Non, je ne me suis point lassé des joies bloguesques en cette époque où tout le monde, alors que le blog était le next big thing, s’en lasse, ferme le sien et part pour Facebook échanger des graines virtuelles et vendre ses amis contre de faux dollars (encore plus factices que le linden dollar, dont la valeur d’échange virtuelle doit osciller entre cinq signes de com’ élogieux et 1 po 50).

N’empêche, Facebook, c’est encore plus rapide qu’un blog: une ligne de statut, et voilà l’activité, l’état d’esprit du moment résumés au monde entier. Finies les longues soumissions un peu mal branlées de théories en cours d’élaboration. Plus d’entrées aguicheuses dans le flux RSS comme “La crise financière en temps réel, démonstration inside” qui s’ouvraient sur de longs billets émaillés de GIF animés et d’insupportables musiquettes MIDI. Il suffit d’un “Jean-Claude Kipling a compris la crise financière” sur la home page, point barre. A la fois générateur de mystère et direct comme un uppercut sémantique, le statut Facebook dégraisse le message de tout emballage superflu – la subtilité et le langage – pour le réduire au sens pur qui pénètre alors l’esprit comme une révélation venue du temps du rêve.

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Facebook, c’est le haiku social.

Bref. Intro circonvolutive et sans aucun rapport avec la suite, comme d’habitude, pour annoncer – et je ne suis pas peu fier, j’avoue – que “L’Île close”, texte initialement paru dans l’anthologie de Lucie Chenu De Brocéliande en Avalon aux éd. Terre de Brume, a été enregistré et repris par le podcast francophone des littératures de l’imaginaire, Utopod.

La nouvelle a été divisée en deux parties en raison de sa longueur. La première est ici (Utopod 026), la seconde là (Utopod 027). Le texte est écoutable en ligne ou bien téléchargeable sur tout baladeur MP3 pour écouter à pied, à cheval et en fusée (explications ici). Je vous invite vivement à soutenir l’initiative, par exemple en vous abonnant aux flux.

Illus. MZS

Illus. MZS

Pas peu fier, disais-je, parce que, à part des illustrations (comme celle de “Récital pour les hautes sphères” réalisée par MZS, ci-contre, texte lisible ici, hop hop shameless plug), c’est une des premières fois qu’un de mes récits se trouve “adapté”. Adapté, dis-je, parce qu’une lecture n’est certainement pas neutre et implique un réel travail d’interprétation (effectué ici par Charlotte Reymondin), même si le texte reste le même. Où placer les effets, que mettre en avant, comme jouer les personnages, tout cela relève en quelque sorte de la “traduction” d’un support à l’autre et c’est un exercice difficile (surtout avec ce texte, qui est infernal à lire!).

Je m’étais posé un moment la question de réaliser moi-même la lecture (que ces années passées sur les patinoires d’improvisation théâtrale servent finalement à quelque chose, bon sang), mais j’avoue que ce qui m’intéressait aussi dans cette aventure, c’était de voir comment la lectrice s’approprierait le texte, peut-être même aux antipodes de mes intentions d’origine. C’était le jeu et je suis profondément ravi de l’avoir joué: c’est extrêmement intéressant – et flatteur, oui – de voir ce qui compte d’une ambiance, d’un personnage aux yeux d’autrui.

Car mon travail consiste seulement à apporter un récit, une trame, un univers, parfois un propos; aussi à divertir, à intéresser le lecteur (si je fais correctement mon boulot). Pas à lui dicter les interprétations, les messages qu’il doit y trouver, les émotions qu’il doit ressentir. En cela, dans sa réception, le lecteur a (quasiment) toujours raison.