Procrastination podcast S02E20 : “Talent Vs. Travail”

procrastination-logo-texte

Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : “Talent Vs. Travail“.

Le talent, le travail ou les deux ? Cette question a tendance à remuer les milieux artistiques, les discussions entre créateurs et Internet ; mais nos podcasteurs n’ont peur de rien et se lancent dans cette discussion en seulement quinze minutes. Mélanie, justement, se positionne entre les deux, et donne une intéressante définition du talent : ce serait ce qui ne s’apprend pas. Laurent non plus ne minimise certes pas l’importance du travail ; pour lui, la nature du talent est directement connectée à la nature même de l’art, et surtout ce qu’il génère chez son public. Lionel dit clairement que la notion de talent l’ennuie car elle est trop évanescente ; puisque la seule chose que l’on peut contrôler est le travail, alors travaillons.

Références citées :
– Harper Lee
– La collection Fleuve Noir Anticipation
– Stefan Wul

Procrastination est hébergé par Elbakin.net et disponible à travers tous les grands fournisseurs et agrégateurs de podcasts :

tumblr_n7wj8rqhsm1qenqjeo1_1280     soundcloud_logo-svg     youtube_logo_2013-svg     rss-feed
Bonne écoute !

Et Procrastination reviendra le 15 septembre pour une troisième saison !

2019-05-04T18:45:57+02:00lundi 2 juillet 2018|Procrastination podcast, Technique d'écriture|3 Commentaires

Fantasy épique… et vraisemblance historique [table ronde aux Imaginales 2018]

Ce débat aux Imaginales 2018 a été capté par le site de référence ActuSF et faisait participer Fabien Cerutti, Estelle Faye, Jean-Philippe Jaworski et moi-même. Modération et animation : Victor Battagion. Il peut être écouté librement en ligne ou bien téléchargé sur cette page.

En prime, un extrait vidéo :

 

2018-06-14T03:38:45+02:00lundi 18 juin 2018|Entretiens|Commentaires fermés sur Fantasy épique… et vraisemblance historique [table ronde aux Imaginales 2018]

Procrastination podcast S02E19 : “Choisir des noms”

procrastination-logo-texte

Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : “Choisir des noms“.

Grand consensus dans cet épisode entre nos trois auteurs sur le processus et la symbolique de création des noms. Mélanie met en avant qu’un nom n’a pas nécessairement de sens caché, même s’il peut être révélateur d’une origine ou d’une génération ; ce qui compte, c’est l’impression. Lionel approuve, le rapprochant de la notion de musique dans l’écriture et de symbolique personnelle, et Laurent prolonge en le rattachant résolument à toute la toponymie d’un univers fictif, son jargon, ses termes.

Références citées
– Gudule
– 1984, George Orwell
– Les Archives de Roshar, Brandon Sanderson
– Ultrogothe, reine franque, https://fr.wikipedia.org/wiki/Ultrogothe
– Jean-Claude Dunyach
– Serge Brussolo
– Tonino Benacquista

Procrastination est hébergé par Elbakin.net et disponible à travers tous les grands fournisseurs et agrégateurs de podcasts :

tumblr_n7wj8rqhsm1qenqjeo1_1280     soundcloud_logo-svg     youtube_logo_2013-svg     rss-feed
Bonne écoute !

2019-05-04T18:45:58+02:00vendredi 15 juin 2018|Procrastination podcast, Technique d'écriture|3 Commentaires

Payer les auteurs invités : jusqu’où aller ensemble ? [table ronde aux Imaginales 2018] + un commentaire

Ce débat aux Imaginales 2018 a été capté par le site de référence ActuSF et faisait participer Samantha Bailly, Sara Doke, Stéphanie Nicot, Stéphane Wieser et moi-même. Il peut être écouté librement en ligne ou bien téléchargé sur cette page.

En prime, un extrait vidéo :

Et, comme le sujet soulève beaucoup les passions et que j’ai vu des comptes rendus et des réactions plus ou moins houleuses, je vais juste prendre un instant pour repréciser ma position (si vous avez déjà vu une partie de cette tartine passer sur Facebook, c’est normal), qui n’est pas grand-chose de plus que ce que j’ai dit dans ce débat, mais écrivons-le une bonne fois, au jour d’aujourd’hui (berk, cette expression) en 2018 :

Je suis juste un mec qui fait des choses comme il pense à un moment donné, au cas par cas, en essayant autant que possible de péter la baraque de personne et en se donnant le droit d’évoluer.

J’ai pu lire que j’étais pour la gratuité de toute intervention : c’est absurde, puisque je dis le contraire. Je fais en revanche des nuances en fonction des événements ET des types d’intervention (une conférence et une table ronde, ce n’est pas le même boulot, et ce n’est aussi pas le même boulot en fonction du thème : quand on m’appelle à parler de biologie marine sur un panel, par exemple, ou de mes livres). Je négocie au coup par coup en homme d’affaires. J’ai dit très clairement que je faisais une différence entre, d’une part les festivals à entrée gratuite (dont la mission culturelle est indiscutable et cela bénéficie à tout le secteur, donc à moi – et ça c’est mon avis de mec qui vient de l’halieutique et du développement durable) et/ou très locaux (même raison), et d’autre part à entrée payante (où il y a tout un continuum, mais si on parle de Livre Paris, c’est là clairement une machine commerciale à l’extrémité du spectre). J’ai aussi dit à répétition que mon avis n’était que le mien, que j’étais le candide dans cette discussion (et je crois que c’était la raison de ma présence, n’étant membre de quasiment aucune organisation et gérant ma barque tout seul : je suis “extérieur”), en expliquant que je prenais des décisions de business qui n’engageaient que moi, rendant hommage aux représentantes syndicales, et j’ai explicitement invité les jeunes auteurs à prendre conscience de leurs droits et à les défendre (ce que toutes les restitutions que j’ai vu passer ont remarqué, et tant mieux). J’ai insisté sur le fait que l’auteur devait à mon sens aujourd’hui se comporter en homme/femme d’affaires pour gérer et réfléchir à sa carrière, ses contrats, ses occasions, ce qui est difficile car il n’est généralement pas équipé pour ça (là, le fait d’avoir été formé comme ingénieur, même si je n’ai jamais vraiment exercé, m’a bien armé).

J’ai aussi vu passer qu’étant un gros vendeur, je n’avais aucune légitimité à venir tenir ce discours. Je suis très flatté par le vote de confiance, mais permettez-moi de remettre les choses en perspective : les années où j’ai pu m’affranchir de toute activité annexe grâce aux seuls droits d’auteur de mes livres (typiquement en complétant grâce à la traduction, les cours à la fac et – tiens donc – des conférences – ce qui, soit dit en passant, signifie fréquemment enchaîner deux journées de boulot en une, oublier l’existence des week-ends pendant des mois, demander ponctuellement un coup de main financier aux proches pour joindre les deux bouts, se former à des tas d’outils de productivité pour ne pas perdre une minute de la journée et garder une longueur d’avance, etc. ) se comptent sur les doigts d’une main. Alors oui, j’ai parfaitement conscience que c’est déjà super bien, hein, mais c’est hautement aléatoire – rien n’est jamais gagné ; ça m’a pris plus de dix ans de carrière et de galère, et ça implique une vigilance de tous les instants, de tous les ans, et de la gestion à un, deux ans d’avance, et ça peut s’effondrer en quelques années d’inactivité (je n’ai pas le droit d’être malade, fatigué, etc. – je remercie la providence pour la santé de fer que j’ai, d’ailleurs). Je ne m’étends jamais sur ce genre de chose mais, pour info, j’ai eu des mois très difficiles où j’ai dû vivre aux crochets de mes proches (et je sais aussi que j’ai la chance d’avoir eu cette possibilité).

Sur le sujet de la rémunération, j’ai émis des craintes par le passé notamment sur l’accessibilité des événements aux jeunes auteurs qui ne sont pas bankable et donc peu rentables s’il faut les payer (c’est dans les archives du site, mais l’article est daté aujourd’hui). Si, à le déduire à certains commentaires, je suis donc considéré bankable aujourd’hui (merci, ça fait bizarre…), j’aurais pu totalement esquiver la question, hein – après moi le déluge, take the money and run – au lieu de juste la questionner. Or, je questionne les machins, c’est mon truc, c’est pour ça que j’écris, en fait. Donc j’avais des craintes, mais qui ont évolué grâce notamment au travail à la fois des syndicats et des festivals comme les Imaginales qui ont démontré que rémunérer les débats était possible sans mettre en péril une manifestation, ni la diversité de son programme (deux piliers à mon sens indispensables).

C’est quand même vachement bien qu’on soit rendu là, non, si on avançait avec ça ?

2018-06-08T06:32:56+02:00lundi 11 juin 2018|Entretiens, Le monde du livre|2 Commentaires

Révoltes et guerres de libération chez les écrivains de fantasy [table ronde aux Imaginales]

Photo ActuSF

Ce débat aux Imaginales 2018 a été capté par le site de référence ActuSF et faisait participer Manon Fargetton, Estelle Faye et moi-même. Modération et animation : Christophe de Jerphanion. Il peut être écouté librement en ligne ou bien téléchargé sur cette page.

2018-06-04T01:51:50+02:00mardi 5 juin 2018|Entretiens|Commentaires fermés sur Révoltes et guerres de libération chez les écrivains de fantasy [table ronde aux Imaginales]

Exercice, inconscient et Rihil

Petit exercice proposé par Jean-Claude Dunyach au cours de la Masterclass des Imaginales que nous avons donnée la semaine dernière (temps imposé : dix minutes) :

Le Rihil inclina sa tête communicante, invitant Jethra à franchir le palier de laminaires tressées. Peu rassurée, mais peu disposée à contrarier un individu qui la dépassait d’un bon demi-mètre et aux pseudopodes terminés de lourdes massues osseuses, elle s’exécuta avec un sourire embarrassé – en espérant tout à coup que montrer les dents ne serait pas perçu comme un signe d’agression.

L’intérieur de l’habitat dégageait une puissante odeur de jasmin inexplicable sur une planète gazeuse. Jethra maudit une nouvelle fois ses préjugés ataviques de primate évolué en contemplant l’austère sérénité de la sphère. Le fond était rempli d’un sable noir ultra-fin qui épousa la semelle de ses bottes avec le moelleux d’un épais tapis. Les parois courbes arboraient d’étranges images géométriques monochromes réalisées sur un papier brun – mais, pour autant que la jeune femme le sache, il aurait tout aussi bien pu s’agit de calligraphies exquises, des diplômes du Rihil ou de la variante locale du test de Rorschach. Une lanterne à huile de baleine-ciel pendait à la voûte – probablement la source de l’odeur de jasmin.

Le Rihil la dépassa de son étrange démarche chaloupée pour s’asseoir en tailleur sur le sable devant elle ; un exercice fascinant pour une espèce munie de quatre membres inférieurs dotés d’articulations à 360°. D’un pseudopode à massue, il invita Jethra à l’imiter.

Celle-ci réfréna un raclement de gorge gêné.

Portant le traducteur universel à sa tête communicante, le Rihil démarra la séance :

« Pour commencer notre travail ensemble, préférez-vous me parler de votre enfance, ou bien de votre mère ? »

C’est amusant de constater comment l’inconscient fonctionne : j’avais besoin d’un nom immédiatement pour mon personnage (en dix minutes, on n’a pas le temps de finasser) et c’est “Jethra” qui s’est imposé à mon esprit, comme étant à la fois compréhensible, féminin et exotique. Je me suis évidemment rappelé aussitôt que c’est le nom d’une des îles de l’Archipel du Rêve, de Christopher Priest ; or, j’avais le plaisir d’être son interprète pendant les Imaginales proprement dites, qui commençaient le lendemain, et je venais de me replonger pas mal dans son œuvre pour faire sa traduction correctement. Visiblement, mon inconscient était resté “connecté” en sous-main à ses histoires.

2018-05-28T10:31:52+02:00lundi 28 mai 2018|Journal|1 Commentaire

Rencontrons-nous à St Malo ce week-end au festival Étonnants Voyageurs !

Venez au soleil au bord de la mer et des livres ce week-end : c’est le festival Étonnants Voyageurs à Saint-Malo ! Expositions, conférences, tables rondes, rencontres, une immense librairie dans tous les genres dont évidemment l’imaginaire, des glaces et des crêpes sur les remparts : cela se déroule du samedi 19 au lundi 21 mai (j’y serai les trois jours).

Je n’ai pas encore mon programme précis, mais je sais déjà que je participerai à un café littéraire intitulé “Sans oublier : mythologie” à la salle Maupertuis, lundi à 11h45, avec David Vann et Estelle Faye. Et sinon, je serai évidemment sur le stand CriticLe livret du festival est disponible ici en PDF.

À ce week-end ! 

2018-05-11T16:21:55+02:00lundi 14 mai 2018|À ne pas manquer|Commentaires fermés sur Rencontrons-nous à St Malo ce week-end au festival Étonnants Voyageurs !

Faire avancer l’accessibilité au prêt numérique en bibliothèque ? [une conversation]

Sur Twitter, il y a un bon paquet d’abrutis, c’est un fait (la preuve, j’y suis), mais par chance, on tombe parfois sur des gens vachement intéressants qui savent des trucs qu’on ignore. Lors d’une discussion sur le piratage (je remets ici ma lettre à mon pirate) qui a, comme souvent, dérivé vers l’accès à la culture, les bibliothèques, le coût d’icelles et leur disponibilité, j’ai appris des choses sur le prêt numérique de la part d’un professionnel de la profession, et il y a là des trucs qui me paraissent intéressants à connaître. Dont acte. Et merci à @Zali_Falcam pour son exposé de la situation !

(Soit dit en passant, suivant l’arrêt de Storify, j’essaie une nouvelle plate-forme de curation, Wakelet. On verra si elle disparaît elle aussi…)

2018-05-09T22:19:15+02:00jeudi 10 mai 2018|Le monde du livre|13 Commentaires

Un panorama sur la traduction de l’imaginaire [entretien]

Je reçois de loin en loin quelques questions sur le métier de la traduction, et je voudrais remercier Marielle Carosio, qui termine son parcours en métiers du livre, pour les siennes, excellentes et qui m’ont donné l’occasion de faire ce que j’avais envie de faire depuis un moment : proposer un petit tour d’horizon de là où j’en suis arrivé dans mes réflexions sur le métier sur son approche et sa technique, pour servir, eh bien, à qui cela pourra servir, surtout à un moment où je traduis de moins en moins et viens de mettre un terme à la majorité de mes interventions extérieures en M2 à la fac d’Angers (on peut pas tout faire, ma bonne dame. Je vous parle beaucoup sur ce blog, ma bonne dame, il faudra quand même que je vous rencontre un jour.)

Cet entretien a initialement servi à un dossier d’études. L’expérience prouve que les questions qu’une personne pose à voix haute, dix personnes se les posent tout bas.

Fi de cette introduction somme toute assez maladroite (« eh, on m’a interviewé, voilà le résultat, c’est cool »), passons au « contenu », pour reprendre l’expression chère à Fleur Pellerin.

Comment en êtes-vous arrivé faire de la traduction (et à l’enseignement de la traduction) ?

Je suis ingénieur halieute à la base et quand j’ai décidé de faire de la littérature mon activité professionnelle principale, j’étais avide d’expériences et d’apprentissages en tout genres. Je travaillais comme critique pour la revue Galaxies dans les années 2000, et j’ai demandé à Jean-Daniel Brèque, à l’époque responsable des fictions anglophones, s’il pouvait me faire passer un test. Il a trouvé que j’avais du potentiel, et je me suis retrouvé à traduire pour la revue. C’est une activité que je n’ai cessé de développer par la suite, à la fois par goût et aussi, très honnêtement, parce que j’ai découvert que c’était la plus rémunératrice à ma portée à l’époque.

J’ai récemment mis fin à mes activités d’enseignement dans le domaine après huit ans de bons (j’espère) et loyaux (ça c’est certain) services. Je m’y suis retrouvé par le plus drôle des concours de circonstances. À la suite d’une empoignade absurde sur la liste de diffusion de l’Association des Traducteurs Littéraires de France, je m’étais laissé aller à frapper du poing sur la table pour rappeler les règles de base d’Internet et l’usage de ses outils et défendre le travail des modérateurs. Une traductrice m’a alors approché car elle cherchait quelqu’un qui s’y connaisse dans le métier ET ait un solide bagage en informatique… (ce que je venais de démontrer avec ma gueulante) car elle cherchait un successeur pour le cours qu’elle enseignait, lequel s’appelait Outils informatiques du traducteur. À partir de là, au fil des ans, j’ai pris quelques responsabilités de plus à l’université, comme des conférences ponctuelles et des ateliers.

Faites-vous partie d’une « école » de traduction ? Si oui, laquelle et pourquoi ?

Si vous faites référence au vieux débat entre sourciers et ciblistes, je crois que la question est résolue dans la littérature moderne : l’école de pensée qui domine actuellement est celle des ciblistes. À savoir, s’il faut faire un choix, privilégier la fidélité au sens et aux intentions plutôt qu’à la lettre dans le cadre de la fiction. Donc : adapter les blagues, les références culturelles quand c’est possible et transparent pour le lecteur, évidemment sans jamais trahir l’esprit, mais mettre l’accent sur l’expérience de lecture française plutôt que sur une fidélité obsessionnelle et aride à la lettre qui desservirait la vie du texte. C’est en tout cas ma position.

Quelles difficultés rencontrez-vous lors de vos traductions ? Comment vous en sortez-vous ?

Chaque traduction pose son lot de difficultés inédites et uniques, je pense. Mais j’en vois principalement trois : les références, les créations et les textes traîtres.

Les références culturelles sont probablement la difficulté la plus évidente : l’original contient une citation, une marque, une référence qui sera transparente pour le lecteur de la langue source mais pas pour le lecteur francophone. Dès lors, on a trois tactiques possibles : expliciter (rajouter un tout petit morceau de phrase pour éclairer ce dont il s’agit, sans recourir à la note de traducteur honnie) ; adapter (convertir une référence en une autre, équivalente au niveau du sens mais transparente pour le lecteur francophone) ou glisser (placer une référence équivalente, différente, non loin de là – c’est une tactique courante pour une blague intraduisible).

Vient ensuite la création, qui est une difficulté quasiment exclusive, je pense, aux littératures de l’imaginaire. Avec la création de mondes fictifs viennent généralement tout un vocabulaire, une toponymie, des cosmologies et autres règles naturelles différentes de notre réalité, et il faut transcrire cette terminologie d’une manière transparente et significative pour le lecteur francophone (exemple très simple : lightsaber devenant « sabre laser », ce qui comporte aussi une part d’adaptation, puisque lightsaber est, en toute rigueur, un « sabre-lumière »).

À vrai dire, ces deux-là ne sont pas tant des « difficultés » pour moi que des aspects fondamentaux du métier, des jeux enthousiasmants au même titre que le seraient des énigmes à résoudre. Pour moi, la véritable difficulté, c’est le texte traître.

Ce que j’appelle un texte traître est un texte dont la maîtrise narrative est flottante : il peut présenter des imprécisions, des raccourcis, de sévères implications voire des erreurs littérales. Ce genre d’occurrence peut exploser en contresens ou en absurdité à la traduction en raison du jeu des connotations, qui ne sont évidemment pas les mêmes d’une langue à l’autre. Il faut alors contrôler à chaque phrase les interprétations possibles de chaque tournure, vérifier que toutes les informations sont convenablement présentes et, le cas échéant, reformuler de manière à lever toute ambiguïté possible, mais toujours en prenant garde de ne pas traduire l’esprit et les intentions. C’est un travail de minutie au long cours qui peut être harassant ; le danger est que l’on ne peut jamais « se reposer » sur l’original.

Avez-vous vu une évolution dans votre pratique de la traduction ou de votre exercice de la traduction ?

Comme toute pratique d’écrivain, c’est un apprentissage sans fin. Je n’ai pas changé subitement mon fusil d’épaule à la suite d’une épiphanie de théorie ; en revanche, je n’ai jamais cessé d’apprendre, et je veux glisser un mot pour mon autre maître à penser, Pierre Michaut (l’Atalante) qui m’a énormément appris à travers les corrections de mes travaux (et cela a aussi énormément influencé ma rigueur d’auteur).

La traduction, je pense, est une vaste affaire de pratique, tout comme l’écriture. Mon passage dans l’enseignement m’a permis de rendre conscientes certaines choses, de me les expliquer clairement pour les transmettre ensuite. Mais, dans l’ensemble, je m’efforce juste de faire au mieux ce qu’un livre exige.

Quels sont vos outils pour exercer la traduction dans votre domaine ? Avez-vous des conseils à donner ?

Les outils sont assez simples : un bon traitement de texte (à titre personnel, je déteste Word et lui préfère à peu près n’importe quoi d’autre, de préférence Scrivener ou Ulysses en fonction de la longueur des projets), de bons dictionnaires (bilingues et unilingues), une bonne connexion Internet (pour 98% des recherches) et une bonne bibliothèque accessible (pour les 2% restants). Pour la traduction littéraire, surtout PAS de mémoire de traduction type Trados ou Wordfast – il n’y a rien de plus sûr pour tuer toute vie dans un texte de fiction.

Au niveau des conseils : passion, volonté, persistance. Et compétence, évidemment, mais c’est censé être la base. Au cours de mes années d’enseignement à la fac, j’ai vu tous les ans des étudiants qui suivaient cahin-caha leur cursus comme s’ils étaient toujours au lycée, bossant correctement, mais n’allant jamais au-delà, n’interrogeant jamais leur parcours, leur passion, n’allant jamais s’intéresser à un champ de connaissance dans le but, peut-être, d’y apporter ensuite leur contribution. Et les profs sont dans l’ensemble un peu perdus aussi face à la complexité des activités de la création (au sens large). Or, il faut s’investir, il faut aller au-delà du travail purement scolaire, il faut se plonger dans le champ qui reflète sa passion et apprendre à le connaître – en un mot, et j’ai toujours détesté ce terme, mais il dit bien ce qu’il veut dire : il faut de la proactivité. L’édition n’est généralement pas un domaine où l’on trouve du boulot en répondant à des petites annonces, mais en montrant sa passion, en allant sur le terrain, en rencontrant du monde, peut-être même des mentors, et en cherchant à comprendre comment ça « marche ». Ce n’est pas un champ pour ceux qui veulent des horaires confortables et balisés – comme pour tous les indépendants, il réclame de savoir un peu tout faire (lire un contrat, se promouvoir, réparer son ordinateur en rade, etc.) et d’avoir, eh bien, la niaque.

Sur quelles sources vous appuyez-vous ? Où allez-vous chercher vos informations ?

Comme je le disais, Internet répond à 98% des questions aujourd’hui (mais il est important de savoir repérer les 2% où seule une bibliothèque fournie pourra répondre). Donc, je vais n’importe où qui me donnera la réponse juste, avec un Google-fu le plus entraîné possible. Chaque traduction est différente et chaque livre pose ses propres défis, donc au-delà des références évidentes (Wikipédia pour débroussailler un sujet, urbandictionary pour l’argot, le TLF pour le dictionnaire français, la BNF pour le patrimoine et le catalogue du dépôt légal, les boutiques d’ouvrages électroniques pour récupérer rapidement un ouvrage pour une citation ou référence, etc.), on va là où il le faut.

Selon vous, à quoi sert la traduction ? Est-ce que cela influe sur votre vision du monde ?

Je crains d’enfoncer une porte ouverte, mais la traduction rend accessible tout un patrimoine étranger à d’autres locuteurs. Elle est donc fondamentale : elle propose toute une manière de penser, toute une histoire, tout un regard étranger à d’autres peuples. C’est un pont capital jeté entre les cultures, entre les idées, et elle permet à chacun de s’enrichir par la confrontation à des points de vue inédits dans sa langue. Et cela vaut pour les essais, la littérature, jusqu’à la fiction de genre : même le divertissement le plus pur comprend une part de différence, un regard autre, qui enrichit celui qui le reçoit et l’incite à élargir ses horizons. Louerait-on, par exemple, l’humour anglais sinon ?

Pour ma part, pratiquer deux langues à parts quasi-égales (plus quelques autres pour lesquelles j’ai des notions) a clairement contribué à élargir ma vision du monde, je pense ; on découvre des mots, des tournures pour des notions qui n’existent pas dans sa langue maternelle. C’est comme si des zones inédites du cerveau s’ouvraient avec le bon sésame, révélaient des territoires de pensée auxquels on ne pouvait accéder précédemment parce qu’il manquait les bons mots pour désigner les choses. J’ai commencé l’anglais très tôt donc j’ai du mal à m’imaginer sans, mais j’espère que cela me rend plus ouvert au monde, plus bienveillant envers des points de vue étrangers. Et le simple exercice de la traduction m’a aussi énormément appris sur l’écriture, en me faisant travailler toujours davantage mon style, l’adéquation entre les mots sur la page et la pensée que l’on s’efforce de transcrire, que ce soit celle d’un autre ou la sienne.

Combien de temps par an consacrez-vous à la traduction ?

La réponse a énormément évolué au fil des ans et ne reflète pas forcément grand-chose. Quand j’ai commencé, comme tous les débutants, je cherchais évidemment des contrats, et je consacrais au domaine peut-être un ou deux mois dans l’année, mais j’aurais bien voulu faire davantage ! Au maximum de mon temps dans cette activité, elle occupait peut-être dix mois par an ; je faisais deux gros romans à cette époque. Aujourd’hui, me consacrant davantage à l’écriture et l’expérience aidant à l’efficacité, je ne fais plus qu’un roman de taille moyenne par an, ce qui me prend entre deux et quatre mois en fonction de la difficulté du travail.

2018-05-09T11:30:49+02:00mercredi 9 mai 2018|Entretiens, Le monde du livre|6 Commentaires

Annonce de service : Disponibilité de Procrastination sur les différents réseaux

Hop, un petit mot que je croyais avoir écrit ici, mais que j’ai dû seulement mettre sur Facebook, qui servira donc de référence ultérieure. On nous demande, ou nous signale assez souvent que les épisodes de Procrastination ne sont pas forcément disponibles sur certains réseaux (notamment YouTube).

C’est normal. L’hébergement, la promotion et la diffusion nous sont très aimablement et gracieusement fournis par le site de référence en fantasy Elbakin.net, et gloire leur soit rendue – sans ce soutien logistique, il y a fort à parier que le podcast n’existerait pas (l’humble producteur que je suis n’a qu’à monter les épisodes, les leur fournir et ils s’occupent de tout – ce qui est vraiment confortable). Mais certains réseaux nécessitent plus de travail que d’autres (YouTube notamment nécessite un petit montage supplémentaire d’image dont ils s’occupent). Donc, si un épisode est en retard sur un réseau donné, ou en retard tout court (et ce malgré mon annonce sur le blog, laquelle est préparée à l’avance), veuillez prendre patience ! Cela va arriver, nul besoin de nous le signaler comme une potentielle erreur. Et remercions tous dans l’intervalle l’équipe d’Elbakin.net qui fait un super boulot et permet, tout simplement, à ce podcast d’exister en s’occupant de la mise en ligne à notre place (ce dont aucun de nous n’aurait le temps de s’occuper).

Merci pour votre patience et votre compréhension ! 

2018-04-29T13:55:52+02:00mercredi 2 mai 2018|Non classé|2 Commentaires

Titre

Aller en haut