Productivété (6) : Passer à l’action, le matériel

Photo par Pizarros, CC-By-SA

Photo par Pizarros, CC-By-SA

(Retrouvez tous les articles de l’été sur organisation et productivité ici.) 

Maintenant que nous avons fait un relatif panorama des méthodes les plus populaires d’organisation et de productivité, il s’agit d’implémenter tout ça. Ce sera l’objectif de ce mois d’août, avec, à nouveau, une emphase sur des principes plutôt que des outils précis, mais, comme il est impossible de tout envisager, j’aurai néanmoins tendance à recommander certaines applications testées et approuvées. Bien sûr, votre kilométrage peut différer.

Nous vivons des temps intéressants (comme on dit en Chine), avec toute une pléthore de smartphones, tablettes, assistants personnels, applications destinées à la productivité. Tellement intéressants que chacun y va de sa contribution, en espérant toucher le pactole en ayant inventé la prochaine application magique qui fera de lui le Google du pétrole.

Du calme.

De quoi avons-nous besoin ?

Avant de partir à la quête de l’Outil Ultime (TM), il convient de définir ce que l’on cherche. Il semble que c’est assez simple, finalement :

  • Conserver les informations des projets en cours…
  • … avec une recherche facile
  • Bosser dessus (produire, et non organiser)
  • Une forme de calendrier pour se rappeler les impératifs du jour
  • De quoi noter l’idée du moment 

Le dernier point est spécialement important. Les idées viennent aux moments les plus incongrus, et s’il y a bien un conseil d’écriture à donner, c’est d’avoir en permanence sur soi de quoi écrire, et de noter les idées dès qu’elles viennent. Pas demain, pas dans cinq minutes. Tout. De. Suite. L’expérience prouve que vous les oublierez.

L’expérience prouve aussi que si elles semblent idiotes sur le moment, votre futur vous-même saura s’en servir.

La clé du matériel, c’est d’avoir un outil qui vous corresponde, que vous ayez plaisir à utiliser, et qui soit portable. S’il est nécessaire de multiplier les approches en fonction des usages, tentez le coup, mais multiplier les outils, c’est courir le risque de perdre des informations. Prudence et concision.

mskLow-tech

Les impératifs énoncés plus haut signifient-ils que nous avons forcément besoin de smartphones, de cloud, de connexion à Internet ? Non. On était productif avant la 3G, on peut l’être encore. Un bon vieil agenda et un crayon suffisent amplement.

La tendance est même au low-tech. Le « Hipster PDA » symbolise l’opposition à la fuite en avant du tout-numérique et se compose d’un tas de fiches bristol réunies par une pince à dessin. Pour ma part, malgré l’emploi de smartphones et autres assistants personnels, je tends à recommander fortement l’usage de calepin pour les notes « libres » – cette idée de roman qui vous vient dans le train, ce nom de personnage qui trotte dans la tête, cette blague idiote qui ne fait rire que vous mais ne voulez pas perdre. Je suis un grand fan du petit Moleskine qui se glisse n’importe où (et je suis loin d’être le seul).

Mais pour le reste, la technologie permet de sacrés gains de temps, et j’en recommenderais l’usage (raisonné).

Hi-tech

Bon, vous n’avez pas besoin qu’on vous guide pour employer un papier et un crayon, non ? Alors parlons geekeries.

Les « nouveaux outils » de communication amènent quantité de possibilités d’organisation liées à l’informatique précédemment inenvisageables. Si vous avez une quelconque affinité avec la technologie, si vous avez la sensation que celle-ci doit être à votre service et pas l’inverse, si vous avez envie de vous y plonger pour lui faire cracher tout le temps qu’elle peut vous faire gagner, l’outil qu’il vous faut, de base, est le smartphone. C’est le minimum. Sérieusement. N’imaginez pas avoir un bureau mobile informatique sans.

desire_Z

Le but : il remplace votre agenda et carnet d’adresses. Il synchronise vos données, vous rappelle vos rendez-vous. Il complète aussi le calepin où vous prenez des notes libres (mais, dans ce cas, ne peut en prendre entièrement la place). Il se connectera au cloud qui stockera vos informations et les mettra à jour en permanence, les rendant disponibles sur tous vos terminaux. C’est votre secrétaire automatisé, votre cerveau externe qui prend en charge tout ce dont vous ne voulez pas vous rappeler. 

Mon dégoût pour Apple (verrouillage des appareils, politique du store révoltante, prix prohibitifs) est de notoriété publique, et il me semble que la plate-forme Windows Phone est encore trop jeune (pas assez d’applications). Je suis donc un utilisateur d’Android, que je recommande en raison de la variété des appareils, la possibilité de prendre la main sur sa machine moyennant quelques installations, l’expérience de Google en termes de service web1 et l’envergure de l’offre matérielle. Si vous n’aimez pas les écrans tactiles, il existe des modèles à clavier physique (j’ai longtemps utilisé le HTC Desire Z, ci-contre).

Une connexion Internet musclée (forfait 3G confortable, voire 4G si vous avez les moyens) est indispensable en termes de confort. Si ce n’est pas déjà fait, activez le wi-fi chez vous (avec une sécurité robuste) et configurez le téléphone pour qu’il s’y connecte sans effort. Vous êtes connecté(e) au nuage. (Et à PRISM. Et la NSA. Souriez et dites du bien de Barack Obama.)

Le set-up de base, ne JAMAIS sortir sans.

Le set-up de base, ne JAMAIS sortir sans.

 

En complément

Après, si vous êtes technophile et/ou fréquemment en déplacement, il convient d’ajouter à la panoplie (par ordre décroissant d’importance) :

Le miniportable. Netbook ou ultrabook, un petit ordinateur portable, au clavier confortable (pour écrire, c’est le but, pas jouer à Plants Vs. Zombies dans le train). Prévoir une connexion Internet 3G pour les mêmes raisons que ci-dessus. Pour éviter de multiplier les frais, prévoir de partager celle du smartphone (tous les opérateurs ne le permettent pas), peut-être en déplaçant la carte SIM dans une clé USB dédiée à cet effet.

La liseuse. On parle d’écriture, qui dit écriture dit lecture. Vous relire, lire les autres, vous documenter : vous allez (devez) bouffer du texte. Aux fêtes de l’année dernière, on a parlé des tablettes et des liseuses, je n’y reviens pas, à deux détails près :

  • Toi qui veux écrire, prends une liseuse en tout premier lieu, c’est bien plus confortable qu’une tablette pour la lecture (testé et comparé) ; 
  • Je signalais que mon choix s’était porté sur le Kindle, mais j’en reviens, à la longue, surtout en voyant les facultés des Kobo pour gérer le PDF (le Kindle étant purement inutilisable sur ce point).

La tablette. Qui vient en dernier, et qu’on utilisera comme super-smartphone et en remplacement possible du miniportable. Prévoir du wi-fi pour synchroniser l’engin au moindre point d’eau Internet qu’on trouve, et y ajouter un clavier Bluetooth si l’on compte vraiment s’en servir pour remplacer un ordinateur lors des déplacements.

Après, prévoir de quoi stocker tout ça, et faire un choix en fonction des circonstances. Sinon votre bureau mobile risque vite de ressembler à ça :

Photo Bjarni Juliusson, domaine public

Photo Bjarni Juliusson, domaine public

Ce qui n’est plus, ahem, mobile.

Cet article ne fera probablement que récapituler des détails connus de beaucoup. Pourquoi tout ça ? Pour employer, à pr »sent, tout un tas d’applications liées aux principes d’organisation exposés les semaines précédentes, ce que nous allons aborder en août, dans la pratique véritable. Disons qu’il s’agit d’une semi-introduction à la suite des événements.

Auguste lectorat, as-tu des appareils précis à recommander (on ne parle pas encore de logiciels) ? C’est le moment de défendre la machine que tu aimes d’amour et sans laquelle tu n’imagines plus ta vie.

  1. Je sais qu’ils nous espionnent, etc. Si vous ne voulez pas prendre ce risque, utilisez un hipster PDA.
2018-07-17T14:18:25+02:00lundi 5 août 2013|Technique d'écriture|10 Commentaires

Quelques idées en vrac sur les diplômes d’écriture

lolcat-relevantL’école supérieure d’art et design du Havre a lancé, à la rentrée dernière, un master de création littéraire. Je n’en ai pas parlé parce que, d’une part, j’ai eu l’info un peu tard, d’autre part, je n’avais pas forcément grand-chose à en dire. Sauf que, la semaine dernière, sur un réseau privé, une discussion s’est lancée sur le sujet en mode outré de la part de certains intervenants : keuwâh, on pourrait apprendre à écrire ? Et on donne des diplômes pour ça ? Scandale au formatage, à la mainmise de l’université sur la pensée, à l’illusion qu’on puisse prendre un léger raccourci.

Personnellement, je n’ai pas fait le master, hein, donc je m’abstiens de le critiquer. Mais puisque le débat était assez profond et bien fourni en arguments, je recopie ici mes messages, car cela déborde du cas de ce master pour aborder la notion plus globale de travail Vs. inspiration, d’artisanat Vs. art, d’apprentissage Vs. découverte, et touche finalement aussi à un de mes domaines d’intérêt : parler de technique littéraire.

My two fucking cents :

Les apprentis écrivains ne connaissent souvent pas les codes, les attentes des lecteurs, les questions d’artisanat inhérentes à tout art (car dans tout art, il y a l’inspiration, mais aussi la technique – Picasso, avant de fonder le cubisme, était un roxxor de la perspective, du fusain et de l’anatomie). Ils veulent direct casser la maison, mais sans même savoir quelle maison ils cassent, et ça donne souvent des choses bancales, ou étrangement conventionnelles.

Alors, si un Master enseigne les codes, c’est une excellente chose. Avant de s’en affranchir, avant de réinventer les règles du jeu, il faut savoir à quel jeu on joue, et c’est pour ça que les livres sur l’écriture, les formations, les blogs comme le mien et – ô surprise – le travail existent : pour *comprendre*.

Les formations en art, c’est toujours pareil. On se les approprie et on en fait quelque chose. Si on reste dans la parole imposée et la mécanique, on n’est pas un vrai créateur, on est un abruti.

Mais si cette formation propose un raccourci pour enseigner déjà les briques de base, c’est une excellent chose. Devenir un bon musicien, c’est vachement plus facile en faisant des gammes et du solfège. Devenir un bon dessinateur, c’est vachement plus facile en étudiant les principes de la composition. L’écriture, c’est la même chose. C’est seulement quand on a ingurgité assez de technique qu’elle s’efface et qu’on a la boîte à outils assez fournie pour faire quasiment tout ce qu’on veut. Et c’est le but de la manoeuvre.

Il m’a été répondu que je faisais passer l’attente du lecteur avant la liberté de l’écrivain. Sauf que :

Minute.
Si l’on écrit, avec volonté d’être lu, alors on parle à quelqu’un. Quelqu’un qu’on ne connaît pas forcément, quelqu’un dont on espère peut-être qu’il nous ressemble. Mais quelqu’un quand même. Sinon, on écrit pour son tiroir, donc sans volonté d’être lu ni compris. OK, ça existe, pas de souci. Mais si l’on veut être lu, il faut prendre en compte qu’à un moment, il y aura quelqu’un en face, et si l’on veut que l’histoire soit appréciée, il faut AUSSI lui faire plaisir. Il y a donc communication. Et s’il y a communication, il y a nécessité / volonté / devoir d’intelligibilité.

C’est à mon sens la plus grande leçon qu’enseigne la technique (ou sa pratique). Suivre son envie, sa volonté, tout en sachant la rendre intelligible aux autres. Les deux ne sont pas antinomiques, mais les concilier demande de l’apprentissage. Savoir se faire plaisir, tout le monde y arrive plus ou moins. Savoir faire plaisir au lecteur tout en se faisant plaisir à soi, c’est, je crois, ce qui fait d’un écrivain un professionnel.

Cette dernière phrase a été interprétée comme la différence entre art et artisanat. Sauf que, again :

Désolé, mais il n’y a pas d’artiste sans artisanat. L’artisanat implique la réalisation et les moyens pour y parvenir. En caricaturant à mort, je peux me déclarer peintre, mais si je n’ai pas de bras et pas de bouche pour tenir le pinceau, je ne peindrai jamais rien.

Attention, l’artisanat ne fait pas la valeur d’une oeuvre, on est d’accord : elle n’est que pratique sans âme.
Mais l’âme, sans la pratique pour lui donner forme et impact, restera mal dégrossie et donc ne prendra pas pleinement son envol et toute la force qu’elle peut véhiculer. Je ne parle même pas des aspects commerciaux ; je parle de faire les choses *bien*.

Si je n’ai pas de muscles dans les doigts et un minimum de pratique, je ne jouerai jamais Beethoven. Les avoir n’assurera pas que je le jouerai bien, mais au moins, il n’y a rien qui me retiendra.

« Sans pratique, le talent n’est qu’une sale manie. » – Brassens.

C’est tout de même amusant cette résistance à la technique, alors qu’elle est parfaitement admise dans la musique, le dessin, même la danse ou le deltaplane ; mais tout le monde est forcément écrivain. Probablement parce que bosser, c’est tout de suite plus chiant que de s’imaginer génial de base, alors on a tendance à considérer que c’est superflu… (Et c’est ainsi que des centaines d’auto-proclamés écrivains en herbe ne grattent pas plus de dix pages dans leur vie.) Le truc, c’est que même Mozart a dû un jour apprendre à lire une partoche. Faut bosser. Personne ne sait si vous êtes génial, et surtout pas vous : la seule chose que vous maîtrisiez, c’est le travail. Alors autant régler ce qu’on maîtrise. Et puis même, les récompenses, la richesse, la maîtrise, les enseignements qui viennent avec le travail sont souvent bien plus délectables que la facilité immédiate. Et voilà que je sonne comme un jésuite, merde.

2014-08-05T15:18:29+02:00lundi 7 janvier 2013|Best Of, Technique d'écriture|29 Commentaires

Sujet de philo à troll

Sachant que, d’après la plaisanterie, tout travail est :

  • Facile
  • Lucratif
  • Honnête

Deux possibilités au choix parmi les trois.

Et que l’écriture n’est ni :

  • Facile
  • Lucrative
  • Honnête (ça se saurait)

Peut-on en déduire que l’écriture n’est pas un travail ?

Vous avez deux heures.

2014-08-05T15:21:33+02:00mercredi 18 janvier 2012|Best Of, Technique d'écriture|14 Commentaires

John Gardner, The Art of Fiction

Ce volume assez mince (200 pages), non traduit à ma connaissance, est cité très régulièrement par les Américains comme référence et lecture quasi-obligatoire ; je me souviens notamment de Terry Brooks le recommandant très chaudement lors de sa venue aux Imaginales il y a quelques années. Son sous-titre (« Notes sur le métier pour les jeunes auteurs ») laisse entendre un contenu relativement simple mais, si l’on n’est jamais au-dessus d’une révision des fondamentaux, son traitement de problèmes élémentaires de la fiction (point de vue, cohérence, rythme) sert surtout de prétexte à une vision globale du métier d’écrivain à la fois sévère et inspirante.

Il existe globalement deux catégories de livres sur la technique d’écriture : ceux qui sont mécanistes, proposant formules et systèmes, qu’il faut aussitôt s’empresser de critiquer de manière constructive afin d’espérer les digérer et se les approprier intelligemment (les travaux de Holly Lisle, par exemple) ; et ceux qui, au contraire, proposent une vision plutôt personnelle de la littérature et du processus d’écriture, en se concentrant plus sur les buts que les moyens (comme Mes Secrets d’écrivain d’Elizabeth George). The Art of Fiction se place résolument dans la seconde catégorie ; Gardner résume de façon très concise son expérience d’auteur et de professeur d’écriture créative, touchant à peu près à tous les domaines de la narration.

Le livre est organisé en deux parties. La première propose des considérations d’ordre général sur la théorie esthétique de la littérature. J’entends déjà grincer les dents de ceux qui, comme moi, ont été déçus par les exégèses littéraires à la française, espérant trouver dans les travaux universitaires des leçons d’écriture plutôt que des études d’oeuvres ; mais cette partie est très nettement orientée vers la fonctionnement et le rôle de la littérature de fiction, Gardner rappelant qu’avant d’écrire, il faut comprendre ce que l’écriture cherche à atteindre. Ce en quoi il a parfaitement raison.

Loin d’être aride, il établit dans cette partie un certain nombre de fondamentaux bien connus de l’auteur un peu expérimenté et même du lecteur critique, mais qu’il n’est jamais mauvais de rappeler, notamment la qualité onirique de la fiction (une histoire est un rêve qui ne doit pas être interrompu), l’évolution de la notion d’illusion de réalité au fil des siècles, ou encore la place de la métafiction par rapport à la fiction classique. Il établit donc parfaitement le lien entre la narratologie (discipline a posteriori par essence, où l’on dissèque le récit achevé) et la pratique créatrice (chaotique, intuitive, plus ou moins domptée par le praticien).

La seconde partie est beaucoup plus technique, tout en restant assez générale. Gardner aborde les facettes élémentaires de la technique littéraire : point de vue, syntaxe, causalité narrative, dialogue, etc. Rien qu’on ne trouve ailleurs (le Comment écrire des histoires d’Elisabeth Vonarburg traite à mon sens plus clairement ces problématiques pour ceux qui en cherchent une synthèse), à part peut-être un rappel enrichissant sur lenergeia d’Aristote : une intrigue est la réalisation du potentiel contenu dans les personnages. L’ouvrage propose une section sur le rythme et la sonorité de la prose, aspects souvent laissés de côté mais appliqués ici à la langue anglaise et donc sans intérêt pour celui qui lit cet article (normalement).

Il termine par quelques considérations morales sur la pratique artistique et la responsabilité qu’a tout créateur quant à l’impact de son oeuvre ; c’est probablement le discours qui peut le plus prêter au débat, alors que Gardner quitte sa position relativement permissive pour affirmer des principes certes nobles, mais vis-à-vis desquels, à mon sens, tout auteur doit trouver sa position. Une grosse trentaine d’exercices clôt le livre, allant du défi intéressant (« Sans commettre une seule faute de goût, décrivez quelqu’un en train de vomir ») au parfaitement inutile (« Construisez l’intrigue d’un roman », mmkay, mais il faut espérer que le lecteur de ce genre d’ouvrage n’attende pas la permission pour s’y essayer) – à considérer comme du bonus.

Par les domaines abordés, The Art of Fiction constitue donc un parfait manuel introductif à l’écriture, ce qui explique sa réputation de référence, mais, dans une forêt d’ouvrages regorgeant de formules narratives prétendûment miracles, il constitue en plus une petite bouffée d’air frais dont, à mon sens, même l’auteur expérimenté peut tirer profit. Car ce qui fait son intérêt n’est pas tant son contenu que son approche, son ton légèrement provocateur et empli d’un subtil esprit, le tout visant à susciter chez le lecteur (ou son élève) une attitude à la fois humble et ambitieuse vis-à-vis de la pratique artistique. Une attitude qu’il est bon de voir reprécisée et formulée aussi clairement. Comme l’excellent (à mon sens) livre d’Elizabeth George, Gardner trouve un juste équilibre entre la technique et l’ineffable inhérent à toute activité créatrice : il en reconnaît la nature chaotique, la loue et l’encourage même, mais met en avant l’indispensable nécessité de la technique pour apprivoiser et canaliser ce foisonnement. Sur ce point, il est sans pitié : il insiste sur la nécessité de l’amélioration constante, ne montre aucune tolérance pour la paresse ou le sentimentalisme, tout en encourageant l’auteur en devenir à considérer les plus grands écrivains du passé comme sa famille et non des modèles ou, pire, des fantômes penchés sur son épaule.

En art, rien ne vient sans travail ni réflexion, répète-t-il. C’est une évidence, mais on peut lui savoir gré de la formuler aussi clairement, et dans un ouvrage qui se proclame comme adressé au néophyte.

2014-08-05T15:23:07+02:00vendredi 24 septembre 2010|Best Of, Technique d'écriture|3 Commentaires
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