Du travail et du fruit du travail dans l’écriture

Je sors souvent une référence à la Bhagavad-Gita ici et là et dans Procrastination, et quelques échanges de loin en loin m’ont laissé entendre que cela pouvait être un peu mal compris, du coup, archivons ici ce qu’il en est. Il s’agit du célébrissime verset 2.47, que je connais le mieux sous cette forme en traduction anglaise1 :

You are entitled to the labor, but not to the fruits of the labor.

On le trouve en traduction française par exemple sous cette forme :

Tu as le droit de remplir les devoirs qui t’échoient, mais pas de jouir du fruit de tes actes ; jamais ne crois être la cause des suites de tes actions, et à aucun moment ne cherche à fuir ton devoir.

Sur Wikisource

Mais que je résume ainsi pour mon usage personnel :

On peut prétendre au labeur, mais pas aux fruits du labeur.

Quel est le rapport avec l’écriture ?

La différence entre prendre du plaisir et péter un câble.

Les réseaux commerciaux sont submergés de questions, conseils, stratégies pour arriver à convaincre une maison d’édition et publier son livre ; et soyons clairs, oui, la plupart du temps, quand on écrit, on espère être lu – il y a là un effort (considérable) de communication et le but de la communication, c’est quand même d’avoir quelqu’un en face.

Cependant, l’effet délétère – qui est humain, compréhensible, mais délétère quand même –, c’est de considérer alors que la création est orientée vers le résultat, la production, l’édition, qui, en plus, peuvent former dans notre société autant de métriques de résultat, de succès, jusqu’à un effet extrêmement retors de validation individuelle. (C’est l’incompréhension qui guide les chantres de l’IA.)

Or, quand on crée, tout n’est pas entièrement maîtrisable, et c’est une angoisse de la chose, mais aussi, selon votre constitution, une joie.

On ne maîtrise pas le résultat produit

Même le plus obsessionnel-compulsif des architectes (hello) vous dira qu’il existe toujours un moment où le récit, les personnages prennent vie sur la page et révèlent d’eux-mêmes ou de l’intrigue des éléments complètement inattendus (mais souvent géniaux). Je raconte toujours cette histoire entre Laenus Corvath et Thelín de « Bataille pour un souvenir » à « Au-delà des murs » prouvant même que l’inconscient, la Muse, le Mystère, la communication avec les mondes parallèles opèrent par-delà les textes et les ans, bref : nous sommes les vecteurs de la création, mais il se passe quelque chose d’ineffable au cours du chemin. Et en plus, la valeur de la production nous échappe toujours un peu : une scène écrite dans le sang et les larmes peut se révéler bonne à jeter comme une autre écrite avec la facilité la plus déconcertante peut s’avérer fantastique – et inversement.

Bien sûr, on peut toujours corriger, mais je pense que même avec la plus haute technicité du monde, on ne peut qu’amener sa matière initiale à un certain plafond. Vient un moment où il faut potentiellement réécrire pour imposer un meilleur élan.

On fait de son mieux, mais on ne peut pas garantir le résultat.

On ne maîtrise surtout, surtout pas le succès

Oh ! combien d’écrivains, combien de capitaines
Qui sont partis joyeux pour des carrières lointaines,
Dans les réseaux sociaux se sont évanouis !

Si l’on connaissait la recette pour faire un best-seller, mes chers amis, tout le monde l’appliquerait, à commencer par les maisons d’édition. Certes, quand on fait ce métier, on espère que ça va marcher suffisamment pour payer sa prochaine facture de pâtes, mais c’est alors que démarre un dangereux raisonnement, celui d’associer la valeur du travail (et donc du chemin de la création) au succès, aux ventes, aux chroniques, aux commentaires sur les réseaux, aux prix littéraires, aux adaptations cinématographiques et – pire que tout ce qui précède – aux mêmes métriques chez les voisins.

Or, personne n’a de réel contrôle là-dessus ! Et attribuer le mérite de son travail à ces métriques extérieures – pire, à celles des copains, qui n’ont pas la même carrière, les mêmes vœux, les mêmes univers – peut peut-être soutenir une personnalité combattive pendant un temps, mais au bout du compte, comme tout élément de son identité dont on plaque la valeur sur une composante du monde extérieur, cela ne peut que rendre foncièrement malheureux.

On fait de son mieux, mais on ne peut pas garantir le succès.

On fait de son mieux, et c’est tout ce qu’on peut faire

Je ne suis absolument pas en train de prétendre qu’il faut atteindre une espèce d’horizon détaché de tout (cela annihile l’implication personnelle, et je pense résolument qu’il est vital de croire à ce qu’on fait, donc de lui attribuer un minimum d’importance), que je pratique parfaitement ce qui précède (certainement pas), ni même que toutes ces impulsions ne sont pas humaines ni compréhensibles.

En revanche, non conscientisées, laissées à proliférer, elles sont une voie sûre vers l’épuisement professionnel, le découragement, la frustration, notamment parce qu’elles se trompent sur ce qu’est l’essence du métier. Elles confondent le résultat final (sur lequel on n’a guère de prise) avec le processus créatif lui-même.

Or, notre métier, c’est créer, ce n’est pas vendre des bouquins. Oui, je répète : notre métier, c’est créer, ce n’est pas vendre des bouquins.

Vendre les bouquins, c’est le métier de la maison d’édition.

Vendre des bouquins est une conséquence possible et merveilleuse de la création. On s’y implique, bien évidemment ! Mais tout ne se vend pas dans notre marché (qui est ce qu’il est), et se désoler, rager que ce qu’on fait ne vend pas dans cette situation revient à insulter le ciel pour le temps qu’il fait. Bien sûr, on peut être déçu ; il existe des accidents industriels (je raconterai un jour les vraies coulisses de Léviathan, près de quinze ans plus tard, il commence à y avoir prescription) ; on peut combattre, communiquer, élargir les horizons, se lancer avec courage, tenter le coup, et tout peut marcher, et on s’efforcera toujours de mettre un maximum de chances de son côté, mais au final, on prendra soin de se rappeler cette règle cardinale :

Le labeur ne nous doit aucune rétribution.

Il découle donc, logiquement, qu’il convient de concentrer son énergie sur le labeur lui-même – c’est la seule chose sur laquelle on peut influer – et, surtout, trouver dans celui-ci la toute première source de son plaisir. Un auteur qui écrit parce qu’il aime écrire sera toujours heureux (ou presque). Un auteur qui écrit parce qu’il veut vendre, être vu, reconnu, apprécié sera toujours malheureux (ou presque) parce qu’il n’aura, en définitive, jamais assez.

C’est pour ça que je trouve oiseuse et inutiles les conversations sur le « talent », « l’inspiration » et tous ces concepts qui ne nous aident à rien et sont même, si j’ose, un peu classistes : tu as le don ou tu l’as pas. En revanche, on peut tous travailler, et on peut tous trouver du sens dans ce qu’on fait. Sinon, autant ne pas le faire, hein ?

C’est aussi pour cette raison que je fais l’analogie entre l’écrivain et un DJ : le DJ est embauché pour faire danser la salle, mais il va le faire avec la musique qu’il aime (ou au moins qui ne lui écorche pas les esgourdes). Le cœur de métier, au sens de profession et de carrière, cette fois, est là : faire le travail avec cœur, sincérité et intégrité, en gardant la conscience d’essayer de s’adresser au plus grand nombre, de travailler sa technicité pour être le mieux reçu possible, mais l’un et l’autre doivent fonctionner ensemble.

Bien sûr qu’on fait notre travail du mieux possible, avec la visée raisonnée, intelligente et construite d’un public (on se rappelle, en gros, qu’on gagnera probablement mieux sa vie avec de la romance qu’avec un recueil de haikus en elfique dans le texte). Bien sûr qu’on espère rencontrer les lauriers de la victoire. On ne fait pas ça par-dessus la jambe, à balancer nos œuvres soigneusement assemblées dans le vide. On fait tout ce qu’il faut pour ça marche.

Mais, tels des généraux romains, nous devons conserver la voix perchée sur l’épaule qui nous répète que nous sommes mortels, qu’au final, tout cela est une vaste farce, que l’Univers ne nous doit rien, et que la seule validation solide vient d’abord de l’intérieur avant d’arriver d’ailleurs, et que la réalisation contient déjà en elle sa validation.

Nous pouvons prétendre au labeur, mais pas aux fruits du labeur.

  1. Il existe quantité de traductions, on préférera celle-ci ou celle-là pour quelque chose de moins lapidaire.
2024-09-09T03:02:10+02:00lundi 9 septembre 2024|Best Of, Technique d'écriture|Commentaires fermés sur Du travail et du fruit du travail dans l’écriture

La boîte à outils de l’écrivain : ce minuteur (et un dé à 4 faces)

Je suis un fervent pratiquant de la méthode Pomodoro (adaptée à la création) et si j’aime mes applications, mes bidules et mes machins qui soutiennent un mode de vie relativement nomade, il y a un plaisir à manipuler du matériel. (C’est peut-être mes envies de musique électronique qui parlent aussi en ce moment.) Plus que ça : manipuler un objet signale plus concrètement au cerveau l’intention qu’un clic dans une application perdue au milieu d’une forêt de fenêtres. Et donc, je trouve qu’il y a un intérêt notable, et un bénéfice clair, à employer un minuteur physique pour ses pomodoros plutôt qu’une application : le fait de retourner le sablier / tourner le bouton1 lance une session de travail avec satisfaction.

D’accord, mais lequel ? La moindre boutique en ligne est remplie de bidules en plastique à deux balles ou de machins ultra fancy connectés avec affichage digital Bluetooth multimédia. En fait, c’est étonnamment difficile de trouver un minuteur adapté à l’usage, parce qu’ils essaient tous d’être trop intelligents pour leur bien et ça défait le marsouin – pardon, defeats the purpose.

Les Pomodoros adaptés à la création sont légèrement différents de la méthode classique en ce sens que finir un créneau de temps ne bascule pas nécessairement sur la pause, elle autorise la pause à la première occasion qu’on souhaite. Si on est en état de flow, on veut généralement y rester. Par conséquent, le bon minuteur :

  • Ne bascule pas automatiquement sur la pause au bout de 25 minutes. C’est ahurissant le nombre de bidules qui pensent que c’est une bonne idée, mais c’est complètement con, pardonnez-moi. Et si j’ai pas envie à cet instant, moi ?
  • Est silencieux, que ce soit quand il décompte (pas de tic-tac, pitié) ou quand il parvient au bout de son créneau. Idéalement, une loupiote s’allumera discrètement et l’engin attendra sagement qu’on décide quoi faire ensuite, pour lancer manuellement la pause (signifiant là aussi une intention, un contrat avec soi).
  • Est visuel (montrant le décompte d’un coup d’œil, ça motive).
  • N’est pas bloqué sur des durées fixes de 25/5 (parfois, on veut faire davantage ; en ce moment, je fais 30/5, j’ai aussi joué avec 52/17).
  • Bonus : une action physique permet de lancer son créneau d’un tour de main rapide.

Vous n’imaginez pas le nombre de minuteurs qui ne répondent pas à ces critères pourtant simples. J’en ai commandé et retourné un paquet avant de me fixer sur un clone chinois probablement vendu sous douze marques différentes, mais qui fait parfaitement le boulot :

Un tour de clé et boum, un disque coloré apparaît ; quand c’est fini, la loupiote en haut à droite clignote trois fois, c’est tout. Souvent, je la rate, mais c’est une qualité : je continue ce que je fais et je lève souvent le nez plus tard quand je commence à fatiguer, constatant que, ah oui, j’ai le droit de penser à autre chose deux minutes.

Ça coûte entre 15 et 20 balles, allez sur n’importe quelle boutique en ligne et vous en trouverez pléthore, mais faites vraiment gaffe aux critères mentionnés ci-dessus : plus le minuteur promet des fonctions avancées et plus il est probablement stupide en réalité (évitez notamment le Minee Timer, magnifique et superbement construit, mais qui déclenche la pause tout seul, ce qui est, répétez avec moi : complètement con). Il existe des versions avec affichage numérique (j’en ai un en France de la marque Yunbaoit qui représente un relatif équivalent, beaucoup plus joli, mais je préfère manipuler le bouton en façade).

Bref, quoi que vous commandiez, lisez les commentaires pour vous assurer que ça ne cache pas un loup genre un tic-tac insupportable, et assurez-vous de pouvoir le renvoyer sans problème si vous découvrez une stupidité de conception.

Associez à ça un D4 de jeu de rôle, un peu joli tant qu’à faire. La méthode Pomodoro classique propose quatre intervalles de travail soutenu puis une pause plus longue de 15-20 minutes ; je ne la faisais pas, mais j’ai récemment découvert un vrai bénéfice à ça (le petit singe dans mon cerveau se tient beaucoup plus tranquille s’il sait qu’il aura un vrai quart d’heure à un moment pour se distraire – et le moment arrivé, il tombe souvent à court d’idée, d’ailleurs).

Et puis, qui n’a pas envie d’utiliser un dé de jeu de rôle comme accessoire professionnel ?

EDIT 2024-08-12 : On me signale que le Time Timer pourrait être la version originale de ce minuteur, à potentiellement préférer, donc. Voir cet article.

  1. Le bouton tout rond, qui chante des chansons, bien sûr.
2024-08-10T10:22:35+02:00mercredi 7 août 2024|Best Of, Lifehacking, Technique d'écriture|Commentaires fermés sur La boîte à outils de l’écrivain : ce minuteur (et un dé à 4 faces)

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’écriture sans jamais oser le demander (table ronde aux Imaginales 2024)

Conformément à la tradition, le podcast ActuSF a mis en ligne les tables rondes et les conférences des Imaginales 2024 – merci à toute l’équipe (soit dit en passant, le site est une mine d’or avec des captations remontant à des années). J’ai eu le plaisir de partager un plateau avec Julia Richard et Pascal Godbillon sur les questions / réponses aux jeunes auteur·ices en 2024, où l’on parle de formations, d’édition, de patience et d’artisanat. Merci à Jolan C. Bertrand pour la super modération ! C’est écoutable dans votre lecteur préféré, sur cette page ou même juste ci-dessous :

2024-08-02T02:33:38+02:00lundi 5 août 2024|Best Of, Entretiens, Technique d'écriture|Commentaires fermés sur Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’écriture sans jamais oser le demander (table ronde aux Imaginales 2024)

Quelle app pour ses notes (PKM) en 2024 ? Bear notes ou Obsidian.

Okay, ça fait une éternité absolue (par opposition à l’éternité relative) que je promets de parler d’applications de notes, pour construire sa base de connaissances, son journal, ses illuminations sur la vie, l’univers et le reste, j’ai longtemps été un utilisateur acharné d’Evernote mais l’application s’est perdue (en plus de ne pas offrir de chiffrement de bout en bout, ce qui me semble impensable en 2024), j’ai exploré le sujet de long en large, ouvert des comptes d’essai et de bêta-test chez absolument tout le monde (Notion, Onenote, Roam, Tana, Standard Notes, Craft, The Archive, Capacities, Reflect, Logseq, Anytype, Amplenote et j’en passe, j’ai tout, je dis bien tout essayé) et il est venu, le temps des cathédrales.

Qu’est-ce qu’on utilise comme app pour noter ses idées, les construire et les conserver ?

Avec un pareil sujet, j’ai fini par me faire une raison : il est impossible de recommander une application ultime qui convienne à tout le monde, à la fois en raison des différences de mode de travail et des plate-formes. Il va donc être question de deux, les meilleures dans leurs genres respectifs, couvrant le meilleur des fonctionnalités que l’on recherche.

Les fonctionnalités nécessaires

À mon sens, une application de gestion de la connaissance (PKM, comme on dit dans les cercles initiés, pour Personal Knowledge Management) doit présenter a minima les fonctionnalités suivantes :

Une expérience utilisateur (UX) réfléchie et fluide pour permettre de penser rapidement et efficacement. Cela inclut entre autres : des raccourcis clavier nombreux, une interface minimisant le nombre d’interactions pour arriver à la commande désirée, la possibilité de travailler simplement sur plusieurs documents en parallèle. Pouvoir automatiser des tâches est un bonus.

Une application « local first« . On veut pouvoir travailler dans n’importe quelle condition avec l’Internet qu’on a (ou qu’on n’a pas), que ce soit sur ses notes ou ses attachements. (Cela exclut notoirement Notion et Craft.)

Une application soucieuse de la vie privée. Une solution de synchronisation chiffrée de bout en bout est idéale.

La possibilité de relier ses notes entre elles. Les liens entre fiches et documents sont indispensables pour construire une base de connaissances puissante (voir la série Geekriture) et l’on veut pouvoir inventorier les liens pointant vers un document donné (backlinks).

Des options de formatage avancées, notamment les tableaux.

Un format de document ouvert ou au moins une facilité d’export de ses données, on rédigera idéalement en Markdown, ou au moins, il sera possible d’extraire ses données sous ce format. Les applications vont et viennent ; on parle de gérer une base de savoir censée durer sa vie entière, ce qui dépasse la longévité moyenne des outils informatiques.

Une application fonctionnelle sur mobile. Les idées frappent à tout moment et généralement quand on n’a que son téléphone avec soi : il faut pouvoir au minimum capturer ses idées sur mobile.

Ne pas casser le compte en banque.

Bear et Obsidian

Bear et Obsidian sont les deux applications qui recoupent au maximum ces fonctions de façon la mieux fichue avec le moins de désagréments dans les autres domaines, mais elles s’inscrivent dans deux philosophies relativement opposées, en plus de ne pas forcément être disponible partout.

Bear est l’application des minimalistes (ou des personnes faciles à distraire) dans l’écosystème Apple

Si vous êtes sous Windows et/ou Android, arrêtez-vous là, prenez Obsidian.

Bear est une application puissante mais avec une idée très claire de ce qu’elle est, et n’est pas. Vous obtenez un jeu de fonctionnalités abouti, mais rien de plus. N’espérez pas avoir de dossiers, tout fonctionne par tags ; ne cherchez pas de représentation visible de vos liens ou de géolocalisation de vos notes, ça ne sera jamais dedans. Dans Bear, on note vite (une des meilleurs UX du marché), joliment (l’app est une joie à utiliser) et on se réjouit de la myriade de petits détails bien pensés qui en font un bonheur à l’emploi, mais on accepte que c’est une app volontairement limitée pour réduire l’éventail des fonctionnalités et empêcher le bricolage à l’infini. Dans Bear, on choisit un thème, une poignée d’options typographiques, et puis on bosse. Point.

Ce que Bear fait très bien :

  • UX fantastique (c’est beau, rapide, efficace).
  • App mobile avancée, réactive et agréable.
  • Système de classement par tags ultra rapide pour organiser ses notes.
  • Grande simplicité dans la gestion des pièces jointes (images, PDF etc.)
  • La recherche fouille aussi dans vos pièces jointes.

Ce que Bear fait moins bien :

  • Pas de fonctions avancées (graphe, géolocalisation). Si vous avez tendance à tout paramétrer aux petits oignons pendant des heures, croyez-moi, c’est un atout… vous n’avez pas l’excuse de travailler sur votre outil au lieu de dans votre outil. (Voir les risques d’Obsidian.)
  • Pas de lien à des paragraphes ou blocs de texte (seulement à des titres, ce qui peut suffire) ni de transclusion. (Si vous ne savez pas ce que c’est, vous n’en avez pas besoin.)
  • La synchro se fait sur votre propre espace iCloud sans être chiffrée de bout en bout, mais pour moi, c’est suffisant.
  • Système de multifenêtrage un peu bizarre, nécessitant un petit temps d’apprentissage.

Obsidian est un environnement numérique pour la pensée

Par contraste, Obsidian fait tout, mais alors, absolument tout. Et c’est son plus gros piège : on peut le transformer en quasiment n’importe quoi, ce qui est intimidant, et égare le ou la novice.

À la base, Obsidian est un éditeur de fichiers Markdown gérant des liens et un graphe de connaissances. Point. Mais Obsidian est personnalisable dans ses moindres aspects (jusqu’à la position des commandes de l’interface), et présente un écosystème de près de 2000 plugins allant du petit truc pratique (ajouter un raccourci clavier) à la transformation complète de l’application (intégrer une solution de gestion de projets). Beaucoup imitée, Obsidian bénéficie aujourd’hui d’une communauté ultra dédiée, de développeurs assez géniaux et d’une éthique assez unique à notre époque.

Ce qu’Obsidian fait très bien :

  • Obsidian est de loin la meilleure app pour faire incuber ses idées. Tout est reliable, visualisable sous forme de graphe, il est possible d’intégrer des bouts de notes à d’autres (transclusion), ou des requêtes dynamiques, rien que son jeu de fonctionnalités de base est ultra puissant.
  • Obsidian est bâti sur des formats entièrement ouverts (un paquet de fichiers sur votre disque) et se synchronise avec chiffrement de bout en bout.
  • L’écosystème de plugins permet d’ajouter à peu près n’importe quelle fonction. Si vous vous demandez : « Obsidian peut-il faire ça ? », la réponse est oui1. La vraie question sera comment (et c’est là que les ennuis peuvent commencer, voir ci-dessous).

Ce qu’Obsidian fait moins bien :

  • L’app mobile est utilisable, mais un peu lourdingue. C’est pas idéal pour la capture rapide (même si l’équipe travaille dessus).
  • L’app est basée sur le framework Electron : cela signifie que quasiment aucun outil système ne fonctionne dedans (agaçant notamment sous macOS).
  • Plus vous personnalisez Obsidian, plus vous courez le risque que vos ajouts ou plugins cassent avec une mise à jour future, ce qui peut vous pousser à une maintenance malvenue et agaçante (et à éplucher les forums / Discord officiels).

Rapides conseils de survie pour vivre Obsidian sainement

  • Préférez un thème d’interface extrêmement bien suivi et développé pour éviter les migraines (acceptez d’utiliser le thème de base ou bien Minimal, développé par le CEO de la boîte).
  • N’ajoutez un plugin que si vous avez un réel besoin de la fonctionnalité associée, et prenez le temps de le maîtriser avant d’ajouter le suivant. (Limite leur prolifération extrêmement néfaste.)
  • Tenez-vous à distance des vidéos YouTube qui vous expliquent comment le transformer en tableau de bord intégré de votre existence. Vous y viendrez plus tard si nécessaire.

Comment choisir ?

Au final, si vous avez suivi ce qui précède, vous verrez clairement deux écoles.

Déjà, de base, si vous êtes sous Windows et/ou Android, c’est Obsidian. On l’a dit.

Ensuite. Si vous avez une forte tendance à la distraction et à l’obsession pour tout paramétrer au poil, préférez Bear. Vraiment. Vous allez passer des heures à bricoler Obsidian pour voir vos modifications casser progressivement au fil des mois. Faites tout de suite le deuil dudit bricolage et prenez l’outil qui vous empêche de faire ça. Oui, c’est absolument du vécu. (Après quatre ans d’oscillations constantes et d’allers-retours entre les deux, j’ai fini par me fixer sur Bear précisément pour cette raison.)

Si vous n’avez pas de tendance obsessionnelle au paramétrage, que vous voulez juste prendre des notes puissantes en Markdown avec peut-être une poignée de fonctionnalités choisies et que vous n’avez pas besoin d’une app mobile parfaite, Obsidian vous réjouira. On ne fait pas mieux dans cette catégorie.

À vous les studios : Bear | Obsidian

  1. On y trouve entre autres un lecteur de podcasts et un moteur de bases de données.
2024-07-28T02:31:05+02:00mercredi 31 juillet 2024|Best Of, Technique d'écriture|6 Commentaires

« Si vous ne descendez pas vous aussi dans l’arène vous faire botter les fesses, votre avis ne m’intéresse pas »

L’autre jour, entraîné par un lien malencontreux, j’ai fait le truc qu’il ne faut absolument jamais, jamais faire parce que c’est très dangereux – non, pas mettre les doigts dans la prise – non, pas manger les jolis champignons rouges – non, pas emmêler ma cravate1 dans un ventilateur – mais, pour la créativité et le moral, c’est à peu près aussi mortel : je me suis perdu sur quelques chroniques idiotes de mes bouquins. Notez bien que je ne dis pas négatives, je dis idiotes. Il existe des tas de chroniques négatives intelligentes et/ou constructives et/ou qui reconnaissent quand la rencontre ne s’est pas faite pour des raisons purement personnelles et font la part des choses avec les qualités du travail et ça, on serre la paluche de la personne en disant : ben oui, absolument, bien sûr, buvons un coup. (Ça commence en coulisses, soit dit en passant, par le travail avec les bêta lecteurs et sa direction éditoriale : sachez, mes amis, que les livres n’apparaissent pas de rien, ils ont la forme qu’ils ont parce qu’il y a eu des passes de correction avec des équipes, donc les choix qui s’y trouvent ont en général été tous soigneusement soupesés, on s’efforce de maîtriser ce qu’il y a dedans et pourquoi.)

Peu importe qu’elles soient une poignée perdues dans – j’ai cette chance, merci mille fois, auguste lectorat, surtout quand on se coince bêtement la cravate dans une prise de champignons rouges – une majorité positive, voire très positives ; hélas le cerveau (surtout quand il neurodiverge) a, sur l’instant, tendance à se focaliser sur ça au détriment du reste (surtout, bis, quand on bosse depuis des années sur un projet colossal qui avance par centimètres malgré les heures investies quotidiennement et qu’il faut combattre le syndrome de l’imposteur à l’arme nucléaire).

C’est absolument ridicule. Je suis parfaitement au courant. Alors, dans ces cas-là, je repense autant que possible dans ces cas-là Elizabeth Gilbert dans Big Magic avant de baisser la tête et de me remettre au taf.

Que ma mésaventure, donc – manger une prise de courant en emmêlant mes champignons rouges dans une cravate – puisse éventuellement servir à d’autres qui tombent sur cette page (« Et ces traces, un jour, un autre être affligé, / Voguant sur l’Océan solennel de la vie, / Pauvre frère en misère, et seul et naufragé, / En les voyant, Peut-être aura plus d’énergie. » – Longfellow).

Parce que, justement, une autre source peut faire du bien dans ces moments-là, et c’est Brené Brown, qui propose une approche très saine et ouverte pour affronter ce genre de critique (elle mentionne que dans son cas, évidemment, on s’en est pris à son physique, parce qu’Internet est rempli de cons) :

  • Réserver toujours une place dans son Colisée mental à ces critiques idiotes, parce qu’elles sont inévitables, donc autant reconnaître leur présence ;
  • Mais leur répondre : je vous entends, je vous vois, mais si vous ne descendez pas vous aussi dans l’arène vous faire botter les fesses, votre avis n’entre pas en ligne de compte.

Perso, j’aurais dit « j’en ai rien à carrer », mais c’est parce que j’adore secrètement utiliser des gros mots devant des publics de cadres.

Prenez soin de vous.

  1. C’est là qu’on sait que je ne suis qu’un bonimenteur, la dernière fois que j’ai porté une cravate remonte au XXe siècle.
2024-07-24T02:23:33+02:00mercredi 24 juillet 2024|Best Of, Technique d'écriture|2 Commentaires

La boîte à outils de l’écrivain : Typinator, l’expansion de texte à la vitesse de la lumière

Okay, je vous ai fait l’article avec TextExpander pendant des années, et donc chanté les louanges de l’expansion de texte : tout ce qui permet de taper du texte plus vite est une bénédiction, surtout quand on écrit, mais pas seulement. Nous passons nos vies à écrire ne serait-ce que des mails, nos claviers sont un mode d’interaction majeure de nos vies modernes, donc gagner du temps et de l’efficacité, c’est bien. J’ai longtemps promu TextExpander, mais ses performances de plus en plus mauvaises + sa formule absurde sur abonnement m’ont incité à chercher une autre solution.

Et celle-ci existe : elle est non seulement extrêmement rapide (beaucoup plus que TextExpander), mais ne requiert pas d’abonnement (MIRACLE), et c’est Typinator (sur Mac uniquement).

C’est pas sexy, hein ? C’est parce qu’il faut que je vous en cause.

En deux mots (enfin, un peu plus, sauf si vous utilisez l’expansion de texte), l’expansion de texte permet de taper une courte abréviation qui devient étendue en une expression au choix : par exemple, mon propre catalogue transforme ci-précédemment la chaîne « p.ex » en « par exemple ».

Avec l’expansion de texte, on peut1… 

Taper rapidement les mots fréquents :

  • jms → jamais
  • tps → temps
  • zk → Zettelkasten
  • prc → procrastination
  • dc → dranaclase…

Taper ses titres de livres et nouvelles qui reviennent tout le temps, surtout si on a la bonne idée d’en faire à rallonge :

Insérer d’un coup les liens qu’on emploie tout le temps :

Taper les formules de politesse courantes :

  • bcdt → Bien cordialement
  • vdisp → je reste à votre disposition
  • saldis → Veuillez agréer, Messieurs, l’expression de mes salutations distinguées…

Taper simplement des caractères spéciaux et symboles pratiques :

  • -> donne →
  • => donne ⇒
  • et ça marche aussi avec les émojis : ee:) donne 🙂
  • eeid donne 💡
  • ee? donne ❓…

Insérer rapidement des macros comme la date et l’heure :

  • sdd insère la date au format année-mois-jour (2024-07-14)
  • hhh insère l’heure au format heure:minutes (13h39)
  • !z insère un timestamp pour repérer un document de manière unique au format date + heure-minutes (202407141349) (capital dans certaines approches du Zettelkasten)

Gérer la typographie des applications qui ne connaissent pas les règles françaises :

  • " donne « » (guillemets à chevrons prêts à l’emploi)
  • !! donne espace insécable + ! (conformément aux règles)
  • -- donne – (tiret semi-cadratin)…

Faciliter l’entrée du balisage Markdown :

  • mkl donne []()
  • mkfn crée [^] (lien vers une note de bas de page, fn pour « footnote »)
  • mkcd crée un bloc de code prêt à l’emploi, sauts de ligne inclus…

Créer des macros pour automatiser la création de texte : Il est très simple de créer des textes à trous pour des messages-type où l’on va remplir les champs à la volée (par exemple « cher Monsieur / chère Madame ») et taper automatiquement la touche tabulation pour changer de champ à la volée, permettant par exemple de pré-remplir un mail standard.

Attends, mais on ne peut pas déjà faire ça avec les remplacements de texte du système ? Non. En tout cas, pas aussi bien. Les macros sont impossibles, mais surtout, il est impossible de forcer l’outil système à différencier l’emploi des majuscules et minuscules, ce qui est capital pour moi si j’écris vdf pour désigner le Verrou du Fleuve, la ville de Loered, dans le cours d’une narration, ou bien Vdf, Le Verrou du Fleuve, le titre de livre, tome 2 de la saga « Les Dieux sauvages ».

La beauté de la chose par comparaison avec les outils du type intégrés, par exemple, à Word, c’est que c’est un outil qui fonctionne partout sur le système, donc ça marche aussi dans Scrivener, Slack, Mail, Obsidian… et qu’il est possible très simplement de synchroniser son répertoire d’abréviations entre machines en plaçant le fichier dans un répertoire cloud quelconque. En gros, on détermine ses abréviations une fois pour toutes. C’est un outil tellement puissant et utile qu’il m’empêche de voir l’iPad comme une machine sérieuse, car cette intégration profonde est impossible sous iOS et me ralentit clairement quand elle est absente.

Typinator est le meilleur outil du genre que j’ai pu tester (c’est le plus rapide, de très loin) avec un modèle économique donc respectueux de l’utilisateur (un achat une fois pour toutes, avec des mises à jour majeures payantes). Et c’est pour cela qu’il rejoint la boîte à outils de l’écrivain.

➡️ Découvrir Typinator (démo gratuite, lien affilié)

De manière générale, si l’envie d’acheter cet outil (ou l’un des autres présentés sur ce site) vous vient, n’oubliez pas de passer par les liens proposés ici – vous contribuez à financer le temps passé à rédiger ces articles gratuitement. Merci ! 

  1. Tous les exemples viennent de mon propre catalogue.
2024-07-14T06:57:54+02:00lundi 15 juillet 2024|Best Of, Technique d'écriture|3 Commentaires

Des projets prometteurs concurrençant la Freewrite

Maintenant que le dépit concernant les machines Freewrite est totale (un petit oiseau – merci – m’a d’ailleurs signalé que le patron veut embaucher un Director of Engineering ET un Lead Firmware – pas du tout un mauvais signe), qu’est-ce qu’on peut faire ? Où trouver ce Nirvana brièvement atteint de l’écriture sans distraction sur une belle machine lourde de professionnel·le ?

Visiblement, on est nombreux à se poser la question, parce que plusieurs projets qui ont le potentiel de totalement tuer les Freewrite (fonctionnalités mieux pensées, une fraction du prix, pas d’abonnement) voient le jour.

Le BYOK (Bring Your Own Keyboard)

Voilà des types qui ont tout compris : le clavier est une partie éminemment personnelle d’une machine à écrire, donc autant laisser l’utilisateur·ice apporter le sien, et ne fournir que la partie logicielle minimaliste qui consiste à afficher les mots. On a un petit bidule qui affiche quatre lignes de texte à emporter partout, une partie wifi pour la synchronisation, et roulez jeunesse.

Image BYOK

L’idée est tellement élégante, sacrebleu ! Je rêve déjà d’en acheter douze et de les disséminer partout et d’en emporter dans tous mes sacs de voyage.

Le produit est toujours en développement (comme en témoigne le sondage que je viens de remplir), et un gros point noir se profile à l’horizon : l’équipe n’a toujours pas confirmé à l’heure actuelle qu’on pourra employer une disposition de clavier qui n’est pas le fucking QWERTY. Évidemment, le cas échéant, c’est un casseur de distribution (dealbreaker). Je prie donc très fort pour qu’on puisse installer des dispositions de clavier internationales.

On peut actuellement réserver sa machine pour 3$ seulement avec un système assez innovant qui évite les financements participatifs qui n’en finissent jamais.

➡️ En savoir plus (et potentiellement réserver sur Prelaunch)

Le Micro Journal v5 et v6

Un Kyu Lee, bricoleur génial, a entendu la demande des auteur·ices de par le monde, et comme il est visiblement cool, il s’est mis en tête de répondre à la demande. Le résultat, après plusieurs itérations, est le Micro Journal, un appareil totalement open source (on peut le monter soi-même, les plans et le logiciel sont fournis) ou que l’on peut lui commander directement pour une fraction du prix d’une Freewrite (dans les 150$ en fonction du modèle).

Solution maison oblige, il faut un petit peu de préparation à faire soi-même, mais tout est parfaitement détaillé : on met une carte SD dans la machine ou l’on synchronise avec Google Drive moyennant l’installation d’un petit script dans son compte Google, on commande la batterie séparément (qu’il ne peut vendre lui-même pour raisons légales) et on se retrouve avec une machine qui s’allume immédiatement et ne sert qu’à taper du texte. Ça, ça existe déjà, et c’est achetable en direct (moyennant le temps de fabrication, on rappelle qu’il fait ça tout seul dans son garage).

Attention, le Micro Journal existe en deux versions, la v5 et la v6 :

Micro Journal v5

C’est l’équivalent du BYOK cité plus haut : un écran, on apporte son clavier, et c’est parti. Attention, il faut mentionner expressément dans les commentaires de sa commande la disposition du clavier qu’on veut, pour qu’il fasse la configuration avant envoi. J’avoue que j’ai craqué, je lui ai demandé un clavier français belge comme sur les Macs, on va voir si c’est possible, je raconterai l’expérience.

Image Un Kyu Lee (le Micro Journal v5 est le boîtier blanc et jaune)

➡️ En savoir plus sur la v5 (et potentiellement commander sur Tindie)

Micro Journal v6

Là, on est carrément dans la machine à écrire tout inclus, l’exact réplique de Freewrite : écran + clavier. Il est possible de changer les touches ET la configuration du clavier soi-même par une petite manip’ technique. Preuve de goût supplémentaire, le clavier est ortholinéaire (les touches forment une grille, comme il se devrait, au lieu de la quinconce héritée des machines mécaniques), mais cela pourra désorienter les geeks aux mauvaises habitudes trop ancrées (comme Bibi).

Image Un Kyu Lee (ici le clavier est inclus)

➡️ En savoir plus sur la v6 (et potentiellement commander sur Tindie)

2024-07-08T00:18:57+02:00mardi 9 juillet 2024|Geekeries, Technique d'écriture|2 Commentaires

Procrastination podcast s08e20 – Identifier et connaître ses forces

procrastination-logo-texte

Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : « s08e20 – Identifier et connaître ses forces« .

Question de long terme : on parle beaucoup du travail, mais quid des aspects de son écriture sur lesquels on peut s’appuyer ? Comment les cerner, et que cela signifie-t-il d’avoir des « forces » ? 

Estelle célèbre l’approche beaucoup plus professionnelle de l’écriture aujourd’hui, où il est communément admis qu’elle exige des corrections dans la majorité des cercles ; cependant, le revers de la médaille peut être une quête perfectionniste où l’on perd sa personnalité. Pour combattre ça, bien s’entourer ! Mélanie approuve, et ajoute que c’est la bêta-lecture qui lui a fait prendre conscience d’atouts qu’elle pouvait avoir sans s’en rendre compte, l’aidant à savoir où capitaliser. Pour terminer sur les vertus de la bêta-lecture, Lionel met l’emphase sur le fait d’en donner plutôt qu’en recevoir, toujours de manière à conscientiser son esthétique mais aussi pour apprendre à placer ses propres compétences littéraires et, au sens large, de se confronter au monde. 

Procrastination est hébergé par Elbakin.net et disponible à travers tous les grands fournisseurs et agrégateurs de podcasts :

Bonne écoute !

2024-09-16T08:31:01+02:00lundi 1 juillet 2024|Procrastination podcast|Commentaires fermés sur Procrastination podcast s08e20 – Identifier et connaître ses forces

De l’écriture à la patinoire

Reçu cette question récemment :

J’ai fini la lecture de votre livre, il m’est d’une précieuse aide pour tenter d’écrire. C’était drôle et bien expliqué, merci, vraiment. […] je souhaitais aussi vous posez une question dont je n’ai pas trouvé la réponse, ni sur votre site, ni sur internet. 

Est-ce qu’on peut écrire une partie un point de vue en narration externe aligné strict à un temps de narration présent (car je trouve que ça colle avec mon perso mais j’ai cru comprendre que c’était moins usité/conseillé quand on débute) et repasser à un temps de narration au passé plus classique pour les autres points de vue? 

Ou faut-il le même temps de narration pour tous et faire un choix?

Déjà, merci beaucoup pour Comment écrire de la fiction ; ravi que cela ait pu être utile – et drôle (mon but était : avec toutes les empoignades autour de la technique d’écriture, si vous n’êtes pas d’accord avec moi, au moins, je vous aurai fait glousser bêtement).

Excellente question et, pour celle-ci et en fait plein d’autres, il me faut faire un détour par l’improvisation théâtrale.

L’impro a été formalisée au tournant des années 80 par un petit groupe d’expérimentateur·irces sur cette forme nouvelle, dont un certain Robert Gravel, qui a documenté et écrit deux courts bouquins sur le sujet (avec Jean-Marc Lavergne, sobrement intitulés Impro I et Impro II). Et à un moment, il parle de la patinoire et de sa codification.

L’impro, dans sa forme codifiée au Québec, ne se pratique pas sur une scène, mais une patinoire, laquelle est directement inspirée de la patinoire du hockey sur glace, un muret d’un mètre de haut environ qui entoure la zone de jeu :

On pourrait penser que parce que, haha, c’est des Québecois, ils ont fait un truc en lien avec le hockey, regardez comme c’est drôle. Sauf que peut-être, mais pas seulement. Gravel explique (de mémoire) que la patinoire a un effet particulier sur la discipline. Elle coupe la silhouette du joueur en deux, ce qui le réduit presque à une marionette grotesque, et c’est le cas en effet si la personne ne donne pas tout à son jeu : la patinoire ajoute une difficulté supplémentaire qui pardonne peu. En revanche, avec quelqu’un qui se consacre intégralement à son jeu, qui a à la fois les bonnes idées et la compétence théâtrale, la patinoire disparaît totalement et n’a plus aucune importance.

Soit : la contrainte aiguise le danger de la discipline chez ceux et celles qui n’ont pas la compétence et/ou l’engagement dans leur jeu. Mais quand la magie opère, la contrainte est transcendée.

J’imagine que vous voyez où je veux en venir. Un chapitre de Comment écrire de la fiction ? s’intitule « Tout est possible, tant que c’est bien fait ». C’est la réponse à la question posée comme à la situation de la patinoire : sortir des codes, ajouter une contrainte inhabituelle (un muret d’un mètre de haut, un changement de temps de narration ou – c’est souvent la question analogue – un changement de focalisation dans le choral, passer du « il/elle » au « je »), c’est courir le risque de « briser le rêve de la fiction » cher à John Gardner. C’est s’ajouter une occasion supplémentaire de se prendre les pieds dans le tapis et d’avoir l’air d’une marionnette grotesque ; que l’artifice révèle l’artificialité.

Mais si ça marche, bon dieu, ça marche, et la contrainte devient sublimée, le jeu / l’œuvre s’appuient dessus et la transforment en force, la transcendent au lieu d’être limités par elle.

Tout est possible tant que c’est bien fait.

De manière générale, je pense, à ce titre, qu’il faut faire confiance à son sentiment, son envie, ses tripes. Si la forme que tout cela dicte est inhabituelle, inusitée, peu importe, c’est la forme qu’il faut. Il est toujours possible de voir ensuite si c’est pertinent / si la contrainte est transcendée. Et si ce n’est pas le cas, de corriger en fonction ; car, contrairement à l’impro, l’écriture n’est pas un art de représentation. On a une infinité de chances d’y arriver du premier coup.

2024-06-24T02:42:48+02:00lundi 24 juin 2024|Best Of, Technique d'écriture|2 Commentaires

Les diaporamas de la Masterclass 2024 sont à jour

Un petit mot rapide pour dire que, comme c’est l’habitude, les présentations de la Masterclass 2024 des Imaginales sont disponibles au téléchargement sur la page dédiée, dans leurs versions mises à jour, et avec celles de Sara Doke et Jean-Claude Dunyach, bien évidemment. Et il y a plein d’autres ressources là-bas, d’autres présentations en accès libre, je serais vous, j’irais voir.

➡️ La page diaporamas et ressources issues d’ateliers

2024-06-16T09:48:17+02:00mercredi 19 juin 2024|Technique d'écriture|Commentaires fermés sur Les diaporamas de la Masterclass 2024 sont à jour
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