La création se nourrit aussi de silence

Réflexion aléatoire parce qu’on en a parlé lors de la table ronde à Sirennes sur “Vivre de son écriture”, ainsi, un peu plus avant, dans l’épisode de Procrastination sur le burn-out – à de très rares exceptions de constitution près, le cerveau se nourrit d’activité mais aussi de repos. Notre société ultra productiviste qui pousse à voir les êtres humains comme des machines – et donc à considérer la créativité comme un processus industrialisable – y laisse peu de place, mais : créer se nourrit de temps, d’attention, de mûrissement et de vagabondage.

Cela n’exclut pas l’application de la discipline, de prendre soin de toucher son manuscrit tous les jours, de s’efforcer de raffiner son approche pour créer plus facilement. Si l’on n’investit pas le temps qualifié en anglais de BICHOK – butt in chair, hands on keyboard (le cul sur la chaise, les mains sur le clavier), il ne se passe rien, et c’est là que bloquent 95% des aspirateurs écrivain·es. Mais il y a une raison pour laquelle le slogan de Getting Things Done est “la productivité sans stress” : s’organiser réduit le stress, ce qui permet de travailler plus facilement donc de façon plus productive, mais c’est une conséquence et non le but. Le but devrait toujours être un art de vivre qui permet de se rapprocher toujours davantage de ses vœux – en l’occurrence, écrire des récits dont l’on est content et avec le moins de difficulté possible. Produire des pages à la chaîne est très impressionnant, mais, si on y arrive, c’est une conséquence d’un épanouissement dont, je crois, la source est ailleurs (comme la vérité).

Le processus de création de la bande originale de Psycho Starship Rampage a été l’un des plus doux que j’aie connus, parce qu’un jeu vidéo, ça prend des années à se faire, alors qu’une production sonore, beaucoup moins. J’ai pu accompagner de loin en loin le développement et fournir des sons par étapes successives, permettant d’alterner les phases d’incubation / réflexion / fredonnements ridicules dans l’enregistreur de mon téléphone et de production concentrée devant Ableton. Quand j’ouvrais l’application, je savais parfaitement ce que j’allais faire, comment, ce qui m’a permis d’être comparativement très rapide dans l’exécution, mais cette vitesse n’a aucun sens : elle existait justement parce que, de loin en loin, j’avais réfléchi des semaines.

Il y a un moment où l’on a besoin de laisser reposer, et un moment où l’on a besoin de mettre un coup de collier et de s’autocoudepiéaucuter. On met souvent l’accent sur le second car il est, évidemment, plus difficile. L’action est infiniment (au sens très strictement mathématique) plus difficile que l’inaction. Mais l’inaction a sa valeur, au même titre que l’on insiste sur show, don’t tell, mais le tell a aussi sa valeur. Il est juste beaucoup plus facile, donc on met constamment l’accent sur le show.

Comment décider au moment où l’on passe de l’un à l’autre ? Ma foi, vous êtes de grandes personnes ; au final, celui ou celle qui crée, c’est vous ; celui ou celle qui sait ce dont il ou elle a besoin, c’est vous. Une part de la maturité de la création consiste à reconnaître le mode dont on a besoin à un moment donné. Et le professionnalisme à s’astreindre à observer celui que les obligations du moment dictent alors qu’on pencherait vers l’autre.

Tant que cela ne devient justement pas une habitude.

2024-04-14T15:50:14+02:00mercredi 17 avril 2024|Technique d'écriture|0 commentaire

Le bingo / jeu à boire de Procrastination

Depuis le temps qu’on en parle, ça devait arriver.

Les règles du jeu sont très simples : munissez-vous d’amis qui écrivent et de quoi écrire (attention : ce sont deux choses distinctes). Chaque fois qu’une occurrence du bingo sort, vous devez mettre le podcast sur pause et écrire 500 signes. Alors OK, vous pouvez aussi vous boire un shot de tequila et vous pinter petit à petit le dé à vingt faces (variante dite du Bukowski), mais on vous informe quand même que cette technique créative ne fonctionne plus depuis les années 1960.

Le premier·e à tracer une ligne complète sur sa grille doit beugler, non pas “bingo” mais “j’ai fini mon premier jet !” Il doit lire ensuite son écriture à ses camarades, qui la commentent en retour, et marque un point. Puis le jeu reprend. Le gagnant est celui qui a le plus de signes écrits quand celui qui a voulu jouer en variante Bukowsi roule sous la table.

Émergence organiqueÉlisabeth VonarburgZettelkastenL’épisode dit autre chose que promis dans l’intro
Je vais vous laisser parlerJe suis tout à fait d’accord avec vousLionel commence trois phrases et n’en finit aucuneNon mais là on est trop d’accord, ça ne va pas du tout
Tiens, le son a encore changéPopcornNotre-Dame des FleursLa Maison des feuilles
Écrivez tous les joursN’écrivez pas tous les joursFaites le projet dont vous avez envieUne subtile coupure au montage de quelqu’un qui s’est perdu 😁

Points bonus :

  • Un demi-point accordé à celui qui répond le plus vite possible “pas comme Davoust” à la mention “j’ai fini mon premier jet”,
  • Un demi-point accordé à celui qui peut réciter le plus vite possible et de façon PARFAITEMENT INTELLIGIBLE après la lecture de la production d’un des participants “navré, mais après une lecture attentive, votre manuscrit ne nous a pas semblé correspondre à notre ligne éditoriale”, SAUF si la personne qui lisait son texte réplique IMMÉDIATEMENT “je m’en fous, je fais de mon mieux et c’est ce qui compte”
  • Cent douze mille sept-cent quatre-vingt-trois points accordés à celui ou celle qui note que les points n’ont au final aucune importance dans le décompte de la victoire.
2024-03-31T16:00:29+02:00lundi 1 avril 2024|Juste parce que c'est cool|0 commentaire

Quelques souvenirs de PAX Australia 2023

Ce week-end, c’était la convention PAX Australia (Penny Arcade Exhibition) à Melbourne, et c’était génial : un peu comme une Worldcon à domicile, mais concentrée sur l’univers du jeu – plateau, rôle, stratégie et évidemment vidéo. Si le principe vous est inconnu, les conventions façon anglophone sont très différentes de nos festivals à la française : c’est beaucoup plus proche d’un congrès, où les places, en nombre limité, sont vendues bien à l’avance (et souvent épuisées des semaines avant la date). Cela implique des événements beaucoup moins grand public, puisque s’adressant aux initiés qui savent pourquoi ils sont là – et quand on l’est, c’est bien sûr du bonheur en barre, des concours de cosplay très référentiels aux activités merveilleusement débiles comme des concours de speedrunning de l’E1M1 de Doom sur un tapis de Dance Dance Revolution (évidemment, ça s’appelle Doom Doom Revolution) ou des panels très sérieux sur les techniques avancées du cosplay ou la musique de jeu vidéo.

C’était aussi l’occasion pour nous d’y aller costumés ! Ça devait bien faire dix ans que je n’avais pas remis mes bottes steampunk. Elles sont toujours aussi inconfortables, mais je suis maintenant capable de les supporter deux jours, ce qui est la preuve irréfutable qu’on durcit des pieds avec l’âge.

2023-10-09T08:19:40+02:00lundi 9 octobre 2023|Juste parce que c'est cool|Commentaires fermés sur Quelques souvenirs de PAX Australia 2023

Chère Esther, aujourd’hui, j’ai joué à Dear Esther

D’où qu’il est interdit de parler de jeux qui ont dix ans ? Hein ? Est-ce que les lycéens s’empêchent de faire des fiches de lecture sur Les Fourberies de Scapin juste parce que Molière est mort (attendez je vérifie) en 1673 ? (51 ans, merde, décidément on mourait bien jeune) Bon, techniquement, les lycéens aimeraient bien s’empêcher eux-mêmes de faire des fiches de lecture, mais en rédiger, c’est un réel plaisir d’esthète qu’on découvre à l’âge adulte, comme le whisky tourbé, le sexe dans un vrai lit et les consultations chez l’ostéopathe.

Donc, j’ai joué à Dear Esther après tout le monde, après avoir entendu aussi tout ce qu’on en a dit (« c’est pas un vrai jeu ») et… 

Ben ouais, c’est pas un vrai jeu. Mais ça n’est pas forcément un problème.

L’action se déroule à la première personne, à travers les yeux (et la charpente un peu poussive) d’un protagoniste échoué sur une île sans nom des Hébrides, qui, je dois dire, est très joliment représentée (un argument auquel j’étais forcément sensible), avec le vent constant, la mer et les vapeurs d’embruns qui te mettent le goût du sel sur les lèvres et réussissent l’exploit de te tremper sans que tu ne te sentes mouillé avant qu’il ne soit trop tard (une spécialité écossaise que même la Bretagne ne parvient pas à égaler).

C’est joli, hein ? Et là, je vous assure qu’il est midi pile avec un vache de cagnard.

Le protagoniste se met à réciter (lire ? se remémorer ?) des messages adressés à une certaine Esther, et à décrire ce que l’île, où il est s’est rendu (échoué ? exilé ?) représente pour lui.

Et là, on marche. Pas pour rien que Dear Esther est considéré comme le père des walking simulators ; il n’y a strictement rien d’autre à faire que marcher, et éventuellement regarder les trucs autour de soi d’un peu plus près. De temps en temps, en vue d’un repère, d’un monument, dans une situation, notre personnage continuera à causer, jusqu’au dénouement final (comptez deux heures). Au joueur de recoller les morceaux, de fouiller, de comprendre / composer sa propre version de l’histoire.

Dear Esther (dans son édition la plus récente, la Landmark Edition que j’ai faite) est très joli même sur Steam Deck, avec des vues magnifiques et une ambiance locale parfaitement restituée (manquent juste les cormorans qui t’engueulent). Tout le propos du jeu / de l’installation virtuelle réside dans la pesanteur du personnage que l’on contrôle : tout est loooong, on marche à un pas de sénateur, mais cela fait évidemment partie du truc, de ce “cheminement” quasi initiatique que le protagoniste est amené à suivre (ben oui, personne n’a jamais fait de téléportation initiatique)1. Le truc, c’est que le moindre déplacement étant coûteux, ça n’encourage pas l’exploration ni l’expérimentation ; d’autant plus qu’il apparaît très vite qu’en-dehors du chemin balisé, il n’y a pas vraiment de salut. Donc, on suit la route de l’expo en faisant “oooh, la vache, c’est quand même très beau”. Et des fois, des jolies choses, ça peut suffire à un type qui se tape trois vols d’avion de 7h30 (exemple absolument innocent bien entendu).

J’ai vu Dear Esther comparé à un poème et c’est probablement la forme, en réalité, dont cette “œuvre” (faute de meilleur terme) s’approche le plus. Ça n’est pas un jeu ; c’est un propos symbolique inscrit dans le temps lui-même et dont on sent la texture (pour le meilleur et pour le pire) comme consubstantielle de l’expérience. (Oui, c’est une façon polie de dire que ça frise parfois le chiant, mais c’est volontaire, et ça a du sens.)

Est-ce que c’est bien ? Diantre, comment vous dire si un poème est “bien” ? Ça dépend si ça vous parle. Ça n’est pas un jeu, c’est une expérience à qui l’on a retiré tout ce qui peut faire un “jeu” (possibilité d’un échec empreint de conséquences résultant de la mauvaise exécution de ses mécaniques – rien de ça n’existe ici). Ça cause de deuil, de solitude, de renouveau. C’est marin et venteux. Ça a beaucoup de caractère (à condition de kiffer les landes battues par les rafales, mais je suis un public conquis). C’est aussi cryptique et, certains pourraient dire, un brin prétentieux par endroits.

Personnellement, j’ai passé un bon moment. Mais si je suis absolument le cœur de cible (comme on dit dans la startup nation) des thèmes de Dear Esther, j’ai l’impression d’être un peu passé à côté de leur exécution (je ne sais pas si j’ai tout compris parce que c’était finalement très simple ou rien du tout parce que j’ai raté un niveau de lecture). Cependant, dans le genre de jeu qui n’en est pas vraiment un et qui a réussi à me mettre la larme à l’œil sans moteur 3D ni lande battue par les vents, j’ai de loin préféré To the Moon ou même, pour rester dans le même format que Dear Esther, son petit interlude gratuit A Bird’s Story. J’ai toujours été plus sensible au fond qu’à la forme, même s’il faut quand même soigner cette dernière pour emballer le paquet cadeau (et pour ça, Dear Esther a parfaitement réussi la seconde).

Si ce que je raconte vous parle, foncez.

(Pour une fois, je ne mets pas le trailer, qui présente TOUT LE FUCKING JEU en seulement deux minutes.)

  1. Rendons quand même à Esther ce qui appartient à Esther : on peut voir, loin en aval, l’héritage de ce cheminement vécu par le joueur comme substance même de l’expérience ludique dans un “vrai” jeu comme Outer Wilds, lequel est, comme chacun sait ici, le meilleur jeu du monde.
2023-04-11T22:22:05+02:00mercredi 12 avril 2023|Best Of, Geekeries|Commentaires fermés sur Chère Esther, aujourd’hui, j’ai joué à Dear Esther

Écrire est plus difficile qu’imaginer

Tout le monde ne fonctionne pas comme ça – il existe des auteurs et autrices pour qui le flot de l’écriture court automatiquement au fil des mots et du clavier ; mais j’oserais gager que même pour ces personnes, il existe des moments où elles calent – où la pensée consciente s’invite dans le flot, et fait tousser la machine.

Une grande partie de l’effort d’écriture vient du fait de chercher ce que l’on va dire, et comment le mettre en scène ; le jeu et la joie libres de l’imagination représentent un mode de pensée très distinct de celui d’écrire, où l’effort consiste à rendre l’infini palpable, à borner la vision, à la faire rentrer dans les briques LEGO des mots. Et ce changement de mode est difficile, peut susciter une certaine fatigue mentale (voire l’envie de fuir), car la liberté de penser se trouve à présent contrainte par un système vaste mais fini, le langage. 

Il est important de reconnaître cette difficulté de manière à accepter la fatigue mentale ponctuelle, pour ne pas céder à la peur et à la tentation de l’abandon. Cela peut être un état très vulnérable. Dans ces moments, il convient de se donner un instant pour se recentrer, accepter la peur, et potentiellement identifier la difficulté qui vient (s’agit-il d’imaginer, de concevoir, de rédiger, de trouver comment aborder une scène ou un problème ? etc.)

Car ce que l’on inventorie et identifie est à son tour délimité ; et ce qui est délimité perd de sa capacité anxiogène.

2023-03-28T03:04:11+02:00mercredi 29 mars 2023|Best Of, Technique d'écriture|2 Commentaires

Outer Wilds est le meilleur jeu du monde

Et en fait, la meilleure manière d’en parler, c’est de ne surtout pas en parler. Que vous ne vous documentiez surtout pas. Je vous en ai déjà donné le titre, et c’est peut-être déjà trop.

Regardez, je vais même trouver une image qui ne dit quasiment rien.

Je vais plutôt vous raconter comment je l’ai découvert, et c’était absolument parfait. Il faudrait que vous le découvriez de la même manière, si vous pouvez. D’ailleurs, je vais faire la même chose à d’autres copains, du coup. Bref.

Un jour, un copain me mentionne en passant : “Tel week-end, j’organise un petit rassemblement chez moi entre gens de bon goût. Il y a un jeu formidable que je veux vous faire découvrir. Je ne vous dis rien, vous ne savez rien, vous me faites confiance, vous venez juste et vous découvrez, j’offre le gîte et le couvert. T’es chaud ?”

J’étais tellement en phase que j’imaginais qu’on allait faire un week-end jeu de plateau, pour tout dire.

J’arrive le vendredi soir et, le temps de boire quelques coups, d’échanger quelques news, il était évidemment temps de commencer convenablement à deux heures du matin, comme il se doit. Finalement, avec les désistements, nous étions seulement deux gars devant le projecteur, avec notre pote commun derrière (car je venais de rencontrer mon binôme d’aventure – magnifique manière de faire la connaissance de quelqu’un), lequel ne dit rien, mais profite presque autant que nous de revivre à travers notre regard neuf et innocent ce qu’il avait lui-même vécu. (Et aujourd’hui, je me réjouis, donc, de proposer à mon tour la même expérience à quelqu’un, après avoir poncé le jeu dans tous les sens, vu toutes les fins, et écrit douze fiches dans mon Zettelkasten à son sujet.)

Outer Wilds a un côté Into the Wilds (la similitude est assurément voulue, car rien, absolument rien dans ce chef-d’œuvre est laissé au hasard) : “happiness only real when shared”. Ce serait trop vous en dire de vous expliquer pourquoi, mais même si c’est un jeu parfaitement solo, il se découvre encore mieux à deux ou en petit comité, en ignorant tout de ce qui se passe, avec des gens qui se passent la manette à tour de rôle, qui commencent à échanger des idées, à formuler des hypothèses sur nan mais en vrai c’est quoi ce bordel ? C’est un formidable jeu à partager en couple, tout simple en apparence, avec un gameplay exploité au maximum, et surtout, oh mes aïeux, surtout, une explosion de l’esprit quand tu commences à faire oh mais mon dieu en fait c’est ÇA qui se passe.

Je.

Outer Wilds livre une expérience de jeu intelligente, réfléchie, qui utilise à la perfection la grammaire du gameplay en fondant sa courbe de progression sur un mécanisme à la fois tout simple et quasiment jamais vu, qui distille l’essence même de ce que cela signifie d’avancer dans un jeu vidéo.

Je ne peux pas en dire davantage, à part que si vous êtes ici, vous avez certainement vaguement entendu parler d’un genre appelé la SF un jour dans votre vie, et que Outer Wilds réussit les doigts dans le nez à évoquer le vertige de l’immensité, le sense of wonder, l’intelligence que le cinéma de genre des années récentes peine parfois à toucher. Il flotte sur son berceau les influences de 2001, Interstellar, Premier Contact, Babylon 5, mais le jeu les a digérées, comprises, et se dresse de lui-même, avec son propre univers un peu fou, un peu baroque, pour faire jeu égal avec ces monuments.

Prenez votre conjoint·e, votre chat, un ou quelques amis proches, préparez du thé, une couette, et jouez ensemble à Outer Wilds. Parmi les meilleures vingt heures vidéoludiques de mon existence entière, encore au-delà de Gris et de Hellblade : Senua’s Sacrifice – c’est dire (je serais prêt à acheter une Xbox pour jouer à Hellblade 2, rendez-vous compte).

En plus, un DLC sort fin septembre. Pile le temps pour vous de le finir, puis de repartir à l’aventure.

2021-08-26T17:26:19+02:00mercredi 1 septembre 2021|Geekeries|4 Commentaires

L’exposition fantasy de la BnF en ligne s’enrichit pour Halloween

On ne dirai jamais assez de bien (et on ne répercutera jamais assez) le travail titanesque accompli par la Bibliothèque nationale de France autour de la fantasy – 

Cliquez pour y aller !

– exposition virtuelle qui est maintenant disponible en anglais, pour mémoire.

À l’occasion d’Halloween, l’exposition enrichit son contenu autour des sorcières, des monstres, des sorciers : tous les albums sont disponibles ici, et pour tout visiter, une seule adresse :

➡️ https://fantasy.bnf.fr/

2020-10-25T10:38:24+01:00mardi 27 octobre 2020|Le monde du livre|Commentaires fermés sur L’exposition fantasy de la BnF en ligne s’enrichit pour Halloween

Les photos de la semaine comme déclencheurs de micro-nouvelles

Je signale une chouette initiative de l’auteur Frank Scaldeyr qui, depuis deux semaines, s’est mis à prendre la photo de la semaine comme déclencheur pour des micro nouvelles (ici et ). Je n’y avais jamais pensé et c’est une très chouette idée, merci à lui ! Il y a des tonnes de listes de déclencheurs sur le présent site, mais cela fait trois ans que je n’en ai pas reproposé, et voilà qu’en réalité, il y en avait un par semaine depuis tout ce temps ! Plot twist !

Si vous cherchez une petite contrainte / coup de pied aux fesses / inspiration instantanée, joignez-vous au jeu !

2020-09-21T10:43:48+02:00jeudi 24 septembre 2020|Technique d'écriture|1 Commentaire

Vous devez lire Comme par magie

Je sais, je vous ai fait le coup avec La Guerre de l’Art, hein ? Eh bien, Comme par magieBig Magic en VO1, c’est fascinant, parce que c’est exactement le même discours, avec des moyens diamétralement opposés.

Elizabeth Gilbert – l’autrice de Eat, Pray, Love – livre dans cet ouvrage une vision de la créativité heureuse, harmonieuse, qui se libère avec amusement de l’image de l’artiste qui porte ses dons artistiques comme une croix. Un peu d’autobiographie, beaucoup d’anecdotes pour certaines vraiment drôles, et pas mal de réflexions entre la philosophie et la spiritualité tracent un discours tendre mais sans complaisance sur la vie créatrice quel que soit le domaine, qu’il s’agisse d’écriture ou (véridique) de patin à glace. Résolument opposée à une vision moderne, post-Lumières, torturée de l’artiste se soumettant à des pressions inhumaines, elle prêche au contraire une démarche presque évanescente qui place le plaisir et le jeu au centre de tout ; de la légèreté, de la disponibilité, mais aussi – et c’est là que Pressfield et elle s’alignent dans une passionnante opposition de contraires – de la persévérance, de la volonté, de la confiance en soi et en l’univers.

Car là où Pressfield a une rhétorique résolument guerrière (c’est dans le titre), parfois à la limite de la culpabilisation, prêchant l’intensité et la persévérance à tout prix, avec une victoire à emporter sur la Résistance, Gilbert se place résolument sur le terrain de la coopération avec la Muse qui nous choisit pour nous murmurer des idées et, surtout, privilégie le principe de joie. Et c’est… vraiment nécessaire aussi.

Le plus beau ? C’est qu’ils disent donc, au final, exactement la même chose, avec des mots radicalement opposés : il existe quelque chose qui nous dépasse (ce que j’appelle personnellement le Mystère) où réside la créativité, qu’on le voie comme la Muse homérique (Pressfield) ou des sortes d’esprits désincarnés (Gilbert) voire des sortes d’anges (les deux auteurs) ; le travail d’un ou une artiste consiste à se mettre en lien avec cette “chose”, car la création est une voie formidablement nourrissante pour l’individu et le monde ; la seule voie pour y parvenir est la persévérance et la foi.

Si vous avez détesté La Guerre de l’Art (je sais qu’il y en a), lisez Big Magic. Je suis quasiment certain que c’est le bouquin qu’il vous faut à la place. Si vous avez adoré La Guerre de l’Art, lisez Big Magic quand même, parce que c’est une bouffée d’air frais salutaire dans la tendance à la pesanteur qu’on beaucoup de créatifs, un rappel constant à sourire, rire et travailler avec les obstacles au lieu de forcément les combattre à tout prix. Tout cela n’est qu’un tendre jeu, comme l’est la vie. L’art est à la fois la chose la plus importante et la moins importante du monde. Je trouve réjouissant, fascinant, et vertigineux de voir deux personnalités aussi différentes (d’après ce qui transparaît de leurs ouvrages, du moins) toucher à ce qui me semble être exactement le même phénomène. Personnellement, les deux m’ont nourri autant l’un que l’autre de façon complètement différente, et je sais que je finirai par m’en procurer de belles éditions pour les ranger côte à côte, réunis dans leur union au Mystère et dans ce que leur totalité représente à mes yeux.

Pour découvrir le ton drôle et chaleureux d’Elizabeth Gilbert, son TED Talk le plus court, sur la manière dont elle a repris l’écriture après le succès planétaire et inattendu et Eat, Pray, Love (pour poursuivre, jetez un œil à cette interview beaucoup plus poussée autour, justement, de Big Magic) :

  1. Et d’ailleurs, si vous pouvez, je vous encourage vraiment à préférer la version originale ici. Loin de moi l’idée de dire que la traduction est mauvaise, et les nombreux avis favorables en ligne montrent que le livre a su parler au public ; par contre, à titre personnel, le ton employé n’est pas du tout raccord avec mon ressenti de l’anglais.
2020-09-03T12:18:40+02:00jeudi 3 septembre 2020|Best Of, Technique d'écriture|Commentaires fermés sur Vous devez lire Comme par magie

Un jeu de personnages (merci à Rozenn Illiano)

Rozenn Illiano (Le Phare au corbeau chez Critic, et plein d’autres histoires et des bijoux splendides) a fait un beaucoup trop beau cadeau à la tweetsphère littéraire en ressortant ce mème, parce qu’on aime tous beaucoup trop parler de nos personnages, en effet. Donc, amusons-nous (fil Twitter d’origine).

1. On prenant les publiés, probablement Dwayne de Heldadt dans Léviathan. Qui… apparaît finalement assez peu. A la base, j’étais censé revenir dessus (un jour, peut-être !)

2. Bruz dans « Les Dieux sauvages » (L’Héritage de l’Empire). Un personnage d’arrière-plan, mais qui s’est un petit peu posé quand même. Quand c’est comme ça, faut laisser faire.

3. Dur, ça change souvent. Mais je pense que… Chunsène (« Les Dieux sauvages »). Sa façon de n’avoir failli jamais exister et de s’être imposée comme jamais un personnage auparavant me dit qu’il se passe quand même des trucs étranges dans l’écriture. (Et puis elle n’en a rien à foutre des conventions, est tragiquement sombre et solaire à la fois, elle est très futée et voit clair sur le monde, bref… et elle s’écrit toute seule.)

4. Hmmm difficile à dire aussi parce que je pense les personnages en mots plus qu’en images, mais Ganner, probablement.

5. Parce que y a une histoire derrière, ou parce qu’il y a une occasion narrative qui mérite quelqu’un pour la porter et lui donner de la chair et du sang (et s’en emparer et partir avec la caisse en courant)

6. “D’où viens-tu, et où veux-tu aller ?”

7. Pas du tout, j’avoue. Ce sont les personnages qui me disent qui les attire, et ça reste toujours dans leur propre environnement, nécessairement.

8. Peux pas dire. C’est dans le tome 4 de « Les Dieux sauvages ».

9. Darén, sans aucun doute.

10. Voui, plein. Même chez les gentils, des fois.

11. Absolument pas. Je les passe à l’essoreuse et parfois ils ne sont sauvés de la mort que pour pouvoir être essorés davantage et lâcher tout ce qu’ils ont à dire. (Je crains que Chunsène ne l’ait compris, d’ailleurs.)

12. Hu, j’en ai tué plein, surtout dans « Les Dieux sauvages ». Difficile d’en mentionner un sans spoil, mais l’assassinat sordide dans la ruelle de La Messagère du Ciel reste pour moi aussi vain que juste.

13. Yep, le personnage principal se mangeant le plus dans la face la difficulté de la chose étant Izara de Rhovelle.

14. Au premier jet, ça arrive toujours. Mais j’essaie de comprendre pourquoi, et si c’est parce que le personnage en question n’a finalement rien de spécial à faire ce moment-là, je l’intègre dans l’histoire. Ça arrive, dans la vie.

15. Guil Redel, j’en parlais récemment. C’est un véritable monstre et il faut que j’aille très, très loin pour aller puiser de quoi il est fait.

16. Alors, on enlève les exosquelettes, on est d’accord ? Le plus grand : peut-être bien Darén ? Le plus petit (adulte) : peut-être bien Andrew León dans Léviathan. Avec exosquelette : Jared Valne, mais il triche, il pilote une mekana grande comme un immeuble.

17. Le plus vieux : Mordranth (l’oracle-dragon de l’Empire d’Asreth/ia). Le plus jeune : la princesse Carila de Rhovelle dans « Les Dieux sauvages ».

18. Ça dépend de quelle manière : les limites de l’humanité me fascinent et c’est pour ça que j’écris des monstres, ils sont souvent douloureux à écrire (Guil Redel, aussi Ganner et Daphn).

19. Au sens classique du “self-insert / Mary Sue”, jamais, en tout cas pas que je sache. De façon plus vaste : toujours, parce que c’est moi qui écris, forcément.

20. Je regrette de ne pas avoir davantage montré les aventures de Chunsène et Nehyr dans Le Verrou du Fleuve. C’était un choix volontaire et assumé à l’époque, mais avec le recul, je pense que j’aurais dû.

21. Leopol. Je n’aurais jamais imaginé qu’il soit aussi populaire, et certainement pas auprès des lectrices.

22. Leopol. Je n’aurais jamais imaginé qu’il se révèle aussi tragiquement et humainement riche.

2020-05-17T20:22:18+02:00lundi 18 mai 2020|Entretiens, Journal|2 Commentaires

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