Vos gueules, les corbeaux

Grumpy-cat-meme-end-of-the-world-meme-lol-lulz-cats-funny-pictures-blog_thumbJ’en ai définitivement marre de ressentir la négativité ambiante et de la lire dans la presse. Tout va mal, on va tous mourir, rien ne sert de se battre: si, au contraire, bon sang, ce qui nous tue, c’est le défaitisme, c’est la peur, ce sont ceux qui, au nom de la raison, de la norme, ou par jalousie et impuissance, nous empêchent de rêver plus grand, plus haut, plus vaste, qui nous donnent perdants avant même d’être descendus dans l’arène. Il n’y a que deux choses à leur dire : 1) va te faire foutre ; 2) merci, car rien que pour t’emmerder, maintenant, je vais réussir. On n’a qu’une vie: au nom de quoi, bon sang, se priverait-on de tenter des projets fous, des aventures immenses, au nom de quoi, de qui, de quelle morale, de quelle divinité étriquante, se retiendrait-on de vivre ? Au nom de quelle attente ? L’attente d’être plus sage, plus expérimenté ? On le sera toujours davantage demain. Un jour, il faut agir, agir maintenant, car demain, nous serons morts, et ce sera toujours trop tôt ; et ce jour-là, tout sera fini, plus de crédits dans la machine, plus temps de tenter.

Il vaut mieux tenter et échouer. Pour ma part, même si je me vautre, même si je me rate, j’aimerais, au minimum, qu’on dise de moi : “il s’est peut-être planté, mais il aura essayé.”

La réussite n’est jamais garantie. Mais putain, on peut donner tout ce qu’on a, et que faire d’autre ? Peut-on se devoir plus, et oserait-on se satisfaire de moins ?

Ce qui ne veut pas dire foncer stupidement et sans préparation. Le funambule ne regarde pas en bas, mais il n’oublie pas non plus la magnésie sur les pieds. C’est toute la différence avec lui dire inutilement : “mec ! tu vas tomber.”

2014-07-21T17:57:14+02:00mercredi 23 juillet 2014|Humeurs aqueuses|94 Commentaires

Question : relancer l’inspiration

writers_block_lolcatAprès un long hiatus, on reprend sur les questions concernant l’écriture (pour mémoire, n’hésitez pas à m’envoyer vos questions, j’y répondrai, si je me sens qualifié, par un article de blog). Parlons d’inspiration – cette inspiration si évanescente et volage, qui nous empêche de dormir la nuit et de bosser le jour :

Existe-t-il des trucs pour provoquer ou débloquer l’inspiration au lieu d’attendre qu’elle vienne toute seule ? Le blocage est difficile à expliquer, mais en gros, passé une phase où les images/idées/situations affluent toutes seules sans que j’aie à les chercher, il arrive souvent une phase où “ça ne veut pas”, et j’ai beau à réfléchir à des moyens de relancer l’idée, rien de transcendant ne vient (sachant qu’en général, chercher la suite “logique” d’une situation aboutit à quelque chose de plat et d’inintéressant, c’est seulement quand je trouve une association d’idées inhabituelle que je sais être sur le bon chemin). Le plus souvent, ça finit par se débloquer de manière inattendue, mais des semaines ou des mois après. Je vois souvent dire que “l’inspiration n’est pas juste un truc qui tombe tout seul du ciel”, mais je n’ai jamais lu de texte qui explique comment on peut la provoquer, ou au minimum la structurer. C’est un des rares aspects que je ne voie jamais abordé dans les conseils d’écriture, alors que de mon point de vue c’est une question fondamentale.

Tout à fait… Et je crains que chaque auteur fasse sa propre “paix” avec l’aspect un peu aléatoire de la chose.

Néanmoins (ce qui entraîne toujours de joyeuses conversations, et je me doute que cet article va susciter la controverse – c’est très bien, je ne prétends pas détenir des réponses universelles) je fais partie de ceux qui ne croient pas à l’inspiration, mais au travail. Travail étant pris au sens large : observer le monde est du travail ; se documenter est du travail ; réfléchir est du travail. Tout ce qui requiert un acte de volonté qui hisse la personne au-dessus de l’état basal consistant à manger des chips sur le canapé devant Call of Duty est un travail – un travail volontaire et plaisant, on l’espère, mais qui provient du désir de surmonter quelque chose en vue d’un accomplissement.

Quid, donc, de l’inspiration ? Comment débloquer le récit qui fait sens, qui va être intéressant – pour soi avant toute chose, qui va résonner avec le désir que l’on a de raconter ? Eh bien, pour moi, la réponse est contenue dans la reformulation de la question : dans “pour soi ». L’écriture, comme tout art, est un exercice d’équilibre dynamique entre contrôle conscient (je dois penser à la cohérence des détails, raccourcir cette scène qui n’apporte rien, etc.) et relâchement inconscient (tiens, j’ai envie de mettre une attaque de ninjas MAINTENANT, et tant pis si ça fout tout en l’air). Chacun place le curseur plus d’un côté ou de l’autre (les structurels côté contrôle, les scripturaux côté relâchement).

C’est également un exercice d’équilibre entre les exigences des autres (quels sont les codes narratifs où j’évolue, et est-ce que je les respecte, ou pas ? est-ce que mon récit est intelligible, clair, accessible pour le public que j’aimerais atteindre ?) et les siennes : qu’est-ce que j’ai envie de faire ? En cherchant l’histoire, le déroulé, qui fait sens pour soi, on vient forcément à la question de l’envie. Et, au coeur, il me semble que c’est cela qu’il faut traquer. Si cela semble plat, convenu, alors il ne faut pas aller dans cette direction, effectivement, à moins de balancer un gros chamboulement (comme une attaque de ninjas). Je ne crois pas à l’inspiration (qui tombe du ciel) mais, en bon petit nietzschéen, à la volonté créatrice, l’envie. Et l’envie se rattache à la vérité du soi. Pourquoi suis-je ici ? Pourquoi je raconte ça ? Qu’est-ce que je voudrais que cela m’apprenne ? Qu’est-ce que j’explore ? En quoi est-ce important pour moi ? De quoi ai-je besoin, maintenant, pour me débloquer ? Pourquoi ça ne marche pas ? Qu’est-ce qui me faisait envie dans ce projet, à la base ? Comment y revenir ? Comment le faire évoluer ? Et surtout, sur quoi ai-je besoin de lâcher prise pour laisser mon inconscient tracer sa route ? 

Je pense que travailler l’envie / l’inspiration au corps relève là aussi d’un équilibre entre deux aspects. L’inspiration est (en tout cas de mon expérience personnelle) une grosse feignasse, donc il faut aller lui planter des banderilles dans les côtes pour qu’elle daigne remuer son imposant postérieur ; mais elle est aussi vivante, ce qui signifie qu’on ne peut pas la traire sans arrêt sans qu’elle s’assèche, qu’elle mérite respect et soins. Et qu’il faut parfois la laisser reposer, la relâcher pour qu’elle mûrisse. L’inspiration est un potager. 

Ouais.

Comment on travaille un potager ? En le soignant, en récoltant, mais aussi en le laissant croître. Il me semble que j’ai obtenu le plus de résultats de mon potager en mêlant les séquences de harcèlement actif (en grattant frénétiquement les questions précédentes, en traquant mon envie sans pitié dans un coin, sans cesser tant que je n’avais pas cette petite étincelle qui fait dire: “aha ! » et en me poussant à l’épuisement mental) et de repos. Le harcèlement consiste à se poser des questions, à se documenter pour élargir ses horizons, à creuser en soi jusqu’à trouver la sensation de l’envie, ce qu’Elisabeth Vonarburg décrit dans Comment écrire des histoires par “le corps sait” – quand on trépigne d’un coup sur la chaise en se disant “oui ! oui ! putain, c’est ça !”

Mais cela n’arrive pas forcément en une session de travail. Ni même deux. Ni une semaine. C’est là que le relâchement intervient. En un sens… je crois qu’il faut avoir confiance en son inconscient, en son potager, pour mûrir et apporter les fruits, tant qu’on l’a suffisamment arrosé d’engrais (et de pesticides et d’anitbiotiques, bien sûr). Présenter à son esprit, à son inconscient, les bonnes questions, sans tolérer la moindre paresse : celles qui correspondent à l’envie, puis le laisser vagabonder, infuser, sans cesser de revenir l’aiguillonner de temps à autre pour qu’il ne s’endorme pas. Si la réponse n’apparaît pas immédiatement, ce n’est pas grave. Mais il ne faut pas cesser de traquer le désir, la volonté profonde, qui est plus une sensation qu’un eurêka en mots. Cela ne fournit pas de réponse articulée, juste la sensation que, par là, il y a quelque chose à faire ; cela montre une direction. C’est, je crois, ce qu’il ne faut pas perdre. Quant au chemin qui sera parcouru par cette direction, il se dévoilera au fur et à mesure. Il faut, je crois, houspiller activement son envie, sa volonté pour qu’elle donne la direction à suivre… puis laisser relâcher, lui faire confiance, pour qu’elle prenne les rênes sur ce chemin. 

2014-08-05T15:13:13+02:00vendredi 10 janvier 2014|Best Of, Technique d'écriture|27 Commentaires

Neuf raisons de faire le NaNoWriMo en novembre

nano_2013Hey ! Ce week-end, c’est les Utopiales, mais c’est aussi le début du NaNoWriMo, le mois de l’écriture. L’objectif : écrire un livre en… un mois (50 000 mots, soit 300 000 signes). C’est pendant le mois de novembre.

Ça semble un défi fou, et ça l’est. Pourtant, si vous souhaitez écrire un tant soit peu sérieusement, ça représente aussi un défi auquel vous feriez fort bien de vous confronter. Ce n’est évidemment pas une étape obligatoire, mais elle est grandement instructive et productive. Le concept est bien mûr, et la communauté française présente et active.

Mais pourquoi faire le NaNo ?

1. Au début du NaNo, vous n’avez pas de livre écrit. À la fin du NaNo, vous avez un nouveau livre écrit. Bilan positif net.

2. Le NaNo vous force à écrire. Bien des jeunes auteurs disent vouloir écrire, ont quantité d’histoires qui leur tournent dans la tête, mais ils manquent du temps ou de l’organisation nécessaire pour y parvenir. Quand vous vous lancez dans le NaNo, vous vous fixez un objectif tangible. Vous avez passé un contrat avec vous-même.

3. Le NaNo vous oblige donc à trouver comment écrire dans les interstices de votre emploi du temps. Il vous force à prendre votre écriture au sérieux parce qu’à présent, vous avez un livre à écrire pour la fin du mois. Il faut vous organiser et trouver comment faire autour, par exemple, d’une vie de famille et d’un autre travail. Il vous faut réserver de l’énergie et du temps pour écrire, ce que vous n’avez peut-être jamais fait auparavant.

4. Corollaire : il est impossible d’atteindre ce genre d’organisation sans en parler autour de vous, à vos proches, qui se demanderont pourquoi, brutalement, vous ne venez plus à la beuverie du jeudi soir. À présent, non seulement vous avez établi vis-à-vis de vous-même que vous souhaitiez écrire un livre, mais vos proches le savent. Vous êtes lié(e) par votre parole vis-à-vis d’eux… Ce qui renforce votre promesse à vous-même. Leur réaction est également instructive. Si ce sont de bons amis, de bons conjoints, ils devraient respecter ce désir de votre part et même vous soutenir. Si ce n’est pas le cas, c’est aussi une leçon… Celle de suivre votre rêve, pour vous-même, qu’importe l’opinion d’autrui.

5. Le NaNo contribue à vous apprendre à écrire. Règle 1 de Robert Heinlein : “tu dois écrire ». On n’apprend à écrire qu’en écrivant ; en se confrontant aux difficultés, en regardant l’histoire se dévoiler, en constatant si elle suit le chemin prévu ou si elle en dévie, si c’est mieux ou non. C’est chouette de vouloir écrire, mais si on n’écrit jamais, on reste un simple velléitaire. L’auteur, c’est celui qui se confronte à l’épreuve, qui ose se casser la figure, qui se relève et qui apprend. “C’est en écrivant qu’on devient écriveron.”

6. Le NaNo vous confronte à votre façon de travailler. Êtes-vous structurel(e) ? Scriptural(e) ? Efficace la nuit ? Le matin ? Dans les cafés ? Pourquoi coincez-vous ? Qu’est-ce qui fait qu’aujourd’hui, tout va bien ? Je répète à l’envi qu’apprendre à écrire, c’est apprendre à se connaître ; apprenez à vous connaître à travers cette épreuve et vous écrirez mieux, avec davantage de plaisir.

7. Le NaNo vous ouvre toute une communauté d’auteurs, plus ou moins expérimentés, qui traversent la même épreuve que vous. Cela peut déboucher sur des rencontres et des échanges fructueux sur l’écriture, sur l’engagement qu’elle représente. Vous n’êtes plus seul(e). Discutez !

8. Le NaNo vous apprend l’enfer que ce métier peut être. Par enfer, j’entends : trouver le moyen d’avancer alors que vous butez sur la même scène depuis trois jours. Ne pas lâcher votre projet, votre rêve, alors que tout en vous voudrait abandonner, parce que c’est trop dur, les personnages sont tartes, l’action est molle, les dialogues sont creux. Vous insistez. Le NaNo vous enseigne la discipline. Vous n’avez pas fini votre quota du jour ? Vous restez à écrire. Vous avez envie de sortir faire un tour ? Vous restez à écrire. Vous trouvez ça trop dur ? Vous restez à écrire. Vous vous faites fait une promesse, vous avez pris un engagement : vous allez faire tout votre possible pour le mener à bien. Parce que, bon dieu, vous voulez écrire.

9. Le NaNo vous confronte au retravail. Peut-être n’avez-vous jamais terminé de premier jet… Mais une fois cela achevé, le “vrai” travail, peut-être, celui qu’on sous-estime le plus, commence. Il faut rendre le livre accessible, intense, lisible, bon. Mais cela… c’est une autre histoire.

2014-08-31T14:01:26+02:00mercredi 30 octobre 2013|Best Of, Technique d'écriture|21 Commentaires

Ma position sur de potentielles éditions numériques

Article mis à jour en février 2016 pour refléter l’évolution du marché et de la technologie. La discussion de 2016 se trouve dans l’annonce de cette mise à jour, ici

Forcément, étant geek et auteur, je suis amené à parler pas mal d’édition en ce lieux et notamment à causer édition numérique. Or, je reçois régulièrement la question suivante :

Où peut-on te trouver en numérique ?

Il semble important de faire un point qui servira potentiellement de façon ultérieure ; parce que, effectivement, tous mes livres ne sont pas forcément disponibles sous ce format. Voir dans le menu “Spécial numérique” et la page téléchargements.

Réponse courte, donc : seuls certains de mes livres sont disponibles en numérique à l’heure actuelle – les liens sont présents sur les pages concernées. Si vous ne les trouvez pas, c’est que les éditions n’existent pas (encore).

Ce qui entraîne donc quand même une question :

Pourquoi ?

Tout d’abord, il faut savoir que les droits numériques d’un ouvrage sont fréquemment associés aux droits du papier. Donc, si je vends, au hasard, mon épopée de fantasy intitulée Le Saigneur des Agneaux à l’éditeur Bob Bobby, Bob Bobby détient les droits. Il lui revient donc de réaliser l’édition numérique.

Cela entraîne deux cas de figure :

  1. Bob Bobby n’a pas de projets numériques, ou bien sa stratégie implique une diffusion en deux temps (papier d’abord, numérique ensuite). Les raisons le regardent – il s’agit souvent d’une question de ressources à investir dans le numérique qui reste, il faut le dire, encore un marché extrêmement réduit ; c’est son droit et son problème. Comme c’est mon droit et mon problème de signer avec un éditeur qui a cette stratégie. Il faut savoir que l’éditeur représente le livre ; il est mon partenaire privilégié ; vous ne m’entendrez pas disconvenir de sa stratégie pour cent raisons, à commencer, déjà, parce qu’il est inélégant de critiquer les partenaires avec qui on signe des accords. Le calendrier de l’édition numérique est décidé par l’éditeur (et le marché le forcera à remettre en cause sa stratégie si cela en vaut vraiment la peine), pour ma part, je le suis.
  2. Bob Bobby a des projets numériques, mais il fixe des conditions pour ceux-là, en termes de rémunération, de diffusion, de durée de cession etc. Là, c’est comme dans tout contrat d’édition : on se rencontre, on discute, on confronte nos vues. On tombe d’accord, ou pas. Comme on tombe d’accord sur les conditions d’une diffusion papier. Si l’on ne tombe pas d’accord sur les termes, l’édition numérique n’existe pas. Non, je ne proclamerai pas sur les toits qui est qui, cela relève là encore de l’élégance fondamentale.

Un mot important sur ce dernier point, qui peut entraîner une situation pour le moins paradoxale. Certains publics brandissent beaucoup le numérique comme un moyen pour l’auteur de s’émanciper (ça reste sévèrement à prouver en France) et comme un encouragement à rompre avec les éditeurs supposés léonins pour faire valoir leurs droits. On mélange parfois le piratage là-dedans, en supposant que le téléchargement illégal fera changer les pratiques éditoriales. Pourtant, quand l’auteur défend ses droits, justement – en ayant le courage de refuser une édition numérique à des conditions qui ne lui conviennent pas – il devient dans ce cas triplement perdant : non seulement il n’a pas son édition numérique, mais en plus on le pirate, pratique qui effraie le monde éditorial encore davantage et conduit à restreindre encore plus les rémunérations.

J’en profite pour glisser qu’un auteur n’a pas son mot à dire sur d’éventuels DRM. De la même façon que l’éditeur fixe le grammage du papier, la police de caractères, le prix de vente public, son distributeur, il décide de la présentation du fichier numérique et de son éventuel verrouillage. C’est son métier, il décide. Mal ou bien, de la même façon qu’on peut trouver une couverture inadaptée, mais c’est son rôle.

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Je suis un team player

J’ai reçu un jour un mail super sympathique d’un lecteur potentiel me proposant de m’envoyer un chèque sous la table contre l’envoi par mail du fichier du manuscrit pour qu’il puisse le lire sur sa liseuse, parce qu’il préfère le numérique. Ça part d’une excellente intention (et ça rappelle l’affaire Thomas Geha) mais d’une, je ne peux pas faire ça, de deux, je me refuse à le faire.

  1. Je ne peux pas faire ça, car j’ai signé un contrat qui cède mes droits d’exploitation à un éditeur. Celle-ci lui revient. C’est mon engagement.
  2. Personne ne pourrait me choper à conclure ce genre d’arrangement, pourtant, je m’y refuse. J’ai la faille d’être un type qui respecte la parole donnée et les contrats signés. Je suis un team player et je me fie à mes interlocuteurs et mes partenaires (tant que la relation est harmonieuse et honnête, bien entendu). Je ne brise donc pas mes engagements.

Corollaire : il arrive parfois, dans certains cas, que l’édition numérique n’ait pas été prévue par un contrat. Techniquement, je dispose donc toujours des droits. Pourtant, je rechigne toujours, du moins dans les circonstances actuelles, à réaliser moi-même une édition. Deux raisons à cela (c’est une manie, de tout faire par deux, dans cet article) :

  1. Travailler un texte, c’est un métier, ça demande du temps, de l’énergie, de l’esprit. C’est être éditeur. Par conséquent, une fois un texte publié, je n’oublie jamais l’éditeur qui est passé dessus et a permis, par ses remarques, de sortir le diamant de sa gangue brute. Il me semble juste de voir en premier lieu avec cet éditeur si une édition numérique pourrait se faire, fût-elle à moyen terme (et l’on retombe sur le début de l’article). S’il me dit “vas-y coco, fais-la ailleurs », très bien (et je salue par exemple Rivière Blanche qui a recommandé à ActuSF l’édition numérique de L’Importance de ton regard), mais pas sans l’avoir consulté au préalable.
  2. L’ai-je dit ? Éditeur, c’est un métier. Vendre des livres, les distribuer, leur donner une exposition, leur permettre de trouver un public, c’est un métier. Je n’ai actuellement pas la disponibilité (et pas forcément la compétence) pour réaliser ce travail de communication, et je voudrais que des éditions électroniques aient la même chance d’être vues et promues qu’un livre papier. Je préfère donc m’allier à un partenaire économique qui fera ce travail bien.

Et l’avenir, alors ?

Donc, en résumé, si vous ne trouvez pas d’édition numérique d’un ouvrage, c’est qu’elle n’existe pas (n’oubliez pas que les pages livres listent toutes les éditions disponibles).

Oui, des projets d’édition numérique sont toujours en cours, mais cela se fait petit à petit. Bien sûr, j’en parle ici dès que cela se profile à l’horizon.

Enfin, j’espère avoir réussi à faire passer le fait que cette absence est en partie une volonté de ma part, ou de mes partenaires : celle de faire ces éditions, le cas échéant, en prenant le temps de bien les réaliser, avec de bons moyens. Je vous saurai gré, vous qui passez par ici, de respecter ce souhait si vous soutenez mon travail. Une diffusion non légale irait à l’encontre de ce désir de belles réalisations et dans des conditions économiques équitables. 

D’avance, merci !

2016-02-10T11:56:53+01:00mardi 26 février 2013|Dernières nouvelles|6 Commentaires

Dans les coulisses de Léviathan : La Nuit, sur Livresque du Noir

John Irving avoue qu’il écrit sur ce dont il a peur, et je pense que la confidence vaut pour bien des écrivains. J’écris aussi en partie sur ce qui m’impressionne ou m’effraie, et dans mon cas, c’est le fait de ne pas savoir. Non pas le savoir académique, la connaissance purement livresque ; mais l’ignorance plus profonde, viscérale et incommensurable, de ce que je fais ici-bas, c’est-à-dire, ce que je veux faire ici-bas. Il ne s’agit pas de choix d’orientation, de carrière, de vie, même si cela y participe. La question est que je me refuse à voir dans le monde qui nous entoure un système purement mécaniste où l’intention, la volonté, l’humour n’ont pas leur place.

Le site Livresque du Noir propose aux auteurs de thriller et de polar de parler de leur livre de façon différente et personnelle, parfois drôle, parfois intimiste. Après Léviathan : La Chute, je me plie à l’exercice pour Léviathan : La Nuit sur cette page.

2012-08-01T22:10:07+02:00mardi 7 août 2012|Entretiens|2 Commentaires

Les déclencheurs sont trop durs !

Très heureux que l’aventure des déclencheurs plaise, que ce soit suivi, et surtout que l’entraide se soit installée ! Je ne pensais sérieusement pas que l’initiative rencontrerait un tel succès ; du coup, il est probable que je retente ce genre de chose, et cela me fait prendre conscience que je pourrais bloguer davantage sur l’écriture et l’édition (cet article porte d’ailleurs subtilement – ou pas – sur le sujet).

Mais, alors que je passe parfois sur des sites qui relaient le défi, il m’arrive de lire : c’est trop dur. Je ne trouve pas vingt minutes dans la semaine. Ça ne m’inspire pas.

Ce qui me pousse, cette fois, à prendre mon bâton de sergent instructeur et à dire : hé, ho, les divas, ça suffit.

Vous voulez écrire ? Vraiment écrire ? Votre rêve consiste à publier un livre dont vous soyez content(e), puis à poursuivre ?

Vient un moment où faut se botter le cul.

(Je ne parle pas des gens qui écrivent pour eux sans ambition de publication, ce qui est une approche parfaitement légitime ; il n’y a là d’autre exigence que la sienne, puisqu’aucun regard destinataire, et aucune exigence de discipline.)

Si vous ne trouvez pas vingt minutes dans une semaine de probables vacances pour écrire sur un thème au choix parmi dix tous très différents les uns des autres, permettez-moi de m’interroger sur le sérieux de votre engagement “professionnel” (au titre de celui ou celle qui désire pratiquer l’écriture avec le sérieux d’un professionnel, pas de celui qui est payé pour ça). Si vous n’accordez pas ce minimum (car vingt minutes, on parle bien de minimum, moins, c’est ne rien faire) de sérieux à votre écriture, qui le fera ?

L’approche professionnelle exige parfois qu’on se fasse violence. Et se faire violence, être un(e) pro, c’est écrire même quand l’envie n’est pas présente, surtout pour apprendre à se connaître pour savoir comment réveiller la machine à “inspiration », sans attendre qu’elle vienne ; aller la chercher de force, et le plaisir qui va avec. Les déclencheurs vous déplaisent ? Il ne s’agit pas d’écrire toujours sur ce qu’on veut, parfois, mais aussi de savoir tordre un thème pour le faire coller à sa propre sensibilité et trouver ce qu’on a à dire dessus. Où se trouve votre envie d’écriture ? Là est la vraie question. Tordez-les, ces thèmes, et faites-leur cracher ce que vous voulez.

C’est même le meilleur exercice qui soit, car c’est la difficulté qui enseigne. (Ce n’est pas pour dire que l’écriture est une souffrance, bien au contraire ; elle est censée être un plaisir, mais elle comporte un apprentissage, et apprendre nécessite d’investir de l’énergie contre des épreuves, ainsi que se permettre de se tromper.) Apprendre à écrire est un processus constant, et on n’apprend pas le monde en restant dans la sûreté de chez soi. Écrire est un muscle. Un pro – surtout à plein temps – doit produire du texte, un texte bon pour ses lecteurs et qui lui fasse plaisir à écrire, et s’il ne s’est jamais préparé à la difficulté avec sérieux, s’il n’a pas appris à la transcender, à savoir quelle méthode de travail lui convient pour savoir attiser la passion au quotidien, il va dans le mur. (Ou plus exactement dans la grange avec une corde à attacher aux solives.)

Je parle d’expérience. Si j’avais laissé la timidité et le sentiment d’inadéquation face au mythe arthurien parler au lieu de me demander : “qu’est-ce que j’ai, moi, de personnel à dire, et que je peux apporter à ce thème ? », je n’aurais jamais écrit “L’Île close », qui, deux ans plus tard, était finaliste du Grand Prix de l’Imaginaire, lauréate du prix Imaginales, traduite aux États-Unis.

Mais je ne suis pas plus malin que vous. Je réfléchis et je pratique simplement autant que je peux, comme tout le monde. Ce que je peux dire en revanche, c’est que ce chemin ne défilera pas sous vos pieds de lui-même, c’est à vous de l’emprunter. Au bout du compte, écrire est un engagement que vous avez pris avec vous-même, et personne ne vous regardera ni ne vous félicitera de le faire. C’est pour vous que vous travaillez, et personne d’autre. Oui, il faut parfois du courage face à une feuille blanche, je ne dis absolument pas le contraire. Mais ce courage, c’est à vous de vous le donner, et de vous autoriser à l’avoir. Prenez-le à bras-le-corps. Vous ne le trouverez pas dans les prétextes et les fuites, c’est une certitude. Vous le trouverez en vous battant, en remportant de petites victoires, comme avoir consacré vingt minutes à votre rêve, et rien qu’à lui.

Vous voulez écrire ? Vous voulez vraiment écrire ?

Alors au boulot, bordel.

Avec tous mes encouragements.

2014-08-27T16:06:25+02:00jeudi 26 juillet 2012|Technique d'écriture|9 Commentaires

Invité sur la Couveuse des Idées : “Nous sommes tous des créateurs”

La Couveuse des Idées est une section du site LesInfluences.fr, dont le sujet est très simple :

Quelle idée avez-vous envie de défendre en ce moment ?

J’ai eu l’honneur d’être invité à proposer ma réponse :

Nous sommes tous des créateurs.
Ce que nous sommes relève de notre seule responsabilité. Au sens double du terme : celui des choix que nous accomplissons, que nul ne peut faire à notre place ; et celui des conséquences qu’ils entraînent, qui n’appartiennent qu’à nous.

La suite à lire sur la page correspondante de la Couveuse.

2012-07-18T00:55:02+02:00vendredi 20 juillet 2012|Entretiens|3 Commentaires

Nancy Kress, Characters, Emotion & Viewpoint

« Story is character », dit Elizanbeth George dans Write Away1. On peut disconvenir de la formulation, mais une évidence subsiste : aucune histoire, aussi passionnante soit-elle, ne peut subsister sans personnages forts, intéressants, qui vivent et qui souffrent, alors qu’une histoire un peu faible peut être sauvée par des personnages inoubliables (que serait How I Met your Mother sans Barney ?). La création d’individus fictifs crédibles, originaux et surtout vivants est un des grands défis de l’écriture, et c’est ce à quoi ce livre cherche à répondre.

Le nom de Nancy Kress est un gage de qualité : gagnantes de plusieurs prix Hugo, Nebula, Asimov’s, on la connaît en France entre autres pour le cycle de La Probabilité, très chouette trilogie de space opera un peu hard science sur les bords avec des idées originales et une civilisation (Monde) attachante. Et l’on ressent dans ce volume la même clarté qui préside à sa plume de romancière : elle domine son sujet et parvient à le communiquer avec une érudition qui ne sacrifie jamais à la pédagogie.

Au cours de ces 200 pages, Kress aborde tous les sujets relatifs à la création et à la mise en scène des personnages : historique, présentation, changements, point de vue (un bon quart dévolu à ce seul aspect). Comme souvent dans ce genre de manuel, elle mélange théorie et techniques ; si la première mérite d’être disséquée et méditée en détail par le lecteur, les secondes ne devront pas être prises comme un inventaire exhaustif, mais simplement comme des exemples qu’il faudra s’approprier, puis détourner. De nombreux exercices en fin de chapitre, bien pensés, enseigneront un certain nombre d’astuces à celui qui les fera avec assiduité.

On résume souvent la création de personnages à une fiche détaillée et à un environnement, alors que le plus important, pour l’écriture d’une histoire, est leur motivation, leurs objectifs, leur vision de monde (lesquels découlent de ce fameux passé, mais il est une charpente qui étaye l’identité et non l’essence totale du personnage). Kress accorde une place non négligeable aux détails biographiques, mais laisse justement cette motivation émerger et appuie son importance dans l’histoire. On peut regretter qu’elle n’insiste pas davantage sur le lien que nourrissent personnages et intrigue – la motivation doit venir justement servir l’histoire que l’on souhaite raconter – mais il faut supposer que cela dépassait le cadre de ce volume et que la pratique se charge de l’enseigner.

Toutes les techniques que présente ce volume sont relativement fondamentales, ce qui en fera une lecture extrêmement profitable pour le jeune auteur, qui sera bien inspiré de faire les exercices proposés. L’écrivain expérimenté n’y apprendra probablement rien de très nouveau, à part un fondement théorique poussé à ce qu’il fait peut-être intuitivement, ce qui est toujours bon à prendre, et justifie pleinement la lecture.

Une épiphanie peut cependant toucher : Kress conclut son livre sur une leçon profonde et simple, comme le sont toutes les bonnes leçons ; un piège dans lequel, à mon humble avis, tous peuvent tomber. Le meilleur service qu’un auteur peut rendre à son récit, dit-elle, c’est de comprendre que c’est l’histoire de ses personnages, et non la sienne propre. Un agréable précepte à encadrer au-dessus de son bureau qui allège les enjeux : en libérant l’esprit et la narration, il encourage la prise de risques et pousse à aller chercher au fond de soi cette vérité qui fera le sang d’un beau récit.

  1. “L’histoire, c’est les personnages”, dans Mes Secrets d’écrivain
2014-08-05T15:23:05+02:00mercredi 26 janvier 2011|Best Of, Technique d'écriture|5 Commentaires

Question : personnages et leurs besoins

Comme la semaine dernière, voici une petite question d’écriture. L’auteur peine un peu sur une situation statique et cherche comment faire progresser son histoire :

Q : J’ai essayé de faire des fiches personnages pour ma pièce… on verra ce que ça donnera. J’ai un peu l’impression de remettre à plus tard le moment ou je vais devoir m’accrocher pour de vrai à l’histoire. […] Pour le moment j’en sais rien de ce qu’ils veulent… Rester vivants ? Que leur famille reste vivante ?

(suite…)

2014-08-05T15:24:32+02:00lundi 12 juillet 2010|Best Of, Technique d'écriture|Commentaires fermés sur Question : personnages et leurs besoins

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