… Parce que « post-mortem » est en latin, et que c’est bien plus classe que « debriefing », et que j’en ai marre de voir de l’anglais partout (« BNP Paribas Real Estate, It’s the Place to Be », sérieux, ça ressemble à quoi ? Surtout que je suis persuadé que pas un seul des marketeux décerébrés ayant pondu un truc pareil ne sait prononcer correctement le « th » anglais autrement que « z », et ils font les malins avec de l’anglais à la con, enfin, bref, pheuque).
C’est la rentrée et l’exercice des déclencheurs est donc terminé. L’aventure a été plutôt suivie, et une petite communauté s’est même formée autour de l’exercice, ce qui est très sympa ! Si vous n’avez pas pris le train à temps, il est toujours temps de vous lancer. Voici un petit récapitulatif de l’ensemble des articles. Et si vous avez joué le jeu mais cherchez un exercice d’écriture rapide, il est aussi toujours possible de tenter avec un déclencheur différent.
La liste complète des déclencheurs par ordre chronologique
J’espère que vous vous êtes rendu compte, après ces neuf semaines, que
- Votre écriture est importante. Mais écrire, ça prend du temps. Donc, vous devez réserver ce temps, le désigner comme sacré, et vos proches doivent comprendre que là, vous faites un truc qui compte pour vous, et qu’on doit vous ficher la paix, pas d’exceptions à part enfants qui brûlent et maison qui s’est cassé un bras. Et encore.
- Écrire, ça peut se faire dans les interstices. Souvent, avec les priorités du quotidien, il est difficile de se mettre dans l’humeur d’écrire. Sauf que, selon les termes de Robin Hobb (je cite de mémoire), « vous devez comprendre que vous n’aurez jamais plus de temps que maintenant ». Si vous désirez écrire sérieusement, il faut tirer profit de ces moments. Ayez de quoi écrire sur vous. Noter cinq phrases dans un bus chaque matin, ça donne une page à la fin de la semaine. À la fin de l’année, ça donne deux nouvelles. OK, c’est peu, mais entre ça et ne rien faire du tout en vous lamentant de n’avoir pas le temps d’écrire, vous choisissez quoi ?
- Vous n’êtes pas forcément bon du premier coup, mais ON S’EN FOUT. Ce qui compte, ce n’est pas d’écrire merveilleusement bien – du moins, la première fois. Ce qui compte, c’est d’écrire. C’est mauvais, vous vous relisez et vous avez envie de vous enfoncer des aiguilles dans les yeux, vous grimacez devant vos lignes de dialogue ? Félicitations, c’est le métier. Tous les auteurs, même et surtout les pros, ont des moments comme ça. Le bonheur, avec l’écriture, c’est qu’on peut – qu’on doit – retravailler. On peut reprendre, encore et encore, jusqu’à ce que ça sonne juste, que ça rende bien, qu’on soit content. Ce qui compte, dans le premier jet, dans l’écriture, c’est de mettre de foutus mots sur le papier ou le clavier. Vous jugerez plus tard. Ensuite, toujours ensuite. Et plus vous écrirez, plus vous pratiquerez, plus vous prendrez de risques. Et plus vous prendrez de risques, meilleurs vous serez.
Alors ? Au boulot, stou !
J’espère que cette série d’exercices vous aura, si vous l’avez suivie sérieusement, décoincé et aidé à montrer que vous pouvez écrire. J’aimerais bien proposer à nouveau ce genre de choses à l’avenir, surtout à voir que, manifestement, cela a répondu à une demande. Du coup, n’hésitez pas à partager votre expérience en commentaires !
- Comment l’avez-vous vécu ?
- Aimeriez-vous voir d’autres exercices ? De quel genre ?
« Tu dois écrire » – Première règle de l’écriture de Robert Heinlein.
Et pourtant j’en ai fait des forums et j’en ai lu des bouquins sur l’écriture et le scénario mais bon sang, rien n’est plus vrai ni plus juste que le résumé que tu viens de donner de l’écriture.
Le reste n’est que fioriture.
Et je sais de quoi je parle
…pour les fioritures !!
J’en suis à 4 postés (je n’ai pas tout publié), mais le fait d’écrire en temps limité est assez étrange. Il y a vraiment ce côté déclencheur : pas de temps à perdre pour monter une intrigue complexe, des personnages torturés… on prend un mot, un truc, une accroche, on s’y accroche et on regarde ou le train nous mène.
De manière assez surprenante, j’aime assez ce qui est sorti de ces petits exercices. Aucun n’est un chef d’œuvre (ce n’était pas le but), mais que ce soit mes textes ou ceux des autres que j’ai lu, j’ai l’impression que tous, sans exceptions, contiennent un petit « quelque chose », une sorte de substantifique moelle qui a pu s’exprimer parce que pressée par le temps.
Je me demande dans quelle mesure c’est parce que, pressé par ce temps, on est obligé de prendre des chemins qui nous sont « proches », et qu’on est donc plus près d’une espèce de « vérité ». On a pas le temps de tricher en quelque sorte ^_^.
…
Non mais pourquoi se fait-on chier depuis des siècles, alors? Il suffisait d’attendre que vous trouviez LA bonne définition, les mecs! 😀
Cela dit et en arrêtant de vous rappeler que la pensée unique dans ce genre de domaine est un peu de la sodomie d’insecte, c’est super intéressant, je trouve, de voir que CERTAINS textes trouvent leur juste tempo avec un temps réduit. En particulier les textes d’action, dans mon cas, et paradoxalement, ceux avec une émotion progressive. Et donc, je suis bien d’accord!
Beaucoup aimé l’exercice. Ca rejoint des trucs similaires que je m’etais auto-donné pour m’aider à me donner des coups de pieds… disons pour avancer. Perso, j’aime utiliser ce genre d’exercices pour mieux construire l’univers d’une histoire sur laquelle je suis en train de travailler (quand c’est possible, hein. J’ai reussi a caser la cle a molette, mais j’avoue avoir laisse tomber pour la phrase sur la mayonnaise et les frites). Que ce soit inclus au final ou pas, il faudra voir, mais en tous cas c’est une maniere de se changer les idees tout en avançant un projet en cours.
Dans cette optique, moi j’aime assez les exercices applicables dans ce sens. Du style: douze situations dans lesquelles votre perso (allez, appelons-le M) pourrait se retrouver, et comment réagirait-il.
Coup de foudre
M rencontre celui/celle/ce dont il/elle/ça va tomber (dont il tombe de suite?) amoureux
Demoiselle en détresse
M voit celle qu’il aime en danger ou blessée
Trahison
M se rend compte de la trahison d’un ami ou d’une personne en qui il a confiance
Situation désespérée
M est dans une situation désespérée: a priori il lui est matériellement ou physiquement impossible de s’en sortir.
Problème insoluble
M est face à un dilemme, une énigme ou un problème intellectuel insoluble.
Pouvoir absolu
M obtient le pouvoir absolu, tout lui devient soudain possible.
Inaction forcée
M est coincé, condamné à l’inaction forcée: par ex enfermé dans une prison ou reclus volontaire pour se cacher.
Phobie
M doit faire face à une peur profonde, irrépressible.
Encerclé
M est seul, entouré d’ennemis: comment réagit-il et par quel moyen essaie-t-il de s’en sortir?
Ennui du quotidien
Comment M gérerait une routine quotidienne, banale, ennuyeuse et répétitive?
Evénement inexplicable
M se trouve soudain face à un phénomène ou un événement étrange, fantastique, inexplicable pour lui. Comment réagit-il face à l’inconnu?
Responsabilités
M est responsable de la santé, du bien-être, voire de la vie d’une ou plusieurs autres personnes. Comment réagit-il quand d’autres dépendent complètement de lui?
Torture
M est soumis à d’horribles tortures, aussi bien physiques que psychologiques.
Et sinon, bien d’accord aussi avec ces conclusions sur l’ecriture. Plus qu’a passer a/poursuivre/progresser dans la mise en pratique !
Merci beaucoup Pascal pour ce partage. Effectivement, ce genre d’exercice permet de forger un personnage, de mieux le sentir. Et parfois, il peut même en sortir des idées de scènes utilisables.
Anne, ma chère Anne, donné-je l’impression de prêcher une quelconque pensée unique? On prend et on laisse ce qu’on veut de ces articles. Je m’efforce de transmettre un peu de ce que j’ai pu apprendre – ce que j’aurais aimé trouver en français quand j’ai commencé – mais j’encourage toujours kes participants, en atelier par exemple, à questionner les méthodes pour construire la leur.
Onirian Iste : Beaucoup d’auteurs – j’en fais partie – recommandent d’écrire « vite », c’est-à-dire en coupant l’éditeur interne qui critique en permanence ce qui est rédigé. Je trouve que cela donne beaucoup plus de naturel à l’élan narratif, il y a une énergie brute difficile à atteindre si on soupèse chaque mot, et donc, c’est peut-être un peu plus vrai, un peu plus proche des préoccupations véritables de l’auteur. Sans compter qu’à mon avis, c’est plus facile et plus drôle de se lâcher. Evidemment, il faut pas mal corriger ensuite, mais il faut TOUJOURS corriger ensuite, alors…
Bonjour,
et en écrivant cela, tu trouves/donnes la meilleure justification possible à ce défi terrible qu’est le NaNoWriMo (50 000 mots en un mois).
Pour tenir la cadence, on n’a pas d’autres choix que d’écrire (presque) tous les jours, et surtout, sans en reniant la pulsion de la correction immédiate.
Ecrire, écrire, écrire même si parfois les scènes et paragraphes paraissent douloureux.
Ensuite, on fera le compte -> et on passe du temps à la relecture/correction.
En attendant, en théorie, ce foutu synop’ que vous traînez depuis un long moment, vous en aurez peut-être enfin fait un manuscrit. Perfectible, certes, mais au moins, cette histoire qui vous tenait à coeur est écrite 🙂
Merci Lionel pour ces pistes d’écriture durant l’été !
Avec plaisir !
Pour avoir des proches qui font le Nano, c’est effectivement un point très positif de l’exercice : ce déverrouillage, cette course, parce qu’il n’y a pas le choix.
J’ai très scrupuleusement gardé les consignes, mais j’avoue ne pas avoir commencé à écrire, pas assez de temps pendant les vacances ! En tout cas l’idée est excellente, merci
Choupinet, je répondais à david… 🙂
Mais j’ai dit « vous », j’avoue, trompée par ton nom sur le post.
Haaan, je croyais que tu me faisais les gros yeux. 😀
Tu sais bien que je passe directement à la fessée!
Owi 😀
Il ne s’agit pas, je crois, de définition. Je serais bien en mal de définir ce qu’est l’écriture. En tout cas, je n’en ai pas la prétention.
Mais je trouvais juste ce que disais LD.
Dans le cadre d’un roman ou d’une écriture de longue haleine, il est nécessaire de s’investir et d’OSER. C’est bien sur valable pour la majeure partie des métiers. Il est par contre bien Français, en tout cas je trouve ce mal assez français, de croire que l’écriture est un don inné.
Maintenant, même pour l’écriture, certaines règles existent. Mais je ne crois pas que c’était là le sujet de LD.
Bien à vous.
Un don inné? Je préfère parler de processus intellectuel particulier. Il y a une part d’inné, et une part d’acquis, comme pour tous les domaines. Non, tout le monde ne peut pas devenir écrivain, même en s’investissant et osant. Il y a une structure qui est (hélas pour les dogmes artistico-chiants des années 70) à la base même de l’écriture. Après, le talent sans travail n’est rien qu’une sale manie, on le sait. Je trouve ça toujours un peu simpliste d’opposer « don » et « travail ». Base et fructification et vécu et perception du monde: la bonne équation de l’écrivain, à mon sens. Après, des techniques et des perceptions de la matière très différentes…
Je suis peut-être un gros idéaliste, mais je pense que chacun porte en lui quelque chose qu’il peut dire de la façon qui lui convient, par l’écriture, la musique ou le C++. La difficulté est de trouver cette voie, puis d’arriver à la suivre contre les autres priorités du quotidien : mais si la voie est juste, alors cet équilibre que tu décris très joliment se fera. Tout le monde ne peut pas devenir écrivain, mais tout le monde ne le veut pas réellement, et c’est ce qui est important (c’est pour cela que les divas et les wannabes de tous les métiers de création m’agacent, ils font beaucoup de bruit et de vent contre ceux qui rament mais auraient sincèrement quelque chose à exprimer).
Donc, je vous rejoins largement sur les règles qui existent et qui permettent à un esprit éclairé d’utiliser au mieux son talent!
Jolie insertion d’un de mes vers préférés de Brassens,Anne. J’en ai fait quatre, postés deux, deux trainent sous forme écrite sur papier quelque part. Des lieux d’écriture très différents entre la table de bistrot, le train (trajet epinal-metz, étalant pour la relecture mes feuilles sur le siège d’en face sous les regards interloqués) et mon vieil ordi. Ensuite les derniers j’étais dans une recherche perso (volonté de casser les quelques outils que je possède, résultant en une cinquantaine de pages sur un mois dont je ne sais pas quoi penser, que je regarderai d’ici un mois ou deux parce que… si l’inspiration fluctue à tort ou à raison je fais confiance en la part critique/rédactrice/éditrice en moi) et j’avais besoin de m’immerger dans ce truc, j’ai senti – et c’était peut être une erreur? – la nécessité de ne pas me disperser dans ce mois d’août où je pouvais ne qu’écrire. Je ferai les autres en « pause » quand je bloquerai sur les projets en cours, parce que ça viendra et c’est très bien ainsi.
Un grand merci d’une petite anonyme qui a découvert ce blog un peu par hasard ! L’exercice des déclencheurs aura été, pour ma part, utile, sinon plaisant (ou l’inverse, je ne saurai trop dire :p) ; j’ai été agréablement surprise de ce qui a pu ressortir de ces séances d’écriture (même si la reliseuse acharnée en moi a hurlé de frustration pendant tout ce temps) et je crois que cela a constitué LE déclic qui m’a permis de me replonger dans mes projets.
Merci aussi pour les coups-de-pied-au-cul-virtuels, les articles incisifs et les belles photographies. Et pour les commentaires des habitués qui m’ont fait découvrir d’autres auteurs et d’autres idées. Bonne continuation à tous ! 🙂
Merci à vous Marine et bienvenue ici ! J’espère que vous vous plairez et aurez envie de rester un peu parmi nous. 🙂
Il faut que je précise qu’il n’y a évidemment nulle obligation de poster les exercices en commentaires. C’est une habitude prise par les participants, mais à chacun de procéder comme il le souhaite bien sûr.
Ca dépend surtout de ce qu’on met derrière le terme créatif, écrivain ou autre. Le tout c’est de savoir se situer sous deux aspects, à titre personnel et à titre « global »: on peut prendre plaisir à produire, créer reste à savoir ce que ça donne, est-ce que ça apporte quelque chose en dehors de sa satisfaction personnelle ou du cercle des intimes? et même si ce n’est pas le cas, tant que ça apporte quelque chose à soi-même, il faut le faire. Dans le Sandman de Gaiman, dans le Dreaming, le royaume des rêves il y a une grande bibliothèque avec tous les livres écrits en rêve, chacun y a son rayonnage; la France est peut être le pays où on a le plus de monde qui te dit « j’ai une idée de livre » indépendamment de la qualité du texte, le principal écueil est l’actualisation de cette envie.
Je t’ai bassiné avec « Saga » de Brian K. Vaughan, je remets une couche : dans le courrier des lecteurs de l’épisode 2, Vaughan place un questionnaire, 25 questions dont trois que je trouve extraordinaires:
22) What are you working on these days, anything creative?
23) Wait, why did you abandon it?
24) Relax, I’m sure it’s great. Listen, why not put down this comic and do a little work on your thing RIGHT NOW?
La 23 est belle, j’aurais eu l’idée de la mettre mais alors la 24… là je ne suis pas sûr que j’y aurais pensé mais tout ce joue là 🙂
Je crois que le plus important là-dedans est « Relax ». 🙂
C’est clair! 80% de mon activité dans les ateliers d’écritures que je fais en milieu scolaire ou biblio consiste à faire passer ce « Relax ». Maintenant que j’y pense je crois que c’est aussi 80% de la répartition de mon temps comme Prof doc lol sur le rapport à la lecture et à la culture.
J’ai écris plusieurs fois sur des déclencheurs, simplement pour me lancer un défi.
Et le « plus difficile » n’était pas de l’écrire mais de poster mon texte …(même si je le mets de façon anonyme).
J’ai aimé aussi lire les autres textes (après avoir écris le mien pour ne pas être orienter) pour voir quels chemins avaient été pris avec les mêmes déclencheurs.
Résultat : je me suis amusée, étonnée et je suis prête à renouveler l’expérience !
Et dans 30 ans quand on me posera la question :
– comment avez vous commencé ?
– grâce aux déclencheurs de Lionel Davoust 😉
Pas d’obligation de poster les textes, hein ! L’essentiel c’est d’écrire pour soi. Les participants ont juste pris cette habitude pour échanger ensuite.
Bravo pour avoir tenu le coup et joué le jeu ! 🙂