(Si au moins ma mésaventure permet d’illustrer la différence entre les deux termes…)
Merci. Merci infiniment pour votre déluge de commentaires, courriels, tweets, messages concernant ma blessure signalée la semaine dernière. C’est fou ! Merci pour vos bons vœux, vos idées, suggestions. Je suis toujours “empeiné” comme on dit en Charente-Maritime, donc toujours incapable de faire plus que m’efforcer de tenir les engagements minimaux pris, mais l’urgence du moment étant passée, voici un message global pour expliquer ce dont il est question de manière plus détaillée (je récapitule aussi par rapport à la semaine dernière).
Il y a dix jours, donc, nous étions partis pour acheter, entre autre choses, des boîtes alimentaires en verre dans une grande surface (communément appelées Tupperwares dans la langue de Boris Johnson). Les dites boîtes étaient rangées hors de vue dans le rayonnage, et l’une d’elle était, sans que je puisse le voir, brisée en deux.
[Attention, explication légèrement graphique à suivre – mais toujours moins grave que ce que pouvez lire dans La Messagère du Ciel…]
Au moment où je l’ai prise, l’étiquette apposée sur le fond a agi comme un levier et la partie brisée est venue frapper de tout son poids mon annulaire gauche, suscitant a) douleur b) terreur c) repeignant au passage le rayonnage en couleurs chaudes à tous les sens du terme.
Bon, alors, vous savez les jets d’hémoglobine qu’on voit parfois dans les films, genre la scène du chevalier noir dans Sacré Graal ? Ils existent, j’en ai rencontré un, quand l’opératrice radio a enlevé le bandage de compression pour s’assurer que je n’avais pas de bouts de verre coincés dans la plaie (occasionnant de ma part le plus gros “OH FUCK” que j’aie jamais gueulé de ma vie, parce que, eh bien, ça vous fait un truc quand même). Verdict :
Bonne nouvelle : les tendons ne sont pas touchés. Je peux toujours (théoriquement, parce qu’en ce moment c’est pas mon activité favorite favorite) plier le doigt, au moins un peu.
Mauvaise nouvelle : le nerf a donc été coupé net. Il a fallu une opération de microchirurgie pour le recoudre (j’ai maintenant une découpe qui fait tout le côté du doigt de la forme de la cicatrice d’Harry Potter). Le saviez-vous ? Nous avons deux nerfs le long de chaque côté responsables de la sensibilité de nos doigts. Je n’en ai plus qu’un et demi – en gros – puisque celui qui a été coupé risque de ne jamais retrouver sa pleine sensibilité, et encore, sous 6 à 12 mois maximum. Je vous avoue que c’est pas trop le fun neuronal dans mon annulaire qui ne comprend actuellement rien à ce qui lui arrive : le moindre contact sur la partie lésée est à la fois insupportable et étouffé, comme si toute la zone avait été brûlée vive. Je découvre chaque jour des mouvements à éviter parce que sinon c’est comme quand tu te cognes le coude dans le rebord de ta table mais puissance cent – il s’avère qu’un nerf recousu n’aime pas trop qu’on le dérange. Fun times. Retrouver une part fondamentale de cette sensibilité est cependant indispensable, notamment pour chaud et froid, histoire que, si je me brûle précisément à cet endroit, je m’en rende compte avant de me demander pourquoi ça sent le cochon grillé en plein hiver. Avouez que ça serait ballot.
Suite des événements
Déjà, ma participation aux événements et salons n’est pas, pour l’heure, remise en cause ; ne comptez juste pas sur moi pour faire un Jungle Speed. Mais comme je le disais plus haut, mon temps de frappe est donc grandement réduit (parce que tout prend au quotidien des plombes à faire, et notamment qu’écrire avec une seule main est beaucoup plus long). Cela implique de faire des choix : le blog est donc suspendu pour un à deux mois à l’exception des actualités, le temps de réévaluer ma situation, tout comme les publications et participations sur les réseaux commerciaux (qui se résumeront au mieux à des likes et des RT, désolé). Je m’efforcerai quand même de donner des nouvelles ici de l’avancée des choses. Ma correspondance devra se limiter aux engagements professionnels, ce n’est pas que je vous snobe, encore une fois, c’est que le clavier est littéralement mon mode d’expression principal à longueur de journée et que je n’ai qu’un nombre de mots de fini (et réduit) à ma disposition par jour, et que je vais devoir les réserver en priorité aux bouquins (en espérant arriver à tenir les délais). Et en plus il se trouve, curieusement, que réfléchir clairement avec un nerf en court-circuit est vachement plus difficile qu’il n’y paraît, dites-donc.
Vous avez été très nombreux.ses à me suggérer la dictée et je vous en remercie, mais je dois insister sur le fait que ce n’est pas applicable dans mon cas (j’avais hélas dû un peu faire l’expérience il y a cinq ans). Je ne peux pas écrire comme je parle et inversement. Mon écriture (surtout romanesque) s’apparente davantage à de la sculpture qu’à une formulation finale de la moindre idée : j’écris un bout de phrase, un autre, comprends comment le paragraphe va peut-être s’orchestrer, m’aperçois qu’il faut une information à mettre avant, je mets des mots en ordre de marche jusqu’à trouver le bon, etc. Je réfléchis autant que je rédige quand je tape, jusqu’à parvenir à ce qui sera le premier jet. (D’aucun.es disent que je parle aussi comme ça. C’est vrai. Bref, à moins qu’il existe Dragon Unnaturally Speaking In Riddles, le clavier et ce bon vieux TextExpander restent mes meilleurs alliés.)
Vous avez aussi été plusieurs à remarquer que la responsabilité du magasin était engagée. Un peu, mon neveu, à 200% (on récapitule : j’ai mal, peur, un doigt en mousse qui restera probablement en éponge, je suis handicapé dans mon activité professionnelle et ma vie quotidienne). Les contacts ont été pris, les preuves sont irréfutables, les diagnostics en noir sur blanc, mais on va d’abord commencer par discuter de manière civile, parce que je trouve qu’il faut toujours commencer par discuter de manière civile et on va essayer de s’arranger entre grandes personnes.
Quelques mots pour conclure :
- Si vous avez la chance d’être entièrement valide, prenez un instant pour le savourer. Même si on le sait intellectuellement, on ne comprend pas viscéralement le nombre de petits privilèges dont on bénéficie à chaque instant quand tout va bien, ni à quel point le monde est conçu pour des gens avec deux mains en ordre de marche (je prends mon cas) avant de les perdre. L’accessibilité, c’est bien, et ça concerne tout le monde.
- Mon respect renouvelé à tou.tes ceux et celles qui luttent contre des affections chroniques, quelle qu’en soit la nature. Je suis amoché, c’est hyper chiant au quotidien et il est possible que j’en garde des traces indélébiles, mais ça aurait pu être bien pire et j’en ai tout à fait conscience : j’aurais pu perdre un pouce entier. Compassion, chaleur et, je le répète, mon immense respect à vous toutes et tous qui gérez avec bien plus compliqué : vous êtes des gachte de héros et d’héroïnes.
- Le prochain jeune (ou moins jeune) auteur qui me dit la gueule enfarinée qu’il ou elle ne peut pas trouver du temps pour écrire risque peut-être bien de se prendre, avec bienveillance et amitié, une gifle. Si vous voulez écrire, vous le faites. Parmi les héros et héroïnes sus-citées, il y en a beaucoup dans le monde de l’imaginaire, qui construisent leur œuvre malgré les embûches du corps et de l’esprit1. Si vous avez la chance d’être en parfaite santé, faites le choix de faire les choses qui comptent. Et cela peut commencer par : reconnaître la peur au lieu de la fuir, pour chercher à l’apprivoiser, pour l’empêcher de vous retenir dans l’accomplissement de vos rêves. Mais faites-le aujourd’hui, pas demain. Car tant qu’on n’aura pas vendu notre âme à Google X, tous nos jours restent comptés.
- Et à ce sujet, j’ai aussi une embûche de l’esprit – je n’en ai jamais parlé parce que c’est mon problème et que je le gère avec moi-même, mais je débats de plus en plus de la possibilité d’en parler, non pas pour moi, mais parce que ça peut peut-être aider du monde. Et au cas où ça ne serait pas clair, je ne me considère nullement comme les héros sus-citées – je suis juste un mec qui fait son truc dans son coin. ↩
Gifle bien de la main droite, quand même 😛
Oh si.
Tu fais aussi partie des héros. Tous les héros sont des mecs et des meufs qui font leur truc dans leur coin, en le faisant le mieux possible.
D’autant plus si t’as une embûche de l’esprit.
Take care of yourself, l’esprit de l’Orque-en-ciel veille sur toi.
Je plussoie tellement tes “Si vous avez la chance d’être entièrement valide, prenez un instant pour le savourer” et “Mon respect renouvelé à tou.tes ceux et celles qui luttent contre des affections chroniques, quelle qu’en soit la nature.” On ne s’en rend compte que quand on est atteint d’une manière ou d’une autre, et la nature humaine étant ce qu’elle est, on a vite tendance à l’oublier dès que l’on est en bonne santé à nouveau…
BTW, je ne sais si “Dragon Unnaturally Speaking In Riddles” existe (j’ai un GROS doute ^^), mais maintenant tu sais quoi demander à des amis programmeurs ^^
Bref. Bon courage et bon rétablissement à toi ! Et bonne écriture aussi (surtout !) 🐬🐨🦘🐬
Je suis soulagée d’avoir de tes nouvelles ! Le bilan est mitigé mais au moins la mécanique n’est pas touchée, de ce que je comprends tu pourras te resservir de ton doigt mais pas avant une longue période de convalescence ponctuée de douleurs incessantes.
Je compatis et t’envoie mes meilleures ondes océaniques pour un prompt rétablissement. Et comme tu es un vrai héros, ça va guérir en moins de 6 mois. Si si !
Et sinon pour la dictée, est-ce que au moins tu ne pourrais pas t’en servir pour la correspondance justement ? Histoire de diminuer la pression et la douleur pour les mails et autres textes secondaires.
Bon courage à toi Lionel pour ces mois qui s’annoncent difficiles mais dont tu sortiras vainqueur, j’en suis persuadée.
Bisous
Emilie
Tu as tellement raison de souligner combien nous avons la chance d’être en bonne santé et/ou être en mesure d’écrire… Je pense souvent à toi et je t’envoie toutes les pensées positives et imaginables… Gros bisous !
Ça fait plaisir de voir un *gachte* dans un texte de blog! On sait d’où tu viens^^
Comme beaucoup de choses, la bonne santé nous manque quand elle nous quitte et on regrette de ne pas lui avoir dit combien on l’aimait.
Heureux d’avoir de tes nouvelles, même si tout n’est pas des plus réjouissant.
En effet, lorsqu’on est en bonne santé, on a pas conscience de l’incroyable chance qu’on a, et en prend hélas conscience quand la santé en question se met à deconner.
Alors ne remettez pas à demain ce que vous avez envie de faire aujourd’hui, parce que la vie est jonchée de saletés sous forme de Tupperware ou autre qui vous guettent sournoisement..
Bon courage à toi, j’espère que vous allez trouver un arrangement civil pour compenser les dégâts causés par cette incident sur ta santé et ton outil de travail.
Merci à toi de nous tenir au courant, et bravo encore pour ta combativité et les messages que tu transmets même dans ces moments difficiles : you’re an hero, Sir.
Bon courage pour tout, l’humour ca aide, mais au quotidien c’est probablement pas le fun (le coup du coude, c’est trèèès parlant). Oui la santé c’est naturel jusqu’à ce qu’on ne l’ait plus (j’ai fait un peu les mêmes réflexions à ce sujet ces derniers mois, je passerai les détails et je compatis aussi avec les maladies longues et chroniques, accessoirement invalidantes). Bref, boldly go et tant qu’on a pas de Docteur McCoy ou autres sous la main pour réparer des nerfs sans douleur, fais attention à toi. Je te souhaite aussi que tout se passe au mieux dans les démarches avec le supermarché. Parce que quand même…
J’ai l’habitude de sous-mariner mais vu le sujet de l’article, je me fends d’un petit commentaire pour te souhaiter un bon rétablissement. C’est le genre de blessure qui demande beaucoup de patience (je sais de quoi je parle ^^) et tu ne sauras qu’au bout de plusieurs mois, peut-être un an, les séquelles réelles – s’il y en a ! les chirurgiens font quand même du super boulot de nos jours, on ne le mesure pas toujours. Donc ne te décourage pas si pour le moment le moindre mouvement est pénible, l’état de ta main va évoluer doucement mais sûrement. En attendant, je croise les doigts (désolée, il fallait bien la placer celle-là 😉 ) pour que ton nerf parvienne à se régénérer au maximum. Bon courage, bonne guérison et, si tu en passes par là, bonne rééducation !
Je suis désolée pour toi. J’espère que tout se passera bien !
MERCI à vous toutes et tous pour vos mots et vos encouragements ! Je reprends un peu corps avec la civilisation, merci pour vos retours d’expérience, et vos bonnes vibrations. Je voudrais vraiment pouvoir répondre à tout le monde individuellement, pour vous faire un gros hug, et vous remercier comme il se doit de votre soutien à toutes et tous. Je vais essayer de reprendre des activités un peu normales cette semaine, on va voir ce que ça donne… en tout cas, MERCI, et merci à vous qui êtes passé.es par là de vos récits.
Prenez bien soin de vous !