FAQ – Atelier Techniques avancées de création de mondes imaginaires

Un stage intensif ! D’un week-end ! Sur des techniques avancées ! C’est effectivement un peu impressionnant dit comme ça, et comme quelques questions ont été soulevées suite à l’annonce du stage de mai, voici quelques réponses auxdites questions, parce que vous avouerez que des réponses à d’autres questions, comme la couleur du cheval blanc d’Henri IV ou la température de sublimation du plutonium-44, ça serait pas très raccord.

Merci à la personne qui a eu le courage de poser ses interrogations et me permet de les reproduire ici :

Il est indiqué qu’il est indispensable de posséder une familiarité de base avec l’imaginaire et ses genres. Est-ce que cela signifie qu’il faut les connaître d’un point de vue théorique ? Ou simplement lire des livres qui appartiennent à ces genres littéraires ?

Non, absolument pas besoin de fondement théorique. L’idée c’est d’être sensibilisé·e aux genres, par opposition à l’autre atelier que je fais aux Mots qui s’adresse davantage aux gens qui ne connaissent pas l’imaginaire ; de ne pas ouvrir des yeux ronds si je lâche les mots de fantasy et SF et les noms de Tolkien ou Martin en référence culturelle. Si tu aimes ça (et si tu en lis, c’est le cas – enfin j’espère !), c’est bon.

De plus, est-ce qu’il faut nécessairement être familiarisé avec tous les genres (science-fiction, fantasy et fantastique) ?

Pas spécialement, on a évidemment des affinités plus ou moins marquées avec les courants. Voir plus haut : tu sais que ça existe, si je te parle d’un androïde, d’un elfe ou d’un vampire, tu as une vague image mentale et tu ne me regardes pas comme si j’avais deux têtes parce que la Vraie Littérature Sérieuse™ ne doit pas parler de ces choses-là, on est bon.

Concernant le fait d’arriver avec une proposition de monde magique, est-ce que cela pose problème si c’est la première fois que l’on se prête à ce type d’exercice ?

Absolument pas, et j’aurais tendance à dire : au contraire. On va partir de ta base, jouer avec et la pousser dans tous les sens pour voir ce qu’elle recèle (et ce dont elle peut éventuellement manquer), un des buts de l’atelier étant de vous faire prendre conscience des pièges et difficultés ultra courantes de la discipline pour les jeunes auteur·ices, donc justement, si tu as un œil neuf, c’est peut-être là que tu auras le plus d’occasion de réfléchir sur ton travail.

Et si vous avez d’autres interrogations brûlantes (ou glacées) (ou très très tièdes), n’hésitez pas à les poser là-dessous, sous l’image rigolote. ⬇️

2024-02-16T05:43:55+01:00mercredi 21 février 2024|Dernières nouvelles|Commentaires fermés sur FAQ – Atelier Techniques avancées de création de mondes imaginaires

Un jeu de personnages (merci à Rozenn Illiano)

Rozenn Illiano (Le Phare au corbeau chez Critic, et plein d’autres histoires et des bijoux splendides) a fait un beaucoup trop beau cadeau à la tweetsphère littéraire en ressortant ce mème, parce qu’on aime tous beaucoup trop parler de nos personnages, en effet. Donc, amusons-nous (fil Twitter d’origine).

1. On prenant les publiés, probablement Dwayne de Heldadt dans Léviathan. Qui… apparaît finalement assez peu. A la base, j’étais censé revenir dessus (un jour, peut-être !)

2. Bruz dans « Les Dieux sauvages » (L’Héritage de l’Empire). Un personnage d’arrière-plan, mais qui s’est un petit peu posé quand même. Quand c’est comme ça, faut laisser faire.

3. Dur, ça change souvent. Mais je pense que… Chunsène (« Les Dieux sauvages »). Sa façon de n’avoir failli jamais exister et de s’être imposée comme jamais un personnage auparavant me dit qu’il se passe quand même des trucs étranges dans l’écriture. (Et puis elle n’en a rien à foutre des conventions, est tragiquement sombre et solaire à la fois, elle est très futée et voit clair sur le monde, bref… et elle s’écrit toute seule.)

4. Hmmm difficile à dire aussi parce que je pense les personnages en mots plus qu’en images, mais Ganner, probablement.

5. Parce que y a une histoire derrière, ou parce qu’il y a une occasion narrative qui mérite quelqu’un pour la porter et lui donner de la chair et du sang (et s’en emparer et partir avec la caisse en courant)

6. “D’où viens-tu, et où veux-tu aller ?”

7. Pas du tout, j’avoue. Ce sont les personnages qui me disent qui les attire, et ça reste toujours dans leur propre environnement, nécessairement.

8. Peux pas dire. C’est dans le tome 4 de « Les Dieux sauvages ».

9. Darén, sans aucun doute.

10. Voui, plein. Même chez les gentils, des fois.

11. Absolument pas. Je les passe à l’essoreuse et parfois ils ne sont sauvés de la mort que pour pouvoir être essorés davantage et lâcher tout ce qu’ils ont à dire. (Je crains que Chunsène ne l’ait compris, d’ailleurs.)

12. Hu, j’en ai tué plein, surtout dans « Les Dieux sauvages ». Difficile d’en mentionner un sans spoil, mais l’assassinat sordide dans la ruelle de La Messagère du Ciel reste pour moi aussi vain que juste.

13. Yep, le personnage principal se mangeant le plus dans la face la difficulté de la chose étant Izara de Rhovelle.

14. Au premier jet, ça arrive toujours. Mais j’essaie de comprendre pourquoi, et si c’est parce que le personnage en question n’a finalement rien de spécial à faire ce moment-là, je l’intègre dans l’histoire. Ça arrive, dans la vie.

15. Guil Redel, j’en parlais récemment. C’est un véritable monstre et il faut que j’aille très, très loin pour aller puiser de quoi il est fait.

16. Alors, on enlève les exosquelettes, on est d’accord ? Le plus grand : peut-être bien Darén ? Le plus petit (adulte) : peut-être bien Andrew León dans Léviathan. Avec exosquelette : Jared Valne, mais il triche, il pilote une mekana grande comme un immeuble.

17. Le plus vieux : Mordranth (l’oracle-dragon de l’Empire d’Asreth/ia). Le plus jeune : la princesse Carila de Rhovelle dans « Les Dieux sauvages ».

18. Ça dépend de quelle manière : les limites de l’humanité me fascinent et c’est pour ça que j’écris des monstres, ils sont souvent douloureux à écrire (Guil Redel, aussi Ganner et Daphn).

19. Au sens classique du “self-insert / Mary Sue”, jamais, en tout cas pas que je sache. De façon plus vaste : toujours, parce que c’est moi qui écris, forcément.

20. Je regrette de ne pas avoir davantage montré les aventures de Chunsène et Nehyr dans Le Verrou du Fleuve. C’était un choix volontaire et assumé à l’époque, mais avec le recul, je pense que j’aurais dû.

21. Leopol. Je n’aurais jamais imaginé qu’il soit aussi populaire, et certainement pas auprès des lectrices.

22. Leopol. Je n’aurais jamais imaginé qu’il se révèle aussi tragiquement et humainement riche.

2020-05-17T20:22:18+02:00lundi 18 mai 2020|Entretiens, Journal|2 Commentaires

Question : relancer l’inspiration

writers_block_lolcatAprès un long hiatus, on reprend sur les questions concernant l’écriture (pour mémoire, n’hésitez pas à m’envoyer vos questions, j’y répondrai, si je me sens qualifié, par un article de blog). Parlons d’inspiration – cette inspiration si évanescente et volage, qui nous empêche de dormir la nuit et de bosser le jour :

Existe-t-il des trucs pour provoquer ou débloquer l’inspiration au lieu d’attendre qu’elle vienne toute seule ? Le blocage est difficile à expliquer, mais en gros, passé une phase où les images/idées/situations affluent toutes seules sans que j’aie à les chercher, il arrive souvent une phase où “ça ne veut pas”, et j’ai beau à réfléchir à des moyens de relancer l’idée, rien de transcendant ne vient (sachant qu’en général, chercher la suite “logique” d’une situation aboutit à quelque chose de plat et d’inintéressant, c’est seulement quand je trouve une association d’idées inhabituelle que je sais être sur le bon chemin). Le plus souvent, ça finit par se débloquer de manière inattendue, mais des semaines ou des mois après. Je vois souvent dire que “l’inspiration n’est pas juste un truc qui tombe tout seul du ciel”, mais je n’ai jamais lu de texte qui explique comment on peut la provoquer, ou au minimum la structurer. C’est un des rares aspects que je ne voie jamais abordé dans les conseils d’écriture, alors que de mon point de vue c’est une question fondamentale.

Tout à fait… Et je crains que chaque auteur fasse sa propre “paix” avec l’aspect un peu aléatoire de la chose.

Néanmoins (ce qui entraîne toujours de joyeuses conversations, et je me doute que cet article va susciter la controverse – c’est très bien, je ne prétends pas détenir des réponses universelles) je fais partie de ceux qui ne croient pas à l’inspiration, mais au travail. Travail étant pris au sens large : observer le monde est du travail ; se documenter est du travail ; réfléchir est du travail. Tout ce qui requiert un acte de volonté qui hisse la personne au-dessus de l’état basal consistant à manger des chips sur le canapé devant Call of Duty est un travail – un travail volontaire et plaisant, on l’espère, mais qui provient du désir de surmonter quelque chose en vue d’un accomplissement.

Quid, donc, de l’inspiration ? Comment débloquer le récit qui fait sens, qui va être intéressant – pour soi avant toute chose, qui va résonner avec le désir que l’on a de raconter ? Eh bien, pour moi, la réponse est contenue dans la reformulation de la question : dans “pour soi ». L’écriture, comme tout art, est un exercice d’équilibre dynamique entre contrôle conscient (je dois penser à la cohérence des détails, raccourcir cette scène qui n’apporte rien, etc.) et relâchement inconscient (tiens, j’ai envie de mettre une attaque de ninjas MAINTENANT, et tant pis si ça fout tout en l’air). Chacun place le curseur plus d’un côté ou de l’autre (les structurels côté contrôle, les scripturaux côté relâchement).

C’est également un exercice d’équilibre entre les exigences des autres (quels sont les codes narratifs où j’évolue, et est-ce que je les respecte, ou pas ? est-ce que mon récit est intelligible, clair, accessible pour le public que j’aimerais atteindre ?) et les siennes : qu’est-ce que j’ai envie de faire ? En cherchant l’histoire, le déroulé, qui fait sens pour soi, on vient forcément à la question de l’envie. Et, au coeur, il me semble que c’est cela qu’il faut traquer. Si cela semble plat, convenu, alors il ne faut pas aller dans cette direction, effectivement, à moins de balancer un gros chamboulement (comme une attaque de ninjas). Je ne crois pas à l’inspiration (qui tombe du ciel) mais, en bon petit nietzschéen, à la volonté créatrice, l’envie. Et l’envie se rattache à la vérité du soi. Pourquoi suis-je ici ? Pourquoi je raconte ça ? Qu’est-ce que je voudrais que cela m’apprenne ? Qu’est-ce que j’explore ? En quoi est-ce important pour moi ? De quoi ai-je besoin, maintenant, pour me débloquer ? Pourquoi ça ne marche pas ? Qu’est-ce qui me faisait envie dans ce projet, à la base ? Comment y revenir ? Comment le faire évoluer ? Et surtout, sur quoi ai-je besoin de lâcher prise pour laisser mon inconscient tracer sa route ? 

Je pense que travailler l’envie / l’inspiration au corps relève là aussi d’un équilibre entre deux aspects. L’inspiration est (en tout cas de mon expérience personnelle) une grosse feignasse, donc il faut aller lui planter des banderilles dans les côtes pour qu’elle daigne remuer son imposant postérieur ; mais elle est aussi vivante, ce qui signifie qu’on ne peut pas la traire sans arrêt sans qu’elle s’assèche, qu’elle mérite respect et soins. Et qu’il faut parfois la laisser reposer, la relâcher pour qu’elle mûrisse. L’inspiration est un potager. 

Ouais.

Comment on travaille un potager ? En le soignant, en récoltant, mais aussi en le laissant croître. Il me semble que j’ai obtenu le plus de résultats de mon potager en mêlant les séquences de harcèlement actif (en grattant frénétiquement les questions précédentes, en traquant mon envie sans pitié dans un coin, sans cesser tant que je n’avais pas cette petite étincelle qui fait dire: “aha ! » et en me poussant à l’épuisement mental) et de repos. Le harcèlement consiste à se poser des questions, à se documenter pour élargir ses horizons, à creuser en soi jusqu’à trouver la sensation de l’envie, ce qu’Elisabeth Vonarburg décrit dans Comment écrire des histoires par “le corps sait” – quand on trépigne d’un coup sur la chaise en se disant “oui ! oui ! putain, c’est ça !”

Mais cela n’arrive pas forcément en une session de travail. Ni même deux. Ni une semaine. C’est là que le relâchement intervient. En un sens… je crois qu’il faut avoir confiance en son inconscient, en son potager, pour mûrir et apporter les fruits, tant qu’on l’a suffisamment arrosé d’engrais (et de pesticides et d’anitbiotiques, bien sûr). Présenter à son esprit, à son inconscient, les bonnes questions, sans tolérer la moindre paresse : celles qui correspondent à l’envie, puis le laisser vagabonder, infuser, sans cesser de revenir l’aiguillonner de temps à autre pour qu’il ne s’endorme pas. Si la réponse n’apparaît pas immédiatement, ce n’est pas grave. Mais il ne faut pas cesser de traquer le désir, la volonté profonde, qui est plus une sensation qu’un eurêka en mots. Cela ne fournit pas de réponse articulée, juste la sensation que, par là, il y a quelque chose à faire ; cela montre une direction. C’est, je crois, ce qu’il ne faut pas perdre. Quant au chemin qui sera parcouru par cette direction, il se dévoilera au fur et à mesure. Il faut, je crois, houspiller activement son envie, sa volonté pour qu’elle donne la direction à suivre… puis laisser relâcher, lui faire confiance, pour qu’elle prenne les rênes sur ce chemin. 

2014-08-05T15:13:13+02:00vendredi 10 janvier 2014|Best Of, Technique d'écriture|27 Commentaires

Noël arrive, paix heureuse, achetons tous des liseuses (1)

Nous nous levons à l’heure où l’aube blanchit la campagne et rougit les pommettes, de suspects personnages avinés et victimes d’obésité morbide secouent des cloches en faisant ho ho ho, bref c’est l’époque du chiffre d’affaires : Nowel. Et j’ai reçu en rapide succession des messages de camarades et proches formulant tous la même question : « toi qui as forcément étudié la question, j’offre quelle liseuse à Noël ? »

Ahem.

Non, j’ai pas étudié la question. Du moins, pas en mode guide d’achat pour éliminer scrupuleusement un à un tous les modèles candidats jusqu’à brandir le LD Seal of Approval sur ce modèle, c’est çui-là qu’il faut, la quadrature du cercle. En revanche, j’ai étudié comment ça marche, je m’en sers, j’essaie de suivre à quelle sauce les commerçants veulent manger les auteurs et donc les lecteurs. Je voudrais également en profiter pour établir quelques notions de base sur le sujet, faire des articles qui pourront servir de référence plus tard.

Donc, pour cinq articles (ouais, cinq !), on va causer livre électronique et aide à l’achat, mais pas comme un guide Fnac : on va parler principes et fonctionnement, les points auxquels prendre garde. Et après, auguste lectorat, comme tu es la Communauté la Plus Cool du Net (vainqueur du prix Lionel Davoust 2012 de la Communauté la Plus Cool du Net), tu feras ton choix comme tu l’entends, en fonction de ce qui se sera dit. Par ailleurs, ce qui se reflète ici est le résultat de mon expérience et ma vision (voir les caveats d’usage).

Un fil de discussion est déjà né sur mon mur Facebook autour de la question ; pour cette série d’articles, je te demande, auguste lectorat, de t’aider toi-même. Vous avez certainement des bonnes ou mauvaises expériences, des réactions à ce qui se dira : donnez-vous vos bons plans, vos recommandations, de manière à ce qu’on en sorte tous grandis (enlarge your IQ).

Demain, on lance les hostilités avec la question fondamentale : une liseuse ? Mais pourquoi, en fait ? 

2012-12-08T16:00:06+01:00mercredi 12 décembre 2012|Geekeries|13 Commentaires

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