(Rappel des épisodes précédents.)
Encore merci à toutes et tous pour vos bons vœux de rétablissement au fil du temps ! C’est simplement incroyable de voir tant de suivi et de prévenance quand, parfois, on ne s’est rencontrés en vrai que deux ou trois fois (mais qu’on communique largement en ligne – et c’est, vraiment, l’aspect positif des réseaux commerciaux, que j’ai pu retrouver ces derniers temps :).
Merci.
Je refais un peu surface, aussi me disais-je qu’il était grand temps de donner des nouvelles.
La situation est maintenant, en fait assez simple car stabilisée et… longue. J’ai clairement franchi le pire : les médecins sont contents de ma jolie cicatrice en forme de Z à la Harry Potter sur toute la longueur du doigt (et qui me permettra probablement de sentir la présence de Voldemort). L’opération s’est déroulée aussi bien que possible, les points sont enlevés, bref, ça suit son cours.
Sauf que maintenant, le cours est long. Déjà, ça reste diablement pas pratique au quotidien : le doigt est quand même raide comme une brindille toute sèche, mais surtout, le fait d’avoir un nerf sectionné vous rend donc toute la zone insensible, comme une anesthésie qui refuserait de passer. Sauf que c’est sur le côté du doigt, donc toute l’autre zone reste normale – et à la confluence entre les deux, c’est le bordel. Exercer une pression (genre, sur une touche de clavier) envoie toute une foule de signaux d’alerte hyper contradictoires : « cerveau, cerveau, c’est pas normal, on est en train de se brûler / se retourner l’ongle / se couper / ah en fait probablement pas mais steuplaît arrête de faire ce que t’es en train de faire plz plz parce que c’est chelou. » Sans parler du fait qu’il est difficile de jauger de la juste pression dans un effort aussi simple que de lever son verre de whisky pour oublier tout ça, et que parfois, tu te rends compte que tu touches un truc depuis trente secondes avant de t’en rendre compte. Et évidemment, il y a comme un programme en tâche de fond qui s’est installé dans ta tête contre ton gré et qui te rend empoté parce que qu’il te dit : « jamais plus tu ne devras utiliser ta main pour faire quoi que ce soit de plus dangereux qu’un coucou à distance flegmatique façon Elizabeth II ».
Bref : ça se passe aussi bien que possible, mais c’est diablement chiant. Pour vaincre le diablement chiant, il n’y aura d’autre solution que
- Se faire violence (j’ai mentionné dans un article précédent une embûche psychique au long cours, donc il se trouve que ça je sais à peu près faire, j’y arriverai)
- Attendre, pour voir à quel point le câblage nerveux se retisse (avec un horizon de 6 à 12 mois), pour voir quelle mesure de sensibilité reviendra.
Ce que cela signifie pour les projets en cours
J’ai donc perdu du temps avec ces conneries, entre autres parce que, eh bah, ça m’a un chtipeu chamboulé quand même, pour tout avouer, et avec le recul, j’ai mis une dizaine de jours à m’en rendre compte et à pouvoir me secouer ensuite. Cependant, selon toute logique, les projets planifiés (principalement L’Impassible armada et L’Héritage de l’Empire) sortiront aux dates prévues (juin et automne, respectivement), même si on a dû un peu jongler avec les calendriers en interne.
Je reviens timidement sur les réseaux commerciaux et espère pouvoir reprendre une activité plus fournie sur le blog sous peu. Cependant, cette absence forcée a eu un effet bénéfique : comme je ne pouvais alimenter ni l’un ni l’autre, j’ai pris de la distance et me suis donc reconcentré sur les activités de réflexion et production. Ce qui, ô attention surprise et révélation que personne n’a jamais eue avant moi, m’a finalement libéré pour penser à l’écriture, à l’organisation, et me remettre à envisager des choses que je repoussais toujours parce que, eh bien, 168h par semaine.
Cette capacité de concentration a drôlement bon goût, pour tout avouer. Et pour tout avouer, je n’ai pas envie de la perdre. Je préfère prendre deux heures pour produire un épisode de Procrastination, réfléchir à une nouvelle, que de m’écharper en ligne avec des imbéciles qui ont de toute façon décidé qu’ils ne seraient pas d’accord juste pour faire monter leur e-réputation. Encore une fois, merci, Captain Obvious !
Quelque part, j’ai suivi le régime sec technologique recommandé par Cal Newport dans Digital Minimalism, et je suis à présent en situation de réintroduire, petit à petit, les choses dont j’ai été forcé de m’éloigner. Honnêtement, je jette bien moins la pierre aux réseaux commerciaux, qui m’ont offert ce mois-ci les plus belles interactions que j’avais pu avoir dessus depuis belle lurette – merci encore. Par contre, une chose est certaine, je ne reprendrai probablement pas le même niveau d’engagement que j’avais auparavant, parce que, eh bien, les tweets s’envolent, les bouquins restent, et encore une fois, 168h par semaine : où les investissons-nous ? Dans des projets qui nous tiennent à cœur et des interactions de qualité, là voilà la réponse, duuuuh.
(Était-ce la leçon violente que mon corps voulait me donner avec cette blessure, constatant mon incapacité à lâcher-prise, cf l’embûche mentale plus haut citée ? J’évite de faire du finalisme ou de croire à un grand plan ; en revanche, je m’efforce de transformer les pépins en occasions et en leçons qu’ils offrent.)
Ce qui va donc se produire :
Le blog va doucettement reprendre un peu de publication en-dehors des actualités strictes, à commencer par les photos (ça demande moins de doigts en état de marche). En revanche, je ne vise plus, à terme, un article par jour. J’ai lancé ça en 2012, je n’y ai quasiment jamais dérogé, c’était une expérience amusante, et cela m’a permis de constituer un corpus qui pourrait certainement composer trois-quatre bouquins sur l’écriture. Mais il faut savoir évoluer, et j’ai trop de projets en stand-by qui me font envie, qui pourraient toucher un plus vaste public que même un blog en accès libre, pour continuer à m’astreindre à un tel rythme. Le blog ne va nulle part. Mais je vais me réduire à peut-être un article réellement construit et fouillé par semaine, et autrement me décaler davantage vers des choses plus éphémères, parler de processus en cours, peut-être plus adaptées au format du blog proprement dit. L’énergie récupérée partira dans des projets plus construits, davantage de fiction ou même d’ateliers et de cours. Peut-être adopterai-je ici un ton plus intimiste et personnel qu’avant (au sens : utiliser le « je », ce que je m’étais toujours plus ou moins interdit de faire).
Concernant les réseaux commerciaux. Cela fait un moment que je traite Facebook comme un mail – c’est-à-dire, j’y vais deux fois par jour, je réponds, je poste, j’interagis strictement avec les bonnes nouvelles ou pour répondre à des questions si ça peut aider, et c’est fini jusqu’au soir. Je lève maintenant le pied sur Twitter de la même manière. Je ne vais nulle part, mais, malgré ce que ces compagnies essaient très très fort de nous faire croire, le côté « social » du réseau n’implique nullement une disponibilité en temps réel. Je sais que je sors la même rengaine tous les six mois1, mais j’ai, comme vaguement évoqué plus haut, un petit souci avec l’investissement de mon attention2. En résumé : je reste disponible, présent, mais bien moins impliqué. Je disais précédemment que j’avais un nombre limité de mots à ma disposition par jour depuis l’accident ; j’ai aussi un nombre limité de mots à ma disposition dans ma vie tout court – comme nous tous. Ce n’est pas que je snobe le monde – je serai toujours dispo pour discuter avec plaisir et longueur, hors de question que ça change, et pour aider quand je peux – mais il faut choisir ses batailles, et le gros des miennes consiste à raconter des histoires, pas à avoir des histoires, see what I mean.
Gros bisous / hugs / coucous d’Elizabeth II selon notre degré de connaissance / proximité / consentement,
Prenez comme toujours soin de vous, pour de vrai,
Et à très vite pour la sortie progressive de l’ermitage, en vous remerciant comme toujours pour votre patience et votre soutien !
Merci de donner de tes nouvelles, c’est cool de voir que cela va (globalement) mieux !
Merci à toi pour ton petit mot ! 😊
Heureux de lire que ça va dans le bon sens ! C’est rassurant pour le futur 🙂 Je te souhaite une bonne dose de patience et de volonté pour ce voyage au long cours 😉
J’ai hâte de voir ce que vont nous proposer comme contenu intéressants ces doigts désormais balafrés ! (et ce cerveau tout perturbé ^^)
Remet toi bien, toujours un plaisir de te lire 😉
Merci beaucoup à toi ! 😊
Héhé je crains que pour les bouquins, cela ne me donne une perspective beaucoup plus proche concernant certains types de séquelles (et encore une fois, j’ai eu de la chance). Rien ne se perd 😁
Saluons-nous tous à la Elizabeth II, ça serait tellement cool !
(et sinon, toujours toute ma compassion/soutien/etc)
Merci 🐳
J’espère avoir le temps de venir te faire un salut Elizabethien à Rue des livres à Rennes dans une dizaine de jours, il me faut le troisième tome des Dieux Sauvages. Le deuxième était très bien, j’ai hâte de voir la suite !
Merci Johan ! Avec très grand plaisir, ravi que tu enchaînes sur le 3 (qui monte d’un cran niveau épique à mon goût) 😊
Ça promet !!
Contente de voir que ça va beaucoup mieux… mais méfie-toi!! Si tu nous dit qu’après une presque-amputation du doigt la conséquence est que tu vas faire moins de blog et plus d’ateliers d’écriture et de cours… mais je vais aller mettre des tupperware cassés dans tous les magasins de mes auteurs favoris!! (Niark niark niark…)
Attention à force y a pu de doigt 😁
Mais oui, je me dis que je me suis peut-être un peu trop pris la tronche avec le blog ces dernières années, et qu’il peut retrouver un rythme plus à la cool (sans faire de compromis sur le contenu !) Et récupérer cette énergie en « production » au sens large, tout en favorisant plus d’échanges sympas avec tout le monde.
C’est beau de pouvoir prendre ce recul, et d’en parler avec élégance et humour. Bon rétablissement, bon rencentrage, bons livres (mais cela on le savait déjà).
Merci beaucoup Cédric ! J’espère toujours que ce sera bien le cas. 😊
Je suis soulagée de voir que tu remontes lentement mais sûrement la pente de la guérison et que toute la partie chirurgicale s’est bien passée et est derrière toi ^^ La prise de recul des réseaux commerciaux est une excellente chose même si bon ton corps aurait pu choisir un moyen moins douloureux (et sanglant !) pour te forcer à le faire…
Prends bien soin de toi !
Bisous
Merci beaucoup Emilie pour ton gentil message ! Ma foi, si mon corps a bel et bien choisi cette approche, c’est probablement que j’étais un peu trop sourd… J’espère arriver à ne pas oublier d’écouter, cette fois… !
Bisous et merci ! 😊