« Les Dieux sauvages » adapté en comédie musicale !

Auguste lectorat, j’annonçais depuis quelque temps des projets accaparants mais heureux que j’espérais pouvoir dévoiler très bientôt. Initialement, l’annonce devait être faite en octobre pour une première en novembre, en même temps que la publication de L’Héritage de l’Empire ; mais, avec les conditions actuelles, on m’a autorisé à en parler dès maintenant, et je suis très, très heureux de pouvoir l’annoncer :

La saga « Les Dieux sauvages » va être adapté en comédie musicale !

Pour moi qui suis un grand fan d’œuvres comme Phantom of the Opera, qui m’efforce de cultiver un versant musical en parallèle de l’écriture, voir ainsi l’une de mes histoires mises en musique est un immense honneur, surtout que la première sera prévue au Her Majesty’s Theatre, dans la grande tradition des œuvres d’Andrew Lloyd Weber ! Le titre sera bien entendu, très sobrement :

The Feral Gods – The Musical.

Her Majesty’s Theatre à Londres. Photo: Andreas Praefcke / CC BY 3.0

Bien sûr, il s’agit d’une adaptation ; quand l’on écrit une saga de fantasy, on dispose de l’entière liberté de la littérature, et l’on ne se limite pas en termes de figurants, d’effets spéciaux ou de lieux. Cependant, les techniques modernes du spectacle, importées entre autres des grandes adaptations live venues du Japon, permettront, je peux vous le promettre, des visuels stupéfiants, comme ce Ganner holographique de trois mètres de haut plus grand encore que dans la série, car, ainsi que nous en avons discuté avec les producteurs, Ganner ne peut jamais paraître assez grand.

Surtout, il a été décidé – avec mon plein accord – que le ton parfois dur de la saga nécessitait quelques altérations pour être retranscrites sur une scène, au cours de performances live. Cependant, j’ai évidemment veillé au respect absolu de l’univers, de l’histoire et des personnages, ce qui me permet, dès aujourd’hui et en avant-première, de vous dévoiler les premiers highlights de cette adaptation qui promet de repousser encore davantage les limites de cette forme artistique, osant un mélange de genres inouï jusqu’à présent couvrant du symphonique jusqu’à la synthpop la plus catchy.

Ainsi Mériane, la Messagère du Ciel éponyme, réalise un certain nombre de duos avec Wer, et, dans le plus pur respect du récit et pour la première fois de l’histoire dans une comédie musicale, l’acteur jouant le dieu ne sera pas seulement invisible, il ne sera juste pas là du tout.

Mais cette voix divine dans ma tête 

Voix divine sourde et tempête 

Mais cette voix divine dans ma tête 

Leitmotiv, nuits secrètes 

Tatoue mon âme à mon dégoût

Mériane sur les remparts de Doélic dans The Feral Gods – The Musical

D’autre part, pour des raisons d’accessibilité à tous les publics, les confrontations entre Ganner et Chunsène ont été revisitées en duos lents et émouvants, laissant transparaître la quête de sens de chacune de ces âmes égarées et, au fond, tellement sensibles, en un clin d’œil aux plus belles pages de la chanson française, comme lors du poignant On aime juste tuer des gens (mais pas pour les mêmes raisons).

Leopol ne sera pas en reste, bien sûr. Il lui est donné les plus belles complaintes du spectacle, avec des morceaux comme Mon épée, ma masculinité ou encore Tout cela est très sale, c’est bien pour ça que je suis en blanc.

Leopol ramenant Mériane dans La Messagère du Ciel (photo de répétition)

Ce qui n’empêchera absolument pas les mélodies entraînantes et les grands ensembles de danse caractéristiques de la comédie musicale : même sans les costumes, j’ai vu les répétitions du ballet des Enfants d’Aska pour L’Éternel Crépuscule ! Ça pue du…, et je peux vous dire que c’est une incroyable émotion de voir ainsi les monstres odieux venus des profondeurs de votre inconscient prendre vie avec autant de sourires chaleureux.

Enfin, pour bien en restituer l’aspect résolument bizarre relevé par de nombreux lecteurs, les passages Ailleurs, décrivant les échanges entre les dieux Wer et Aska, seront par ailleurs retranscrits sous forme de passages bruitistes composés en collaboration avec l’IRCAM, avec un featuring spécial de Henry Rollins les scandant en spoken word.

Un mot de logistique toutefois : il est bien sûr impossible de rendre une saga de cinq très épais volumes encore en cours d’écriture au cours d’un spectacle de seulement deux heures, aussi l’histoire sera-t-elle légèrement condensée et adaptée. Cependant, les techniques de pointe du spectacle vivant ne seront pas les seules à être importées du Japon : pour la première fois dans l’histoire de la comédie musicale, The Feral Gods – The Musical adoptera le rythme du kabuki, soit une représentation sur une journée entière.

Pour le premier volume de la série, bien entendu.

Crédit photo “Leopol ramenant Mériane” : par Chouaib brik sur Unsplash.

2020-03-30T09:05:30+02:00mercredi 1 avril 2020|Expériences en temps réel|6 Commentaires

Black Swan : un cygne du fantastique

Natalie Portman, de la danse classique, Tchaikovsky et Le Lac des Cygnes, l’histoire d’une femme qui rêve de devenir danseuse étoile, tout serait réuni pour un film trop romantique et trop bôôô – et c’est ce qu’ont certainement cru les parents peu renseignés qui ont amené leurs petites filles à la séance.

Lesquels sont tous partis avant la fin. Mouhaha.

Nina est une danseuse de ballet talentueuse, mais vieillissante pour ce milieu, et couvée par une mère abusive qui n’a jamais réussi à sortir du rang. Quand l’étoile de la troupe prend une retraite plus ou moins forcée, c’est peut-être pour Nina la chance de progresser vers le haut de l’affiche et d’incarner les deux cygnes du Lac. Cependant, c’est une obsessionnelle de la technique, pétrie de blocages et d’une certaine innocence, ce qui fait d’elle un cygne blanc parfait… mais l’empêche de se libérer pour atteindre le charisme magnétique du cygne noir. Si elle veut réussir, il va lui falloir trouver en elle-même une nouvelle Nina, tout en déjouant la jalousie et les coups bas de ses camarades.

Effectivement, dit comme ça, cela sonne comme un Léa Passion Danse Classique. Sauf que Black Swan est un film d’une violence psychologique extrême. Dans les relations entre personnes bien entendu – danseuses, la mère parfaitement abusive de Nina, jusqu’au chorégraphe, campé par un Vincent Cassel en parfait dominateur -, mais surtout dans le rapport au corps, évidemment bien particulier dans la recherche de la perfection, et poussé ici dans ses retranchements. Comme bien des athlètes, Nina soumet sa chair à des pressions terribles pour atteindre l’idéal, n’ayant rien d’autre dans l’existence que son rêve de danse, lequel n’est peut-être, d’ailleurs, que la projection de celui de sa mère.

Et Nina va progressivement plier sous la pression. Car incarner le cygne noir exige qu’elle se confronte à une part d’elle-même qu’elle a totalement verrouillée et bannie : la part de laisser-aller, de folie, de spontanéité dont l’absence fait justement la danseuse parfaite qu’elle est. L’ouverture imprudente de cette porte va bouleverser sa vie et sa psyché de manière irréversible.

Black Swan est donc l’histoire d’un contact avec l’ombre jungienne – la part d’inconscient et de refoulé qui finit par contaminer et briser notre existence quand on la bannit avec trop de force. Ce contact se fait ici selon la grammaire du fantastique, où, progressivement, la réalité va glisser vers l’impossible, source d’angoisse et d’incompréhension : on navigue donc en plein dans les territoires de l’imaginaire. On peut quand même reprocher un usage assez grossier de ce langage à l’image – la symbolique, toute en noir et en blanc, a la subtilité d’un panneau clignotant proclamant “ICI SAY LA GENTILLE, LA SAY LA GARCE” – mais, vu le thème et le large public auquel le film veut s’adresser, on le pardonnera sans mal. Et, surtout, le film ne tombe jamais dans un manichéisme primaire, brouillant les cartes avec intelligence pour présenter la dialectique en termes de “contrôle / abandon” et non de bien et de mal.

Le scénario et sa conclusion seront sans grande surprise pour les habitués des genres et même les aficionados de David Lynch, mais Black Swan s’apprécie surtout pour son atmosphère et son image délicieusement malsaines, paradoxe pour une troupe qui vise à créer la beauté et sa perfection, et surtout pour l’interprétation absolument renversante de Natalie Portman, qui parvient à emporter sans réserves le personnage par ailleurs un peu bidimensionnel de Nina et offre une incroyable performance d’actrice en danseuse de ballet.

Black Swan est donc une fascinante plongée, dérangeante et dure, dans les méandres de l’inconscient et pousse à l’interrogation sur la part de glauque que nous cachons tous en nous ; un parcours initiatique au sens obscur du terme à recommander à tous ceux que le sujet intéresse.

 

2011-02-28T11:33:49+01:00lundi 28 février 2011|Fiction|8 Commentaires

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