Julien Assange, le très poursuivi et controversé rédacteur en chef de Wikileaks est actuellement au centre d’un conflit diplomatique opposant l’Équateur et la Grande-Bretagne. Les premiers lui accordent l’asile politique, ce qui n’est pas du tout du goût des seconds, qui menacent de répliquer par une intervention armée.
Évidemment, ça fâche.
Nous souhaitons être très clairs, nous ne sommes pas une colonie britannique. Le temps des colonies est terminé […] Si l’intervention mentionnée dans le communiqué officiel britannique se produit, elle sera considérée par l’Equateur comme un acte inamical, hostile et intolérable, ainsi que comme une agression contre notre souveraineté, ce qui nous obligerait à répliquer par les moyens diplomatiques les plus fermes. – Source
C’est dans l’air que les inégalités sociales, les disparités de rémunération, les répercussions de la crise économique, les horreurs générées par le capitalisme sans contrôle, la haine envers l’Occident née de la misère forment un très dangereux cocktail qui monte doucement vers l’ébullition et des paroles de « révolution » ou de « guerre » ne se trouvent plus seulement prononcées par les alarmistes.
Quand je vois Assange détenu par un État souverain et qu’un autre menace ni plus ni moins d’une violation de celle-ci pour récupérer un homme qui – à tort ou à raison, c’est un autre débat – a poussé à l’extrême l’idéal de libre circulation de l’information, je frémis. Je me rappelle qu’un autre type est mort assassiné il y a presque un siècle et que, par le jeu des alliances, cet événement tragique mais relativement isolé a plongé l’Europe dans une guerre atroce. Assange symbolise un enjeu majeur du début du XXIe siècle, celui du contrôle de l’information. Car, selon les mots d’Orwell, « qui contrôle le présent contrôle le passé ; qui contrôle le passé contrôle l’avenir ». Cela va bien au-delà des questions de propriété intellectuelle ou du fantasme de geek ; il y a les colossaux enjeux économiques liés au contrôle de l’information personnelle du citoyen (qu’on constate le succès de Google et Facebook, deux régies publicitaires, pour mesurer leur poids), la tentation du contrôle et du fichage des citoyens par les États, même démocratiques, sous couvert d’épouvantails rhétoriques. Assange ne peut pas rester impuni. Sans même parler d’éthique et en constatant les faits seuls, il est la faille dans le système, l’épine dans le pied, une faille qu’il faut écraser, effacer, au risque de saper l’ensemble des édifices politiques actuels.
C’est trop gros, et pourtant. Une part de moi-même ne peut s’empêcher de souhaiter ne pas assister à un fragment d’histoire en train de s’écrire. Que le symbole controversé qu’est Assange et les actions irréfléchies des États ne forment pas le prétexte à l’explosion tant prophétisée du cocktail et déclenchent une cascade de dominos comme en 1914 avec l’assassinat du pauvre archiduc Ferdinand qui ne se serait probablement jamais douté que sa mort conduise des États prétendus civilisés à la guerre. Qu’en 2090, un gosse comme moi cent ans avant ne s’interroge sur la cause incroyablement stupide d’une boucherie, preuve de la sottise humaine – une espèce qui a manifestement besoin de se baigner dans son propre sang pour apprendre des leçons.
Des leçons pour lesquelles sa mémoire semble toujours tristement courte.
Merci Lionel. Je ne savais pas qu’il y avait eu des menaces d’interventions armées.
Quand ils auront fini de jouer à celui qui a la plus grosse, on pourra s’intéresser aux choses sérieuses… Assange n’est rien, juste un mec qui fait son intéressant, les réactions sud-américaines, dont celle, outrée, de Hugo Chavez me fait bien rire, lui qui ferme les médias d’opposition (tiens, d’ailleurs, ça ne fait jamais la une de Libé, ça…) pour les remplacer par des médias à se botte. Oublions Assange, laissons-le dans son ambassade et occupons-nous des choses graves et urgentes.
Très juste.
j’arrive juste pas à comprendre la syntaxe du titre de l’article x_x
Ah je me disais bien aussi, ce n’était pas JUSTE le manque de café. -_-
Ah, Joyeux Drille. L’argument des priorités. Le gars peut juste perdre la vie parce qu’il révèle des trucs que les gouvernements élus démocratiquement refusent de dévoiler à la populace. C’est vrai, qu’est-ce qu’une vie humaine au regard de la crise, bien réelle, ici, qui touche nos filles et nos compagnes…
Ah oui, Assange a découvert la raison d’Etat, quel scoop ! Qui connaissait Wikileaks avant que les USA cherchent des poux à Assange ? Et qui cela peut-il intéresser ? L’ignorer aurait été la meilleure solution plutôt que de lui offrir une tribune permanente. Pour moi, Assange ne vaut pas mieux que les gens qu’il dénonce et je déplore, comme bien des gens actuellement, ses indignations à géométrie variable.
« Qui connaissait wikileaks avant que les USA cherchent des poux à Assange ? » Vous étiez sur Mars ?
Non, simplement je m’en fous, les barbouzeries ne sont pas les priorités de mon existence.
Laurent xD
*adore ces gens qui disent « De toute façon j’ai mieux à faire que ça » et qui passent quand même un quart d’heure à ouiner en commentaires de statut Facebook*
Joyeux Drille, jusqu’à ce que vous en soyez la victime, un jour, peut-être.
Et merde à la raison d’état. Une démocratie c’est le peuple qui dirige. Pas ses élites sous couvert d’élection bidons.
Mais je suis déjà victime, depuis ma naissance : j’appartiens à une espèce insensée qui chaque jour m’écoeure un peu plus par ses comportements consternants. Cette humanité moribonde n’a aucun sens…
@ Raphael Aj : le peuple, j’en prends le pari, si tu l’interroges, n’a aucune idée de ce qu’est Wikileaks !
Joyeux truc, il y a plein d’endroits chouettes pour ne pas subir la « moribonderie » de ton espèce : j’ai le regret de t’informer que Facebook n’en fait pas partie.
Donc, si je comprends bien, tu es favorable à la démocratie, à condition que tout le monde soit d’accord avec toi et que les autres se taisent ? Ca donne envie !:
Non, tu comprends mal.
Julien Morgan, je viens de bloquer Joyeux Drille. Tu peux en faire de même en visitant son profil. Du coup, je ne vois plus ses commentaires.
Et n’essaie pas de lui expliquer ce que tu penses, il s’en fiche et n’est qu’un troll. Bien gras.
Je n’ai jamais bloqué personne sur Facebook. Moi, j’ai foi en l’humanité 😀
Les gens dont le seul but est de faire perdre du temps en discussions stériles ne m’intéressent pas. Je bloque maintenant. Pas souvent, mais ça m’arrive. Je n’aime pas TF1, je ne la regarde jamais (sans télévision c’est facile) alors pourquoi ne pas faire pareil avec les gens?
Alors, on est à égalité : tu as mal compris mon propos également. Ce qui me gêne, c’est qu’il y a en terme d’indignation deux poids, deux mesures et je trouve ça dommage. D’abord, parce que ceux qui s’indignent le font souvent pour des raisons idéologiques et (mais ça n’engage que moi) ça me gêne, car à mes yeux, toute idéologie est dangereuse. Quant à la foi en l’humanité, j’ai, hélas, 5000 d’histoire et des compléments quotidiens qui ne m’incitent pas à l’avoir. Je le regrette, je fais plein d’efforts pour ça, mais non, vraiment, l’être humain, je n’en peux plus… Merci pour cette discussion, j’espère qu’elle en amènera d’autres, avec plein d’arguments de part et d’autre et la capacité à laisser de côté ce que nous sommes et ce que nous pensons, juste pour s’intéresser au fond des problèmes. Car rien n’est tout blanc ou tout noir, comme nous avons l’air de le dire. C’est plus complexe et c’est pour ça que c’est passionnant d’échanger.
J’aime bien proposer un article sur la nécessité de désarmer un peu et de penser plus loin que l’escalade des conflits et que ça s’échauffe en commentaires…
N’hésitez pas à continuer à débattre, mais prenez soin de rester civils. 🙂
Sinon, y’a toujours la réserve.
Il y a trop d’hétéros pour faire l’amour, alors on fait la guerre, que veux-tu.
Comme le débat est chaud je veux commencer par dire que j’exprime sincèrement mon avis en toute humilité, et que les questions que je pose ne sont pas simplement rhétoriques.
Je réagis d’abord sur une parole, du genre qui a tendance à provoquer des réactions épidermiques chez moi : « Mais je suis déjà victime, depuis ma naissance : j’appartiens à une espèce insensée qui chaque jour m’écoeure un peu plus par ses comportements consternants. Cette humanité moribonde n’a aucun sens… »
Quand tu insultes « l’humain », tu t’insultes toi-même, il me semble. Tu n’es pas une victime, tu n’es ni plus bas ni plus haut, tu fais partie de cet ensemble. Ou alors tu n’insultes qu’un concept, sans réalité propre, simplement un outil de pensée. Et là ça n’a pas de sens. D’autre part : l’idéologie est dangereuse, j’en conviens. Mais l’absence d’idéologie ?… Je ne suis même pas sûre que ce soit possible ; en société, j’entends. Et puis on ne peut pas dénigrer une idéologie parce qu’elle en est une, je veux dire, une idéologie c’est un système de valeurs, et est-il possible de vivre sans valeurs, aucune ? Alors oui, chacun réagit selon ses valeurs propres. C’est peut-être potentiellement dangereux, mais le contraire ne serait-il pas une preuve d »indifférence ? (dans tous les sens du terme, absence de sentiment, et fait de considérer toutes choses comme égales et sans importance particulière les unes par rapport aux autres)
Pour en revenir à l’article, je me suis passionnée pour cette affaire ces derniers jours, je suis sûre que quand cela sera terminé, on en fera des films. En tout cas pour ma part je soutiens Wikileaks, le fait de passer au-dessus de la soi-disant « raison d’état » pour que tout le monde puisse voir à quoi ressemble une guerre aujourd’hui. Pour citer encore Orwell, sur la vidéo de la bavure en Irak par l’armée américaine, il y a cette citation que je trouve plutôt parlante pour ce sujet : « Political language is designed to make lies sound truthful and murder respectable, and to give the appearance of solidity to pure wind. »