L’écriture d’un roman est toujours une période particulière, une parenthèse faite autant d’exaltation que d’abattement à vaincre, et je commence à me rendre compte que mes promesses pour le blog mettent toujours du temps à se concrétiser. J’en suis navré, d’autant plus qu’il y en a une qui me tient à coeur, celle de répondre aux questions sur le métier. En voici donc une qui m’est arrivée depuis à peu près deux ou trois éternités, avec mes plates excuses pour ma lenteur, et mon fervent désir d’être plus à jour.
J’ai bien trouvé deux trois choses pour m’orienter dans l’écriture d’un roman. Mais je crois que le plus gros travail reste d’ordre psychologique et prendre suffisamment de confiance en soi pour ne pas jeter l’éponge quand une voix me sussurre : “Laisse tomber, d’autres ont déjà écrit ça mieux que tu ne le feras jamais.” J’envie tous ceux qui n’entendent jamais cette voix et qui peuvent écrire avec leurs tripes sans se soucier de savoir que tout a déjà été écrit. Y a-t-il une méthode pour franchir cette barrière ? Pour enfin faire s’écrouler ce Mur des lamentations ? A force d’y mettre des coups de têtes, peut-être…
Voilà bien une excellente question sur la confiance en soi pour écrire, ainsi qu’un résumé à mon sens très juste de l’essence de ce métier : un mélange d’humilité – pour savoir retravailler, s’améliorer tant qu’on peut, ce qui signifie, au fond, que rien n’est jamais terminé – et d’égocentrisme, car écrire avec une visée professionnelle revient à dire : “j’ai des choses à raconter, et cela va suffisamment intéresser quelqu’un pour qu’il l’achète ».
Eh bien, pas de problème. C’est tout le paradoxe de la chose. Dès qu’on en prend conscience, cela va même mieux, je dirais. Je ne crois pas qu’il y ait de méthode miracle pour vaincre cette ambivalence. Je pense même que le doute, à petites doses, est un aiguillon salutaire pour chercher la qualité et pour ne pas croire que tout ce que l’on fait est génial – un syndrome hélas assez fréquent chez certains jeunes auteurs, ce qui rend impossible tout apprentissage ou tout retravail… Mais, à trop hautes doses, il est paralysant, nous sommes bien d’accord.
Je crains hélas que la réponse – en tout cas celle que j’aie trouvée, pour ma part – soit contenue dans ta question. Prendre confiance en soi, et cela vient avec le travail, l’expérience, la conscience évanescente que l’on parvient de mieux en mieux à atteindre ce que l’on souhaite faire.
Mais au-delà de ça, il y a une réalité réconfortante : seul toi peux écrire ce que tu as à écrire, si tu prends le temps de chercher au fond de toi ta vérité et ce que tu veux vraiment dire. Non, d’autres n’ont pas déjà raconté mieux que toi ton histoire. D’autres ont peut-être déjà traité ce thème, oui – c’est même plus que probable – mais ce que tu peux en faire, ce que tu peux raconter dessus, vient de ta personnalité, de ton vécu, de l’être que tu es, de ton regard sur les choses. Et tout cela est unique, au même titre que tu es une personne unique. Les thèmes sont immensément nombreux mais, à terme, ils représentent l’expérience humaine, le socle de ce que nous sommes, et tu es presque assurément condamné à retomber sur quelque chose de commun. Mais c’est normal. Ce que tu as à dire dessus, par contre, n’appartient qu’à toi. Il faut par contre prendre le temps de le chercher… Et savoir le rendre accessible, le faire partager. C’est là le parcours à apprendre.
En d’autres termes, si l’on s’était arrêté de parler d’amour parce qu’après Tristan et Yseult, tout avait été dit, Shakespeare n’aurait jamais écrit Romeo et Juliette. Toute création se construit sur les épaules des géants qui viennent avant nous. C’est le processus. Nous sommes des créateurs, mais aussi des continuateurs, des explorateurs à avancer en terrain nouveau, le nôte, en permanence.
Un des intérêts de l’imaginaire, c’est qu’on se trouve à défricher de nouveaux thèmes des décennies, voire des siècles, avant qu’ils ne fassent partie de l’expérience humaine. Mais c’est une autre histoire…
“Toute création se construit sur les épaules des géants qui viennent avant nous” : très joli !
Merci pour cette réponse, Lionel. Il ne me reste plus qu’à me mettre au travail en gardant tout cela à l’esprit.
Mes excuses pour cette réponse aussi tardive, Stefan. Je suis en train de remettre mes affaires en ordre…
Aucun problème, Lionel. Quand je vois le retard que je mets moi-même à répondre… et je n’ai pas tes impératifs éditoriaux et l’emploi du temps qui va avec.
Si je peux me permettre, lorsqu’on est jeune auteur, déjà il faut être un peu mégalo, sinon comme il l’est dit dans l’article, jamais on n’arrivera à se motiver assez. Mais aussi faire lire ce qu’on écrit, avec comme but d’avoir des retours, qu’ils soient positifs ou négatifs (mais ils doivent être honnêtes). Car ces retours donnent la force et l’envie de continuer. Dès qu’une seule personne s’intéresse à ce que l’on fait, alors écrire prend du sens.
Moi par exemple, lorsque je termine un texte, je suis juste content de pourvoir le faire découvrir à mes bêta-lecteurs, car ce sont mes premiers lecteurs et pour moi les plus important. Ensuite, les soumissions et le reste c’est une autre histoire.
Une dernière chose. Pour ne pas abandonner, je pense que se lancer dans l’écriture d’un roman alors qu’on est débutant est un mauvais choix, s’entraîner à écrire des histoires courtes est bien plus formateur, car cela permet d’avoir un résultat rapide et de tester si ce qu’on écrit marche ou non en le faisant lire. Même si ce n’est que mon avis.
Je termine en vous félicitant Monsieur Davoust de votre site qui est très intéressant en plus d’être régulièrement mis à jours. C’est toujours un plaisir de venir y faire un tour.
Merci Tom pour votre commentaire et pour avoir partagé votre expérience ! Heureux que le blog vous plaise. Au plaisir de vous revoir par ici 😀
Tiens, histoire de rassurer les djeunes et d’en rajouter une couche : plus qu’on vieillit, plus que le spectre de ce qu’on a pu écrire de vaguement réussi se dresse et se penche sur votre épaule pour vous demander si vous êtes à la hauteur, et si vous ferez mieux, ou aussi bien, ou pas… Les doutes de quand on est jeune, c’est les mieux, profitez-en ! ;-)))))
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Le site est HS chez moi, je suis la seule, ou… ?
ça merdouille ici aussi, alors que je l’ai consulté il y a quelques minutes.
:/
Petite panne de l’hébergeur dans la journée, nprmalement c’est revenu. 🙂
Aaaah oui, merci 🙂