RÉVÉLATION : La Succession des Âges sera un haiku

Je travaille traditionnellement de façon secrète ; je peine à révéler des détails des projets en cours tant qu’ils n’approchent pas de leurs dernières étapes. Mais avec mon retour sur Twitter, je m’étais promis de lever un peu le voile sur la genèse de La Succession des Âges, l’ultime volume de « Les Dieux sauvages ».

Vous le savez, j’ai toujours cherché à adapter la forme d’un projet à son fond ; et tandis que nous approchons du printemps, il est temps de partager un peu plus la forme finale voulue pour ce livre. Avec tout l’élan acquis au cours des quatre – et épais – volumes précédents, il me semblait nécessaire de proposer une conclusion digne de ce nom – j’en ai parlé dans la feuille de route 2022 ; c’est le soin désiré pour cet ultime acte de la saga qui a dicté d’en repousser la publication, afin de le réaliser conformément à ma vision. Mais pourquoi, exactement ?

Nous parlons fréquemment dans Procrastination de la concision et de la nécessité d’évoquer plutôt que de dire ; avec l’expérience acquise sur cette série, j’ai voulu appliquer à la lettre exacte ces préceptes pour boucler la saga. Poussant la perfection formelle jusqu’à ses derniers retranchements, je peux vous révéler aujourd’hui que La Succession des Âges sera un haiku, frappant directement au cœur (et par totale surprise, car mes éditeurs ne sont pas encore au courant, n’est-ce pas excitant ?).

Or, un haiku mesure en français environ 70 signes, et si vous suivez les barres de progrès, à ce stade, j’en suis à 58% du livre – j’en suis en fait à 40 signes, ce qui représente, pour tout dire, 7 mots. Mais l’écriture n’est pas que question de quota journalier, de pages remplies ni de volume, il s’agit avant tout de sens, et je peux vous dire que ces sept mots ont été dûment choisis au cours de l’année précédente. Certains, d’ailleurs, m’ont demandé trois mois entiers à plein temps, ce qui explique la lenteur de production sur ce roman.

À présent, cela peut poser un problème de support physique, tout comme un livre volumineux. Je sais que les bibliophiles ont à cœur d’avoir une collection esthétiquement cohérente sur une saga ; mais qu’ils et elles n’aient crainte, car j’ai pris la liberté, pour faciliter le travail de Critic, de rechercher des solutions graphiques permettant de conserver grosso modo la même épaisseur d’ouvrage. La Succession des Âges sera ainsi imprimé sur du carton plume d’un grammage de 1260 g/M2, portant un mot par face, ajoutant ainsi le bénéfice d’une lecture confortable même en cas de presbytie. La réalisation de la maquette est extrêmement prometteuse :

Je ne doute pas qu’en vertu du support seul, ce livre est appelé à faire un carton.

Par ailleurs, cela signifie que pour la première fois, La Succession des Âges sera disponible en audiolivre ! La production sera grandement facilitée par ce format, puisque je pourrai en faire la lecture moi-même. Bénéfice supplémentaire : sa version en mp3, peu gourmande en place, sera lisible même sur les anciens terminaux, comme les Thomson TO7/70 équipés de lecteurs de disquettes 5’1/4 ! Et bien sûr, de façon générale, il sera facile de lire et relire ce livre, plusieurs fois dans la même soirée même, si on le désire, ce qui représente un bénéfice indiscutable sur les romans précédents.

Je suis ravi de partager ces nouvelles perspectives avec vous et j’espère que vous m’accompagnerez dans cette exploration d’un format parfaitement inédit (et pour cause) dans le monde du roman ! Je vous donne rendez-vous en juin, en principe, pour le huitième mot de cette histoire complexe, qui ne peut être servie, justement, que par le non-dire.

À très bientôt !

2022-03-29T08:57:04+02:00vendredi 1 avril 2022|Expériences en temps réel|8 Commentaires

Habitat Dudule

Hier, auguste lectorat, j’ai acheté un porte-manteau.

Ne fuis pas, il y a des choses à raconter, je t’assure. Mais avant d’entrer dans le vif du sujet, il me faut m’excuser pour le jeu de mots à la fois graveleux et consternant qui constitue le titre de ce billet : vois-tu, comme bon nombre d’auteurs d’imaginaire, j’ai signé de mon sang un pacte avec les forces obscures du calembour, lors d’une nuit orageuse sur un cimetière indien, qui ma garantit l’inspiration concernant bons mots et blagues au moment opportun ; c’est ainsi que la Providence m’a fait la faveur du merveilleux Avatar Simone dont je suis décidément très fier. Mais le pacte comprend un prix, comme tous les pactes.

Je ne peux résister aux jeux de mots les plus consternants, même si ma réputation, ma carrière et ma vie en dépendait.

Donc, hier, j’ai acheté un porte-manteau.

Il faut que tu saches, auguste lectorat, que les auteurs ne font rien gratuitement : tous leurs actes, semblassent-ils des plus anodins, ont forcément un lien avec l’écriture, leur obsession, la lentille à travers laquelle ils voient le monde. En fait, hier, j’étais donc allé acheter la licence d’Office 2010 pour disposer du nouvel OneNote, le logiciel de prise de notes que j’aime d’amour et qui me sert à centraliser toutes mes infos sur les projets en cours. Et puis, il se trouve que je n’ai pas de porte-manteau, que c’est naze, mes manteaux traînent par terre, quand je reçois du monde, je suis obligé de dire aux gens : navré, mais j’ai pas de porte-manteau, par contre cette énorme valise qui a traîné pendant un an dans mon hall à mon retour de la Worldcon peut servir de repose manteau. Tu veux une bière ?

Donc, en revenant de la Fnac, je suis passé chez Habitat et je me suis dit : pourquoi ne pas en profiter pour acheter un porte-manteau ?

Auguste lectorat, j’avais d’Habitat l’image d’une boutique un peu bobo, un peu chère et pas mal moche, mais plutôt solide, genre Ikea en plus cher et en souvent pas terrible. Le genre d’endroit où vont des gens qui répondent “mais oui bien sûr” quand on leur propose de leur livrer la commode Bartleby blanc laqué pour seulement 75 € de plus.

Mais moi, je voulais juste un putain de porte-manteau.

J’ai trouvé un modèle vaguement convenable, un peu cher, mais il faut savoir aussi sur les écrivains, auguste lectorat, que leur temps est de l’argent : pécho l’engin là, alors que j’étais dans les parages, fût-il cher, m’aura coûté toujours moins que d’aller prendre une heure et demie pour sortir de la ville, me pointer chez Ikea, faire quarante fautes de transcription à Bügülzuppkrømm, qui sera comme par hasard le modèle qui me plaira, sur la feuille de commande, insulter dans ma barbe quelques couples fatigués qui n’ont rien de mieux à faire que de rester en plein milieu du chemin en discutant de la couleur d’abats-jours tous moches de toute manière, retirer le truc à la caisse, rentrer chez moi, me rendre compte qu’il manque une rondelle de treize dans le colis, repartir là-bas, insulter dans ma barbes d’autres couples, rentrer, monter l’engin et puis le casser au bout de deux jours parce que j’aurai fait ça n’importe comment. Alors hein.

Malgré les apparences, je ne suis pas un homme aux idées reçues, même si je parle de couples fatigués qui restent dans le chemin en discutant de la couleur d’abats-jours tous moches ; je suis parfaitement conscient d’avoir dans les recoins marécageux de ma psyché des remugles de clichés aussi bêtes que méchants et qui me font ricaner la nuit quand je sacrifie des bébés pandas à la gloire d’Azathoth. Mais je me disais, man, t’es vraiment qu’un gros connard, t’as une espèce de vision de gauchiste premier degré d’Habitat, c’est quand même pas mal ce qu’ils font, tout ne te plaît pas mais tous les goûts sont dans la nature, regarde, leurs serviettes éponge ont l’air moelleuses, leurs horloges sont rigolotes même si tu n’en voudrais pas, et puis t’as même acheté un porte-manteau là-bas, tu fais partie de leur clientèle maintenant, alors stop le vieux cliché, et puis t’as trente ans passés maintenant, tu commences à aimer le beige, fais-toi une raison.

C’était jusqu’au moment où j’ai pris possession du colis.

Pièce à conviction :

Alors maintenant, qu’on m’explique quelle boutique, qui se soucie un minimum d’une clientèle piétonne, peut avoir le sadisme de faire des PUTAINS DE CARTONS AVEC DES BORDS BISEAUTÉS (et donc coupants) ?

Non mais sérieux ? Si ça c’est pas du mépris du prolétariat, des petites gens, des vélocipédistes, que dis-je, du développement durable lui-même – puisqu’un véhicule polluant sera le mode de transport préféré pour rapporter l’achat convoité ?

Tout ça pour un foutu porte-manteau en fil d’acier qui ne doit peser que dix kilos tout mouillés à terme ? Je jure que le colis me faisait l’effet d’en peser quarante, et pourtant je fais du sport depuis trois mois, c’est dire ma forme olympique.

Et après quoi ? Je suis sûr qu’ils lestent leurs cartons de canapés avec des ancres de paquebots.

L’oeil ne voit que la surface des choses, qu’ils disaient. Ouais, ben, parfois, l’emballage est instructif aussi.

2011-05-19T14:51:55+02:00jeudi 19 mai 2011|Humeurs aqueuses|14 Commentaires

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