Fort intéressante étude rigoureuse confirmant ce que l’on pressentait intuitivement : ce sont les contenus extrêmes qui génèrent le plus d’interactions sur les réseaux.
Sources of news and information rated as far-right generate the highest average number of interactions per follower with their posts, followed by sources from the far-left, and then news sources closer to the center of the political spectrum.
Looking at the far-right, misinformation sources far outperform non-misinformation sources.
Far-right news sources on Facebook more engaging
Depuis bientôt quinze ans de blogging, j’ai bien pu le mesurer empiriquement : personne ne réagit à une information modérée ou factuelle. Les messages portant sur mon actualité sont ceux qui génèrent le moins d’interactions ; les articles à opinions fortes sont au contraire ceux qui font réagir. C’est une évidence, et c’est normal : on tend à ne pas signaler son assentiment, c’est la position par défaut.
Là où cela devient un énorme problème sociétal, c’est quand l’engagement devient la métrique reine. Les réseaux, et Facebook en tête, se moquent de la qualité de vos interactions : ce qui compte, c’est vous garder sur la plate-forme pour vous montrer de la pub ciblée (c’est leur modèle économique). Et pour vous garder, il faut vous faire interagir, il faut vous impliquer dans les contenus (dieu que je hais ce terme), soit : générer de l’engagement. Et ce qui génère de l’engagement se trouve promu, visible, générant davantage d’engagement, etc.
C’est une attitude à la fois sociopathique et névrotique. Déjà, il s’agit de court-circuiter la raison pour nourrir la réaction instinctive, viscérale, ce qui distord l’information vers des hallucinations collectives type Qanon. Mais au-delà de ça, cette poursuite du commentaire, du like, nourrit insidieusement chez les personnes une tendance à l’emportement, à la catégorisation outrancière, et n’encourage qu’à poster des contenus (gah) à leur tour susceptibles de réactions. Le tout générant une spirale d’aigreur dont, franchement, je me demande à qui elle fait du bien (à part aux profits de Facebook de Twitter).
J’espère qu’un jour, nos sociétés parviendront à émerger de ce modèle égotiste et collectivement misérable, pour espérer peut-être des plate-formes davantage tournées vers la qualité des interactions que sur leur nombre, vers la construction commune plutôt que vers la discorde. Qualité Vs. quantité : la leçon que l’être humain se trouve peut-être perpétuellement voué à réapprendre sous des formes sans cesse différentes.
Merci pour cet article qui m’a provoqué un fort sentiment contradictoire aussi agréable qu’être assis entre les deux fameuses chaises.
D’un côté, je me suis dit « tiens j’ai envie de poster un commentaire » et de l’autre « ne suis-je pas exactement en train de faire ce qui est dénoncé dans une certaine mesure puisque c’est un article d’opinion ? »
Puis les chaises se sont transformées en une spirale boisée alors que je songeai à cette photo du kookaburra trop mignon que j’ai montré à mon bêta-lecteur mais à qui je n’ai pas osé posté un petit commentaire sur votre blog, car j’étais envahi d’un sentiment de futilité honteuse, puis les articles sur la parution de « Comment écrire de la fiction ? » où je n’ai pas forcément osé dire que j’attendais impatiemment la sortie parce que je trouvais le terme un peu fort et que je me suis visualisée comme une affreuse groupie… mais j’ai partagé l’article quand même, puis à ces vidéos ou articles où je ne dis mot, et au summum, à ces forums que je lis sans être inscrite… Bref, je me suis perdue.
Tout ça pour dire merci pour ce billet d’humeur (et mes phrases sont trop longues).
Mais merci beaucoup, Ghost ! 😊 (le prénom le plus classe de la Terre.)
Je ne suis pas Facebook, moi je suis Chouette™. (Ou kookaburra. Ce qui est sûr c’est que mon humour est interdit par la convention de Genève.) Merci beaucoup de votre intervention qui fait très plaisir, pour vos lectures et pour votre attente de Comment écrire de la fiction ? (en espérant qu’il vous parle) (ou pas, parce que c’est un livre, ça ferait peur) (j’avais prévenu 😁).
De manière générale, pour ma part, j’aurais plutôt peu d’intérêt à générer de l’engagement, en fait. Le blog n’est que mon plaisir, et une façon de payer ma dette karmique. Les commentaires, c’est so 2005, mais bon, s’il peut y avoir quelques échanges sympa par ici loin de la misère des réseaux, c’est toujours ça de kookaburra !
Merci à vous. 😊
https://www.babelio.com/livres/Birnbaum-Le-courage-de-la-nuance/1308827
Je viens de découvrir aujourd’hui cet essai, sorti il y a quelques jours. Je ne l’ai donc pas lu, mais le titre et le résumé m’intéressent beaucoup. Comme toi, c’est une réflexion qui est née quand j’ai quitté les réseaux sociaux ; comme toi, j’espère que les gens finiront par sortir de ce mode de communication !
Oooh le joli titre que voilà et le discours fort alléchant. Merci pour la référence !
Je doute que l’on sorte des réseaux un jour, mais si l’on pouvait au moins contraindre les entreprises à cesser de détricoter activement le tissu même de la raison et de la société, ça serait pas mal.
Merci pour cet article.
Comme justement dit avant (par Ghost Hildly), dois-je commenter ou non ? Peut-être que les utilisateurs et utilisatrices des réseaux devraient plus souvent se poser cette question. Et ceux qui pourraient laisser des commentaires à la fois bienveillants et intéressants sont souvent ceux qui doutent le plus et ne le font pas.
Cela étant dit, le fait de laisser un commentaire ici fait-il de moi quelqu’un qui ne doute pas, malveillant et inintéressant ?
Ce dont je suis sûr c’est que je m’impose des règles si je commente, la première : Ce que je vais dire le sera-t-il avec bienveillance ? Si la réponse est non, je ne poste même pas. La haine devrait se mériter 😉
Aha je suis ravi de ne pas la mériter 😅 Merci à toi.
Je suis tout à fait d’accord avec toi ; hélas, ce n’est pas ce que stimulent les réseaux, comme leur fonds de commerce dépend des réactions instinctives (et je ne prétendrai certainement pas ne jamais avoir été fautif en la matière !).
Cela crée une véritable spirale toxiques de réactions catégoriques et tranchées qui débordent dans la vie réelle, et l’isolement de l’époque ne nous aide pas… J’espère qu’une fois un peu de liberté retrouvée, on pensera d’abord à se faire des câlins (librement consentis ofc) plutôt que la guerre.