J’avoue que quand j’ai annoncé le passage successif à une tétralogie, puis à une pentalogie pour « Les Dieux sauvages », je frémissais un peu d’angoisse, redoutant que l’on me reproche de rallonger la saga par pure visée commerciale ; alors que non, c’est vraiment l’histoire qui a dicté sa propre dynamique, nonobstant tous mes efforts de planification. Votre réaction a été incroyablement positive à la première annonce, ce qui m’a énormément rassuré quand il s’est avéré que la série ferait cinq tomes ; c’est donc le cœur absolument léger et sans gêne aucune que je vous annonce mon plaisir d’un nouveau plan pour « Les Dieux sauvages », qui comptera en réalité 23 tomes.
Un nouveau plan
En effet, l’histoire dicte plus que jamais sa propre dynamique, et il m’est apparu clairement, en écrivant La Succession des Âges, tome 5 de la saga et initialement prévu comme le dernier, qu’il subsistait nombre de fils narratifs en suspens à clore. L’écriture présente d’étranges méandres : pour les conclure convenablement, il me faut parfois introduire de nouveaux personnages, de nouveaux lieux, jeter de la lumière sur des zones d’ombre, ce qui appelle à son tour davantage de promesses narratives qu’il me faut boucler à leur tour en un mouvement quasiment perpétuel. Étant donné l’ampleur de la saga, ce n’est donc pas moins de 18 tomes supplémentaires après celui-ci qu’il me faudra.
Mais cela me permettra d’aborder en détail quantité d’éléments qu’à l’origine, je redoutais de ne pouvoir adjoindre faute de place, et j’en suis absolument enchanté ! Par exemple, d’étudier en détail la courantologie du Golfe des Longues houles, et son rapport avec les routes commerciales de Mérogheze, déployant toute une intrigue politico-halieutique pendant la moitié du tome 12 projeté, intitulé La Blêmeur de la Mer ; ou encore de m’attarder sur la modification climatique en Rhovelle induite par la présence de l’Éternel Crépuscule sur la Cordillère Égide, donnant lieu à une passionnante sous-intrigue symbolique du réchauffement global tandis que les bergers de Saracie voient les prairies d’altitude de leurs troupeaux colonisés par du kudzu. Ce sera l’objet de l’intégralité du tome 8, qui s’appellera, bien entendu, La Transhumance des Alpages. Et enfin, devant la popularité de ce personnage, je suis enchanté d’annoncer qu’un volume entier de 880 pages sera entièrement dédié aux états d’âmes de Leopol tandis qu’il n’ose admettre ce qu’il ne sait pas lui-même mais qui représente, il ne sait pas pourquoi mais c’est certain, quelque faute divine : ce sera le tome 15, baptisé, comme il se doit, Le Ratage d’Éconduire.
Lors d’une réunion de travail, les éditions Critic et ma directrice d’ouvrage ont d’ores et déjà répondu d’un sourire crispé à la perspective de passer le restant de leurs jours et peut-être une part de l’après-vie à travailler sur « Les Dieux sauvages », tandis que j’ai quitté la librairie en hurlant d’un rire peut-être un peu trop libre car je n’ai étrangement aucun souvenir des heures qui ont suivi avant de me réveiller encadré d’une équipe d’inconnus extrêmement bienveillants qui avaient peur que je ravive mes vieux problèmes d’épaules et m’avaient donc très obligeamment attachés à un lit fort confortable d’une blancheur immaculée.
Repousser les lois physiques de la reliure
Ce nouveau plan d’action m’a donné d’incroyables libertés créatives ! Après seulement un gros mois d’écriture, j’ai atteint une productivité inédite, me plaçant à une belle moyenne quotidienne d’environ 110 000 signes par jour. J’ai largement dépassé le volume que je m’étais fixé pour ce tome, mais comme je n’ai plus aucune limite humaine et que le sommeil c’est surfait en définitive, cela n’a aucune importance, et puis, à force de retravail, je devrais pouvoir certainement lisser le style et ébarber dans les 800 000 signes inutiles apparus simplement au fil de la plume :
Les éditions Critic, qui m’accompagnent toujours avec enthousiasme et fidélité dans mes projets – je les en remercie ! – ont d’ores et déjà annoncé se mettre en relation avec SpaceX pour mettre au point une reliure en fibre de carbone issue de l’industrie spatiale permettant de publier malgré tout le livre en seul tome, ainsi que nous y tenons. En réponse, Elon Musk a annoncé se mettre d’ores et déjà en relation avec la Loge de la Clé d’Argent pour s’assurer que la distorsion gravitationnelle d’un ouvrage d’une telle ampleur ne risquerait pas d’entraîner des effets relativistes sur l’écoulement du temps ni d’appeler par mégarde quelque divinité extérieure – ce qui serait cocasse, pour une telle saga !
Cependant, la NASA est d’ores et déjà intéressée par un partenariat industriel afin de développer un moteur à distorsion (warp drive). En effet, des résultats préliminaires indiqueraient qu’en attachant suffisamment de volumes de « Les Dieux sauvages » à la carlingue d’un vaisseau spatial expérimental, on peut plier l’espace et donc dépasser la vitesse de la lumière. Et n’est-ce pas la meilleure preuve que la fantasy et la science-fiction sont sœurs de cœur ?
Est-ce que l’adaptation en comédie musicale tient toujours malgré le rallongement ?
Bien sûr ! L’adaptation d’un seul tome équivaut à une représentation complète de L’Anneau du Nibelung. Franchement, ce Wagner, quel manque d’ambition.
Je passais par là quand mes yeux ont ripé sur « 23 tomes ».
Un sourire béat et bien trop niais…, puis une grimace de « WTF », « un génie ! », à « Trop de café et/ou toujours pas dormi ?!! »
Et j’ai laissé mes yeux faire leurs « Z » frénétiques comme quand je lis du Davoust ! 🤯 Pour en arriver à la conclusion « un génie, puis c’est tout. »
J’ai enfin vu la date. Quel coquin celui-là. Toujours à jouer avec la passion du lecteur !
J’ose tout, c’est à ça qu’on me reconnaît. 😁
(Et merci !)
Ok, mais seulement si Critic passe un partenariat avec un fabriquant de meubles et le musée Giger pour faire une bibliothèque au design inspiré des Dieux Sauvages et des Enfants d’Aska !! :smiley clown:
IKEA est déjà sur le coup, avec un nom sorti tout droit de divinités de Lovecraft et des pièces s’insérant selon des angles non-euclidiens.
Très bon plat pour mordre à l’appât !
Bon courage pour retirer les 18 arrêtes^^
Demain, je…
Pas de problème pour les 23 tomes, j’espère juste que ça ne posera pas problème pour la fameuse comédie musicale ! 🙂
Au contraire, on va embaucher des bruitistes compositeurs d’ambient destructurée pour retranscrire la sensation subjective d’interminable au cours de la représentation.
Voilà une superbe idée ! 😀
Que 23 !?!? Remboursé ! Moi j’en voulais 37 ! boude
Je voulais faire 42, mais j’ai rencontré des soucis pour vendre mon âme et écrire après ma mort, personne n’en voulait.
Il y a un côté cathartique à cet article, j’ai l’impression. Aura-t-on le droit dans un des 23 tomes, à l’explication de la magie ? Mais d’un point de vue approfondi, allant jusqu’à des calculs d’entropie (et des différentielles non-linéaires car j’adore ça, je crois savoir que c’est utilisé pour déterminer les mouvements des bancs de poissons), je sais que tu dois avoir quelques notes là-dessus ! 😉
Ah, je ne l’ai pas dit ? Le volume 23 est entièrement composé d’annexes historiques, de diagrammes géophysiques et d’équations quantiques, bien sûr ! 😁
Une icosikaitrilogie, bien sûr. Enfin une bonne nouvelle.
Je suis ravi que tu sois allé cherché le terme exact ! 😁