Cela faisait quelque temps que je me montrais mystérieux concernant des projets en cours, je peux à présent l’annoncer : j’ai joint mes forces avec le prestigieux Massachusetts Institute of Technology, et nous avons trouvé, conjointement, l’ultime solution à tout problème de procrastination, que nous sommes en mesure de vous dévoiler dans le cours de cet article.
Le contexte
Ma série d’articles de l’été dernier sur la productivité a obtenu un fort retentissement à l’étranger, notamment auprès du professeur Hildefons Labarrière, d’origine germano-québecoise, excellent locuteur de l’anglais, du français et du hongrois. Il dirige le Département des Études Chronologiquement Contrariées (Department of Retarded Studies) au MIT et m’a proposé, à l’automne dernier, cette collaboration. Selon ses termes :
Les écrivains symbolisent un champ de bataille extrêmement précieux dans notre domaine d’études : hantés par le chaos et l’absurdité, ils s’efforcent toute leur vie de donner forme à ces impulsions qui les dirigent, sans se rendre compte qu’ils sont voués à la défaite. Il nous était donc particulièrement intéressant de travailler avec M. Davoust et avec l’illusion qu’il peut donner un semblant d’ordre à sa vie, alors que c’est clairement perdu d’avance.
L’étude
C’est sur la foi de ces paroles élogieuses que j’ai donc voyagé jusqu’à Massachusetts, la ville du prestigieux institut, pour me soumettre pendant trois mois à toutes les expériences conçues par le professeur Labarrière et son équipe. Il s’agissait d’étudier mon activité neurologique à l’aide d’un casque de dernière génération (ci-contre) dont les électrodes, au contact de mon crâne, fournissaient des relevés d’une grande précision :
Tout était prêt depuis des années ; les protocoles, l’équipement. M. Davoust n’est pas le premier auteur à s’imaginer qu’il peut échapper au fléau de sa profession. Le problème, c’est que les écrivains, ces créatures vaines, se préoccupent souvent de leur santé capillaire. Il va sans dire que la calvitie absolue de M. Davoust a constitué un critère de premier choix pour l’adopter comme sujet d’expérience : les électrodes, au contact direct de sa peau, ont fourni des résultats sans précédent.
Le protocole consistait, très simplement, à enregistrer mon activité cérébrale et à la mettre en corrélation avec ma lenteur de mise en travail dans une variété de conditions imposées, comme par exemple :
- Privation absolue de café
- Après une nuit hachée toutes les deux heures
- À l’issue d’un repas nourrissant ou, au contraire, constitué exclusivement d’endives à l’eau
- En fonction de l’heure de la journée, de la quantité de luminosité disponible, du bruit ambiant
- Au contraire, travail des mécanismes de récompense : un verre de whisky chaque fois que je passe sur Facebook (si j’ai pu vous sembler incohérent ces derniers mois, ce n’est pas moi, c’est l’Oban)
- En me jetant une rondelle de saucisson tous les 1000 signes écrits
- En me passant du Christophe Maé dès que ma vitesse de frappe tombait en-dessous des 2500 signes à l’heure
Donnant, par exemple, des graphes d’activité comme suit :
Le résultat
Les conclusions de l’équipe du professeur Labarrière sont, à l’image des plus grandes avancées scientifiques : à la fois révolutionnaires et d’une simplicité limpide dans leur approche, tels la mécanique quantique, le calcul différentiel ou la relativité générale. Après deux mois de relevés soigneux et d’écriture (pour ma part) dans toutes les conditions possibles (dans un congélateur, au fond de l’eau sans bouteilles, suspendu par les pieds au-dessus d’une fosse à lions, conditions dans lesquelles ma productivité était maximale puisque, pour 1000 signes écrits, on me relevait de dix centimètres), la conclusion est simple :
Pour cesser de procrastiner, il faut s’y mettre.
« Nous pensons que notre découverte, assidûment documentée et fouillée, ouvrira de nouveaux horizons productivistes au monde moderne, en stimulant des environnements où l’on s’y mettra pour de bon, par exemple à l’aide de fosses à lions ménagées au rez-de-chaussée des immeubles de bureau pour y jeter les salariés coupables de procrastination régulière. On allie ainsi le meilleur de la science moderne à la tradition séculaire : les Romains savaient déjà, dans un contexte de paix sociale, faire un usage créatif des lions », s’enthousiasme le professeur Labarrière.
À cette fin, alors que l’équipe scientifique apporte la touche finale à l’article qui sera publié dans Nature, je prépare un livre rassemblant le coeur de cette conclusion, sous la forme d’une page unique facile à lire, bientôt disponible en librairie pour un prix qui, m’a-t-on d’ores et déjà assuré, sera sous la barre des dix euros.
C’est bien beau de faire avancer la science, mais est-ce que c’était pas un petit peu un moyen de ne pas écrire d’Evanégyre pendant trois mois ?
Ah non alors ! J’ai même pas eu le temps d’aller au bout du premier paragraphe !
t’as loupé le coche! en ce jour spécial je pensais que tu fêterais l’anniversaire du mariage de l’Empereur romain Stultus avec un dauphin prénommé Pisces
On connait trop peu cette histoire. Et la belle statue où il s’est fait représenté nu chevauchant son épousée <3
Haha, jolie histoire, merci. On voit d’ailleurs déjà à l’époque la confusion dauohin / poisson et ces bestioles fantastiques un peu irréalistes (dauphins à moustaches!)
J’lirais ça demain.
C’était un appel du pied, mais tu es trop modeste… T’en pis, je le ferai pour toi : la cour de justice internationale a enfin déclaré la pêche des baleines pour raisons scientifiques pratiquée par le Japon illégale. Et tu as eu ton rôle là-dedans. C’est trop peu relayé en France mais profitant d’une faille juridique Lionel et d’autres activistes – notamment ceux de l’asso Aarluk – ont épousé « légalement » des baleines de la zone de pêche, un triste hasard a fait que la première a être pêchée était celle de Lionel, qu’il avait prénommée « Ketosa » (de Ketos gros animal aquatique en Grec). Il a ainsi pu entamer une procédure pour assassinat volontaire, démarche qui a attiré l’attention des média anglo-saxons et favorisé la prise de conscience qui a abouti à cette décision.
Ketosa n’est pas morte en vain, Lionel.
Le professeur Hildefons Labarrière ouvre la voie à tout un champ de possibles.
joli …
WE NEVER FORGET. Quand la fin de temps viendra, quand les astres seront propices, je descendrai à R’lyeh l’endormie, et retrouverai Ketosa, pour danser parmi les ombres vertes des grands fonds, alors que la Terre des hommes sombrera sous les vagues.
(Et sinon, oui, ce serait une excellente nouvelle, mais je crains que ce soit une baleine d’avril…)
(( il était cruel ce poisson d’avril là, j’y ai cru jusqu’à ce que je me rende compte de la date… ))
J’y ai cru jusqu’à ce que je cherche un lien officiel pour répercuter la news 🙁
tout pareil 🙁
Pareil ici 🙁
Euh attendez, ça date du 31 mars et ça a l’air crédible, ça… http://www.bbc.com/news/world-asia-26818863
o_O
So it’s real? FOR REAL?
Merci pour l’info! 😀 Yattaaaa
Le Monde a l’air de confirmer… http://www.lemonde.fr/japon/article/2014/03/31/le-japon-somme-d-arreter-la-chasse-a-la-baleine-dans-l-antarctique_4392902_1492975.html
http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/03/31/chasse-a-la-baleine-une-decision-historique-avec-des-repercussions-mondiales_4393111_3244.html
Bon, j’arrête le spam, je crois que c’est clair 🙂
<3 merci et chapeau bas Nadège ;)
Fact-checker à votre service 🙂
J’y croyais, puis j’y croyais plus, puis j’y recrois pour de bon 😀 Ouiiii merci Nadège Fact-Checker 😀
Mais de rien ^^ ça va, pas trop dur l’ascenseur émotionnel ?
Tant qu’il finit en haut tout va bien 😉
YESSSSSSSSSSSS !!!! J’ai retenu ma respiration pour le 1er avril, mon moral est redescendu d’un coup… et hop !
J’y ai cru jusqu’à ce que tu dises que le calcul différentiel est « d’une simplicité limpide dans [son] approche » : il n’y a rien de plus abscons, ça ne pouvait être qu’une blague.
Ahah, ça a tenu quelques paragraphes quand même 😉