Viens, mon pirate. Viens, et assieds-toi, qu’on discute. Cela me démangeait depuis longtemps qu’on ait une petite conversation, toi et moi. C’est toujours un peu difficile de te parler, ou de parler de ce que tu représentes, sans susciter des levées de boucliers ou risquer de voir, pour citer Kipling, mes paroles « travesties par des gueux pour exciter des sots », mais je crois avoir enfin compris, après notamment un séjour en monastère bouddhiste : il ne s’agit pas de t’agresser mais de te parler franchement, parce que l’expérience prouve que, finalement, nos métiers sont assez mal connus, et il y a peut-être, tout simplement, des choses que tu ignores.
Alors, du coup, viens, mon pirate, viens, et assieds-toi, qu’on discute.
Je viens récemment d’apprendre qu’un autre de mes bouquins avait été piraté et se baladait en téléchargement libre. Je voudrais t’expliquer aujourd’hui pourquoi cela ne me fait pas plaisir, pourquoi cela ne fait pas plaisir à mes éditeurs. C’est assez simple : nous vivons dans une société marchande, laquelle fonctionne selon le principe suivant : un travail ou un bien sont fournis, celui qui en bénéficie paie en échange. Cet argent sert d’abord à la personne qui fournit le travail ou le bien à vivre, ensuite à pérenniser son activité.
Dans l’activité du livre, il y a moi, l’auteur, évidemment, mais pas seulement. Il y a l’éditeur, qui prend le risque financier de faire fabriquer le livre et de le distribuer ; qui fait retravailler l’auteur sur son manuscrit pour qu’il soit le meilleur possible. Il y a l’imprimeur, qui réalise l’objet physique. Il y a le libraire, qui permet au public de se procurer l’ouvrage, le conseille à ceux et celles qu’il peut intéresser. Et bien sûr, il y a le diffuseur, qui place les livres dans les points de vente, qui pousse commercialement un ouvrage. On pourrait mentionner aussi attaché de presse, traducteur pour l’étranger, etc. Je te renvoie sur cet article expliquant le fonctionnement de la chaîne du livre.
Quand tu lis un livre, de la fiction dans mon cas, tu en retires quelque chose. Du divertissement, du plaisir, peut-être une ou deux réflexions – tu en retires quelque chose, sinon tu te livrerais à une activité différente, comme jouer à la PS4 ou regarder Netflix1. Du coup, quand tu bénéficies – que tu jouis, au sens économique – de mon travail sans contrepartie, tu casses la chaîne. Je t’ai fourni du plaisir, du temps que tu as passé à lire mon livre, mais non seulement tu ne me rémunères pas en échange, mais tu ne rémunères pas non plus tous mes partenaires économiques qui aident à pérenniser cette activité : éditeur, diffuseur, libraire, etc. Tu fragilises notre activité à tous.
Pire, si tu fais circuler l’ouvrage, tu permets à d’autre de rompre également cet engagement, propageant l’attitude comme un virus.
Il me semble que je joue pourtant le jeu. Ce blog existe depuis huit ans, j’y fournis régulièrement et sans contrepartie aucune des articles fouillés sur la technique de l’écriture dans l’espoir d’aiguiller de plus jeunes auteurs que moi ; il y a des textes en accès gratuit et en diffusion libre sur la page idoine ; j’ai pris et continue à prendre fermement position contre Hadopi, contre le verrouillage d’Internet, contre la loi Renseignement, pour le revenu global universel etc. (voir mon historique sur les réseaux sociaux) ; j’ai fait partie des premiers auteurs en France à construire une plate-forme web pour maintenir le lien avec les lecteurs qui soit plus qu’une simple vitrine publicitaire. Je suis un ami d’Internet.
Quand tu fais circuler gratuitement mon travail sur Internet, tu n’aides pas à « le faire connaître », tu ne contribues pas « à la culture », comme je l’entends trop souvent. Cesse, je t’en prie, de te raconter de belles histoires sur ton rôle. Tu triches, c’est aussi simple que ça, et tu nous fais du mal à tous. Tu mets en danger un métier (auteur) et un secteur (l’édition) qui n’en ont, crois-moi, pas besoin. À tout le moins, s’il te plaît, assume. Tu jouis d’un travail pour lequel tu n’as rien déboursé ; si tu tiens à le faire, sache ce que tu fais, fais-le en connaissance de cause, sache que tu triches, et aies-en bien conscience.
Maintenant, je sais ce que tu vas me répondre. Passons en revue tes arguments habituels, veux-tu ?
Oui, mais la culture est trop chère.
C’est vrai qu’un livre, un jeu vidéo, un film, ça représente un budget. Je pourrais te répondre qu’un bon livre épais te donnera – à l’exception de quelques jeux très longs – bien plus d’heures de plaisir que n’importe quel autre média pour un prix somme toute modique, mais tu pourras quand même répliquer que tu n’as pas les moyens. Ce à quoi je me permettrai de te répondre que l’État met en place des structures en triste désaffection, cela s’appelle les bibliothèques publiques. Et que si ton budget est vraiment serré, il y a probablement des aménagements supplémentaires tendant à la gratuité d’accès. Pour un coût inférieur à un grand format, tu peux lire, visionner à ton envie – je te défie d’épuiser une bibliothèque de quartier en un temps raisonnable – et le plus beau, c’est que c’est intégré dans la chaîne du livre et que tout le monde est rémunéré. Profites-en, et ton problème est réglé.
Oui, mais il n’y a pas ce que je veux.
C’est-à-dire, pas le genre ou pas les oeuvres ? Toute bibliothèque propose aujourd’hui une diversité de genres et si tu ne trouves rien à te mettre sous la dent, permets-moi de te trouver un peu de mauvaise foi. Après, si tu veux des oeuvres en particulier, j’ai juste une question à te poser : tu aimes tant un auteur ou un univers que tu es prêt à pirater pour en profiter ? N’est-ce pas une étrange preuve d’amour : désirer à tout prix lire un livre particulier, mais ne rien fournir pour aider à sa pérennité ? Cet auteur, et par extension tout le circuit économique qui le soutient ? Combien de temps crois-tu que cet auteur et cet univers que tu aimes tellement pourront continuer à te fournir le plaisir que tu désires dans ces conditions ?
Oui, mais je ne veux pas payer si cher.
Je suis navré, mon pirate, mais l’économie de la culture est ainsi faite que les marges de tout le monde se réduisent et qu’il faut que chacun puisse vivre. Ce n’est pas le piratage qui va arranger les choses, au contraire, parce qu’il contribue davantage au manque à gagner. D’autre part, je suis navré de te rappeler qu’encore pour l’instant, dans notre monde, c’est celui qui vend qui décide du prix, calculé en fonction justement de sa rentabilité. « Ne pas vouloir payer si cher » n’est pas un argument commercial valide – enfin si, il l’est : il conduit à ne pas acheter et à se tourner vers la concurrence. Tu es parfaitement libre d’avoir recours aux bibliothèques susnommées ou d’acheter un autre livre. Dire « j’aurais acheté ce livre à cinq euros de moins » revient à la même tricherie que plus haut, et ne représente qu’une belle histoire de plus que tu te racontes pour te justifier en reportant la faute sur l’économie, sur l’éditeur, sur la conjoncture. Dans les faits, tu triches avec les règles du jeu.
Oui, mais je télécharge juste pour tester, si ça me plaît, j’achèterai le livre.
Je te renvoie à l’argument précédent : dans la société marchande, cela ne fonctionne pas de la sorte. Est-ce que tu paies ton billet de concert à la sortie ? Ton pain après consommation ? Il n’y a que dans la culture qu’on considère cette attitude comme acceptable, mais elle ne l’est pas, là encore. Si tu as lu le livre, même si tu as passé un mauvais moment ou qu’il ne t’a pas entièrement satisfait, tu l’as malgré tout fini, tu en as joui au sens économique, et si tu ne fournis pas la contrepartie, tu triches là encore. Quand bien même tous ceux qui téléchargent d’abord paieraient ensuite, une telle pratique représenterait pour tous une avance de trésorerie intenable en particulier pour les petites structures – celles-là même qui te fournissent autre chose que ce contenu formaté pour le plus grand nombre qu’en général, en plus, tu proclames détester…
Oui, mais il faut que la société change.
Alors là, mon pirate, je suis entièrement d’accord avec toi ; j’aimerais qu’on instaure un revenu de base inconditionnel, qu’on prenne en compte le vote blanc dans les scrutins, qu’on supprime les inégalités salariales homme-femme et qu’on prenne des engagements forts contre le réchauffement climatique, entre autres. Puis-je toutefois te demander, mon pirate, pourquoi tu engages ton noble combat social en t’attaquant à son secteur chroniquement le plus faible, la culture ? En sapant les fondations de ce qui, justement, pourrait aider à faire circuler ces idées importantes, de ce qui est le moins bien armé pour se défendre politiquement et économiquement, parce que la culture constitue toujours la huitième roue gouvernementale d’un carrosse qui n’en comporte de toute façon déjà que trois ? Ce changement social que tu appelles de tes voeux, tu ne crois pas qu’il se produirait plus vite et de façon plus productive si tu t’attaquais à de vrais lobbies, de vrais représentants de la société marchande susnommée (quand la culture ne fait que la subir), si tu te livrais à de vraies actions ? Excuse-moi de te demander ça, mais est-ce que, genre, tu ne te raconterais pas un peu de jolies histoires de rébellion quand tout ce que tu fais, c’est regarder Game of Thrones en streaming posé dans ton canapé avec une pizza ?
Mais donc, tu es contre les bouquinistes, alors ?
Il faut que je réponde à ce point parce qu’il revient toujours : absolument pas. C’est assez surprenant de voir une telle confusion des notions : je parle de l’oeuvre et de sa jouissance, et de la filière économique qui repose dessus et lui donne une diffusion ; pas du support matériel qui résulte à terme de cette activité. Un livre acheté est un bien physique qui appartient pleinement à son propriétaire et dont il peut disposer comme il le souhaite2, le détruire, en jouir puis le revendre, l’exposer dans sa bibliothèque, etc. Un bien matériel, par définition, s’use et donc connaît une dépréciation qui forme une des bases du marché de l’occasion. Le consommateur peut choisir entre un bien déprécié ou un bien neuf et c’est ce choix qui articule les deux marchés. (Cela ne fonctionne pas avec le livre électronique en revanche, voir cet article.)
En conclusion
Mon pirate, tu triches. Quelle que soit la manière dont tu tournes le problème, tu triches ; tu décides volontairement de te placer hors des règles économiques pour ton bénéfice. Ce faisant, tu nuis à tous ceux dont tu apprécies le travail, en plus de fragiliser tout le secteur où ils œuvrent, car les contractions structurelles sont contagieuses ; elles se propagent à tous les acteurs et limitent la marge de manœuvre (et donc de créativité !) pour tous.
Tu n’oeuvres pas pour la culture, mais contre elle, car tu ne joues pas son jeu. Cesse, je t’en prie, de te raconter qu’en contribuant à sa libre diffusion, tu l’aides. C’est tout le contraire. Si tu veux que les règles de la société marchande changent, permets-moi de te suggérer de t’attaquer à de vrais adversaires, à ceux qui tiennent les clés du système : ce n’est absolument pas la culture. Sinon, ce ne sont que de belles paroles et des prétextes.
Tu triches et tu nous fais à tous du mal. À tout le moins, s’il te plaît, aies-en conscience et sache ce que tu es en train de faire.
- Un mot de clarification hélas nécessaire pour les quelques nouveaux arrivants sur ce blog qui montent ici sur leurs grands chevaux en s’imaginant que je place la littérature au-dessus du reste (haha, lol). Je suis auteur de fantasy et compositeur pour le jeu vidéo : par nature, je m’inscris moi aussi dans le divertissement et donc exactement dans ces mêmes autres industries. Lire mes bouquins se place justement au même niveau que regarder Netflix (auquel je suis aussi abonné) ou jouer à la PS4 (que j’ai aussi). Si quelqu’un n’aime pas mes bouquins, il fait autre chose au lieu de perdre son temps : l’offre de divertissement est pléthorique. S’il en reste, c’est qu’il en retire quelque chose, au même titre qu’on retire quelque chose (nommément, du plaisir, en premier lieu) de Netflix ou de jouer à la PS4. ↩
- À l’exception des reventes de service de presse, mais c’est une autre histoire. ↩
Bonjour Lionel,
Un dernier «argument» : aujourd’hui, je suis passé au 100% électronique pour mes lectures quotidiennes, pour tout un tas de raisons probablement discutables (mais le débat n’est pas là aujourd’hui). Je possède tout un tas de livres physiques, hein, mais je préfère désormais ce support notamment grâce à sa praticité dans les transports en commun. Quid donc des oeuvres dont on possède déjà le bien physique, et qui ne sont pas disponibles en version électroniques, d’une part, et pour ceux qui le sont, d’autre part, quelle peut être la justification de repayer le travail de certains dans cette chaîne qui n’ont pas eu plus de boulot pour la version électronique que pour la version papier ?
A te lire !
Dans un premier temps, la morale dicte que tu te limites à ce qui est disponible en numérique. Le véritable levier économique, c’est l’achat ; si les lecteurs se déportent massivement vers l’offre légale au lieu du piratage, c’est-à-dire : s’ils créent une véritable valeur dans ce marché émergent et démontrent qu’il y a un véritable manque à gagner à en être absent, alors on verra plus d’éditeurs s’y intéresser ! Tant qu’il génère un manque ou du moins la peur de celui-ci avec le piratage – ce qui plutôt le cas actuellement – alors il n’y a pas d’intérêt économique à « y aller » (ce qui crée un vide problématique d’où découle aussi le piratage, j’en suis bien conscient).
Plus pragmatiquement, dans un monde parfait, on aurait certes le numérique pour aller avec le papier (ce qui se pratique déjà dans la musique, mais il a fallu des années pour y arriver, et encore, uniquement auprès des grandes plate-formes, ce qui n’est pas idéal), pour éventuellement un surplus modique. Le jeu de rôle commence le pratiquer (mais il faut se rappeler qu’un ouvrage de jeu a vocation de référence après avoir été lu de façon plus ou moins linéaire). Je pense que des développements intéressants en ce sens sont à réfléchir.
Je me suis déporté massivement vers l’offre l’égale, je commence à avoir une jolie collection de livres électroniques achetés sur le play store. Je viens de regarder les chiffres, effectivement, c’est pas aussi significatif que je le pensais, le livre électronique ne représentait en 2014 que 4.1 % du CA des éditeurs, il semblerait que je sois un cas à part 🙁
NB : je n’aurai effectivement à titre perso rien contre le fait de payer un supplément pour avoir la version électronique en sus de la version papier, et je ne discute absolument pas le fait que le prix du livre électronique à sa sortie soit le même que celui de la version papier.
Des éditeurs ont tenté ça, et en fait…. les lecteurs n’achètent pas. Soit ils prennent la version papier, soit la version numérique, mais pas la version avec supplément.
Hello,
Des éditeurs ont tenté ça, et en fait…. les lecteurs n’achètent pas. Soit ils prennent la version papier, soit la version numérique, mais pas la version avec supplément.
Est-ce que tu as une référence de ce que tu avances ?
Perso je n’y crois pas… ensuite, c’est évident que si les éditeurs facturent +25 ou +50 % pour avoir la version numérique en plus de la version papier, ça ne passera pas. 🙂
Dans le cas des offres couplées papier + numérique, la loi française du prix unique interdit de faire des réductions. Tu dois donc payer le prix du livre papier + le prix du livre numérique.
Ce qui n’est pas, avouons-le, très intéressant.
on peut troller et parler du mp3 dans ce cas alors ?
l’industrie musicale (en général, merci de me pardonner les écarts de langage) n’a pas forcé sur le mp3 parce qu’il inquiétait de par sa possibilité de partage (oups, de piratage pardon). le livre ne ferait pas le même calcul ?
Non, on ne peut pas troller, ou alors à ses risques et périls. 🙂
Certaines revues ou certains « petits » éditeurs des SFF commencent à proposer, pour l’abonnement à leur titre ou l’achat papier, le fichier numérique correspondant. On peut citer ainsi la revue Galaxies, peut-être aussi les éditions du Bélial’ (à vérifier) et le Club Présences d’Esprits est en train d’y réfléchir pour son zine du même nom… Il y en a sûrement d’autres. Bizarrement, ce sont les petites structures qui sont les premières à « se mouiller, encore une fois…
;o)
Peut être parce que l’aspect légal pose un souci et que les petites structures n’ont pas autant de liens contractuels avec des diffuseurs ou des distributeurs.
Il y a le frein du prix unique du livre (contrainte légale globale ) et le contrat avec le diffuseur numérique qui lui n’aime pas ne pas recevoir de sous.
Après, je suis à 100% pour avoir l’epub quand j’achète le papier !
Le numérique gratuit en plus de l’édition papier, ce n’est pas possible, légalement, en effet. Le Belial avait tenté en 2010 de faire une offre « version papier + version numérique pour 2€ » et lors du bilan 2011, ils avaient constaté que ça n’avait intéressé qu’une personne.
2010, pour le livre numérique, c’est limite de la préhistoire…
Le prix unique du livre est toujours là, et puis justement, le principe de l’offre couplée, c’est typique d’une offre transitoire. Ceux qui sont passés au numérique ne sont pas très intéressés par du papier, et ceux qui sont attachés au papier ne vont pas payer 2 euros de plus pour un fichier dont ils ne feront rien. Je trouve que c’était très bien de la part du Bélial que de tenter l’expérience. Ils l’ont fait pendant 2 ans, je crois, avant d’arrêter. De toute manière, la part du numérique chez eux augmentait et continue d’augmenter, sans avoir besoin de ce type d’offre. (Et cela leur évite le casse-tête comptable, puisqu’il faut verser des droits différents, parce que les pourcentages ne sont pas les mêmes)
Olivier Paquet Dans mon propre cas, j’aime les livres fait de papier, surtout lorsqu’ils sont bien fait (ce qui exclus les poches basique) mais je lis énormément dans les transports, donc en numérique. Je viens de recompter, sur deux ans, c’est 76 livres que j’ai acquis en numérique et en papier. Heureusement qu’il y a des promos sur le numérique ou des éditeurs arrangeants. Mais souvent, j’aurais prix pour 2€ de plus sans hésiter (et aussi pour les autres livres que je n’ai qu’en papier).
Je sais bien que c’est compliqué pour peu de gens intéressés, je comprends donc que ça ne soit pas du tout la priorité des éditeurs. Je pense que la loi peut changer pour laisser la possibilité de vendre le numérique seul ou l’offrir aux acheteurs du papier.
Tu as très bien pointé une grande part du problème « ce qui exclut les poches basiques », les gros éditeurs vivent du poche, et si les lecteurs réagissaient tous comme toi, une bonne partie de cette économie péricliterait.
Je pense qu’inévitablement, le poche va fondre au profit du numérique. Pas aussi vite qu’au US qui a déjà bien entamé le changement, mais je pense que les lecteurs nés au XXIe siècle n’achèteront plus de livres de poche dans une gare.
sur présences d’esprits on a lancé le truc aussi pour voir, parce qu’on est curieux, combien de gens ça intéresse
Il manque quand même quelque chose dans ce type d’argumentation : le piratage est une source de modification de l’industrie en général.
Dans le manga et l’animation japonaise, les délais de traduction se sont réduits, on assiste même à la diffusion simultanée avec le Japon, pour de la VOST.
Il reste cependant pas mal de rigidités qui sont autant de gifles pour le public : le zonage des DVD/Blu-Ray, l’impossibilité d’avoir accès à tout un catalogue de titres au niveau mondial, aussi bien en musique qu’en e-books, etc.
Le piratage de la musique est en train de devenir un épiphénomène avec le streaming, les gens ne « possèdent plus » leur musique, mais cela n’est pas au plus grand bénéfice des artistes.
Je suis persuadé qu’il existe des moyens pour que le piratage diminue, en revanche, je doute que cela améliore la condition des artistes pour autant.
Concernant l’industrie du livre, en France, les plus gros éditeurs se sont mis d’accord pour empêcher le développement de l’e-book, en pratiquant des prix scandaleusement élevés afin de garantir l’économie du poche. Etre favorable au numérique ne signifie pas que l’on doit favoriser ce type de pratique. Et on ne parle même pas de tous ces livres épuisés, qui soit sont repris par ReLire, soit sont piratés.
Il y a un vrai problème de type industriel, face auquel la morale ne peut rien.
Aussi. Mais il y a un intervalle entre « l’industrie doit changer » et « je triche sciemment ». Souvent, dans l’esprit du public, le premier sert trop facilement de justification morale au second. C’est un problème.
Sans le piratage, l’industrie n’aurait pas changé. D’une certaine manière, heureusement que le piratage existe, il a bénéficié au public.
Le piratage de masse cible bien souvent cette industrie anti eBook, les éditeurs pratiquant l’eBook sans DRM et prix raisonnable sont bien moins piratés, voir pas du tout.
Prenons le cas du Belial et de Bragelonne, très peu de piratage (hormi les pur et dur).
par contre FolioSF/Denoel sont bien représenter sur les réseaux pirates.
Il en va de même pour les éditeurs non présent en numérique comme Critic, le piratage est là par manque d’offre. (oui ils changent lentement de politique, mais ce sera trop souvent du différé si j’ai bien compris)
Quid des éditeurs 100% numériques, sans DRM et qui sont piratés quand même ?
Présenter le piratage comme une force nécessairement positive est aussi inepte que de dire : « C’est nouveau c’est donc bien. »
Je suis pour le développement du numérique à prix raisonnable, je pense que ce n’est pas un secret. Après, quand on parle d’un prix du livre, il y d’autres éléments à prendre en compte que l’absence ou la présence de numérique réactif et pas trop cher, pour dire qu’un livre est accessible ou non au plus grand nombre. Pour Folio SF, on parle d’une collection de poche, pour l’essentiel, c’est-à-dire de petits formats qui ne coûtent pas un bras, y compris pour ceux qui n’ont pas de liseuse. Faciles à commander dès qu’on a une connexion internet. Dès lors, l’argument du « c’est pas dispo » ne tient plus trop, je trouve.
Le numérique est le poche de demain, mais le lecteur ne comprenant pas la dynamique grandformat/poche, il attend une sortie numérique simultanée au prix du poche. C’est la plus grande dissonance éditeur/lecteur à mon sens
Et même, si on achète plein plein d’un bouquin, gros succès, il sort en livre de poche et il est moins cher. Et youpi ! (enfin, j’espère que je ne dis pas une grosse boulette)
SI, c’est ça 🙂
Pour qu’un bouquin sorte en poche, il faut en général qu’il se soit bien vendu en grand format.
bon, après, faut être altruiste. Perso, je rachète rarement en poche un livre que j’ai déjà en grand format…
Pareil. En revanche, vu que je conseille beaucoup les livres que j’ai aimés, l’argument « et il est en poche » est essentiel.
Et comment on a sa dédicace sur un livre piraté, hein, hein ?
je teste souvent les auteurs dont je ne connais pas leurs productions en numérique légalement (si on est attentif on peut trouver des livres supers pour pas cher) et je me fais offrir les autres livres soit pour Pâques ou pour Noël par contre un auteur français (ou étranger) mort depuis belle lurette et dont les droits sont libres je prends la version gratuite
Pis faut arrêter, au bout d’un moment, un livre, ce n’est pas si cher que ça ! On dépasse rarement, en grand format, les 20€, peanuts si on compare aux smartphones, au budget essence, repas, sorties, aux paires de chaussures, etc. (dit la fille qui n’aime ni les fringues, ni les voitures, ni les jeux vidéos, ni… et qui consacre l’intégralité de son budget loisirs aux bouquins)
Euh, pas d’accord, mettre 20€ pour un Davoust ok. Par contre, mettre 20€ pour un Marc Lévy c’est horriblement cher ! D’ailleurs, on devrait me payer pour que je le lise
Pas tout à fait d’accord. Les grands formats, (donc chers) c’est un vrai souci en jeunesse, par exemple.
Acheter un livre GF, ça va. Quand tu lis beaucoup ça commence à chiffrer fort (dit la meuf avec un loyer parisien qui refuse de trop compter la bouffe et n’a pas franchement de budget loisir hors livres ni de voiture). L’an dernier j’ai dû acheter genre 4/5 GF à plus de 15€ en neuf et pourtant le budget livre était déjà assez lourd à mon goût ^^’
Bah la solution se trouve dans les médiathèques, en attente de la sortie en poche pour beaucoup d’entre eux. Chez moi, je possède des tas de séries (GoT, tout un tas de Bordage, du Ken Follett) en poche, que j’ai emprunté à la médiathèque en grand format parce que je n’avais pas la patience d’attendre.
Et je ne dis pas que 20€, c’est anodin, je ne suis pas assez riche pour ça. Mais le prétexte du prix est souvent fallacieux, dans le cadre du téléchargement illégal.
Merci, ma caille ! 🙂
Une argumentation bien construite 🙂
Je me pose une question : a-t-on estimé l’impact du piratage, le manque à gagner que cela entraîne pour la chaîne du livre ? J’ai toujours pensé que cet impact était minime dans ce domaine, mais je me trompe peut-être !
Permets-moi de soulever un autre point. Il y a un « problème » dans la production culturelle actuelle : elle est colossale ! Et ceci même au sein de genres très spécialisés. Je prends un exemple tiré de la musique. Je suis une fan de black metal. Sans des trucs comme Youtube, il me serait strictement impossible d’avancer dans ma connaissance de ce genre (et pour le coup c’est pas à la médiathèque que je pourrais trouver des albums, ou à la limite Dimmu Borgir, Mayhem, enfin les têtes de gondole du black, quoi ;)). Il est vrai que le modèle est sûrement différent pour la musique que pour les livres. Les livres, tu peux pas en avoir un aperçu sur Youtube et faire ensuite ton petit marché. C’est pour ça que j’aime beaucoup quand les éditeurs mettent en ligne les premières pages du livre sur leur site, ça permet de se faire une bonne idée du contenu et voir si on a envie d’aller plus loin ou pas. Il fait ça ton éditeur ?
En fait, avant, on écoutait les albums chez son disquaire, c’est ça, le souci…
Maloriel : Les éditeurs le font souvent, et en tout cas j’ai une section Téléchargements bien remplie.
Sinon, YouTube paie des droits aux créateurs à la Spotify… Ce n’est pas mirobolant mais c’est quand même plus légal.
Intéressant comme billet Yoze ! Quel parallèle tu ferais avec les formules d’abonnement pour la VOD type Netflix ou Canal Play, qui entendent concurrencer le streaming ??
Une étude récente montre que Netflix a fait chuter le piratage aux US. Après, le problème en musique et en littérature (Spotify et Kindle Premium par exemple) c’est que la rémunération de créateur est encore plus misérable.
Bonjour Lionel,
Je ne sais pas si je suis le « ton pirate » de quelqu’un – pas le tien en tout cas, je découvre ton blog (avec plaisir).
Etant des 2 côtés du miroir – comme une majorité de gens en fait je suppose, ça m’est arrivé – et ne le nions pas – ça m’arrive encore – de regarder des séries américaines téléchargées ici ou là, tout en étant moi-même développeur et me faisant donc de temps en temps copier des applications par des sagouins sans vergogne.
De mon point de vue, il n’y a pas de bonne réponse en fait. On peut zoomer sur tel malandrin qui va copier tel machin dématérialisé en se faisant le chantre de la morale … En oubliant de regarder nos impôts qui servent aussi à financer des films que personne ne va voir. On peut zoomer sur des petits-enfants qui n’en glandent pas une pour la société et qui veulent continuer à profiter de la rente de grand-papa décédé il y a 40 ans. (Et puis c’est vrai que si je peux mettre à l’abri du besoin mes enfants grâce à ce que j’ai pu réaliser pendant ma vie je ne vais pas dire non…)
Je suis absolument pour que chacun soit rémunéré à la juste valeur de son labeur- et pour ce que j’en lis, toi aussi. La culture et le numérique en général sont un sac de nœuds inexpugnable où les pires ordures / les grands gagnants sont tout de même ceux qui ont les moyens de s’offrir les meilleurs avocats. Ce ne sont que les reflets de la société en général : sanctionner la masse des petits tricheurs serait le plus rentable (les millions de sardines qu’on essaie d’attraper avec des filets faits pour attraper les mille requins), en même temps chacun à son échelle fait moins de « mal » que les quelques milliers d’individus qui sont eux bien plus nuisibles à vouloir abuser du système dans l’autre sens (lobby du cinéma, gros éditeurs aux pratiques frauduleuses de type vente forcée, etc). Il est une certitude : les perdants ce sont nous, les petits créateurs.
Beaucoup de questions restent sans réponse : Faut-il une licence globale ou chacun s’y retrouve « un peu » ? Libéraliser l’ensemble et laisser la sélection naturelle faire son oeuvre ? Et surtout, avons nous le pouvoir de changer quoi que ce soit puisque de toutes façons ce sont nos politiques totalement à côté de la plaque qui décident pour nous ? Donc en définitive, une seule grande question : comment change-t-on la société pour la rendre juste moralement ?
Sur ce je vais parcourir ton blog 🙂
Cordialement
Bienvenue par ici Durn ! 🙂
La culture du tout-gratuit, ou des prix cachés, l’abondance éditoriale et les réseaux sont en partie responsables de cela. Le numérique a développé tellement de services « apparemment gratuits » que nous nous sommes (pour beaucoup, pas tous) habitués à ne pas les payer, souvent sous prétexte qu’ils sont immatériels, qu’on ne se rend pas compte qu’on possède quelque chose (et avec le streaming, on possède effectivement de moins en moins), et que cette chose a de la valeur. L’abondance des parutions, maintenant : comme certains l’ont dit plus haut, la boulimie de lecture finit par coûter cher, et les bibliothèques (je suis bien placé pour le dire) ne sont pas en mesure de fournir en quantité, notamment dans les sous-genres (pardon). Pourquoi ? parce qu’on achète en fonction de ce que les abonnés demandent. Et si vous ne venez pas lire de l’imaginaire en bibli, ne vous étonnez pas qu’on y investisse pas plus. C’est un cercle vicieux et la loi du marché, donc comme le dit Lionel, si vous sortez du système par le piratage, vous faussez le marché. Enfin, les réseaux : la façon de communiquer a changé, les auteurs, les éditeurs, via les blogs et autres, ont un autre rapport à leurs lecteurs. Mais le champ de vision des lecteurs se rétrécit d’autant : on veut lire UN auteur en particulier, on le veut tout de suite, en plus, et on refuse de plus en plus de lire autre chose, de découvrir autre chose. Sauf si cela a été validé par notre réseau personnel.
Merci, Nicolas.
J’ai la grand chance d’avoir dans un rayon de 10 Km trois grandes médiathèque qui, quand je fais une suggestion d’achats, tienne compte de mon souhait a 90 % et en plus m’en offre la primeur. Pourtant j’achète beaucoup de Livre, en Librairie pour la plupart ou aux Imaginales chaque Année. par contre le numérique ne me tente pas sauf pour certaines Saga que l’on ne trouvent plus même en occasion. Je suis entièrement d’accord avec vous pour condamner ces pratiques qui font du tort a toutes la chaîne de l’édition. Maurice Pappalardo
« » l’État met en place des structures en triste désaffection, cela s’appelle les bibliothèques publiques. « » » Qui tentent malgré tout de s’adapter aux nouvelles pratiques numériques en proposant une mise à disposition légale d’ebook via le système PNB. par exemple à Paris https://bibliotheque-numerique.paris.fr/ En espérant que les auteurs soient bien rétribuer en fonction du nombre de « prêts » numériques (chronodégradables) réalisés…
L’argument de faire bouger les choses et du prix ne tient pas quand on sait que les petits éditeurs numériques (e.books souvent très peu chers) sont également très piratés, souvent parce qu’ils jouent le jeu et n’imposent pas de DRM et marquages. Et là franchement c’est ignoble. Parce que ces petits éditeurs sont des passionnés souvent bénévoles qui se battent pour payer leurs auteurs et leurs illustrateurs. Alors l’argument, je fais bouger les grands de l’édition en piratant, c’est trop facile. Les pirates ne sont pas des chevaliers blancs qui défendent un idéal de culture mais pour le plupart des égoistes qui cherchent leur propre profit. Désolée, un peu énervée ce matin.
L’argument pécuniaire (un livre c’est cher…) ne tient même plus : tu peux acheter une version epub pour quelques euros ( de 0.99 à … ) et si tu aimes : tu achètes une version imprimée ; preuve s’il en est du soutien à l’auteur.
Bref …
Eh bien c’est un excellent article.
Bonjour
Je n’ai pas tout lu, mais je pense en connaitre le contenu.
Simplement, je voudrais savoir quelque chose : les éditeurs qui paient 10% leurs auteurs, ça ne vous choque pas ? Parce que ça, personne n’en parle. (Si vous en avez parlé, désolée.) et ça dure depuis que l’écriture existe.
Personne ne s’est jamais dit qu’il n’était pas normal que celui qui est le moins payé, c’est celui qui crée l’oeuvre ?
Perso, quand mon premier éditeur a filé la version bêta de mon livre à une nana qui l’a corrigé en dépit du bon sens sans me demander mon avis, ça m’a gonflé. Je n’ai rien dit, (à tort) mais ça m’a gonflé.
Quand j’ai filé mon livre à une blogueuse qui l’a foutu sur un partage de fichiers, ça m’a gonflé. Surtout quand après la fille a pleuré à l’injustice.
Mais moi, ce qui me gonfle le plus, c’est de payer un livre 20 euros. J’essaie de limiter et pour cela, je privilégie le numérique.
Alors, j’ai envie de dire : à un moment faut savoir ce qu’on veut aussi. Des gens qui ne peuvent pas mettre 20 euros dans un livre, il y en a plus qu’on croit. J’en fais parfois partie.
Donc, on fait quoi ? Parce que là, le serpent se mord un peu la queue.
Et pour conclure, il y a une chose que je ne supporte pas, par conviction, ce sont ceux qui dénoncent nommément les partageurs de fichiers.
Voilà ma petite contribution. Bonne journée.
Oui, un livre à 20 euros, c’est cher, pour beaucoup de budgets – mais moins que deux places de ciné à l’UGC des Halles, le problème est plus global, en fait. Simplement, dans ce contexte, on peut voir comment bouger, à, notre petit niveau, pour faire évoluer les choses.
C’est long, c’est complexe, mais j’ai du mal à croire aux solutions faciles.
Eh bien j’aurais mieux fait de lire votre article, vous répondez à tout ! Félicitations il est remarquable et je le partage.
c’est celui qui vend qui décide du prix, calculé en fonction justement de sa rentabilité.
Non. Désolé mais non. Cette phrase représente le marché du livre où l’éditeur fixe son prix. Dans le reste de la société l’équilibre se fait entre l’offre et la demande. Un coiffeur fait des prix deux fois supérieur à son voisin, il a intérêt à les valoir. Pareil pour un comptable.
Le livre est un marché protégé qui ne protège que les éditeurs. Pas les consommateurs ni les artistes.
Après je suis globalement d’accord avec l’article. Mais il ne faut pas se leurrer les éditeurs creusent leur tombe et enterreront avec eux les auteurs.
Je rejoins certains avis. Le modèle du livre numérique doit changer. on ne peut changer les usages, les acteurs majeurs essaient toujours en essayant de faire jouer la répression mais ne peuvent rien faire au final. La musique la vidéo l’ont déjà prouvé. Il faut innover sur les business models (patreon, ullule, abonnement?) En attendant, les auteurs (surtout jeunes et indépendants) peuvent essayer de tirer partie du piratage. C’est une forme de diffusion de communication qui sort de notre réseau, autant en profiter pour mettre des liens vers son site internet, la version papier de son livre, ses pages sociales etc
C’est ce que je tente de faire et que je compte travailler sur mes prochains livres…
Bon courage à vous!
Je partage bien des idées, mais suis malheureusement en désaccord avec toi sur certains points.
Je pense que le piratage n’apporte pas que des points négatifs, ni qu’il soit dangereux. A l’échelle des littératures, quelles qu’elles soient, il est négligeable. Mais il est parfois pratique, voire nécessaire (combien de fois dans mes études j’ai pu manger tel mois parce que j’avais chopé un document sur facebook plutôt que d’aller le consulter à Rennes, Paris, Lille…) ?
Je comprends ta vision mais la trouve, et c’est bien normal, centrée sur l’unique figure de l’auteur qui souhaite vivre de sa plume, ce que je comprends.
Peut-être une ouverture mériterait-elle d’être apportée à la fenêtre que tu pousses ici.
Bonjour,
Dans toute la démonstration, qui se tient par elle même, il manque un élément qui a son importance dans l’évaluation du coût réel du piratage : ce qui est piraté est-il réellement consommé (il ne s’agit pas de dire si apres visionnage ou ecoute on aime ou pas et qu’on valide ou pas la valeur demandée, mais bel et bien du fait de le « consommer »).
Comme vous l’avez évoqué en particulier pour le cas du livre, lire ce qui est piraté ou acheté prend du temps à « consommer ». Or il est commun (les causes sont sans doute a chercher dans l’emballement de la « consommite ») que des biens soient produits, achetés et jamais consommés (gaspillages de nourriture sont les exemples les plus inacceptables moralement).
Bizarrement (si je continue sur l’analogie alimentaire), aucune société fabricante de foie gras pour Noel ne se lamente que la plupart soit soldés puis jetés sans même avoir été ouverts, par les grandes surfaces ou par les consommateurs qui gerent mal leur refrigerateur ou leurs menus de fête.
Le même phénomène est évident pour le piratage. On charge, puis on oublie qu’on a piraté voire on supprime avant d’avoir ouvert car plus de place, ou truc trop gros ou encore erreur de chargement (oui des fois on croit avoir pris un truc et on en decouvre un autre a la place…), ou on avait envie de lire mais finalement on se rend compte qu’on n’en n’aura pas le temps, ou encore « l’envie a passé ».
1.000.000 de téléchargement illégal c’est combien de réel manque à gagner ?
Si c’est téléchargé à haute dose mais que les ventes (par exemple GF pour le livre) ne suivent pas est-ce la faute du « consommateur » ou celle de la stratégie marketing de l’éditeur qui aurait dû viser directement le format éco ?
Encore, faut-il pousser le consumérisme pour satisfaire le productivisme ?
Les autres arguments permissifs par rapport aux « bienfaits » du piratage ont deja été abordés tant dans les commentaires que partout sur le net, donc inutile de les lister.
La seule chose positive que je retiens de ce debat bien / pas bien sur le piratage, c’est que si on est encore capables de se poser la question, c’est que l’état du monde n’a pas encore atteint un niveau vraiment critique : c’est un problème de riches civilisés.
Ou bien que la culture toute entière devient une affaire de riches civilisés, autant ceux qui la produisent que ceux qui la consomment.
Ce qui devient contraire à la notion même de « culture »…
Bonsoir,
Je vois que c’est toujours la société libérale la source de tous ces maux. Je n’en suis pas si certaine. Justement, notre société offre tellement de services « gratuits » – pas forcément pour tous – ( santé, école, transport, loyer, culture…), qu’elle a habitué ses habitants à se servir, les a débarrassés de certains sens des responsabilités et:ou de contrepartie. Le piratage ne m’étonne pas, et c’est aussi une question d’éducation, de pédagogie, ect…
Ce n’est pas que je sois sans reproche en terme de piratage numérique. Mais, il est vrai que cela dépend aussi de l’offre disponible. Depuis, l’arrivée de netflix, nous ne piratons plus le numérique. Quel besoin? Avec une offre conséquente légale des plus raisonnables, il n’y a plus lieu… Le rapport offre:prix est un moteur important.
Quant aux livres numériques. Pourquoi acheter un livre numérique au même prix qu’un livre papier ? Pourquoi développer une offre papier/numérique avec de tels coûts ? Le bélial vient de mettre à l’affiche un livre et un livre numérique qui représente 1/3 du prix du papier. Du coup, il y a pas trop à tergiverser. De plus, ils proposent des nouvelles gratuites d’auteurs pas forcément connu ou en cours de publication. Cela permet de découvrir un auteur, et d’acquérur cela plaît! Bragelonne fait un peu la même chose. Faudrait voir s’ils sont beaucoup piratés.
Après, il y a une conscience citoyenne comme j’écrivais plus haut. Les petites structures, les auteurs qui ne font pas des millions faut les aider et acheter. Si, ensuite les grosses structures ne jouent pas dans cette cour, et bien je crains qu’il y ait du piratage, et quelque part, ils le cherchent.
Avant de me considérer comme un pirate, je préfère préciser ma consommation livre (achat 100/an). J’ai plus de 1500 livres/BD/mangas/dicos physiques et numériques. Piratés : je dois avoir des Stephen King, Heinlein, Assimov, Platon, Dumas, soit tout au plus une trentaine d’ouvrages. Et j’ai une bibliothéque publique bien fournie!
Etn justement, les grosses structures ne font pas de gros efforts pour développer le numérique « citoyen ».
Autrement le blog est vraiment chouette et je vais continuer la navigation!
Merci et bienvenue. 🙂
Bonjour,
Avant tout, je précise que je suis auteur publié ; dans une petite maison d’édition certes mais à compte d’éditeur tout de même. Je suis également musicien ayant déjà 2 albums autoproduits à ce jour.
Mon unique roman n’a pas encore été piraté, mais l’un de mes albums l’a été, quand à l’autre il est en écoute libre sur internet.
D’autre part, je suis aussi consommateur de médias piratés sous toutes leurs formes.
De la même manière que ça ne me dérange pas vraiment que mes œuvres soient piratées, je n’ai pas vraiment d’état d’âme en ce qui concerne les séries, la musique et le livres que je télécharge.
Pourquoi ?
Parce que l’argument de la réponse à l’une des questions de cet article est biaisé.
A savoir : « Oui, mais je télécharge juste pour tester, si ça me plaît, j’achèterai le livre. »
Reprenons les arguments de la réponse.
On ne va pas payer pour un concert dont on ne connait pas le ou les groupe(s), ou sans amis avec qui s’amuser. En d’autres termes, on est presque assuré de passer un bon moment. A l’inverse, en ce qui me concerne je ne payerai jamais pour un concert de M. Gims (je refuse de lui attribuer le titre de maître) car j’exècre sa « musique ».
Quand on va à la boulangerie y acheter du pain, on sait ce qu’est le pain, on en a tous mangé et les variations de qualités sont, reconnaissons-le, assez faibles d’une boulangerie à l’autre. Et si jamais l’exigence était plus élevée que le commun des mortel, on a toujours moyen de goûter un bout de baguette de ladite boulangerie grâce à un copain. Pour aller dans ce sens, on peut noter que sur les marchés, il est fréquent de pouvoir tester un échantillon avant d’acheter.
Or, en ce qui concerne un roman, d’auteur inconnu de surcroit, il est beaucoup plus difficile de savoir si ça va nous plaire. Les critiques d’un livre pouvant nous mettre sur la piste ne sont jamais qu’une vision personnelle de lecteurs qui n’ont pas forcément nos goûts. En définitive, le seul moyen de savoir si un livre va nous plaire, c’est de le lire en entier.
Avance de trésorerie insoutenable ? Pas vraiment puisque le livre numérique ne coûte rien à proprement parler. Il n’y a pas d’imprimeur, diffuseur, libraire, etc. à rembourser puisqu’il ne s’agit que d’un livre numérique et non papier. Ces maillons de la chaîne ne sont pas impliqués dans cet hypothétique manque à gagner.
Pour conclure, je dirais que : eh bien si, j’achète régulièrement des médias qui m’ont plu dans leur version piratée, et donc dégradée. Car un livre numérique n’est pas un livre papier, de même qu’un un dvd rip n’égale en rien la qualité d’un blu-ray.
Les pirates sans scrupules qui n’achètent jamais doivent donc se contenter d’une version dégradée des œuvres qu’ils consomment.
Enfin, s’il n’y avait pas de pirates, certes, les artistes gagneraient un peu plus d’argent. Je dis « un peu », car personnellement je n’aurais jamais acheté tous les médias que j’ai consommé en version piratée, donc ça n’aurait rien changé pour la majorité des artistes dont j’ai consommé gratuitement l’œuvre. Et c’est le cas de quasiment tout ceux qui font comme moi, de toute évidence.
Et, de toute façon, n’est-on pas artiste par passion, et non pour l’argent ? C’est mon cas, en tout cas. Je suis content de pouvoir partager le fruit de cette passion avec le plus grand nombre, quitte à ce que certains en profitent gratuitement 🙂
PS : je reste anonyme non pas par lâcheté, mais parce que je ne pense pas utile que de potentiels lecteurs se focalisent sur cette déclaration plutôt que sur mes œuvres. Et, à l’inverse, ça m’évite accessoirement de me faire de la publicité de manière éhontée 😉
Je suis d’accord sur tous les points moralement, mais en pratique c’est naïf. On ne peut pas empêcher le “piratage” – en fait, simple copie numérique, qui se trouve être, illégale ou non, le principe de base du monde numérique, comme le souligne souvent Doctorow.
Je ne crois ni aux procès, ni arguments éthiques (qu’ils viennent de Lionel ou de Taylor Swift) comme solution. C’est un problème de moeurs, et comme a fini par s’en rendre compte le monde de la musique, la meilleure (ou seule) parade, c’est une offre commerciale compétitive. Le grand public trouve son compte pour quelques euros mensuels payés à Spotify & co, ou via publicitaires sur YouTube; l’offre légale est simplement plus pratique, économiquement parlant, que le “piratage” gratuit.
Je n’ai pas de chiffre, mais en tout cas en Angleterre, je devine que l’énorme mainmise d’Amazon et son Kindle, horriblement propriétaire mais ô combien fluide à l’achat, réduit le piratage à des sommes négligeables. Pareil pour Netflix et les séries TV, notamment aux USA.
Le véritable problème, à mon sens, ce n’est pas les copies illégales, c’est que ces options tout à fait légales qui se profilent comme solution font le beurre des gros groupes médias. On sait que pas grand chose “trickle down” jusqu’aux artistes hors grandes stars (et encore).
Auquel cas, si le créateur et l’éditeur/label n’en retirent presque rien, quel est le pire: le piratage, ou la solution du marché qui fait de l’argent sur leur dos?
Dans un monde de plus en plus numérique, il n’est absolument pas vrai que le pirate n’a qu’une version dégradée à sa disposition. Un BD-Rip vaut un Blu-ray (et on a fait des gorges chaudes des innombrables pubs en-tête des DVD). Un livre électronique, peu importe la source, reste un livre électronique.
Pour tester un auteur, c’est facile, on peut le lire dans des nouvelles ou des extraits, c’est bien pour ça que j’ai une section à cette fin : http://lioneldavoust.com/telechargements/bonus/
Hum, pour les livres numériques piratés, oui, c’est la même qualité, par contre des epub faits via des scans puis de l’ocr mal relu sont fréquents aussi pour des bouquins qui n’existent pas édités officiellement.
Je suis plutôt du genre à considérer qu’un téléchargement n’est pas « un manque à gagner » ou « un vol » mais plutôt comme quelque chose qui de toutes façons n’aurait pas été un acte d’achat. Sans piratage, son objet n’aurait pas été écouté/lu/vu non plus, ce que je trouve encore plus dommage. Tant qu’à ne pas être payé, au moins être lu/vu/écouté. Je precise que je suis musicien et que les albums (autoproduits) de mon groupe ont été piratés.
J’arrive après la bataille, et bien après l’article qui parlait d’Amazon et de la revente d’ebooks « d’occasion » pour vous proposer un article qui tente d’apporter une solution à ces problématiques : http://www.attelage.net/forum-s330-p0#6393
Curieux de savoir ce que vous en pensez 🙂
Vous n’avez pas tort sur le principe qu’à la racine de toute pratique culturelle (et de toute activité économique) se trouve une force de travail qui constitue du temps à la base. En revanche, vous êtes diablement optimiste sur les chiffres que vous avancez. Même cent ventes pour un livrel sorti dans l’anonymat, c’est énorme. Et plus la diffusion explose, plus les ventes individuelles tendent vers zéro, indépendamment du temps. Je vous renvoie vers http://lioneldavoust.com/2010/comment-la-liberation-de-la-diffusion-fait-le-lit-des-publicitaires/
Un livre ne continuera jamais à se vendre « tout seul » parce qu’on le trouvera. Vous dépeignez en fait un peu le système de la « longue traîne » dont les Américains, malgré la taille de leur marché, déchantent.
Second point d’envergure : le rôle de l’éditeur est fondamental. Il guide l’auteur dans sa maturation et lui fait retravailler le manuscrit, lui offre son regard de professionnel pour pousser le livre au-delà de ce que l’auteur peut faire seul. Un livre sans regard extérieur (éditeur pro ou, mettons, bêta lecteurs investis et avisés) n’est que très rarement de la qualité qu’on obtient avec ce même regard. Quid de la place indispensable de ces acteurs?
Il y a un argument (ou une raison) du piratage que je ne t’ai pas vu évoquer, Lionel : le kiff. Le plaisir de sauter la barrière, de transgresser, de casser le code en ricanant dans son coin. Et contre ça, je ne vois pas de parade. Tous les arguments explicatifs que tu as très bien développés sonnent un peu comme « fumer c’est pas bieeeeen » et hop, tous les ados prennent une clope. Pas de parade, donc, à part la patience : les ados finissent par grandir.
Perso j’achète quasiment que de l’occaz et encore je trouve que là aussi les prix grimpent. Après je vais me faire plus facilement plaisir avec de beaux livres que j’achète neuf … Mais y a quand même un point qui n’est pas évoqué ici et qui moi finit par me faire boycotter les nouveautés …
Je ne parle pas pour votre livre je ne l’ai pas lu je ne peux pas juger mais pour avoir pris des livres des moutons électriques entre autres je constate que la langue française est de plus en plus maltraitrée. J’adore leurs choix d’auteurs mais je ne les prends plus à cause du nombre de fautes qui parsèment chaque livre… Je veux bien mettre 20€ dans un bon livre mais je veux pas me retrouver à le corriger à chaque phrase …
Je finis donc par me poser des questions sur cette fameuse chaine du livre… Y a qu’une seule personne qui relit le livre avant publication? Je veux bien que l’auteur ne relise pas le livre par lui-même mais il y a bien des proches ou même plusieurs personnes au sein de la maison d’édition qui doivent parcourir le livre avant publication non??
pour moi ce n’est pas respectueux de l’auteur, du lecteur ni de la langue française …
Alors ce n’est en rien une reflexion sur votre travail personnel puisque comme déjà dit je ne l’ai pas lu ni même sur le piratage mais je peux tout à fait comprendre qu’on ne veuille plus mettre 20€ dans un livre…
Quant au numérique j’en ai acheté j’en ai lu via ma bibliothèque mais je refuse de mettre plus de 10€ et je refuse les DRM…
les correcteurs professionnels sont de moins en moins nombreux dans les grandes maisons. Dans les petites, on fait avec les moyens du bord : le directeur de collection, le traducteur, l’auteur… parfois un relecteur bénévole 🙂 . Mais il y a clairement un manque de temps, d’argent et de professionnalisation de l’activité…
Comme je ne voulais pas envahir votre fil de commentaires avec une long texte, je me suis permis de réagir sur notre blog à votre excellent billet > http://numeriklivres.info/piratage-un-fleau-pour-les-editeurs-nativement-numeriques/
Très intéressant de lire votre témoignage, merci ! Je vais faire tourner de mon côté. 🙂
Bonjour,
Lançant bientôt ma propre structure indépendante d’édition, j’ai longuement réfléchi au problème du piratage. Et mes réflexions sont loin d’être similaires aux vôtres.
En gros, j’ai l’intention complète et déterminée de ne faire qu’une seule chose au sujet du piratage : informer les pirates de l’existence d’un bouton « DON » sur le site de ma maison d’édition, et ce sur les posts appropriés des sites qui proposeraient éventuellement des copies des bouquins que je vais éditer.
Parce que, selon moi, le piratage est un leurre. Il n’est pas question ici de manque à gagner. Je suis persuadé que 95% des gens possédant une copie piratée d’une œuvre ne l’auraient de toute façon JAMAIS achetée. Les pirates ne sont pas le marché d’un éditeur. Les pirates sont des curieux, des boulimiques, des gens aux ressources limitées, tout ce que vous voulez, mais sûrement pas des clients potentiels.
Par contre, le pirate PEUT, dans certaines conditions, devenir un client potentiel. Une personne qui se dira peut-être un jour, « tiens là j’ai 5 € en poche, je vais les paypaler (le pirate aime les néologismes) à cette boîte qui m’a donné des heures de plaisir » ou, mieux encore, « tiens, j’ai 20 € en poche, je vais acheter cette nouvelle production d’une maison dont j’ai lu des bouquins piratés ».
Notre marché, ce ne sont pas les pirates. Notre marché, ce sont les lecteurs, les gens qui se déplacent en librairie, les gens qui visitent nos sites, les gens qui se connectent sur les plate-formes de vente… S’il se réduit, ce n’est pas la faute du piratage.
Il est illusoire de croire que le pirate représente un manque à gagner. Il est contre-productif de ne pas essayer de s’en faire un allié. Il est mortel d’essayer de lui donner des leçons.
Quant au problème de la rémunération des auteurs, je pense que sa résolution passe par d’autres chemins. Notamment dans les négociations avec les éditeurs et les contrats progressifs.
Donnons-nous alors rendez-vous dans quelques années et racontez-nous votre retour sur cette expérience.
Avec plaisir !
Je suis bien conscient que mes idées sont théoriques. La pratique sera passionnante.
Le pirate, c’est dans sa nature, prend. Il ne donne pas 😉
Bonjour Stéphanie,
Ayant très longtemps travaillé dans le milieu musical, bien plus touché encore par le piratage, j’ai constaté personnellement plusieurs cas contraires. Il existe aussi des pirates au grand cœur 🙂 Je reconnais qu’il s’agit d’une minorité. Mais elle existe.
Très intéressant de lire votre témoignage, merci ! Je vais faire tourner de mon côté. 🙂
Je suis à 100% d’accord avec l’analyse de Patrick pour le coup
Marrant cette époque, quand même, où la « réalité économique » l’emporte toujours sur la morale.
Exactement !
… et où l’on cherche à tout prix à la justifier moralement pour résoudre la dissonance cognitive.
En tant qu’auteur et défendant avec acharnement le droit à la propriété intellectuelle, le fait qu’on pille des oeuvres sans demander l’accord de leur auteur me semble assez condamnable en soi. Et j’ai du mal à m’allier avec ceux qui, par ignorance ou arrogance, piétinent ce droit inaliénable. (Les éduquer à la source c’est autre chose, c’est même mon métier mais m’allier…)
Je suis tout à fait d’accord il y a un monde entre inventer un nouveau modèle qui ne lèse personne et purement voler une oeuvre.
Tout d’abord, je n’utiliserai pas ici le terme de « propriété intellectuelle » qui regroupe deux notions dont une seule nous intéresse aujourd’hui, à savoir la propriété littéraire et artistique.
Plusieurs questions me semblent se poser par rapport à ce droit de propriété littéraire.
Les droits moraux d’un producteur d’œuvres artistiques (oui, le terme est horrible) sont les suivants : le droit de revendiquer la paternité de l’œuvre, le droit de décider du moment et des modalités de sa publication (droit de divulgation), le droit de s’opposer à toute déformation ou mutilation de l’œuvre (droit au respect de l’œuvre), le droit de s’opposer à toute utilisation pouvant porter atteinte à la réputation ou à l’honneur de l’auteur, le « droit de retrait et de repentir ».
Le droit à une juste rémunération n’est pas un droit moral. C’est un droit économique, lié à un modèle économique.
Ce droit est peut-être rogné (j’insiste sur ces termes) par le piratage.
Mais il me semble qu’il est encore plus bafoué par les pratiques éditoriales : à-valoir misérables, intéressement minimal aux bénéfices, pourcentages ridicules…
Il me paraîtrait plus productif pour les auteurs de s’attaquer à ce système plutôt qu’au piratage.
Par exemple, je le répète, grâce à la pratique du contrat progressif, qui lui, garantit une rémunération plus juste à l’auteur.
Ce système est encore à l’heure actuel le seul qui garantisse à la fois une rémunération à l’auteur ET un certain contrôle qualité pour le lecteur ET une diffusion convenable aux oeuvres. Personne, en-dehors de « coups » occasionnels, n’a encore proposé de modèle économique viable sérieux en remplacement. C’est par-là qu’il faut commencer, pas par détruire la maison !
De toute façon, 10% de 1000 exemplaires valent mieux que 80% de 20 exemplaires… Je vous renvoie également là-dessus (je ne crois pas l’avoir encore cité ici) http://lioneldavoust.com/2010/comment-la-liberation-de-la-diffusion-fait-le-lit-des-publicitaires/
Je pense que vous n’avez pas saisi exactement ce qu’est un contrat progressif et comment il s’intègre dans le modèle économique actuel.
Il ne s’agit justement pas de risquer de vendre plus ou moins d’exemplaires. Il ne s’agit pas d’adapter les tirages. Il ne s’agit pas d’inventer un nouveau modèle économique, juste d’y opérer quelques aménagements. Je bénéficie d’une distribution de qualité, d’un contrôle de qualité,…
Il s’agit de transformer la relation financière entre l’éditeur et l’auteur. C’est la seule chose qui change dans ce modèle.
Il s’agit d’adapter les pourcentages des droits d’auteur aux seuils de rentabilité des éditeurs. De fixer des strates de pourcentage en fonction des frais des deux parties et de rééquilibrer les bénéfices en faveur de l’auteur.
Le contrat progressif offre à l’auteur :
1° un à-valoir (personnellement mes à-valoir sont légèrement supérieurs à la moyenne du marché, mais c’est un choix comptable)
2° Un pourcentage réputé « normal » (par exemple 10 %)aux auteurs tant qu’un seuil de rentabilité pour l’éditeur, pré-défini par contrat et calculé en accord avec les auteurs, n’a pas été atteint.
3° Au-delà de ce seuil de rentabilité, un partage significativement plus avantageux des bénéfices.
Dans mon cas (d’éditeur indépendant), cela devrait donner, par exemple, pour un livre tiré à 2000 exemplaires :
– 10 % sur les 1250 1ers exemplaires
– 25 % sur les 750 suivants
– 50 % sur tout retirage
Ce modèle est largement viable pour toute exploitation d’auteur autochtone. Il ne fonctionne évidemment pas pour une œuvre traduite (bien que certains aménagements seraient possibles).
Vous noterez que dans un cas de ventes normales, le modèle de rétribution ne change pas. C’est normal, l’éditeur aussi doit rentabiliser ses investissements. Vous noterez par contre que le partage du succès est plus probant et équilibré.
Toutes les échelles que j’ai vu jusqu’à présent offrent 10 à 15 % au maximum, quelle que soit l’ampleur des ventes. Trouvez-vous cela moins anormal que le piratage ? Je le répète, les auteurs ne souffrent du piratage que parce que le modèle de rétribution actuel est faussé.
Ceci n’est pas de l’angélisme branchouille. C’est une autre façon de considérer l’auteur. C’est une autre façon de considérer les rapports financiers auteurs/éditeurs.
Et la façon dont cela change le modèle économique est la suivante :
Plus question de financer un catalogue voire un fonds d’édition grâce à quelques best-sellers. L’éditeur est obligé de faire fonctionner TOUS ses livres et n’a pas le droit de se concentrer sur la solution facile ci-dessus exposée. Une espèce de permaculture appliquée à l’édition…
Cela me paraît, pour les auteurs, un combat bien plus important que de vitupérer contre les pirates. Qui, quelle que soit la position morale que nous voudrions adopter ne changeront plus leurs habitudes désormais, en tout cas pas de manière significative.
Utopique ? Peut-être. Je vous tiendrai évidemment au courant.
Le problème à mon sens reste le prix des livre papier je lis des VO je vois la différence de prix exemple un livre GF que je paie moins de 10€ en anglais je le paierais 20€ en français, je veux bien que l’on finance des traductions mais quand même quand c’est un livre français on pourrait faire un prix qui le montre. Donc je lis en numérique et je fouine et attends les promotions. Quand à la bibliothèque je vie dans une petite ville où l’on a pas la chance de trouve plein de style différent ce qui est dommage.
Un francophone ne vend pas autant qu’un anglophone en règle générale. Cela, plus les postes fixes dans l’édition, plus la taille bien plus grande du marché anglophone qui assure une rentabilité meilleure, explique en partie que le prix reste voisin en France.
Mes 2 cents
je suis programmeur et auteur d’un livre sur la programmation qui s’est plutôt bien venu à sa sortie il y a plus de 10 ans.
Aujourd’hui le bouquin n’est plus disponible, mon « oeuvre » bien que datée, n’est pourtant pas totalement obsolète, mais malgré mes requêtes à l’éditeur (gros éditeur), il n’en existera jamais de version électronique alors même qu’il possède un site de vente d’ebook et que l’ouvrage a été totalement réalisé sous forme électronique.
Je pensais cette histoire terminée quand un site de développement bien connu m’a contacté pour pouvoir mettre ce bouquin en ligne, sauf que le site en question et l’éditeur on cherché l’un comme l’autre à se rémunérer sur cette opération – moi je n’avais qu’à donner un accord de principe – et le projet est finalement tombé à l’eau faut d’accord entre eux.
Au final je serais presque tenté d’en balancer une version sur les réseaux pirates afin qu’il puisse vivre encore un peu, et je ne suis pas prêt de renouveler l’expérience, ou alors ce serait en vente directe.
Théoriquement, si vous n’avez rien signé en ce sens, les droits numériques vous appartiennent toujours. A vérifier avec un juriste.
Oui.
Vente direct ou des fous comme nous (Multivers) on ne fait pas encore du non fiction mais il faut un début à tout 🙂
En préambule, sachez que je possède chez moi des milliers de livres et que je n’en ai jamais téléchargé.
Sachez que je soutiens ardemment les auteurs, surtout ceux de SF selon mon goût et surtout les francophones dont l’activité est si fragile.
Je connais bien, ayant rencontré de nombreux auteurs en convention (le regretté Ayerdhal, Bordage, Gaborit…), la difficulté qu’il y a à vivre de son art en tant qu’auteur.
Ce n’est donc pas à moi que vous parlez. Mais je ne peux être d’accord avec vous quand je lis ce que vous écrivez.
« tu en retires quelque chose, sinon tu te livrerais à une activité différente, comme jouer à la PS4 ou regarder Netflix »
Selon vous, on ne retire donc rien des jeux vidéos ni du visionnage du catalogue de Netflix. J’imagine qu’il faut comprendre que ce sont là des activités non culturelles, vides et creuses, ne mobilisant aucune matière grise.
Cette réflexion me fait bondir et ôte de fait tout son impact au reste du texte. Par cette réflexion, vous marquez allègrement contre votre camp.
Un nombre non négligeable de pirates cesse de vous lire à cette ligne précise et vous range définitivement dans la catégorie des snobs et des élitistes. Moi-même, je suis à deux doigts de le faire mais j’attends votre réponse.
Qu’on puisse ne pas considérer les jeux vidéos comme une activité culturelle, soit. C’est aussi mon avis.
Mais sachez, monsieur, que sur Netflix, on peut regarder d’excellents films tels que Taxi driver, Full metal jacket, Metropolis…
Jugeriez-vous ces films très en dessous de vos écrits ? Ce serait bien prétentieux. Ou est-ce simplement que vous parlez sans savoir ? Ce serait vraiment gênant.
Ou jugeriez-vous l’ensemble des films et séries comme globalement inférieurs aux livres ? Diantre, ce serait la preuve que vous n’êtes pas bien cinéphile et un manque profond de respect pour tous les artistes qui exercent dans ce domaine.
J’ajoute qu’il est rarement judicieux de chercher à mettre en valeur une chose en en vilipendant d’autres.
De plus, les artistes du cinéma et de la télévision sont dans la même galère que vous. On pourrait attendre de votre part une certaine solidarité.
« tout ce que tu fais, c’est regarder Game of Thrones en streaming posé dans ton canapé avec une pizza ? »
Vous récidivez ! Permettez-moi d’être choquée par votre ton encore une fois bien condescendant envers les oeuvres télévisuelles.
Vous vous adressez à un public de pirates majoritairement jeunes. Pensez-vous que trainer leurs autres loisirs que la lecture dans la boue les incitent à vous lire et à vous écouter ?
J’ajouterais deux ou trois grains de sel à votre article.
– la plupart des bonnes bibliothèques de quartier consentent à commander les livres qu’elles n’ont pas, pour peu qu’on soit aimable. J’usais souvent de cette méthode quand j’étais pauvre.
– le prix des e-books est stupidement élevé par rapport à celui des livres en papier. On économise pourtant la fabrication, le stockage, le transport, le magasin… Il y a sans doute une réflexion à mener de ce côté.
J’attends votre réponse !
Je vous répondrai simplement qu’il peut être avisé de vous renseigner sur l’auteur du blog que vous commentez avant de monter sur vos grands chevaux et de taper complètement à côté (ce commentaire servira donc de clarification). Je suis auteur de fantasy et compositeur pour le jeu vidéo : par nature, je m’inscris moi aussi dans le divertissement et donc dans ces mêmes autres industries. Lire mes bouquins se place justement au même niveau que regarder Netflix (auquel je suis aussi abonné) ou jouer à la PS4 (que j’ai aussi) et qu’il m’arrive de regarder GoT en mangeant des pizzas. Si quelqu’un n’aime pas mes bouquins, il fait autre chose au lieu de perdre son temps : l’offre de divertissement est pléthorique. S’il en reste, c’est qu’il en retire quelque chose, au même titre qu’on retire quelque chose (nommément, du plaisir, en premier lieu) de Netflix ou de jouer à la PS4.
Fais gaffe, Lionel, tu regardes des pizzas là. 😉
(C’est pas parce que je ne suis pas d’accord avec toi que je dois te laisser faire des bêtises !)
Oups, merci. J’en perds ma mozzarella tellement je suis énervé. 😉
Google it : on dit que Mozart est mort., mais quand j’ouvre mon frigo, mozarella. (vraie chanson de rap autotuné qui vaut son pesant de cacahuètes. ça te fera rire un coup.)
Merci, vais aller voir 😀
J’ai tenu 27 secondes. :p
Nooon !
Merci pour votre réponse.
Je précise qu’à l’exception des deux phrases que je citais, le reste de votre article m’apparaît très vrai. J’utilise régulièrement un argumentaire similaire pour tenter de remettre des pirates dans le droit chemin.
« Lire mes bouquins se place justement au même niveau » que regarder Netflix (auquel je suis aussi abonné) ou jouer à la PS4 (que j’ai aussi) »
Ce n’est malheureusement pas ce que l’on comprend en vous lisant. Une reformulation serait à mon sens une bonne idée. Si vous jugez cette clarification utile, j’imagine d’ailleurs que je ne suis pas la seule à vous avoir mal compris.
Votre propos est important et je serais ravie qu’il touche le plus grand nombre.
Vous écrivez que j’aurais dû me renseigner sur vous avant de prendre la mouche. Soit. Mais votre article circule en ce moment sur les réseaux sociaux (où je l’ai trouvé) et personne ne va prendre cette peine sur ces médias. Il me parait donc important que votre propos soit aussi clair que possible. Il serait dommage que des pirates agacés abandonnent la lecture sur cette formulation malheureuse.
Je suis d’accord avec toi sur tous les points. Après, il faudrait analyser ( chose qui est impossible bien sûr) quel pourcentage de ceux qui piratent un livre l’auraient réellement acheté s’il n’existaient aucun moyen de l’obtenir » librement ». Ne les téléchargent-ils pas justement parce qu’ils sont gratuits? Une fois qu’ils se trouvent sur leur liseuse, les lisent-ils réellement ? Le principe de la gratuité à tendance à attirer des vautours de toutes sortes. Je me souviens qu’au tout début, j’ai envoyé des SP à ce qu’on appelle des » gratteurs de SP » qui n’ont jamais lu le bouquin mais qui étaient contents parce qu’ils avaient réussi à l’obtenir » gratuitement » pour agrandir leur bibliothèque. Certes, les chiffres peuvent parfois sembler monstrueux. Sur » la mort en rouge », j’ai vu plusieurs centaines de téléchargements illégaux. Mais, sans vouloir atténuer l’ampleur de phénomène entendons-nous bien, je me demande sincèrement combien d’entre eux l’auraient réellement acheté. Qu’en penses-tu?
Que le réel point, comme stipulé plus haut, c’est : combien de téléchargements pour combien de réelles consommations ? Si l’oeuvre piratée moisit quelque part sans jamais en sortir, bon. C’est juste de l’espace perdu.
Après, comme cela a été rappelé ailleurs, quand on commence à dire : « non mais je ne l’aurais pas acheté » et qu’on en profite quand même, tout le jeu économique classique s’écroule.
Tout à fait d’accord 🙂 C’est juste une interrogation.
Un mot général pour deux choses :
1. Merci à tous les nouveaux arrivants sur le blog (et les anciens) qui ont nourri la discussion de façon constructive et intelligente, même en disconvenant par rapport au propos d’origine. Si vous venez d’arriver, vous êtes les bienvenus et je suis heureux d’avoir pu susciter l’intérêt de gens fins comme vous.
2. Comme il y en a aussi un certain nombre qui dégaine de façon épidermique son commentaire sans réfléchir, je rappelle quelques règles de base : toujours lire ce à quoi l’on réagit ; toujours se renseigner sur l’auteur du message, surtout on débarque dans une communauté âgée de bientôt dix ans (soit trois millénaires en temps Internet). Ça m’évite de modérer a priori voire de supprimer direct certaines réactions, ça vous évite le risque de taper complètement à côté du sujet, nous sauvegardons ainsi tous des électrons et participons communément à ralentir le réchauffement climatique. Joie.
« Non mais c’est qui ce Lionel Davoust ? Un bobo qui surfe à dos d’orque… Oui, donc un de ces élitistes chiants qui ne jurent que par le nouveau roman et crachent sur l’imaginaire, d’ailleurs il méprise GoT, le con. »
Voilà. Merci. 🙂
Bonjour,
Que faut-il faire pour qu’un commentaire soit publié sur votre blog ?
OK, je viens de lire le message posté plus haut.
Je n’avais pas l’impression d’être épidermique ni à coté de la plaque. Mais vous être le décideur final sur votre blog, je comprends.
Bonne continuation.
j’ai préféré récupérer une copie pirate de ton bouquin parce que j’aime pas mettre des histoires d’argent entre mes copains et moi.
J’ai lu une copie pirate de ton article… Gnark gnark gnark !
Bonjour et merci pour votre article.
Quelque remarques si vous permettez, en mode « oui mais ».
Je ne veux pas me justifier. Je sais que télécharger illégalement c’est mal, mais pour qui et à cause de quoi ? Mode avocat du diable :
Déjà je vous comprends et connais le problème, ayant pas mal d’amis dans le monde de la BD. Mais (attention c’est le premier « mais ») je triche aussi. Pas tout le temps, mais je triche. Moins avec les livres mais ça pourrait évoluer.
Mais pourquoi ?
Plusieurs cas de figure. Et je me permettrait de comparer les différents médias.
J’aime lire, les livres et j’aime aussi relire les livres (comme revoir un bon film).
J’ai donc une belle édition du Seigneur des anneaux et l’édition de poche car la première pèse lourd et j’aime lire en voyage. Et puis comme je suis aussi un geek je l’ai en epub.
J’ai donc payé 2 fois le SdA, la version numérique a été gentiment « piratée ». Pas que je n’ai pas eu envie de le payer une troisième fois mais … bin si en fait. Cette copie numérique n’a rien couté à produire physiquement, pas de distribution (à part le site qui l’a mise en ligne), transport, encre etc.. Ce n’est que la copie digitale d’une ouvre dont j’ai déjà payé les droits (2 fois).
Ça marche aussi avec mes VHS de Star Wars, mes DVD de Star Wars, mes blu-ray de Star Wars et mon Rip full HD en mkv car les versions précédentes ne rentraient pas dans ma tablette.
Mais bon là on est encore dans la gentille tricherie. J’ai déjà les versions papier (dvd, …), j’ai payé l’auteur. Ah non, Tolkien est mort en fait. J’ai donc payé son 3eme fils Christopher qu’il a bien de la chance d’être le fils de son père. (troll anti ayant-droit spotted, j’y reviendrais).
Donc je triche aussi sur des livres que je n’ai pas. C’est mal, je le sais. Je ne justifie pas mon geste en mode promotion de l’artiste pas de soucis. Quand je télécharge un livre, souvent c’est un livre que je n’aurai de toute façon pas acheté. Mon budget culture n’est pas trop mal au vu de mon salaire mais il n’est pas extensible.
Autant ne pas télécharger vous me direz. On est d’accord.
Mais, économiquement, chaque téléchargement n’est pas une vente en moins car de tout façon la vente n’aurait pas eu lieu. Que je télécharge ou pas, la vente n’est pas faite. Pas de manque a gagner dans ce cas là.
On peut télécharger des giga octet de musique que l’on écoutera d’une oreille ou des dizaines de livres qu’on ne lira jamais. Sont-ce pour autant des ventes en moins ? Rien n’est moins sur.
Mieux, de nos jours on fait payer un abonnement (ou on rémunère avec de la pub) pour ces même dizaines de giga qu’on n’écoutera peut-être pas plus attentivement. M’enfin, là au moins les auteurs sont payés.
Oui mais… non. Les ayant droits sont payés.
Combien gagnez-vous sur un livre ? Honnêtement ?
Un de mes amis dessinateur vous dirait 0€. Lui est payé avec un fixe @150€ la planche environs (à 42 pages la BD ca fait 6500 balles l’album). Avec un album par an… Et s’il vend plus de 5000 exemplaires (en BD aujourd’hui c’est énorme) il aura un pouillème symbolique en plus.
Autrement dit, si j’achète son nouvel album demain ou non ça ne fera aucune différence pour lui !!
Après tout se négocie en fonction de la notoriété de l’auteur, de son oeuvre, sa base de fan etc. Mais même chez Soleil, ce ne sont pas les auteurs qui roulent en grosse berline.
Et si on achètent la version numérique on élimine de la chaine la distribution, le transport, l’impression, …
Sur un livre numérique vendu (au même prix qu’en papier qui plus est) encore une fois combien gagnez-vous ? Combien gagne l’éditeur ?
Mes amis dessinateurs ont maintenant le pouvoir de se passer des éditeurs, ils s’auto-produisent, font leur promo sur Facebook et vendent donc leurs œuvres directement au près de leur fan. Ceux ci reçoivent donc un bel ouvrage et savent que l’auteur en verra vraiment la couleur.
Ça n’enraye pas le piratage, mais sur les ventes licites, ça rajoute des épinards au petit morceau de beurre.
Et pour finir j’irai dans votre sens, il faut changer la société. Éduquer les gens au problème certes. Mais aussi refondre complètement le système de l’édition et des ayants droits.
Qui aura besoin demain d’un maison d’édition pour sa promo ? Quelle sera la plus-value de celle-ci ? Ils le savent je pense et ont peur, déjà des mecs sur youtube font plus d’audience que la TV, des musiciens se vendent directement sur le store…
Quid des DRM ? Je change de tablette et… a bin non en fait, si je change je perds tout.
Quid d’une réforme du droit d’auteur ? On en est 70 ans post mortem auctoris en Europe si je ne m’abuse. WTF ? (Christopher Tolkien a ptet aidé son père en même temps mais quid des enfants de JK Rolling ? Ils ont 70 ans de tranquillité après maman, chouette hein.)
Quid de la licence globale (Netflix pour tous ?) et qui touchera quoi (surtout ça le soucis je pense) ?
« Mon pirate, tu triches. Quelle que soit la manière dont tu tournes le problème, tu triches ; tu décides volontairement de te placer hors des règles économiques pour ton bénéfice. »
Oui je le reconnais.
« C’est tout le contraire. Si tu veux que les règles de la société marchande changent, permets-moi de te suggérer de t’attaquer à de vrais adversaires, à ceux qui tiennent les clés du système : ce n’est absolument pas la culture. »
Certes mais à part voter (pardon mais lol)… ou ne plus consommer…
Je pense que c’est avant tout aux auteurs de prendre les armes. Avec ce genre d’article déjà. Mais aussi en tapant sur les vrais coupables. Les gros groupes qui s’en mettent dans les poches en revendant les droits des œuvres et margent comme des fous pour ne laisser que des miettes aux auteurs.
Cordialement.
Benoit
Petit rappel général sur l’auto-édition, la diffusion directe et la longue traîne : cet article aura bientôt six ans mais il semble rester d’actualité sur l’équation insoluble qu’elle me paraît représenter –
http://lioneldavoust.com/2010/comment-la-liberation-de-la-diffusion-fait-le-lit-des-publicitaires/
Cher Monsieur Davoust,
Votre article est très intéressant mais il m’a semblé plus y voir la réaction d’un éditeur que celle d’un auteur. En fonction de mon expérience personnelle (et uniquement celle-ci) j’aimerais faire un certain nombre de remarques.
Je suis un vieux lecteur de ce que l’on appelle la littérature de genre (à laquelle vous appartenez) et notamment de science-fiction. Je possède des milliers de livres, tous achetés, aucun de volé. Il y a
deux ans environ, bénéficiant de plus de temps (retraite), j’ai fait l’acquisition d’une liseuse très basique pour essayer (je n’étais pas convaincu à l’avance) en me disant également que je pourrais
avoir enfin le temps de lire ou relire des classiques, gratuits puisque dans le domaine public. J’ai finalement apprécié de posséder une liseuse que je trouve complémentaire du livre papier.
Mais mes premières expériences d’achat d’epub m’ont permis très rapidement, comme tout un chacun de faire deux constatations :
le prix : je voulais acheter l’Archipel du Goulag, le tome 1 était plus cher en epub qu’en papier,
le fonds : impossible de trouver quoi que ce soit, par exemple seules deux préquelles de la Fondation d’Asimov.
Il est devenu clair par la suite que les éditeurs faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour freiner le développement du livre électronique.
Ceci est une formidable erreur ; la majorité est d’accord pour dire je crois que le livre électronique ne remplacera pas le livre papier mais qu’il est un complément (j’ai lu quelque part que seuls 3/% des lecteurs ne lisaient que sur liseuse).
Alors pourquoi ne pas réfléchir à un prix adapté pour celui qui achète le livre papier (comme avait tenté Le Belial qui, à ma connaissance a plutôt cessé parce que c’était illégal). Personnellement je serais prêt à payer 20% supplémentaires mais certainement pas 25 euros plus 18 comme le proposent certains éditeurs. Après tout, quand j’achète un CD, la première chose que je fais en rentrant chez moi, c’est d’en faire une copie sur mon ordinateur au cas où et, éventuellement de graver un CD pour l’auto-radio, l’original ne servant que pour la chaîne HiFi. Cette double utilisation est-elle possible pour un livre ? Non. Il ne faut pas s’étonner alors que certains aient pris les choses en mains. A titre personnel, est-ce que je me sens coupable si, sur le net, j’arrive à trouver mes CLA ou vieilles revues ? Non, elles ne me sont pas proposées légalement (c’est quand même une lapalissade que de penser qu’une offre conséquente et adaptée entraînerait mécaniquement des ventes plus importantes).
Que me reste t-il comme moyens d’action. Et bien j’achète en papier et epub chez les éditeurs qui ont une autre approche (par exemple les 4 premiers de la collection Une heure lumière au Bélial, éditeur qui, je le signale, m’envoie GRATUITEMENT la version électronique de Bifrost auquel je suis abonné depuis le début), rachète en epub certains titres Bragelonne (des Peter Hamilton), ou Alire (voilà un éditeur qui convertit son fonds, résultat j’ai racheté les 5 volumes de Tyranaël de Vonarburg plus ses 4 recueils de nouvelles).
Ma vision des choses est-elle idyllique ?
Deux remarques pour terminer :
vous parlez des bibliothèques : à condition de ne pas habiter la Creuse ou la Lozère alors, parce que là… d’ailleurs quand notre Premier ministre a employé le terme d’apartheid social, j’ai cru qu’il rentrait d’Aubusson ou de Marvejols, d’autant plus que dans ces départements il faut se lever de bonne heure pour pirater, Internet étant plutôt capricieux,
un téléchargement illégal n’est pas nécessairement une vente en moins, je pense même qu’il y a plus de chance que ça entraîne un coup de cœur et des achats ultérieurs. A titre d’exemple personnel encore, et en matière de musique, je suis fan de Pendragon et achète tous leurs CD et DVD de concerts, c’est pour moi une question de principe. J’ai fait un jour une copie d’un DVD pour deux collègues de travail qui j’étais sûr apprécieraient. Résultat : j’ai fait 3 commandes sur le dernier DVD et nous sommes allés à trois au dernier concert lyonnais.
En conclusion, j’ai envie de dire que je ne peux pas avoir du respect pour des éditeurs qui bloquent un progrès technique sans voir plus loin que le bout de leur nez et pour qui le respect du lecteur (et de l’écrivain ?) n’est pas la préoccupation première, de la même manière que je ne peux avoir de respect pour une industrie musicale qui produit des télé-crochets bidonnés dont le seul but est de faire de la vente sur des artistes-kleenex, et que je ne peux avoir de respect pour une industrie du cinéma qui, il y plus d’une vingtaine d’années déjà, nous expliquait qu’il fallait consommer français, protéger ce qui était français (l’exception culturelle sinon Paris devenait un nouveau Pyongyang, ceci dit je suis plutôt pour) mais dont les têtes d’affiche passent leur temps à la télévision, dès qu’ils le peuvent, à expliquer aux smicards et aux chômeurs qui ont les mêmes inquiétudes et qui se sentent abandonnés, que s’ils sont attirés par un certain parti c’est parce qu’ils sont fascistes ou racistes.
Sur ce, je vais aller commander le dernier Lazuli, groupe originaire d’Alès dont Monsieur Nègre, je suis sûr, n’a jamais entendu parler.
Et pourtant, quand mes éditeurs numériques (Critic et ActuSF) sortent des livres à prix raisonnable, sans DRM ; quand des pure players numériques observent la même politique ; il y a piratage. Je veux bien entendre les arguments du progrès technologique, de la facilité d’accès au contenu, de la politique tarifaire… mais cela ne change hélas rien au phénomène. Je vous invite à lire cette réaction : http://numeriklivres.info/piratage-un-fleau-pour-les-editeurs-nativement-numeriques/
Il y aura toujours piratage, Lionel. Il y a d’autant plus piratage que les éditeurs le favorisent par leur action contre le numérique. La vraie question est de savoir comment le limiter dans des proportions marginales. Ce que nous apprend la musique, c’est que les gens sont prêts à payer, sous la forme d’abonnement de streaming. Cela n’a pas éliminé le piratage, cela ne fournit pas des revenus suffisants aux artistes, mais on est passé d’une ambiance « tout gratuit » à « paiement par abonnement ».
Ce qui est important, c’est de changer cette ambiance, et cela ne peut venir QUE des éditeurs, QUE du système éditorial.
Olivier, je sais, il y a des années, je parlais de la loi du tomahawk et de la bombe atomique (les moyens de contournement ont toujours deux ères technologiques d’avance). On le voit qu’une offre légale bien fichue est la meilleure arme (Netflix a fait chuter le piratage aux USA). Mais ce qui m’agace grave dans tous les arguments et la discussion, c’est qu’on parle toujours de convenance ou qu’on justifie éthiquement la pratique par un discours utilitariste: « ça devrait être comme ça », donc on s’assoit sur les conséquences du contournement. C’est un raisonnement qui lorgne un peu trop vers « la fin justifie les moyens » pour que je me sente à l’aise avec, désolé.
Opposer la morale à l’éthique, ça ne fonctionne pas, philosophiquement parlant. La loi, la morale et l’éthique commandent de ne pas voler, et des gens volent. J’ai vécu l’explosion du piratage des anime dans les années 90, avec les teams de fansubs éthiques et les autres. Tout cela était rendu possible par une sorte d’aveuglement des studios japonais. Désormais, il y a le simulcast, et les fansubbers « non-éthiques » râlent et se sentent dépossédés de leur audience. Cela n’arrête pas leurs pratiques, mais cela favorise une offre légale.
Sauf que, cette offre légale qui permet de visionner gratuitement des épisodes, elle n’aurait jamais émergé sans la pression du fansub. Les studios et éditeurs étrangers auraient continué leur industrie classique de vente de DVD (et encore maintenant, pour certaines séries, seul le piratage permet d’y avoir accès, beaucoup de Blu-Ray/DVD japonais n’ayant pas de sous-titres en anglais, je parle même pas en français). A l’ère d’internet, ce genre de comportement est juste aberrant, et c’est pourquoi il ne faut pas s’étonner du discours pro-piratage dans ce contexte.
Je vous donne entièrement raison quant au principe du piratage, il me semble que c’était évident à travers mes propos. Cependant j’aimerais savoir : trouvez-vous normal que l’on ne puisse trouver en epub Helliconia d’Aldiss, le Centre galactique de Benford, les Seigneurs de l’Instrumentalité de C. Smith, le cycle des Inhibiteurs de Reynolds, la trilogie martienne de KS Robinson et tant d’autres encore ?
« Normal » ne me semble pas un terme adapté. Frustrant et regrettable pour le passionné, évidemment, et potentiellement pour la littérature. C’est probablement explicable économiquement – le marché numérique reste très peu développé, et développer des livres numériques nécessite des accords distincts et une nouvelle fabrication. Rien de cela n’est immédiat. Et il peut y avoir d’autres raisons – pour ma part, je vous renvoie à ceci : http://lioneldavoust.com/2013/ma-position-sur-de-potentielles-editions-numeriques/
Parfois, certaines éditions numériques n’existent pas tout simplement parce que je ne suis pas satisfait des conditions proposées.
Du coup, la situation est paradoxale (observation générale sur ce fil de commentaires) : d’un côté, on proteste sur le manque d’éditions numériques de certains ouvrages, on recourt au piratage pour y pallier, puis l’on encourage les auteurs à changer le système (voir des réactions précédentes) – sans se rendre compte que parfois, si lesdites éditions sont manquantes, c’est justement parce que l’auteur essaie de se battre pour des conditions plus acceptables et n’accepte pas de signer aveuglément.
Je suis d’accord avec vous (je l’ai dit plus haut) qu’idéalement, on devrait pouvoir vous fournir le numérique avec le papier, et que du numérique plus cher que du papier, c’est absurde.