J’ai ENFIN choisi mon app de notes, mais il a fallu tout un voyage (Obsidian FTW)

Mais bon, je ne vais peut-être PAS vous parler du voyage, parce que sinon ça va finir comme cet article qui n’a jamais vu le jour quand on m’a demandé de récapituler un peu ma carrière et que ça s’est terminé en cinq parties autobiographiques que je n’ai jamais fini parce que

Tout le monde s’en fout

Et si je remonte à Evernote on n’est pas couchés.

Les notes posent un enjeu fondamental : le savoir, les idées, la base de connaissances, c’est le fonds de commerce d’un auteur, et de tout « travailleur du savoir » (knowledge worker). Avoir un outil puissant mais aussi adapté est crucial, et une fois Evernote quitté, j’ai eu une longue, longue traversée du désert. Et l’année dernière, je finissais par capituler en recommandant deux poids lourds du domaine, chacun adaptés à des approches différentes : Bear pour le minimalisme, Obsidian pour la puissance. J’ai utilisé les deux en parallèle pendant des années, mais ce stade, et finalement, j’ai définitivement élu résidence chez le second.

Mais pour cela, il a fallu deux prises de conscience :

  • Redémarrer un système de zéro directement dans Obsidian pour sortir du fatras ingérable de customisations contradictoires et d’idées inachevées qu’était devenu mon système principal (je vais vous saouler avec ça, mais c’est LE piège) ;
  • Architecturer la toute fin de La Succession des Âges pour me rendre compte que, effectivement, Obsidian est la seule application à allier l’agilité et la flexibilité nécessaires pour un tel travail de construction (que j’ai réalisé à une vitesse qui m’a surpris moi-même).

Ce qu’est Obsidian

Rappel rapide : Obsidian est une application entièrement gratuite de gestion de notes reliées (ils gagnent leur vie avec des add-ons payants, principalement synchro et publication publique).

À la base, Obsidian prend un gros dossier de fichiers texte (en Markdown, voir ce tuto rapide) – donc parfaitement transparents et lisibles même sans l’application – et va ajouter une surcouche de rendu, de visualisation et de présentation extrêmement puissante grâce à son balisage : mots-clés, liens wiki, graphe, dossiers, et surtout une architecture totalement (mais alors, totalement) ouverte. Obsidian compte plus de 2200 plugins à l’heure actuelle, et l’app est intégralement personnalisable, de son schéma de couleurs à l’emplacement des icônes en passant par la manière dont le moindre élément apparaît.

Et c’est là qu’est son énorme piège : Obsidian est tellement ouvert qu’on se perd très facilement à vouloir le personnaliser dans ses moindres détails.

Ne. Faites. Pas. Ça. Je suis tombé là-dedans pendant littéralement cinq ans (j’ai commencé à utiliser Obsidian aux alentours de juin 2020, à la 0.6), sentant que c’était l’outil que je devrais utiliser, mais incapable de l’apprivoiser avant de comprendre que j’essayais de faire trop de trucs à la fois dedans.

Pourquoi choisir Obsidian

Obsidian a, pour moi, quantité d’atouts qui en font l’outil parfait, avec l’équilibre juste de fonctionnalités, d’extensibilité et d’une fondation solide pour construire une base de connaissance censée accompagner un·e créatif·ve pour sa vie entière.

Même si Obsidian disparaît, les fichiers resteront lisibles. Vous avez déjà tenté de migrer depuis Evernote ? Voilà. Obsidian s’appuie le plus possible sur le Markdown, mais un certain nombre d’additions nécessitent forcément une syntaxe maison dans le texte ; celle-ci demeure compréhensible et utilisable même sans le support d’Obsidian. C’est sûr, c’est moins joli, un peu plus rebutant à utiliser, mais si j’ouvre mon fichier et que je vois [[Note bidule^45yhjp]], je sais que c’est un lien vers la Note bidule, paragraphe 45yhjp, et je peux simplement utiliser une recherche dans le texte pour trouver la chose. C’est trivial (testé sous Bear, qui ne comprend pas cette syntaxe) : Obsidian ne tient pas vos données prisonnières.

Obsidian a la meilleure expérience utilisateur qui soit. Oui, Obsidian est basé sur Electron, et oui, ça m’ennuie, mais les développeurs ont fait un travail prodigieux pour cacher la chose : menus natifs, optimisations de performance, réglages subtils d’apparence, on peut rendre Obsidian presque crédible comme app native. Mais surtout, l’expérience a été pensée au millimètre pour la rapidité d’exécution : ouvrir un fichier dans un onglet séparé, les comparer, en ouvrir un troisième, noter un truc dans un quatrième, tout se pilote au clavier avec une rapidité folle (et bien entendu configurable). Obsidian s’inspire ouvertement des environnements de développement logiciel, ou des navigateurs (avec des onglets) si ça ne vous dit rien, et le mode « onglets empilés » (le vieil Andy mode pour ceux qui savent) réplique de façon virtuelle l’idée de travailler sur plusieurs fiches étalées devant soi.

Ceci est mon Obsidian, que vous ne verrez quasiment jamais, car il m’est beaucoup trop personnel.

Obsidian ne vous impose pas de manière de travailler. C’est ce qui fait peur à la plupart des gens, et en effet, c’est là qu’on trouve des trillons de tutos YouTube vous expliquant comment organiser votre vault. Liens ? Tags ? Dossiers ? Recherche ? Vous faites ce que vous voulez. Ce sont vos données. C’est pourquoi il faut absolument commencer simple.

Obsidian est confidentiel par défaut. Obsidian utilise des fichiers texte et média à la base, en local sur votre disque. Leur service de synchronisation est chiffré de bout en bout. Pas envie de l’utiliser ? Les développeurs ne vous empêchent absolument pas d’utiliser une solution tierce. Débrouillez-vous. D’ailleurs :

Les développeurs ont une approche vertueuse. Les développeurs, puis le CEO qu’il se sont choisi, Steph Ango (Kepano) ont pour but de créer un outil vertueux et respectueux des utilisateurs. Jetez un œil à sa philosophie : Files over app, In good hands, 100% user-supported. J’ai longtemps échangé avec les développeurs au temps des débuts et quand j’ai demandé si leur service de sync serait chiffré de bout en bout, la réponse a été « bien entendu ».

Et enfin, donc Obsidian est intégralement personnalisable. Je le mets en dernier car, comme dit plus haut, c’est une bénédiction et un piège. J’utilise à l’heure actuelle une cinquantaine de plugins (donc beaucoup sont des petits, en mode « qualité de vie ») et une vingtaine d’extraits de code (presque exclusivement cosmétiques pour transformer Obsidian en Bear, cf ci-dessus). Vous n’avez aucunement besoin de faire tout ça. Moi, j’ai un OCD. Vous pas. Enfin, j’espère.

Comment bien commencer avec Obsidian

Apprenez les bases du Markdown en trois minutes. C’est indispensable et vraiment pas bien difficile. Je vous le dis tout net, avec cette fermeté rude mais aimante qui fait de moi un rude habitant du bush, mais chaleureux si on apprend à me connaître : si vous ne voulez pas faire cet effort, Obsidian n’est pas pour vous. Restez-en là.

Obsidian propose une doc technique détaillée, claire et fournie. Référez-vous ici pour l’installer et le configurer. Ça n’est pas spécialement difficile, il faut juste créer un « coffre » (vault) soit un dossier qui contiendra vos données.

Ne vous perdez pas. Quasiment toutes les fonctionnalités d’Obsidian sont optionnelles et apparaissent comme plugins (modules). N’installez rien de nouveau. Je le mets en rouge parce que c’est la base pour ne pas se perdre dans l’application : n’installez. Rien. De. Nouveau. Même si ça a l’air trop génial. Le bon réflexe avec cette app, c’est : ne rien installer qu’on n’ait pas l’intention d’apprendre et utiliser. (Vous pouvez par contre vous faire une deuxième vault de test pour y mettre tous les trucs rigolos qui vous amusent – c’est même recommandé pour apprivoiser une fonctionnalité. Prenez le bon réflexe du développement : un environnement de production, un de test.) Configurez l’app avec ces notions de bon sens :

  • Passez l’app en français dès maintenant (il restera des tas de trucs en anglais, notamment avec les plugins, mais ça vous simplifiera la vie pour des tas de trucs de formatage)
  • Dans les préférences, vérifiez que l’éditeur est bien configuré en « Aperçu en direct » (rendu de la syntaxe Markdown comme dans un traitement de texte classique)
  • Toujours dedans, dans Fichiers : vérifiez bien :
    • Toujours mettre à jour les liens internes est activé
    • Emplacement par défaut de la nouvelle note : Même dossier que le fichier
    • Utiliser les [[Wikilinks]] est activé
  • Modules principaux : n’activez QUE Explorateur de fichiers, Liens sortants, Rechercher, Récupération de fichiers, Rétroliens, Sélecteur rapide, Volets de mots-clés. Découvrez les fonctionnalités au fur et à mesure en lisant la doc et en vous demandant : « je vais vraiment utiliser ça ? » et surtout pas « wahou, ça a l’air trop cool »
  • Créez un dossier qui contiendra vos médias. (Le mien est dans Ressources/Media). En effet, les fichiers Markdown sont du texte, donc ils ne peuvent contenir de médias, mais Obsidian peut les stocker et les rendre en direct avec une simple référence du type ![[Image.png]] (voir la syntaxe Markdown). Configurez-le dans les préférences Fichiers et liens > Emplacement par défaut des nouvelles pièces jointes.

Réfléchissez ce que vous attendez d’Obsidian, en fonction de vos besoins et de votre manière actuelle de travailler. Obsidian permet à peu près de tout faire moyennant un peu de recherche ou de bidouille. Définissez votre produit viable minimal pour votre système de notes. De quoi avez-vous besoin pour commencer à écrire là, tout de suite ? Selon toute logique, avec la configuration ci-dessus, vous avez déjà quantité d’outils hyper puissants (liens wiki, liens aux blocs, transclusion). Apprivoisez la chose. Mais, pour vous donner une idée, mon Obsidian remplit tous les rôles suivants :

  • Capture rapide de mes idées, médias, en mobilité, incluant audio et image
  • Journal personnel, avec géolocalisation (important quand on vit sur un continent et travaille sur un autre)
  • Organisation et émergence créative, romans, sagas, idées diverses
  • Base de connaissance personnelle (Zettelkasten)
  • Base de données d’outils musique (synthés, matériel, équipement virtuel) (en cours de construction avec Dataview) (ouais, JE SAIS)
  • Il est BEAU (à mes yeux) (en gros, j’ai piqué l’apparence de Bear, hein)

Tous ces rôles ne lui ont pas été échus dès le début : je le répète, mais ne tombez pas dans ce piège ! On peut gérer sa vie entière dans Obsidian, mais n’essayez surtout pas de le faire dès le début, quoi que vous dise Jean-Michel de la Win sur YouTube. Conservez vos outils actuels, concentrez-vous sans doute sur le cœur de cible de l’outil – notes et émergence créative – et, une fois que ça marche bien, envisagez peut-être d’ajouter une brique en plus (la capture rapide ? Le journal ?). Je vous le dis, j’arrive à Obsidian après cinq ans de voyage.

Et enfin, lisez et relisez la doc. Vous savez ce qu’on disait autrefois ? RTFM – Read The Fucking Manual. La doc liée ci-dessus vous donnera la base de l’approche, et ensuite, petit à petit, ajoutez des choses (une bonne habitude consiste à avoir une fiche compilant toutes les choses qu’on pourrait ou avoir envie de faire).

Et vous savez quoi ? On va donc maintenant parler d’Obsidian. Oh ouiiii.

2025-02-24T01:15:56+01:00mercredi 26 février 2025|Technique d'écriture|12 Commentaires

Combien de vaults Obsidian peuvent-elles danser sur une tête d’épingle ?

Une question assez fréquente sur les apps de notes, les PKM, la gestion de la connaissance, les knowledge graphs, les Zettelkasten, tous ces machins :

Vaut-il mieux avoir un seul environnement de notes, ou plusieurs ? Une seule ou plusieurs bases de connaissances ?

Plus prosaïquement : t’as une seule vault Obsidian ou plusieurs ?

Avant de répondre à ça, considérons que nous affrontons déjà, par la force des choses, une fragmentation de nos environnements de pensée, ne serait-ce que par les applications utilisées. Une personne un brin intéressée par l’organisation de ses notes aura en général trois ou quatre environnements distincts :

  • Une base de connaissances proprement dite (Obsidian et al.) ;
  • Un environnement de réflexion libre (notes manuscrites / carnets / app de notes à la main type Notability) ;
  • Un journal (potentiellement le carnet sus-cité, ou bien une app spécialisée type Day One) ;
  • Un environnement de capture (encore le carnet, ou bien une app spécialisée type Drafts).

Voire une base bibliographique (Zotero, DEVONthink, etc.)

Dans les faits, donc, on est déjà forcé de séparer les environnements dans une certaine mesure, pas forcément selon les projets, mais leur étape de réflexion ; en gros, on part de la capture pour développer dans un journal et/ou réfléchir librement pour distiller les idées dans sa base de connaissances (et produire un résultat, évidemment).

Et je pense que ça n’est pas génial pour la création. En effet, on veut pouvoir passer librement d’une étape à l’autre afin de développer ses idées ; dans l’absolu, il n’y a pas de frontière claire établissant « à partir de maintenant, cette idée floue est un projet à développer assidûment » – même si on peut parvenir à une telle décision, et qu’on le fait. Mais dans les étapes d’élaboration, il n’est pas rare, je crois, de paumer ses idées : « dans quel carnet se trouve cette fantastique idée de roman que je veux faire maintenant tout de suite ? »

Ce serait chouette de pouvoir conserver le continuum intact.

La création, l’émergence et le développement des idées, en particulier dans le domaine artistique, se nourrissent d’absolument tout. D’une photo prise sur le vif dans la rue lors d’un voyage, d’un échange à cœur ouvert avec un ami, d’une réflexion dans son journal, de notes griffonnées sur un coin de table. J’ai mis au point une de mes plus importantes prises de conscience créatives récentes dans un moment de désœuvrement entre deux portes parce que je cherchais à démontrer la nocivité du système PARA pour la création artistique. On ne réfléchit jamais aussi bien que quand on se laisse vagabonder ; c’est pourquoi tant de bonnes idées viennent sous la douche.

Donc : combien de vaults Obsidian ? Combien, au sens large, d’environnements de pensée ?

Un.

Un seul, qui compilera au maximum tous les éléments formant la réflexion conduisant à la création : captures à la volée, notes manuscrites, Zettelkasten, et bouts et constructions relatifs aux projets en cours, notés parce que c’est chouette, sans nécessairement viser d’objectif dans un premier temps – dans un tel environnement, il vient un moment où l’objectif se décante et où une idée est devenue suffisamment mûre pour engendrer une production assidue.

C’est une distillation continue.

Deux caveats à ça; quand même :

Si vous avez une activité purement externe sans rapport aucun avec la création (un boulot alimentaire nécessitant des notes), vous pouvez décider de la séparer de votre environnement de réflexion mais, même là, je trouve cela dommage. Cette activité, même si vous la détestez, fait partie de vous. Il y a sans doute des éléments créatifs à en tirer. Ne serait-ce, le cas échéant, que votre détestation qui peut devenir une satire, une parodie, ou juste une catharsis.

Et, comme dit plus haut, les outils impliquent en général une séparation des étapes de réflexion. Aucune app ne fait tout bien : Obsidian fonctionne mal pour les notes manuscrites, la capture de photos avec Drafts est puissamment compliquée, Notability ne sait pas faire de liens entre notes.

C’était jadis la belle promesse d’Evernote qui demeure, encore aujourd’hui, peut-être l’app qui arrive à recouvrir un maximum de domaines d’activité. Hélas, en 2024, il est impensable d’employer un service qui ne soit pas chiffré de bout en bout, et Evernote fait franchement tout de plus en plus mal.

Mais c’est en train de devenir mon nouveau Graal : l’application qui me permettra de tout combiner (et les pratiques que je peux lâcher pour y parvenir).

Knowledge graph, un exemple
2024-10-21T06:16:43+02:00mardi 22 octobre 2024|Best Of, Technique d'écriture|Commentaires fermés sur Combien de vaults Obsidian peuvent-elles danser sur une tête d’épingle ?

Procrastination podcast s08e07 – Écrire la fin

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Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : « s08e07 – Écrire la fin« .

Un commencement est un moment d’une délicatesse extrême, disait l’autre, mais la fin aussi : cette quinzaine, astuces et techniques pour la trouver et la réussir. Pour Mélanie, chaque type de texte impose ses nécessités en la matière, mais elle explique en quoi la fin dirige son écriture, tout en visant à un effet de résonance avec le lecteur, ce qu’elle décrit comme un fin en « points de suspension ». Pour Lionel, la connaître est impératif pour ne serait-ce qu’écrire, car elle justifie le projet et le voyage même ; c’est cette vision claire qui va dicter et orienter tout le récit. Estelle s’interroge beaucoup sur le sens que l’on donne en arrêtant l’histoire à un moment donné ; elle apprécie une certaine justesse de dosage dans une conclusion, à la fois dans l’ouverture, la nuance, la résonance symbolique et surtout la place qu’elle laisse au lecteur pour l’habiter.

Références citées

  • « La Tour sombre », série de Stephen King
  • Jean Giono, Un roi sans divertissement
  • George Orwell, 1984
  • « Game of Thrones », série dérivée de l’œuvre de G. R. R. Martin
  • « Les Chroniques des Crépusculaires », série de Mathieu Gaborit
  • Guest star : Lucie

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2024-01-09T08:31:14+01:00vendredi 15 décembre 2023|Procrastination podcast|Commentaires fermés sur Procrastination podcast s08e07 – Écrire la fin

Procrastination podcast s07e02 – Organiser ses notes d’écriture

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Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : « s07e02 – Organiser ses notes d’écriture« .

La création est un processus de défrichage, où se mêlent des inspirations, des recherches et des fragments ; l’écriture consiste à évaluer, développer et ordonnancer ces éléments dans l’exécution du récit. Quelles techniques et astuces pour prendre et organiser ses notes dans la construction d’un projet romanesque ? L’approche de Mélanie : ne pas en avoir ! Ou éventuellement seulement des fragments chaotiques qui évoquent atmosphères et ambiances. Estelle adore les notes, et dévoile sa méthode de construction à base de carnets de notes, d’inspirations photographiques, d’annotations dans des livres pour développer ses projets parfois sur plusieurs années. Lionel explique quant à lui la méthode dite du Zettelkasten, la meilleure qu’il ait trouvée pour épouser l’émergence organique présidant aux projets artistiques.

Références cités

– Stellarium, https://stellarium.org/fr/

– Niklas Luhmann et le Zettelkasten, https://zettelkasten.de

– Obsidian, https://obsidian.md

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2022-10-14T22:06:45+02:00lundi 3 octobre 2022|Procrastination podcast|Commentaires fermés sur Procrastination podcast s07e02 – Organiser ses notes d’écriture

Certaines questions d’écriture sont des solos de guitare

En lien avec l’article de la semaine dernière sur la construction des opinions personnelles avant la consultation d’autrui, une observation sur des questions d’écriture en particulier, artistiques en général, que je vois souvent circuler en ligne. Elles se formulent à peu près toutes de la même manière :

Comment puis-je faire x dans mon histoire ? Quelle technique pour accomplir y ? Vous pensez quoi de faire z ?

Ce n’est pas parce qu’on est en écriture et que l’approche technique a (heureusement) traversé l’Atlantique depuis les États-Unis que l’écriture est devenue une science ; qu’il existe une bonne réponse, un code (ou une poignée) garantissant le succès dans l’exécution. Ça serait trop simple. Je dirais même, au contraire, que chercher cela est prendre le problème à l’envers. Cela revient à demander :

Comment puis-je faire un solo de guitare qui déchire ?

Ben, au-delà de te muscler les doigts, faire des gammes et comprendre l’harmonie, la réponse devient très vite éminemment subjective, tant pour toi que le public, et donc, elle ne peut connaître de réponse objective. En chercher une, je le crains, est même une manière assez sûre de tuer la vie et le naturel d’un projet.

D’accord, mais quand même, comment accomplir un effet donné dans une histoire ? Alors, on peut parler de pistes, bien entendu, on peut étudier des approches, partager son expérience. Mais il est fondamental de se rappeler qu’elles sont une voie parmi une infinité, juste un point de départ pour l’exploration. Trouver la manière d’accomplir quelque chose dans une histoire est nécessairement consubstantiel des événements, des personnages, du stade de l’histoire, et surtout, surtout, de la sensibilité et des intentions de l’auteur ou autrice. De la même façon qu’un solo de guitare émerge de sa chanson, et la nourrit en retour. Au bout du compte, c’est indissociable. Et surtout, ça ne connaîtra jamais de réponse absolue.

La question est légitime. Mais pour y répondre, je crois qu’il faut partir avant tout de son projet, de son envie personnelle, et de creuser en soi la manière dont on veut procéder dans cette instance précise. Car c’est de la création : une réponse ne servira qu’une fois telle quelle dans un contexte donné. Oui, les leçons acquises à cette occasion viendront nourrir les projets suivants, la clairvoyance, de manière à cerner peut-être un peu plus vite ce qui fonctionne ou pas ; mais à nouveau projet, nouvelles réponses, nouvelles exécutions subtilement ou très différentes.

Je sais, c’est pas pratique. Mais en fait, si on se laisse le loisir d’explorer et de se faire plaisir, c’est plutôt cool ! Comme dit le proverbe, on ne se baigne pas deux fois dans le même solo de guitare (ou un truc du genre). Vos réponses, votre personnalité, votre humeur à un moment (et même les difficultés qui peuvent être reliées à l’exécution d’un passage) sont mille fois plus intéressantes que tous les modes d’emploi du monde.

Veuillez ne pas en prendre ombrage, mais dorénavant, je crois que j’appellerai cela des « questions solo de guitare » avec cet article comme point de départ à la conversation – parce que ce genre d’interrogation sur l’approche revient assez souvent.

2022-08-28T08:17:48+02:00lundi 29 août 2022|Best Of, Technique d'écriture|2 Commentaires

Procrastination podcast S06e18 – Parler de ses textes

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Deux semaines ont passé, et le nouvel épisode de Procrastination, notre podcast sur l’écriture en quinze minutes, est disponible ! Au programme : « S06e18 – Parler de ses textes« .

Un épisode confession sur le rapport à la verbalisation des projets en cours de création : en parler, s’ouvrir aux autres, avantage ou danger ? Mélanie a besoin de communiquer sur le fait que la « machine » est relancée, de savoir qu’on la surveille au travail… en revanche reste secrète sur le contenu, qu’elle a besoin de développer dans la solitude. Lionel révèle qu’il n’écrit que visé par des Daleks qui menacent de l’exterminer s’il ne travaille pas assez, et plus prosaïquement, ajoute un degré dans le secret : il ne voudrait s’ouvrir, et ne révéler quoi que ce soit, que sur les projets proches de la complétion, sauf à ses plus intimes, de crainte de figer les choses. Estelle est tout l’inverse : elle parle énormément des projets en cours dans son entourage, dans un groupe d’entraide d’auteurs et autrices ; loin de figer les choses, le processus d’évolution que ces conversations induit est essentiel.

Références citées

– Hewlett-Packard

– Le rubber ducking (« méthode du canard en plastique ») : https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9thode_du_canard_en_plastique

– Sylvie Miller

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Bonne écoute !

2022-06-15T10:01:54+02:00mercredi 1 juin 2022|Procrastination podcast|Commentaires fermés sur Procrastination podcast S06e18 – Parler de ses textes

De l’émergence des idées à leur structuration (Geekriture 06)

L’une des forces du Zettelkasten est de ne pas imposer d’ordre a priori, en permettant simplement une exploration libre de ses idées et de ses recherches, et, à travers le tissage constant de liens et d’analogies, de voir les idées et les structures émerger par constellations et reflets d’intérêts. Mais évidemment, si l’on peut avoir une vision d’ensemble de ses notes ou fiches quand il en existe quelques dizaines, quand l’on dépasse la centaine voire, quand on atteint le chiffre vertigineux de 90000 comme dans le cas de Luhmann, la vision d’ensemble est impossible.

À un moment, il faut arriver à rassembler tout ça, à se donner des points d’entrée dans sa collection de notes, au risque de retomber dans le syndrome Evernote : une vaste boîte noire où l’on jette des pensées, mais dont on ne ressort jamais rien. Un Zettelkasten, un système de gestion du savoir doit vivre ; Luhmann lui-même qualifiait son système de « partenaire dans une conversation ».

➡️ … l’article Geekriture du mois traite de L’émergence des idées et de leur structuration, à lire sur ActuSF.

2021-06-17T10:48:32+02:00mercredi 23 juin 2021|Geekriture|2 Commentaires

Des outils numériques pour l’émergence des idées et du savoir (Geekriture 05)

Zettelkasten est le mot très à la mode dans les cercles de productivité et de gestion de la connaissance, mais nous avons vu qu’il ne s’agit, finalement, que d’une application particulière et délibérée de l’hypertexte : digérer la connaissance ou formuler ses idées clairement, de manière à pouvoir établir des passerelles entre elles. C’est de ce principe simple que naît un ensemble dont le tout représente plus que la somme des parties, et c’est particulièrement juste dans le cas de l’écriture de fiction : après tout, les personnages ne valent que par leur insertion dans une histoire, l’histoire ne vaut que par les personnages qu’elle nous donne à suivre, le tout s’insérant dans un monde imaginaire (puisque nous sommes sur ActuSF) qui vient servir et architecturer l’ensemble. C’est cette interdépendance constante de toutes les parties d’une œuvre qui rend le travail par émergence aussi précieux, mais après avoir longuement discuté des principes d’une méthode, il serait bel et bon de voir comment l’implémenter.

➡️ … l’article Geekriture du mois traite des outils numériques pour l’émergence des idées et du savoir, à lire sur ActuSF.

2021-05-28T18:25:11+02:00jeudi 3 juin 2021|Geekriture|Commentaires fermés sur Des outils numériques pour l’émergence des idées et du savoir (Geekriture 05)

Un compendium d’émojis pour indiquer le degré d’élaboration des idées

J’aime les émojis. D’une part parce que c’est standard et que c’est beaucoup plus pratique pour indiquer son humeur que les anciens codes de smileys où se mêlaient les version occidentales :) et asiatiques ^^. Mais aussi parce que, pour constituer des repères visuels dans des notes, c’est suprêmement pratique ; plutôt que d’écrire « idée : », il est beaucoup plus clair (en tout cas à mes yeux, notamment dans le millier de pages de notes que représente tout le travail d’architecture autour de « Les Dieux sauvages ») d’avoir le symbole 💡. En plus, pour retrouver ses « idées », il suffit de rechercher le caractère 💡 dans l’ensemble des notes, plutôt le mot « idée » qui peut être ambigu (fait-on référence à vos idées, ou à celles de vos personnages qui font partie de l’histoire ?). En d’autres termes, les émojis permettent de différencier ce qui se réfère à l’architecture de la réflexion du contenu de la réflexion elle-même. (Doit y avoir un mot pour désigner ça qui contient « diégétique » quelque part.)

Si l’idée vous intrigue et que vous débarquez dans le concept, il faut que je vous renvoie à deux articles préliminaires :

Des degrés de certitude dans l’écriture (avec des émojis) : la base du système, qui rejoint Geekriture 02 – l’échec de la to-do list pour écrire : la création n’est pas un flux de tâches mais un affinement de certitudes ; les émojis sont un système simple et élégant pour garder la trace de la « confiance » que l’on accorde à une idée ou une possibilité narrative. (C’est développé aussi dans Comment écrire de la fiction ?)

Comment taper des émojis au clavier et pourquoi diantre vouloir faire un truc pareil : un usage intense de ces petits symboles nécessite une manière rapide de les entrer sans briser le rythme de frappe ; cet article explique comment en utilisant les outils d’expansion de texte.

Au fil du temps, j’ai donc composé mon propre compendium d’émojis indiquant le statut de mes idées, les différentes entités fréquemment rencontrées dans un récit, les fonctions narratives, etc. Évidemment, ce n’est que mon système, mais peut-être trouverez-vous ici des… idées (heh) pour nourrir votre approche et articuler votre réflexion sans être paralysé·e par la complexité de la tâche que représente l’écriture d’un livre ou d’une saga. Je m’en sers chaque jour, et les raccourcis clavier qui leur sont liés sont devenus seconde nature.

Évidemment, ces symboles sont des marqueurs vivants : une idée 💡 peut devenir une hypothèse ➡️ avant d’être finalement écartée ❌. C’est toujours la réalisation de l’écriture elle-même qui décide du statut final des choses, et c’est une fois une œuvre finie qu’elle devient 📚 et qu’elle fixe ses ❗️et engendre de nouvelles ❓. Les étapes de ce parcours (idée / hypothèse / je veux / je vois etc.) sont aussi développés dans Comment écrire de la fiction ?, ce qui vous montre bien que je travaille vraiment comme ça, ce qui me vaut peut-être, je ne sais pas, d’être fou à lier.

Degrés de certitude et statut

❓ Question gênante à élucider
🖋 À creuser ou rechercher (facilement décidable avec un peu de réflexion, ou sera réglé par des recherches simples)
💡 Idée (possibilité)
👁 Je vois (élément servi par le Mystère, sonnant vrai, autour duquel construire)
👉 Je veux : désir, envie, intention
➡️ Hypothèse (construction théorique d’un pan narratif)
❗️ Il faut que (nécessité)
⛔️ Il ne faut pas que (nécessité négative)
📚 Canon (impossible à contredire)
😃 Oui !
〰️ Serait bien que… 
🤔 Éthéré (idée probablement trop éloignée du cœur du projet)
❌ Abandonné, mauvaise piste, contredit (choix d’une piste différente)
😐 Bof, pas convaincu
🙁 Bleh (j’aimerais éviter)
🔦 Recherches à faire
🧐 Réflexions, brainstorm
🗑 Déprécié : note devenue inutile et archivée
🗄 Archivé (n’est plus pertinent)
☢️ Problème à résoudre (de construction, trou de scénario, etc.)
✅ Fait, écrit, vu

Se combine, par exemple :
💡📄 Idée de scène
➡️📄 Scène probable
✅🗒 Fragment intégré

Éléments de fiction

📖 Récit (saga, roman, nouvelle, haiku : une unité narrative indépendante sans a priori de taille)
🏗 Structuration (plan global, mise en ordre)
🧵 Fil narratif
🪡 Péripétie
📄 Scène
🗒 Fragment
🔭 Laisse entendre, annonce (foreshadowing)
🥀 Déflore (anti-foreshadowing : vend la mèche)
🪝 Hameçon, accroche pour développements dans d’autres récits
🎁 Promesse
💰 Paiement
📁 Thème
📝 Note / fiche
👤 Personnage
✝️ Mort
👁‍🗨 Occasion dramatique ou illustrative (qui montre par l’exemple, bon show, don’t tell)

Zettelkasten / organisation de notes

🗺 Cartographie du savoir (MOC, soit Map Of Content, ou NAV, Négociation Avec la Vérité)
🏗 Structuration, outline, plan
⭐️ Favori
🌱 Graine (à développer)
🌿 Fiche sempervirente (Zettel au sens du Zettelkasten)

2021-04-23T11:09:23+02:00jeudi 29 avril 2021|Technique d'écriture|3 Commentaires

Faire émerger les idées et le savoir en toute liberté (Geekriture 04)

Bon, après tant de teasing, il est grand temps de parler un peu de cette méthode Zettelkasten qui agite tellement les cercles de productivité depuis deux ou trois ans ; qui a vu la naissance d’une myriade de nouvelles applications de prise de notes ; qui se fonde sur un paradigme à la fois révolutionnaire et très ancien, l’hypertexte. Mais il fallait d’abord replacer le décor, et notamment rappeler une notion fondamentale de la création, à savoir qu’il s’agit moins d’un flux de réalisation (j’ai une liste de choses à faire à peu près séquentielle, j’en abats les éléments un à un) que d’émergence (la réalisation s’affine elle-même à chaque session de travail jusqu’à complétion) – voir Geekriture 02, l’échec de la to-do list pour écrire

➡️ … l’article Geekriture du mois expose (enfin) les fondements de la méthode Zettelkasten, à lire sur ActuSF.

2021-04-15T11:12:56+02:00mercredi 21 avril 2021|Geekriture|3 Commentaires
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