En route vers le Port d’Âmes

Et voilà, c’est parti, pour de vrai. Le contrat de Port d’Âmes, le nouvel opus d’Évanégyre – et comme toujours indépendant – a été signé avec les mirifiques éditions Critic, qui soutiennent l’univers depuis ses premières publications avec La Volonté du Dragon en 2010 et La Route de la Conquête, sorti l’été dernier. Port d’Âmes marquera une différence assez certaine avec les livres déjà publiés : loin des récits de guerre, et situé très tardivement dans la chronologie de l’univers, c’est avant tout une histoire d’ascension sociale et d’amour, ainsi que de confrontation à soi-même et à ses valeurs. Avec des complots dans tous les coins et une magie qui rappellera les guerriers-mémoire du Hiéral, pour ceux qui les connaissent…

Pour les lecteurs de longue date de ce blog, oui, il s’agit – enfin – dudit « supertanker« . Un manuscrit que je garde sous le coude depuis cinq ou six ans, achevé, donc, mais sur lequel je compte passer deux bons mois de corrections et de réécriture pures, de manière à l’amener aussi haut que possible. C’est un épais pavé d’un million de signes, mais j’y prévois des coupes – un cinquième, à vue de nez, afin de fluidifier le style, de dégager le superflu, bref, de ne laisser que le nerf de cette histoire.

Le livre sortira en août prochain, à une date équivalente à La Route de la Conquête en 2014. On en reparlera !

2015-02-11T02:50:55+01:00mardi 13 janvier 2015|À ne pas manquer|10 Commentaires

Les plus faibles des dieux

Par Tignous, victime de l'attaque

Par Tignous, victime de l’attaque

En préambule – guère capable de trouver des mots justes et bien tournés. Malaise physique, je me sens comme au lendemain de Fukushima, même si ça n’a rien à voir – le lendemain de la catastrophe nucléaire, l’art me paraissait insignifiant ; aujourd’hui, sa parole et sa liberté me paraissent plus que jamais capitales. Ainsi ébranlé, je n’ose imaginer ce que peut éprouver l’entourage des victimes. Il n’y a pas de mots, pas d’insulte assez forte. Je me suis longtemps posé la question de réagir ou non. Est-il pertinent de réagir à chaud ? Est-il pertinent de parler, tout court ? Et sinon, je fais quoi ? Business as usual ? Impossible. Comment ? Il est des cas où la superbe de l’ignorance est la meilleure des positions, mais ici, je crois qu’aucun libre penseur ne peut rester silencieux. Je cours le risque d’être bancal, inadéquat. Je le prends. Se taire, en l’occurrence, c’est donner raison.

Il y a avant tout la compassion et les pensées pour les victimes et leurs proches, qu’on ne connaît pas, mais auxquelles on s’identifie ; il y a un acte, et des douleurs, des vides, un choc qui dépassent l’entendement, et qui ont frappé le monde entier.

Mais qu’on ne se méprenne pas. Ce n’est pas une voix de peur. C’est une voix de solidarité. Les intentions du crime, la futile et absurde défense d’un nom qui n’est pas censé avoir besoin de cela, cela n’évoque que le plus abject mépris, le plus profond et unanime dégoût. Et ne mérite qu’une chose : qu’on redresse l’échine. Nous laisser ébranler dans l’intimité de nos pensées revient à accorder un soupçon d’ascendance à une barbarie qu’on n’oserait pas même qualifier de moyenâgeuse par égards pour le moyen-âge. On ne lui fera pas cet honneur-là.

Car bien faibles doivent être les dieux, bien fragiles doivent être les croyances, s’il leur faut redouter une simple parole, s’ils ont besoin de sang pour garantir leur existence. 

L’obscurantisme se bat avec les armes mal dégrossies de son ignorance : la violence et le dogme. Seule la faiblesse craint le doute, et emploie la barbarie pour le réduire au silence.

Nous – et ce nous désigne le collectif éclairé de l’humanité, de toutes obédiences, religieux ou non, de par le monde et l’histoire entiers, liés par une forme d’harmonie sociale fondée sur la liberté et la pensée – nous ne saurons être intimidés. Mais nous ne saurons, non plus, nous abaisser au niveau de ces criminels. Nous, collectif humain, etc. – nous, civilisation, quelle qu’elle soit, aussi perfectible qu’elle soit – valons mieux que cela.

Ne nous laissons pas diminuer, ne nous laissons pas terroriser, ne nous laissons pas sombrer dans la colère et la haine. Pleurons, mais laissons notre peine alimenter notre résolution pour défendre, plus haut encore, liberté et raison. Les victimes avaient la seule audace de s’exprimer. Ce crime veut faire taire la satire, la dissension : célébrons-la et portons-la plus haut. Les mots, la raison, ont du pouvoir. Ne laissons pas l’étincelle du débat rationnel vaciller, alimentons-la, toujours plus fort, dans la raison et le progrès. Fleurit sur les réseaux, en signe de solidarité, l’image « Je suis Charlie » – faisons honneur, ne répondons pas à la violence par la bêtise, mais asseyons davantage notre solidarité collective, l’éclat des Lumières face aux obscurantismes de tout bord, en faisant usage, à chaque instant, de notre intelligence. Je n’apprécie pas énormément l’humour du journal, mais ça n’a pas d’importance ; qu’on l’aime ou pas, ainsi qu’on l’attribue à Voltaire, il faut se battre pour qu’il puisse s’exprimer.

N’oublions pas que nous (fraternité humaine de bonne volonté et de tous horizons, de toutes obédiences, religieuses ou non, etc. – nous, gens fréquentables et civilisés) avons dépassé ces « armes » – et la notion même qu’une croyance s’impose par la force. Les Lumières, héritières des philosophes grecs et romains, la civilisation nous ont enseigné la valeur et la force du doute, du débat, facteurs de progrès. Nous nous sommes efforcés, et nous efforçons continuellement, de construire des sociétés hissant toujours plus haut l’égalité, le questionnement, la remise en question – vers l’amélioration de soi, et le progrès de la société. Sont-elles parfaites ? Aucune ne l’est, loin de là. C’est un cheminement, un processus1

Nos forces s’appellent intelligence, raison, éducation, réflexion, esprit critique, liberté d’expression. Nos cadres s’appellent lois, tribunaux, édictées au cours d’un processus démocratique, certes grandement perfectible, mais c’est encore le moins mauvais de tous les systèmes (Churchill). Nos gardiens sont les forces de police et d’enquête, mandatés par la République. Dans les jours qui viennent, dans les émotions qui nous secouent, nous agiteront au quotidien sur les réseaux, dans la vie courante, rappelons-nous l’édifice de la civilisation, en perfectionnement constant, fondé sur la raison, une force que les barbares ignorent, car ils ne savent que prouver leur faiblesse, leur stupidité et leur peur à travers la violence. Nous sommes, chacun, à notre échelon, les garants de cette civilisation, dans nos actes, nos paroles, dans l’usage de notre raison, de notre esprit critique, dans notre ouverture à la différence, bref, dans l’emploi de cet organe appelé cerveau – autant que dans notre maintien et notre défense fermes des principes de liberté qui nous gouvernent, qu’il s’agisse de la liberté d’expression et de la presse, ou de la traque sans merci des assassins.

Il convient de rappeler que le dieu faible défendu par les criminels d’hier n’est pas celui de la grande majorité des musulmans d’aujourd’hui. De la même façon que la France est héritière des Lumières avant d’être la fille aîné de l’Église, l’héritage du monde arabe, s’il est besoin de le rappeler, ce n’est pas l’intégrisme ; c’est Omar Khayyam et ses poèmes dédiés au vin, aux jeunes femmes, son scepticisme vis-à-vis de la religion ; c’est Avicenne, père de la médecine moderne, fondée sur la méthode scientifique ; ce sont d’innombrables traductions et mises à disposition d’oeuvres fondamentales (notamment de philosophes antiques, justement), pierres angulaires de la pensée contemporaine depuis un millénaire, et mille autres réalisations capitales pour l’humanité.

Nos ennemis à tous, les ennemis de l’humanité, ce sont l’ignorance, la bêtise, le silence, tous ceux qui réduisent au silence tout débat rationnel, toute remise en cause des principes établis, des autorités sans fondement. Notre ennemi n’est pas une idée.

Notre ennemi, c’est l’absence d’idées : le refus d’en voir naître, l’interdiction de les nourrir, de les exprimer, et de les soumettre à la discussion, au risque de les voir réfutées et disparaître. 

« La religion, une forme médiévale de déraison, combinée aux arsenaux modernes, devient une réelle menace pour nos libertés. Ce totalitarisme religieux a entraîné une mutation mortelle dans le coeur de l’Islam et nous en avons vu les conséquences tragiques à Paris aujourd’hui. Je me tiens aux côtés de Charlie Hebdo, et nous devons tous le faire pour défendre l’art de la satire, lequel a toujours représenté une force de liberté contre la tyrannie, la malhonnêteté et la bêtise. Le ‘respect de la religion’ est devenu une expression codée pour dire ‘peur de la religion’. Comme tous les idées, les religions méritent critique, satire, et, oui, notre irrespect, sans crainte. » – Salman Rushdie

  1. Les criminels d’hier n’en ont probablement pas bénéficié, comme hélas beaucoup d’autres. Ce qui ne rend pas pour autant leur crime ni justifiable, ni excusable. Mais il s’agit là d’un autre débat, connexe, historique, et surtout très déplacé au lendemain de la tragédie.
2015-01-08T08:57:02+01:00jeudi 8 janvier 2015|Humeurs aqueuses|9 Commentaires

Une librairie amie en difficulté

phenomenejTerrible accident pour Phénomène J, excellente librairie / bouquinerie angevine, fervent soutien de l’imaginaire notamment à travers des initiatives associatives, des fanzines critiques, le salon ImaJ’nère et les anthologies associées qui ouvrent leurs pages aux débutants : un dégâts des eaux en cave a détruit une grande partie du stock et grandement fragilisé les bases de données. La boutique signale ses difficultés et un possible appel à l’aide, peut-être à travers un financement participatif.

J’ai eu le plaisir de participer plusieurs fois à ImaJ’nère et d’aller signer à la librairie : je peux témoigner de l’accueil merveilleux, du professionnalisme et de la fidélité amicale de l’équipe. Plus qu’une boutique, comme tout bon libraire, « Phéno » est un point d’eau pour des passionnés, une communauté qui s’est tissée par amour de la littérature, et se trouve à l’origine de quantités de projets qui communiquent et font vivre cette passion, en particulier à travers des événements.

Si vous vous trouvez dans la région d’Angers, je ne peux que vous encourager vivement à aller y faire un tour, dans un premier temps, à effectuer quelques achats pour aider à faire vivre le commerce. Le fonds estsi vaste, impossible de ne pas trouver votre bonheur. (Notamment, mes chers étudiants passionnés d’imaginaire, si vous me lisez, allez faire un tour là-bas, petits saligauds, et investissez-vous dans la communauté.) La boutique se trouve 3, rue Montault, derrière la cathédrale. Et dès qu’un plan d’action sera mis en place par l’équipe, comptez sur moi pour vous rabâcher les oreilles avec, parce que ce lieu ne doit pas disparaître : on a trop peu de bons libraires pour ne pas leur filer un coup de main quand les temps sont durs.

2015-01-06T23:13:02+01:00mercredi 7 janvier 2015|Le monde du livre|2 Commentaires

2015

2015

JE SUIS RÉVEILLÉ.

De retour de deux semaines sans écran, sans réseaux, sans rien et remonté à bloc pour la nouvelle année. Avec quelques réflexions soufflées par Harpocrate, une des incarnations du silence, notamment le fait que je ne lui laisse pas suffisamment l’espace de s’exprimer. « More on that later. »

Merci à toi, auguste lectorat, pour ta gentillesse, ta compréhension et ta patience pendant ce silence – visiblement, le ciel ne m’est pas tombé sur la tête, et c’est donc à méditer, et à refaire.

Mais peu importe, ce n’est pas l’heure de parler de moi, mais de te parler à toi; auguste lectorat :

je te souhaite, ainsi qu’à ceux à qui tu tiens, une excellente nouvelle année ; puisses-tu, tel Philae, approcher à des vitesses vertigineuses de tes objectifs, atterrir dessus avec une précision d’horloger suisse – et rester ensuite quelques jours hors ligne pour en profiter et méditer sereinement avec toi-même ! 

 

2015-01-05T11:39:23+01:00lundi 5 janvier 2015|À ne pas manquer|12 Commentaires
Aller en haut