L’adage dit que le meilleur appareil photo, c’est celui dont on se sert. Évidemment, c’est notre téléphone ; la machine à selfies et à photos souvenir qui sert davantage à fixer la mémoire qu’à faire de la création pour la plupart d’entre nous. Les appareils dédiés se font de plus en plus rares dans la nature, mais je conserve pour l’animalier un gros machin avec un zoom apte à me faire arrêter au contrôle de sécurité des aéroports : impossible d’attraper ça avec un iPhone, lol :

Keen wallaby
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J’étais longtemps sur un Canon 7D, je suis maintenant passé sur un R7. Je conserve spécifiquement cette gamme au lieu de passer sur du plein format : mon usage principal étant l’animalier, le « crop factor » des plus petits capteurs augmente artificiellement la puissance des téléobjectifs (mon 400 mm, par exemple, est un équivalent 640). C’est pourquoi cette gamme reste au catalogue des fabricants depuis toujours, et pourquoi c’est le boîtier favori des photographes d’animaux et de sportifs (qui, au sens biologique, sont des animaux aussi).

Sauf que, on le sait aussi, la technologie a incroyablement progressé (Apple fait beaucoup de communication sur la capacité « photo » de l’iPhone). Je suis passé sur la gamme Pro des iPhone à l’origine avec le 11 pour m’amuser avec les possibilités offertes, étant à présent sur un 15 Pro Max parce que j’avais envie de jouer avec le grand-angle. Or, quand nous étions dans l’outback en juin dernier et que je me baladais avec mon R7, j’ai enfin saisi à quel point l’iPhone a progressé, mais aussi, à quel point c’est devenu un appareil photo à part entière. (Jusqu’ici, je trouvais ça rigolo, exploitable dans certaines situations, mais je me méfiais à mort du langage marketing : oui, okay, on a tourné tel et tel film avec un iPhone, mais il y a une raison pour laquelle on utilise encore des grosses caméras.)

Ça, par exemple, c’est du #shotoniphone (passé sour Lightroom ensuite) :

Great Central Road
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Les vrais pros se baladent avec deux boîtiers, sur lesquels ils vissent deux types d’optiques différentes, un zoom et un grand angle, par exemple. Mais vu que mon R7 a pour boulot de zoomer, même avec mon grand angle, j’ai été shockay de découvrir que j’avais moins de recul que l’iPhone. Lequel shoote en RAW avec une définition respectable. C’est effectivement un appareil à part entière, aux capacités clairement bornées, mais très compétent pour son domaine spécifique (et même meilleur parfois – j’ai fait à main levée de la photo nocturne qui aurait nécessité un trépied sur un gros appareil).

J’ai donc l’équivalent de deux boîtiers, pour deux usages différents, et je ne m’en étais pas rendu compte. Et visser un grand angle sur mon R7 n’a plus aucun sens : j’ai un truc dans la poche qui fait ce boulot mieux de toute façon. L’iPhone, dans son domaine de compétence, n’est carrément plus un jouet dans la gamme Pro.

Cette prise de conscience me fait également réévaluer mon logiciel de développement photo, et ça tombe à point nommé. Adobe est une compagnie toxique, leurs abonnements sont abusifs, la polémique l’année dernière sur l’entraînement potentiel de leurs modèles génératifs sur le contenu des utilisateurs a soulevé la furie à juste titre, et ils ont encore augmenté leurs tarifs. Je veux les lâcher depuis longtemps, mais pour aller où ? Je suis bien coincé profondément dans Lightroom.

Sauf que, aussi : originellement, j’avais deux bibliothèques photo avec deux rôles clairement identifiés, Apple Photos avec le contenu « personnel » (photos de vacances, pour simplifier) et Lightroom avec le contenu « créatif » (puisque sortant du gros appareil Canon) ou relatif au volontariat écologique (photoidentification). Au fil des années, là encore, je me rends compte que ça n’est plus du tout aussi clair, et cette division est aussi artificielle que malcommode. Un coup je pioche un RAW dans Photos, un coup c’est dans Lightroom… Je passe sour Lightroom, mais je réimporte dans Photos dans mon album « Flickr sélection »… Tout cela est redondant.

Lightroom est puissant, je le connais sur le bout des doigts depuis une petite quinzaine d’années, mais franchement, Adobe et ses abonnements me sortent par les yeux, je vis sans Microsoft, Google et Meta, c’est l’occasion de chercher une autre solution, et de fusionner mes deux bibliothèques en une seule (et je paie de l’espace iCloud que je ne remplis pas).

Alors, quoi ? Setapp m’offre une licence de Luminar, que j’ai utilisé de loin en loin au fil des ans, mais je trouve l’interface bizarre et les résultats sur-travaillés (c’est une esthétique, mais ça ne colle pas pour tout). En ce moment, je tente ma chance avec Photomator, créé par les développeurs de Pixelmator que j’utilise déjà pour l’édition d’images, et qui vise clairement à concurrencer Lightroom en s’intégrant à Apple Photos.

J’ai très envie d’aimer Photomator. Clairement, c’est quand même bien moins puissant que Lightroom. Je perds tous les presets accumulés au fil des ans. Mais l’élégance d’aller directement piocher dans une seule bibliothèque de photos me plaît énormément. Donc, je vais insister et essayer de m’y faire, pour pouvoir virer Lightroom à terme. Pour ce que je fais, Photomator semble « good enough ».

Par contre, Apple a racheté les développeurs… Et on ne sait rien de l’avenir des apps. Je crois cependant qu’il est permis d’être prudemment optimiste : Apple ne rachète pas ce genre d’app pour les tuer ensuite (Workflow a donné l’excellent Shortcuts, par exemple), et il leur manque clairement un successeur à feu Aperture. À suivre.