Excellente question qui revient de loin en loin, et récemment à l’annonce que j’ai tronçonné sauvagement l’équivalent en longueur de La Volonté du Dragon dans le manuscrit de La Succession des Âges : est-ce qu’on verra un jour les scènes coupées en mode bonus ?
Eh bien : mes excuses, mais non.
Deux raisons à cela : déjà, je ne coupe en réalité quasiment jamais de scènes à proprement parler, je remanie, je réécris, je condense, je réorganise, ce qui conduit parfois à dégraisser la moitié du matériel, mais les réelles coupes franches sont devenues très rares. Je n’ai pas de scènes supprimées, donc, à montrer… Il m’arrive en revanche de les réécrire de zéro quand je suis totalement passé à côté de leur angle (c’est justement le cas en ce moment où la v1 de la scène sur laquelle je travaille semblait tout droit sortie de Kaamelott – après un long moment très lourd dans l’histoire, je crois que j’avais besoin de légèreté, mais c’est totalement hors propos dans « Les Dieux sauvages »…), mais la fonction dans l’histoire reste. Je dois juste entièrement réécrire avec une mise en scène, un discours, une couleur différentes.
Ensuite, si ça a dégagé, c’est qu’il y a une raison. C’est que ça n’avait pas d’intérêt pour l’histoire, et, au final, c’est cela que je vise. On attribue à Bismarck que, pour continuer à respecter la loi et les saucisses, il ne faut pas voir comment on les fabrique ; je crois qu’on peut dire la même chose des romans… Si c’était pertinent, ça serait resté dans le bouquin. Comme ça ne l’est pas, je ne crois pas que ça le soit davantage en-dehors, et je trouve l’exercice, pour tout dire, un peu vain.
La seule exception que je ferais à cette règle serait pédagogique. Il pourrait y avoir de la valeur à montrer d’où l’on part et où l’on arrive, en étudiant presque phrase par phrase le raisonnement et les choix conduisant au résultat.
Mais en-dehors de ça, donc, je crains de devoir garder pour moi la scène à la Kaamelott des fromages bénis de Korig le fermier.