Technique d'écriture|1 Commentaire

Nouveau stage intensif aux Mots : Écrire une scène d’action !

[Pour mémoire, activité toujours réduite sur le blog pour cette raison.]

Beaucoup de choses à annoncer autour d’ateliers et de formations sur l’écriture dans les semaines à venir, et commençons par celle-ci : le week-end du 18-19 avril, à Paris, j’aurai le plaisir de proposer une toute nouvelle formation à l’école d’écriture Les Mots :

Écrire une scène d’action

L’action dans la narration est directement reliée à la notion de tension : qu’elle soit physique ou psychologique, elle place directement les personnages face à des enjeux immédiats et intenses qu’ils doivent résoudre d’urgence. Son dénouement entraîne des répercussions d’envergure – parfois irréversibles – sur la suite du récit. 

Mais retranscrire l’action par des mots seuls dans notre monde actuel saturé d’images représente un véritable défi. Il faut communiquer le danger, maintenir le suspense, faire partager au lecteur la nervosité des personnages, le tout avec une clarté et une concision plus marquées que dans tout autre volet du récit. Une scène d’action réussie constituera un moment fort dont le lecteur se rappellera longtemps – quand son échec entraînera l’effondrement de toute une histoire pourtant bien construite. 

Par la confrontation avec divers archétypes célèbres de l’action romanesque, cet atelier conduira les stagiaires à prendre conscience de toutes les facettes étroitement imbriquées dans l’écriture de telles scènes, et comment rythme et tension peuvent être induits dans la texture même du texte. L’idéal : découvrir comment susciter chez le lecteur des sensations approchant le vertige cinématographique. 

Cet atelier est idéal pour vous si : 

  • Vous cherchez une approche structurante avec des notions théoriques qui vont vous apporter un cadre
  • Vous avez envie de sortir de votre zone de confort et aimez l’inattendu ! 

Méthodologie : 

  • Cet atelier propose des exercices différents à chaque séance pour s’entraîner et découvrir !
  • Cet atelier ne requiert pas d’arriver avec une histoire en tête ou des éléments narratifs déjà construits.

L’atelier s’organisera autour de principes théoriques et de six exercices réalisés en groupe et commentés par la suite. Une occasion parfaite de rencontrer d’autres auteurs, de recevoir des retours sur son travail, et de se frotter à cette technique fondamentale de la littérature populaire.

Horaires et inscriptions

2020-04-18T08:54:04+02:00mercredi 19 février 2020|À ne pas manquer|Commentaires fermés sur Nouveau stage intensif aux Mots : Écrire une scène d’action !

Le dynamisme d’un scénario expliqué en deux minutes

Je ne sais plus qui m’a recommandé cette vidéo apparemment assez connue (plus de 150 000 vues, je pense que ça va, c’est connu), mais en seulement deux minutes, elle va au cœur d’un principe fondamental de la narration et du dynamisme :

Trey Parker et Matt Stone, créateurs de South Park, expliquent en termes très simples (et en fucks bipés) que :

Euh, non. Enfin, si, mais pas là.

Si on regarde l’enchaînement des scènes de son scénario et qu’elles se relient par les mots “et ensuite”, il y a un problème. Il se passe A, et ensuite B, et ensuite C → ce n’est pas une histoire. Où est l’unité ? La causation, les conséquences que l’on attend dans une histoire ? Si c’est une collection de scènes sans impact les unes sur les autres… ben ça court le risque que ce soit chiant, en fait.

À la place, deux mots sont autorisés :

  • Donc
  • Mais

Il se passe A, donc il se passe B, mais il se passe C… 

Voilà une histoire avec un cheminement, une énergie (coucou Aristote), et surtout une cohérence narrative qui conduit d’un point A à un point Z.

C’est une idée à la fois tellement simple et efficace que ce serait idiot de ne pas la garder en tête, surtout pour accroître la tension d’une histoire qui semblerait en manquer, ou pour aider à relancer une écriture qui s’enlise. Changer un “et ensuite” en un “donc” peut faire une immense différence.

2019-10-21T09:49:49+02:00jeudi 19 septembre 2019|Best Of, Technique d'écriture|8 Commentaires

Procrastination podcast S03E12 : “Créer du suspense”

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Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : “Créer du suspense“.

Des cheveux qui se dressent sur la tête et des ongles qui se rongent jusqu’au bout de la nuit : voici l’effet de suspense qu’un auteur aimerait générer chez son lecteur ! Mais comment procède-t-on ? Pour Lionel, le suspense est un cas particulier de la tension narrative, et le comprendre implique de comprendre surtout d’abord cette dernière. Laurent approuve et renchérit : le suspense est surtout, et avant tout, une sensation qui se crée. Plus technique, Mélanie met l’accent sur la dimension temporelle du suspense, sa mise en place jusqu’à sa résolution ; en cela, c’est aussi, au fond, un élément de connivence et de jeu avec le lecteur.

Références citées
– Alfred Hitchock
– Destiny
– 13 Reasons Why
– Babylon 5
– Heavy Rain
– Amnesia
– Silent Hill
– Prison Break
– Alias

Procrastination est hébergé par Elbakin.net et disponible à travers tous les grands fournisseurs et agrégateurs de podcasts :

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Bonne écoute !

2020-10-19T11:37:38+02:00vendredi 1 mars 2019|Procrastination podcast, Technique d'écriture|4 Commentaires

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