Les éditeurs n’ont pas pour mission de vous faire progresser

This just in, cet excellent fil sur Twix (ben quoi ?) d’absolue utilité publique :

Et qui me rappelle deux choses : d’une part, la passionnante intervention de Mireille Rivalland dans l’épisode 501 de Procrastination, où elle expliquait ouvertement que dans ses débuts à l’Atalante, elle renvoyait des retours circonstanciés pour chaque refus de manuscrit, et que les discussions sans fin qui s’ensuivaient ont fini par la dissuader de rentrer là-dedans.

D’autre part, des réflexions amères qui passent de loin en loin sur les réseaux, concernant, le fait que les maisons d’édition ne veulent pas aider les jeunes auteurs, relire des manuscrits déjà soumis auparavant, et mettent des années à répondre – insérez les frustrations courantes vis-à-vis du système.

Mes amis, je suis navré, je vais être brutal, mais les maisons d’édition n’ont pas pour vocation de vous apprendre à écrire ni de vous faire devenir de meilleurs auteurs, du moins pas tant que vous et elle ne vous êtes pas accordés un minimum sur un projet à défendre (ce qui implique un niveau basal de compétence comme de professionnalisme pour arriver à construire ladite entente), et là encore, vous n’êtes pas la finalité, c’est le projet, la finalité. (Votre apprentissage est un heureux sous-produit du processus, qui pourra être réinvesti dans tous les projets à venir, qui se conduiront à nouveau avec les mêmes équipes si tout le monde est content.) Ce sont des entreprises qui sont chroniquement en sous-effectif, noyées sous la masse des soumissions (qu’elles lisent et éclusent néanmoins parce qu’elles aiment sincèrement le livre) et dont le travail est de produire de chouettes livres pour leur public.

Pas de prendre en main votre carrière à vous. Vous êtes la seule personne à pouvoir le faire.

Encore une fois, appliquons la transformée simple qui consiste à transposer la problématique dans le domaine de la musique :

Une maison de disque n’a pas pour rôle de vous apprendre à chanter ni à jouer de la guitare, hein ? C’est absurde, on est d’accord ? Si vous présentez du potentiel, et si la rencontre esthétique / artistique se fait, alors oui, la maison va vous aiguiller et bâtir dessus. Mais il faut déjà que le potentiel soit là, et cela veut dire savoir jouer un minimum de son instrument.

C’est exactement la même chose dans l’édition littéraire, ni plus, ni moins. La difficulté inhérente à l’édition est que le langage est un outil largement plus répandu que le chant lyrique, et qu’il est donc plus ardu de voir soi-même si l’on chante juste ou pas. D’où l’importance supplémentaire du travail et, oserais-je dire, du retour critique.

Sérieusement, lisez le thread ci-dessus – chaque twix (je ne m’en laisserai pas) est un distillat d’un problème chronique dans le monde de l’édition pour les jeunes auteurs, et certaines réponses imbéciles qui y ont été faites ne viennent qu’inscrire un gros “CQFD” en lettres de feu visibles depuis Jupiter. Sur chaque point qu’adresse Bleuenn, les éditeurs pestent en coulisses depuis des années.

Maintenant, ne déprimez pas. Au contraire. Soyez malins. Revers positif de la médaille : si, sans même parler d’attitude professionnelle, vous vous comportez avec un minimum de bon sens, c’est-à-dire que vous n’arrivez pas comme un complet abruti sorti du métatarse de Jupiter, vous vous placez au-devant d’une grande masse qui, tragiquement, s’autodisqualifie. Dans votre cas, il ne restera plus qu’à parler du texte, ce qui place la conversation sur le seul domaine où, très franchement, elle devrait se tenir avant toute chose !

Les ressources disponibles aujourd’hui pour travailler son écriture sont ultra abondantes (je me contenterai de citer la nôtre et la mienne). Écrire, c’est comme un instrument de musique : ça demande autant de boulot. Alors : au travail – c’est comme toujours la seule chose que vous contrôlez. Bon courage – et bon dieu, amusez-vous !

2023-07-31T09:15:39+02:00lundi 31 juillet 2023|Technique d'écriture|2 Commentaires

Bruce Holland Rogers en entretien vidéo pour Vingt-huit Façons de tomber dans le ciel

Bruce Holland Rogers, auteur du merveilleux Vingt-huit Façons de tomber dans le ciel que j’ai eu l’honneur de traduire, était présent au festival ImaJn’ère en avril dernier ; je relaie avec un peu de retard son interview vidéo autour du livre, des hôtels, et du singulier poète Donat Bobet.

2023-07-26T09:20:43+02:00mercredi 26 juillet 2023|Dernières nouvelles|Commentaires fermés sur Bruce Holland Rogers en entretien vidéo pour Vingt-huit Façons de tomber dans le ciel

Entrez dans ma cave

Approchez, approchez ! Petits et grands, venez, approchez et contemplez le cirque tragicomique d’une vie d’accumulation en partie due à un trouble obsessionnel compulsif ! Cela, et aussi le fait que, toute ma vie, j’ai eu la possibilité de déménager soit dans un logement plus grand, soit avec une plus grande cave, me permettant de conserver perpétuellement des cartons dont le contenu m’était devenu aussi mystérieux que l’inconscient d’un des premiers patients de Sigmund Freud.

Bref : j’ai déménagé au bout du monde. Et chaque mètre cube coûtant là en revanche une tranche de rein, il m’a fallu opérer un tri drastique, l’occasion également de retrouver quelques merveilles crues oubliées, de la documentation et du matériel accumulés en des époques aux mœurs différentes, et même, quelques fragments de passé étrangement prescients.

Approchez, approchez, et entrez dans un voyage dans le temps personnel et vain ! Mais précieux, car c’est le mien !

La technologie, c’est plus ce que c’était (ou bien si ?)

Regardez ! Regardez comme on se guidait et s’orientait en cet âge de pierre où l’on utilisait encore du papier pour, par exemple, rédiger sa liste de courses – comme des animaux ! Et regardez, y a des prix en francs !

Le plus étrange est que Momox m’a proposé de les racheter 1€ pièce. Il doit exister une secte collectionneuse de vieilles cartes, à la recherche du DaVinci code dans les souterrains du port des Minimes.

Mais, fantastique, ces plans recèlent également d’absolues splendeurs promouvant la technologie du futur : le téléphone en mobilité, grâce à ce fleuron qu’est… la cabine ! Avec des télécartes !

Internet étant d’ailleurs la technologie en plein essor du moment, à laquelle on peut accéder à la vitesse étourdissante de sa ligne téléphonique grâce à un modem qui, comble du raffinement, fait aussi Minitel ! Le meilleur des mondes ! Extraordinaire : ordinateur éteint, recevez et stockez vos fax ! Inclut la version complète de Netscape Navigator 3 ! Je suis étourdi.

Mais qu’allait-on bien pouvoir faire avec tout ça ? Il fallait bien de l’espace pour stocker les données récupérées à très haute vitesse sur les autoroutes de l’information. Heureusement, tout pouvait être réglé avec l’essor des disques durs externes. 20 gigaoctets ! Oh là là, avec tout ça, je pouvais bien stocker l’intégralité de ma musique la graver en mp3 à destination de mon baladeur CD.

(J’ai la tête qui tourne en considérant que ma GoPro stocke aujourd’hui cinquante fois d’espace sur une carte SD plus petite que l’ongle de mon petit doigt.)

C’est marrant (ou pas) de voir qu’en 2004, au-delà de cette nouveauté brûlante qu’est Windows XP, on testait déjà des systèmes de visioconférence. En grand écran s’il vous plaît.

Bon, on arrête les conneries.

Parce que j’ai quand même du vrai joli vintage d’origine. Non mais.

Heureusement, à l’époque, je savais tout de l’avenir. Ou pas. Le bouquin a accumulé les années tandis que je remettais perpétuellement sa lecture.

Oups.

Bizarrement, celui-là, Momox n’en a pas voulu.

Le grand carousel de mon passé chevelu

Ah, mais, auguste lectorat ! Chers grands et petits visiteurs ! Le cirque n’est pas complet tant que je ne vous ouvre pas, dans toute sa touchante vulnérabilité, l’amusement de mon propre vintage, que nous ne soufflons pas ensemble la poussière d’une vie stockée à la cave dans les diverses ramifications qu’elle a pu prendre pour terminer en méandres tantôt vivaces, tantôt asséchés.

Amusons-nous déjà que quarante ans plus tard, on puisse retrouver ceci :

QUARANTE ANS BORDEL

Alors hein, avec vos carnets de correspondance digitaux, là, je me MARRE, vous ne pourrez jamais retrouver vos PDF à la cave AHAHAH

Bon heu, bref

Je sais évidemment que j’avais toujours voulu être biologiste marin, je blague régulièrement que je voulais être commandant Cousteau mais que la place était déjà prise, en revanche, visiblement, j’avais vraiment écrit à la fondation dans un probable moment de désenchantement quant à une future orientation professionnelle, et figurez-vous que ces gens répondaient vraiment, avec de la vraie doc attachée, et que là quand même, c’est limite une mission de salut public.

Je vous dirais que retrouver ça m’a ému un brin. Y figurait le centre de recherches de La Rochelle où, sept ans plus tard (en 2000), je me retrouvais en stage de fin d’études.

Reprenons. Plus tard, j’étais donc en prépa maths sup bio, et comme un livre c’est sacré et que ça ne se jette pas, ça se vend ou se donne, on se trouve bien emmerdé quant on est écrivain professionnel et qu’on retrouve à sa cave ce genre de chose :

Nan parce que j’ai bien regardé, ça n’a rien d’un traité sur la typographie, hein, c’est plein de symboles cabalistiques que j’ai compris jadis mais qui aujourd’hui ne m’évoquent que le Necronomicon, donc dans le doute, j’ai préféré remiser ça avec mes ouvrages sur les espaces non-euclidiens (vous l’avez ? Subtil. Je suis fier.)

Il y a aussi des trucs qui énervent et consternent. Dans ma documentation papier de l’époque (assez conséquente – bon dieu, que l’invention du PDF a été une bénédiction pour les forêts), j’ai retrouvé des machins du genre :

Il en faut encore, vingt ans plus tard, pour contester et chouiner, alors que CNN, donc un média fort obscur, disait déjà que le changement climatique était “évident”. Qui aurait pu croire le débat scellé à l’époque, hein ?

Dans les mêmes eaux, visiblement, mes copies de français de prépa avaient déjà tracé ma future carrière d’écrivain. Si La Succession des Âges est à la bourre, ne cherchez plus, ma prof de français m’avait déjà cerné en 1998 :

Vous remarquerez l’exercice de haut vol qui consiste à pouvoir diluer un résumé. Et ça, c’est la marque des plus grands, parfaitement.

Mais heureusement, j’allais devenir étudiant ensuite, et WAOUH J’AI CARRÉMENT VINGT ANS, roulement de tambour chers petits et grands, préparez-vous à la tronche correspondante, on ne rigole pas, ou du moins pas assez fort pour que je vous entende depuis l’Australie :

Le joyau de l’exposition

Chers amis ! Petits et grands ! Il est temps pour moi à présent de vous révéler le joyau de cette exposition, la splendeur suprême qui, lors de ma redécouverte, m’a plongé dans un ahurissement si abyssal qu’il m’a fallu l’évacuer d’un rire si vaste que ma voisine a tapé sur son plafond avec un manche à balai.

Mes amis ! Replacez-vous il y a trente ans, dans un contexte innocent, bien avant la démocratisation d’Internet et l’inévitable explosion de mauvais esprit, de débauche (et carrément de criminalité) qu’il a charrié dans son sillage. Fut un temps, mes amis, où pour le grand public, les mots s’employaient juste à leur premier degré, sans sous-entendu gras ni arrière-pensée choquée !

C’est de ce temps-là que je vous parle ; un temps où, lors de mon adolescence, je fus très engagé pour la cause animale et notamment contre l’expérimentation en laboratoire et la vivisection ; j’ai redécouvert que j’étais membre d’une association militante à ce sujet pendant deux-trois ans. Association qui, donc défendait et aimait les animaux, c’était la plus stricte vérité d’un point de vue, disons… étymologique.

Association qui publiait régulièrement son journal, dont le titre… 

euh… 

eh bien… 

… disons qu’on ne choisirait plus le même aujourd’hui, hein ?

Je vous le donne en mille.

Je ne m’en remettrai jamais.

(Ah mais c’est l’ex-“jeunesse zoophile” ! Donc tout va bien !)

Au secours.

(Pour la petite histoire, une recherche rapide montre que ladite association a cessé ses activités en 1998 après vingt ans d’exercice !)

2023-07-24T09:10:53+02:00lundi 24 juillet 2023|Best Of, Expériences en temps réel|14 Commentaires

De retour fugacement

Eh bien, ma foi, le site lui-même avait décidé de partir en vacances, on dirait : que ne fut pas ma surprise en le découvrant en rideau total, étranglé par on ne sait quelle malédiction de dépassement de mémoire – impossible d’effectuer la moindre action au risque de tout foutre en rideau1. Mais tout est bon, le revoici fringuant, comme lors de son installation en 2009, ou presque, sa table wp_options allégée au passage d’un audit rageur de lignes orphelines.

Et moi itou, donc, reviendu des paysages idylliques plus beau que des cartes postales, des eaux plus chaudes que l’air, de la respiration de l’air comprimé et de la rencontre incroyable de bestioles sous-marines multiples et émouvantes. Je suis là, en ligne et frais comme un poisson perroquet.

Petite annonce de service cependant : d’ici deux-trois semaines, je connaîtrai une nouvelle semi-déconnexion d’un mois environ pour raisons de vadrouillages familiaux et amicaux consécutivement à notre mariage l’année dernière. Je sais, je suis doublement impardonnable, je m’occupe beaucoup de ma vie perso ces temps-ci. Mais j’ai chopé une légère gastro sur la fin de notre voyage de noces, donc vous pouvez être tranquille : sachez que mon karma ne me laisse pas en paix.

  1. Si vous être curieux.se : après un laborieux traçage de debug et une plongée dans la base de données, j’ai découvert que pour des raisons parfaitement mystérieuses, une tâche programmée cron d’un de mes anti spams, normalement effectuée deux fois par jour, s’était trouvée dupliquée plus de 35000 fois, ce qui, heu, étouffait un rien le truc. Mystère supplémentaire, c’est arrivé le 14 juillet, pour des raisons peut-être révolutionnaires. Une requête SQL ciblée plus tard, le serveur allait beaucoup mieux.
2023-07-24T10:37:31+02:00jeudi 20 juillet 2023|À ne pas manquer|2 Commentaires

Procrastination podcast s07e20 – Retours du poditoire avec Jérôme Akkouche

procrastination-logo-texte

Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : “s07e20 – Retours du poditoire avec Jérôme Akkouche“.

Dernier épisode de la saison, et comme la tradition s’est installée, retour annuel sur vos commentaires et questions concernant tout le podcast jusqu’ici, avec un invité très spécial : Jérôme Akkouche, auteur de Lupus in Fabula, aux éditions du Chat Noir ! Suite à une remarque faite par Estelle dans l’épisode « Se mettre dans l’écriture » (sO7e15), Jérôme offre très gentiment son retour d’expérience à la question brûlante : « Comment fais-tu pour te mettre dans l’ambiance de ton récit rapidement et vaincre la résistance ? »

D’autre part, il est question de baselines et de blurbs en couverture ; de quoi s’agit-il, et est-ce que ça fait vendre ? 

Comme toujours, le meilleur endroit pour proposer commentaires, retours et converser avec nous sur le podcast est le forum Elbakin.net : https://www.forum-elbakin.net/index.php

Références citées

– Floriane Soulas 

– Chris Vuklisevic 

– Les éditions ActuSF

– Publisher’s Weekly 

– Morgan of Glencoe

– Éric Marcelin, directeur de la librairie et des éditions Critic 

Procrastination est hébergé par Elbakin.net et disponible à travers tous les grands fournisseurs et agrégateurs de podcasts :

Bonne écoute !

2023-09-25T08:18:37+02:00lundi 3 juillet 2023|Procrastination podcast|Commentaires fermés sur Procrastination podcast s07e20 – Retours du poditoire avec Jérôme Akkouche

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