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Feuille de route 2025

Une nouvelle année est arrivée, le mois d’août australien (également connu sous le nom de janvier dans les terres de l’URSSAF Limousin) touche à sa fin, la convention calendaire dicte qu’il serait temps de voir un peu ce qui va se passer jusqu’à la prochaine naissance du petit Jésus (qui dicte apparemment aux bons petits Américains de cracher à la gueule de son prochain en ce moment).

Que vais-je donc faire de mes heures durement gagnées à la loterie de l’existence ?

La Succession des Âges

Fun fact (ou pas) : ActuSF réalise en début d’année un point sur les projets des auteurs et autrices, m’a proposé de répondre à la question, et j’ai répondu, heu, je suis touché, mais en gros je fais qu’un truc, et à ce stade, je crois qu’il vaut mieux que je ferme ma bouche.

Comme toujours, comme, semble-t-il, depuis l’an 1867, je vais travailler à terminer, ENFIN, « Les Dieux sauvages » avec l’arlésienne tome 5, La Succession des Âges. Le dernier point remonte à novembre dernier, et l’avancée se poursuit. À ce stade :

J’ai quasiment fini de corriger tout le matériel déjà écrit. Il me reste quelques scènes éparses de fils narratifs terminés qui vont se répartir dans la suite du manuscrit et dont je vais m’occuper dans la foulée, tant qu’à faire.

Au fil de tout ce processus, j’ai :

  • Coupé environ 500 000 signes (soit la moitié en volume du tome 2 de la saga ou d’un roman tel que Port d’Âmes…), revenant principalement à travailler l’efficacité narrative,
  • Tout en rajoutant quelques scènes nécessaires à l’équilibre de l’histoire,
  • Et en réécrivant entièrement 1/4 du matériel (globalement, des scènes à la fonction acquise, mais dont j’avais loupé la mise en scène).

Le matériel finalisé équivaut à environ 2,5 millions de signes à l’heure actuelle, soit environ 1200 pages (pour référence, le plus gros tome de la série jusqu’ici, L’Héritage de l’Empire, mesurait 1,8 millions).

Il faut boucler le premier jet. Il me reste un peu moins de deux actes à rédiger, correspondant aux temps finaux de l’histoire, et de la saga entière. J’espère que cela va représenter 800 000 signes (et pas plus), mais donc, c’est du premier jet ; cela va maigrir considérablement à la correction (cf point précédent), et j’espère donc arriver à maintenir le volume final du livre pas trop au-dessus de 3 millions de signes (un bon 1500 pages).

Pour ça, sachant que je reviens en France vers mi-mars pour salons et ateliers et qu’écrire en déplacement est pour moi très difficile, je me prépare à faire chauffer la Freewrite (malgré les déceptions étalées en détail) pour faire un gros sprint et du coup pouvoir passer en mode corrections au plus vite (en France).

En parallèle, il y aura la direction éditoriale. Ma directrice d’ouvrage, la formidable Florence Bury, suit l’histoire de près, et aiguise son mode suivi des modifications pour attaquer le retravail en commun. Ce qui promet d’être un processus long, là aussi, vue la longueur du livre, mais qui, pour ma part, sera comparativement confortable (cette phase est pour moi un travail beaucoup plus léger mentalement que tout ce qui précède, et ça, pour le coup, je peux faire ça littéralement n’importe où – pour l’anecdote, j’avais fini de corriger Le Verrou du Fleuve dans un avion Édimbourg – Paris).

Nous avons déjà un projet de couverture. Le fantastique Alain Brion, qui a réalisé toutes les couvertures de la saga jusqu’ici, reprend les rênes pour ce tome 5. Nous avons déjà un projet, et il est superbe (il est mon fond d’écran depuis que je l’ai reçu). Je ne peux rien montrer, mais à droite, vous avez la preuve qu’il existe… et qu’il ne sera pas rouge.

T’as une date à nous donner ? Très honnêtement, je vais vous faire la même réponse qu’à ActuSF : je ne dis plus rien à ce stade, je préfère vous expliquer l’avancée du chantier au fur et à mesure. Nul n’a mieux conscience que moi que ce tome 5 aura réclamé à lui tout seul un temps comparable à tout le reste de la série, et je ne peux que vous remercier de votre patience. Dans tout ce trajet, il y a eu le COVID, mon émigration australienne, mon mariage, mon déménagement au bout du monde, bref, la vie a aussi demandé que je lui accorde mon attention… et j’ai, très franchement, sous-estimé la complexité de conclure et renouer toutes les trames que j’avais lancées, malgré les idées claires que j’avais à leur sujet.

Tout ce que je peux dire, c’est que j’espère que l’attente vaudra le coup. Mais on y arrive.

Un teaser. Je l’avais envoyé aux abonné·es de la newsletter il y a quelque temps (vous devriez vraiment les rejoindre, je dis ça, je dis rien), voici donc un morceau vers le tout début du roman (en attente de correction éditoriale, donc).

Erwel

Les trois corps se balançaient doucement au bout de leurs cordes en grinçant. Dans cette part désensibilisée de lui-même où Erwel se réfugiait de plus en plus souvent, il songeait que c’était bien la peine d’avoir restauré les ponts suspendus reliant les deux quartiers d’Altaÿs pour venir voir ça.

Par chance, les fissures dans le toit et les murs de la ruine ne laissaient guère de passage aux oiseaux charognards. Seulement au vent humide de l’automne, qui chuintait à la limite de l’audible. Sous les bottes qui flottaient dans les airs, un banc renversé gisait parmi des débris de mobilier. Des paquetages étaient disposés autour de l’âtre où des cendres froides achevaient de fumer, comme si jusqu’à ce matin même, les trois hommes envisageaient tout à fait de rallier la partie sud de la ville pour présenter leur rapport.

Et puis en avaient décidé autrement.

« Ce sont bien eux, grogna le général Freÿs des Forts, appuyé sur sa béquille. Sang-diable. » Il se retourna vers les trois Chevaliers du Fleuve qui les escortaient. « Eh bien, ne restez pas plantés là ! Ne laissez pas Sa Majesté s’infliger ce spec…

— Laissez, Freÿs, coupa le jeune roi d’une voix douce. Ce n’est pas comme si cela pouvait leur faire grand-chose, maintenant. »

Il s’efforçait de se pénétrer de l’expression d’agonie des trois pendus pour éveiller quelque sensation en lui. Leurs yeux exorbités exprimaient l’hébétude, ou bien le regret, peut-être, au tout dernier moment. Les arêtes de leurs visages mal rasés trahissaient la disette. Ils semblaient à tout instant prêts à combattre, épées courtes au côté, plus commodes pour une infiltration en terrain ennemi que les lames bâtardes des weristes. Leurs capes doublées de lapin s’ouvraient sur des brigandines certes usées, mais qui ne portaient aucun dommage. La blessure était ailleurs. Intangible.

« Voilà le vrai visage de l’ennemi, Freÿs, murmura Erwel. Pas le Pandémonium qui occupe Ker Vasthrion, ni même la folie qui le gouverne à présent. Il est là, mon ami : le désespoir. Un accablement si profond qu’il nous persuade de la totale vanité de nos actes. »

Après La Succession des Âges

Lentement, mais sûrement, il faut penser à la suite, hein ? Des tas de trucs sont toujours à l’horizon, mais voici des choses fixées, qui vont monter en puissance au fur et à mesure que je vais passer le relais à Florence pour la correction éditoriale.

Déjà, Procrastination suit son cours. Pas de changement à prévoir de ce côté-là, on planifie la saison 10, la fin de la 9 est presque entièrement enregistrée. Le fait d’avoir, depuis bientôt dix ans, couvert à peu près tous les fondamentaux nous permet maintenant d’aborder des choses détaillées et techniques assez rigolotes, ce qui va arriver assez vite.

Je vais quitter Meta à brève échéance. Ça nécessite un article à part entière, mais l’évolution du monde fait que je refuse de continuer à alimenter ce système. Contrairement à mon départ en 2020, il ne s’agit pas d’un refus en bloc de tout réseau, parce que depuis, Bluesky est arrivé, et je suis très heureux dessus. Le problème, ce sont et cela a toujours été les algorithmes.

Un nouveau « manuel » d’écriture est prévu. Ce sera le projet immédiatement à suivre après La Succession des Âges. Beaucoup plus technique que Comment écrire de la fiction ? Rêver, construire, terminer ses histoires, mais toujours accessible à tout le monde.

J’ai toujours un projet éditorial à l’horizon, non pas au sens maison d’édition, mais direction d’ouvrage. L’éditeur m’attend patiemment depuis des années (merci…) et il va enfin être possible d’y consacrer un peu d’énergie. Faut juste retrouver le matériel de base dans les 150 cartons… 

Projet Moonshot. Les étapes extrêmement préliminaires de quelque chose de potentiellement génial débutent tout juste, mais je ne peux rien en dire, c’est à très longue échéance, et cela a toutes les chances de ne jamais dépasser la phase « extrêmement préliminaire » de toute façon, donc bon. Mais rien que collaborer là-dessus est déjà méga chouette.

Et il y a la musique. De façon réaliste, il est peu probable que je puisse y réserver beaucoup de place en 2025, mais y revenir et l’insérer de façon active dans le quotidien fait partie de mes objectifs importants (et petit bout par petit bout, la construction du studio progresse). J’ai des tas d’envies dans le domaine. Trop.

Mille mercis pour votre suivi et votre fidélité, et on se retrouve comme toujours ici et ailleurs.

2025-01-29T00:09:35+01:00mercredi 29 janvier 2025|À ne pas manquer, Alias Wildphinn|0 commentaire

Freewrite sort un clavier dédié aux écrivains : passez votre chemin

Freewrite, la compagnie qui fait des machines à écrire connectées, sort un clavier destiné aux écrivains, appelé Wordrunner.

On m’a demandé mon avis en ligne, alors le voici : passez votre chemin.

Déjà, Freewrite / Astrohaus ne sont plus dignes de confiance. Comme je l’ai signalé l’année dernière, Freewrite a changé sans prévenir et sans logique aucune la disposition de son clavier AZERTY, et les échanges avec le support technique ont été proprement abyssaux. Leur dernier produit en date, la Freewrite Alpha, n’était pas compatible avec les claviers étrangers pendant un temps beaucoup trop long, montrant que, clairement, la clientèle internationale ne les intéresse pas.

Ensuite, un clavier est une affaire personnelle, et vous n’avez aucune assurance d’aimer celui-ci. Sans parler qu’il est en QWERTY, ce qui exclut d’entrée toute la clientèle non-anglophone.

Enfin, et surtout, les fonctionnalités du clavier sont des gadgets aisément réplicables avec d’autres outils. Mesurez le concept : c’est un clavier indépendant, donc il se branche à quelque chose. Vous savez ce qu’on trouve sur ledit quelque chose ? Des applications qui font le même boulot. Parmi les fonctionnalités :

  • Le chronomètre à pomodoros se remplacera avantageusement par un minuteur ;
  • Le compteur de mots / signes est intégré à Scrivener, Ulysses, même Word ;
  • Les touches fonction pour déplacer le texte ont déjà des équivalents en raccourcis clavier et, connaissant la maîtrise d’ingénierie de la compagnie, il faudra un pilote pesant 800 Mo, bouffant toute la mémoire vive et compatible uniquement avec la version uruguayenne de Word 2003.

C’est un gadget de hipster qui ne sert à rien. Pour une fraction du prix, achetez plutôt un Micro Journal v5, demandez-le en clavier français et branchez le clavier de votre choix dessus. Vous aurez, donc, le clavier de votre choix, l’équivalent d’une Freewrite, un compte en banque encore garni et vous soutiendrez un indépendant adorable et compétent qui, lui, se soucie des besoins de sa clientèle.

2025-01-24T01:53:54+01:00lundi 27 janvier 2025|Technique d'écriture|0 commentaire

Écrire en musique : Eternal Dystopia

Après Void Stasis, et m’être refait une grosse perf’ de State Azure et de Carbon Based Lifeforms (Interloper reste un des meilleurs albums d’ambient ever, j’ai dit), je suis tombé dans un trou de dark ambient entre les recommandations de YouTube et Apple Music, et pour écrire des scènes pas forcément de marrade ultime, ma bonne découverte récente, c’est Eternal Dystopia (un titre qui respire bon la joie de vivre).

Là, on a totalement quitté les terrains mélodiques de CBL qui s’effritaient déjà beaucoup avec Void Stasis pour arriver dans le drone et les paysages sonores microtonaux, ça n’est pas le banger que vous allez mettre au réveillon (encore que, essayez et venez raconter le résultat), mais pour écrire (ou méditer sur la fin du monde et les abysses, je juge pas), c’est extrêmement efficace sans endormir pour autant. Il y a de quoi faire avec une douzaine d’albums sur les services de streaming, et ça vous changera de ce lo-fi sautillant et solaire, là, au moins, on a des nappes en mineur qui fleurent bon la pluie acide sur le béton, bordel.

2025-01-14T01:53:45+01:00mercredi 22 janvier 2025|Décibels|3 Commentaires

Les Inspiriales : un séminaire d’écriture virtuel avec masterclasses, mentorat et entraide

Pour la quatrième année (ça en fait un rendez-vous d’importance !), les Inspiriales de l’écriture se tiendront du 14 au 17 février. C’est un séminaire sur la narration intégralement en ligne, avec

  • Cinq masterclasses données par des pros sur des points précis du métier :
    • Les descriptions et le show, don’t tell (Aude Vivet)
    • Les corrections de manuscrit (ma pomme)
    • La profondeur des personnages (Paul Beorn)
    • L’inclusivité et la diversité (Mary Orchard)
    • Les premières pages (Estelle Faye)
  • Des tables rondes, des débats autour de la profession ;
  • L’occasion d’accéder à du mentorat ;
  • La possibilité de participer à une communauté, de se motiver et d’échanger sur ses joies et difficultés.

C’est un vrai festival littéraire et une formation couvrant des aspects cruciaux de la narration, et en plus, pas besoin de faire ça seul·e ! (Mais vous pouvez aussi faire ça seul·e.)

Plusieurs formules sont disponibles :

  • La possibilité de suivre seulement les masterclasses et tables rondes (tarif anticipé encore disponible jusqu’au 24 janvier),
  • Ajouter un pack mentoring offrant des retours sur les textes et des échanges de groupe.

Les masterclasses sont en plus disponibles à vie pour toutes les personnes inscrites !

Pour ma part, donc je causerai de correction de manuscrits (un sujet dans lequel je suis un tout petit plongé), et ça me fait bien plaisir, parce que je sais combien ça angoisse (y compris des confirmé·es). Alors que ça n’est pas nécessaire : pour ma part, j’adore les corrections, parce qu’une fois qu’on a pris le coup, c’est purement technique. Ce qui est très rassurant, par rapport au premier jet qui reste toujours aléatoire.

Et l’idée, c’est justement de donner la technique ; que vous repartiez avec une méthode précise, pratique, applicable. On parlera de :

  • La bonne attitude à adopter
  • Les trois grandes mécaniques du récit à vérifier
  • Proposition d’une méthode de correction pratique (et éprouvée)
  • Les maladresses d’écriture fréquentes, et comment y remédier

(Oui. Les gros manuscrits, oui.)

Tout le programme en détail avec les deux formules est disponible sur le site des Inspiriales ; allez y jeter un œil, ça couvre un grand territoire des difficultés les plus fréquentes !

➡️ Découvrir le programme et s’inscrire

Mention légale : les liens renvoyant vers l’événement sont affiliés.

2025-01-14T01:53:43+01:00lundi 20 janvier 2025|À ne pas manquer|0 commentaire

Procrastination podcast s09e09 – Devenir professionnel·le de l’écriture (trois récits)

procrastination-logo-texte

Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : « s09e09 – Devenir professionnel·le de l’écriture (trois récits)« .

Le proverbe dit qu’on ne peut se baigner deux fois dans la même rivière, et chaque parcours d’artiste est unique ; mais dans cet épisode, tout le monde dévoile les coulisses de ses débuts, et notamment les premiers contacts, dans l’espoir peut-être d’inspirer ceux et celles qui suivent. Estelle a le début de carrière peut-être le plus proche de l’époque actuelle, grâce à la présence d’Internet ; elle mentionne l’importance des salons dans son parcours, mais rappelle que ce n’est pas non plus une nécessité. Mélanie parle aussi de l’importance des rencontres, mais qu’elles ne sont pas nécessairement difficiles à entreprendre ; beaucoup de contacts se déroulent naturellement, autour de la passion et des goûts communs. Lionel évoque la tradition perdue du fanzinat, et montre combien saisir la bonne occasion qui est offerte peut infléchir le cours d’une carrière, voire d’une vie.

Références citées

  • Le festival Utopiales (et le bar de madame Spock)
  • Le festival Imaginales
  • Le festival les Galaxiales
  • Poppy Z. Brite
  • La revue Ténèbres
  • Fabrice Bourland et la revue Nouvelle Donne
  • Les éditions NestiveQnen
  • Les éditions L’oxymore
  • Léa Silhol
  • Le commandant Cousteau
  • Le festival Étonnants Voyageurs
  • Mœbius
  • Jean-Pierre Dionnet
  • Stéphane Manfrédo
  • La revue Galaxies
  • La revue Bifrost
  • (À cette fameuse table ronde d’Étonnants Voyageurs, Lionel se demande avec le recul si la troisième revue présente n’était peut-être pas plutôt Yellow Submarine)
  • Stéphanie Nicot
  • Jean-Daniel Brèque
  • Lucie Chenu
  • Les éditions Critic

Procrastination est hébergé par Elbakin.net et disponible à travers tous les grands fournisseurs et agrégateurs de podcasts :

Bonne écoute !

2025-01-14T02:00:07+01:00mercredi 15 janvier 2025|Procrastination podcast|0 commentaire

« Les femmes sont la propriété de leur époux », pourra-t-on dorénavant lire tranquille sur Facebook

Oui, c’est le genre de post qui va dorénavant être autorisé sur Facebook, Instagram et Threads. Ou dire « les gays sont anormaux » ou « les jeunes trans n’existent pas ». Dans un mouvement de trahison opportuniste hélas parfaitement cohérent avec l’absence totale d’éthique de Mark Zuckerberg, Meta vient d’annoncer :

  • La fin d’une flopée de restrictions sur les discours haineux, permettant entre autres « toute allégation de maladie mentale ou d’anormalité basée sur le genre ou l’orientation sexuelle »
  • La fin de leur programme de vérification des faits, remplacé par des « community notes » façon X.

Exactement ce dont on a besoin en ce moment à l’échelon planétaire.

Meta est un putain de cancer sur la civilisation, un réservoir de négativité dont le fonds de commerce est basé la polarisation avec ces foutus algorithmes. C’est un mensonge de prétendre que l’on peut tenir des conversations équilibrées et posées sur ces machins : le COVID nous a montré, en temps réel et pendant deux ans, le bordel que ça a été alors qu’il y avait des politiques en place. La manière dont l’engagement fonctionne promeut mécaniquement la désinformation et le contenu d’extrême-droite. C’est le paradis du sealioning. Lever les restrictions, ça signifie mécaniquement promouvoir le sensationnalisme, la bêtise, la réaction immédiate. C’est la fin de la tempérance.

Je n’ai jamais fait mystère que je n’ai jamais vraiment aimé ces plate-formes, mais j’en reconnais l’intérêt, en particulier en vivant à l’autre bout du monde, les comparant à un salon littéraire permanent. En revanche, je ne participerais en aucun cas audit salon si l’organisateur cautionnait les discours comme « les femmes transgenres n’existent pas, ce sont des hommes pathétiquement perdus » (chacun de mes exemples sont pris verbatim de la revue de presse en fin d’article), ce qui est le cas ici.

Je suis devenu écrivain pour, entre autres, être libre de mon discours et explorer les complexités du monde. C’est beaucoup trop de boulot pour, proportionnellement, une rémunération beaucoup trop modeste pour, en plus, accepter de compromettre avec ce que je crois et, même, écris.

J’avais bêtement cru, en revenant sur Facebook et en tâtant d’Instagram, que Meta avait évolué et peut-être compris son rôle social. Non, Meta est irrécupérable, c’est une entité fondamentalement toxique, opportuniste et toute hygiène mentale devrait l’exclure, au même titre que TikTok.

Je ne jette la pierre à personne de vouloir rester sur ces plate-formes parce qu’il ou elle y percevrait une nécessité d’existence (« toute ma clientèle est là, si je m’en vais, je me coupe de mes revenus »). Je pointerais cependant quelques faits tirés de ma propre expérience :

  • J’ai quitté tous les réseaux en 2020. Le tome 4 de « Les Dieux sauvages », L’Héritage de l’Empire, sorti en plein confinement et sans présence réseau autre que celle de Critic, n’a pas souffert.
  • J’ai connu une productivité et un calme sans précédent (rapport à mon métier qui est de, vous savez, écrire).
  • La qualité des échanges que j’ai eus (par la newsletter ou ici) a augmenté drastiquement.

Après, certes, j’ai eu moins d’échanges et de liens au quotidien, mais c’était beaucoup plus réfléchi, profond, intéressant. Donc, satisfaisant pour tout le monde. Ne vaut-il pas parler réellement à cent personnes que crier à dix mille que ça n’intéresse pas ?

Je pointerais aussi que ces plate-formes n’ont que le pouvoir qu’on leur donne et nous leur en donnons collectivement beaucoup trop. Elles sont très douées pour nous faire croire qu’elles sont indispensables, mais je crois fermement qu’il y a d’autres moyens de constituer nos communautés et, même, de constituer un réseau social. Bluesky est un excellent exemple de ça ; le seul réseau qui trouve réellement grâce à mes yeux et que j’ai plaisir à utiliser parce qu’il n’y a pas d’algorithme. Et les premiers retours sont que : certes, il y a moins de monde, mais proportionnellement, on trouve bien plus de clients (si c’est des clients qu’on cherche).

Ce qu’on peut faire

Se barrer en masse, comme de X (une des meilleures décisions de ma vie récente en termes de rapport énergie / bien-être).

Réfléchir aux alternatives, retrouver le bonheur d’une vie sans algorithmes, et les refuser.

Pour ma part, toutes ces informations seraient suffisantes pour me faire partir, à jamais, de tout ce que Meta touche de près ou de loin (comme j’ai déjà évacué avec succès Google et Microsoft de ma vie). Cependant, John Gruber de Daring Fireball, un analyste que je respecte, pourtant farouchement anti-Trump, décode différemment la situation – et c’est le seul truc qui retient ma réaction furieuse. Il tend à dire que les règlementations internationales (en gros, européennes) rendront impossibles ces changements et qu’il s’agirait ici de brasser beaucoup d’air pour un simple exercice de génuflexion devant l’orange bouffie. Ce qui n’est pas glorieux, mais me fait retarder ma décision de dynamitage ; non pas parce que j’aime Facebook et Instagram (non, je déteste ces machins qui me donnent l’impression de tuer quelques neurones à chaque ouverture) mais par respect envers vous, qui y êtes et m’accordez votre intention et votre fidélité.

Je vous ai déjà fait un numéro de « je m’en vais » (en 2020) pour « je reviens » et je suis très conscient du temps que vous-mêmes passez sur ces plate-formes (avec plaisir même, je ne juge personne). Je vous suis très reconnaissant de vos suivis divers, de vos commentaires, de nos interactions. Il n’est pas question que je fasse la girouette ou la diva, et si je m’en vais de nouveau, ce sera pour de bon, en assumant toutes les conséquences1.

Une chose est sûre, il me semble vital, dans le monde où nous sommes, d’attirer l’attention sur ces situations. Si je n’utilise pas la mienne, de plate-forme, pour parler de tout ça, pour rappeler qu’on se tue le cerveau collectivement en se rendant malheureux avec ça, et peut-être, suivant les déroulements à venir, d’agir en cohérence avec moi-même, pourquoi je fais ce travail, bon dieu ? Pourquoi je passe tant d’heures, parfois au détriment de ma vie personnelle, à façonner au mieux de ma compétence des histoires, des personnages qui se battent pour leur destin et leur actualisation ? Si elle l’avait devant lui, Mériane collerait une énorme gifle à Zuckerberg (et l’enverrait au tapis tellement il est tout fragile).

Nous devons inventer d’autres modes, reprendre le pouvoir de notre communication, de notre lien social. Meta a réalisé un hold-up planétaire sur une activité humaine fondamentale tout en la vidant de sa substance ; combien de temps allons-nous encore tolérer de nous polluer ainsi l’esprit ?

Références

  1. Venez sur Bluesky ! Tant que ça dure… mais je crois qu’ils ont compris leur positionnement qui est : « exactement le contraire du reste ». Aller à l’encontre de ce placement serait un suicide commercial, ce qui me donne espoir.
2025-01-12T21:38:06+01:00lundi 13 janvier 2025|Humeurs aqueuses|3 Commentaires

La photo de la semaine : Melbourne sur l’eau

Melbourne se trouve au fond d’une énorme baie d’environ 50 km de diamètre ; par temps clair, sur certaines plages relativement isolées du gros de la ville, on peut voir les tours sur l’eau, ce qui fait un étonnant paysage.

Melbourne on the water
2025-01-07T23:07:57+01:00vendredi 10 janvier 2025|Photo|0 commentaire
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