À la Chapelle, on a guinchay

Me voilà de retour du très agréable salon du livre Fantasy, Aventure, Contes et Légendes qui se déroulait ce week-end à La Chapelle de Guinchay (71), et le moins qu’on puisse dire, c’est que nous avons été superbement reçus avec Thomas Geha ! J’ai en effet été ébahi et très touché de découvrir dans la vitrine du syndicat d’initiative de Crèches-sur-Saône, en illustration du festival…

Photo Xavier Dollo

… un jeu du lâh géant tiré tout droit de La Volonté du Dragon ! C’est assez incroyable de voir qu’une de vos idées a pu inspirer suffisamment quelqu’un pour la reprendre en grandeur nature. Je n’ai pas pu rencontrer la personne qui s’est occupée de la déco, si elle lit ces mots : merci !

Et merci à toute l’organisation (Céline, Clément, Éliane…) pour avoir monté ce bel événement afin de faire connaître l’imaginaire à un public venu découvrir ces littératures avec curiosité. Merci également au gîte les Tournesols pour leur aimable accueil (et leur fantastique petit-déj), à nos aimables chauffeurs pour nous avoir pris en charge. Et merci surtout à vous tous d’être venus !

2010-11-08T14:39:46+01:00lundi 8 novembre 2010|Le monde du livre|3 Commentaires

Nouvelle scène de violence urbaine

Siloane, qui avait déjà exprimé son horreur face à la tragédie des lolcarts, vient de m’adresser un nouveau cliché d’une rare tristesse. Cela sort un peu du cadre de notre combat, mais ce n’est pas une raison pour rester impassible. Attention, comme toujours, aux âmes sensibles.

Voici le récit qu’elle nous livre :

Mes amis, l’heure est grave ! Non seulement la grande extinction se poursuit en silence au pied de nos immeubles malgré nos efforts pour alerter l’opinion publique, mais elle s’étend même à d’autres de nos amis à roulettes. Pourquoi une telle discrimination, doit on obligatoirement aller sur ses pattes ou ses jambes pour mériter la considération ? Non contents de l’avoir laissé mourir dans l’indifférence, ceux qui l’ont abandonné là ont exposé sa carcasse à l’humiliation publique. Sa souffrance est sans fin, il lui faudra encore pendant de longues années de décomposition supporter les outrages et les regards méprisants des passants en espérant qu’une bonne âme mette fin à ce calvaire et le jette dignement. Pouvons-nous encore tolérer cela ? Pour tous ceux qui restent dans nos placards, tremblants, espérant un meilleur sort, nous devons faire savoir ce qu’il se passe. Regardez bien cette photo, je ne peux pas croire que vous ne serez pas émus.

Photo Siloane

N’est-ce pas ? Pouvons-nous tolérer cela ? Hein ? La colère, que dis-je, la révolte monte en moi face cette image. Que faut-il pour au moins accorder à ces pauvres compagnons une fin décente ?

Je suis toujours disponible via le formulaire de contact pour recevoir vos photos et récits éthologiques originaux. Ensemble, nous ferons reculer la tragédie.

Mes amis, l’heure est grave ! Non seulement la grande extinction se poursuit en
silence au pied de nos immeubles malgré nos efforts pour alerter l’opinion
publique, mais elle s’étend même à d’autres de nos amis à roulettes. Pourquoi
une telle discrimination, doit on obligatoirement aller sur ses pattes ou ses
jambes pour mériter la considération ? Non contents de l’avoir laissé mourir
dans l’indifférence, ceux qui l’ont abandonné là ont exposé sa carcasse à
l’humiliation publique. Sa souffrance est sans fin, il lui faudra encore pendant
de longues années de décomposition supporter les outrages et les regards
méprisants des passants en espérant qu’une bonne âme mette fin à ce calvaire et
le jette dignement. Pouvons-nous encore tolérer cela ? Pour tous ceux qui
restent dans nos placards, tremblants, espérant un meilleur sort, nous devons
faire savoir ce qu’il se passe. Regardez bien cette photo, je ne peux pas croire
que vous ne serez pas émus.
2010-11-05T11:48:21+01:00vendredi 5 novembre 2010|Expériences en temps réel|1 Commentaire

Angle Mort en vue

Se lance aujourd’hui un nouveau support dédié à l’imaginaire, Angle Mort, selon une formule nouvelle et intéressante, adaptée aux nouveaux formats électroniques. À mi-chemin entre la revue et le webzine, Angle Mort propose à intervalles réguliers des nouvelles d’imaginaire en accès libre, avec une formule au téléchargement (sans DRM) pour un prix modique (2,99 €) permettant de soutenir l’initiative, de rémunérer auteurs et traducteurs, de ne pas attendre la publication des textes suivants, et de disposer de bonus (interviews, etc.). Notons que la revue propose des auteurs francophones comme traduits, ce qui augure d’une belle diversité de palettes et d’une sensibilité certaine aux nouveaux courants. Le premier numéro propose ainsi des textes d’Aliette de Bodard et de Laurent Kloetzer, avec Daryl Grégory et Xavier Mauméjean à suivre.

Tandis que la nouvelle loi sur le livre numérique, très décriée, vient d’être votée, des projets novateurs et exploratoires comme Angle Mort se lancent, cherchant à apprivoiser et comprendre la dynamique de ces nouveaux modes de distribution, avec une passion véritable du média comme de la littérature. Je pressens que ce support promet d’être dynamique, comme l’est déjà Utopod, et qu’il y aura de nombreux enseignements à en tirer – en plus, bien évidemment, du plaisir de lecture !

Angle Mort Toolkit

Tout pour découvrir et suivre la revue :

Longue vie à Angle Mort !

2010-11-04T10:52:35+01:00jeudi 4 novembre 2010|Le monde du livre|2 Commentaires

Inventaire des points de vue

Disclaimer : cet article chercher à traiter la question de manière globale afin de donner des lignes directrices capables de couvrir 90% des cas. Mais il y aura toujours des contre-exemples, des solutions particulières, des destructurations post-modernes. Sans vouloir commettre, ô auguste lectorat, le péché de l’autocitation, je vois dans mon propre cas plusieurs occurrences où le mode narratif employé ne rentre exactement dans aucune des cases, notamment dans la novella « L’Importance de ton regard ». C’est de l’art, il n’y a que des conventions, et le but ici est de les appréhender.

Narrateur et point de vue

Le point de vue, dans un récit, est indissociable de la notion de narrateur, même si les deux concepts recouvrent des réalités légèrement différentes. Toute histoire est forcément racontée (pour être transmise), et le ou les moyens employés définissent le mode de narration et donc le point de vue.

Le narrateur est celui qui raconte l’histoire. Ce n’est pas forcément un personnage, il n’a pas forcément une identité claire, ni n’est même obligatoirement un choix possible dans notre réalité consensuelle. L’exemple qui vient immédiatement à l’esprit le récit raconté à la première personne par celui qui la vit, mais je proposais la semaine dernière un interrogatoire de police raconté par une plinthe. Narrativement, les deux sont tout aussi valides.

La connaissance que le narrateur a du récit en train de se dérouler définit le point du vue. Y réfléchir et le choisir est extrêmement important car, pour respecter la cohérence de l’histoire – et donc maintenir la suspension d’incrédulité du lecteur – il impose toutes sortes de limitations et de contraintes sur le récit. Par exemple, le narrateur ne peut pas raconter ce qu’il ignore – ou bien il ne peut pas retenir indéfiniment des informations vitales dans le but de prolonger articiellement le suspense. Sa vision des choses peut colorer le compte-rendu, etc.

Il convient donc de réfléchir aux effets, à l’ambiance que l’on souhaite créer, pour choisir le mode de narration adapté. Il est évidemment possible de changer de mode de narration dans le même récit, à condition de guider clairement le lecteur, en général par des ruptures entre scènes (ton serviteur, ô auguste lectorat, kiffe la tech).

Types

Les modes de narration se découpent grossièrement selon un arbre dichotomique (dans un article théorique, il convient d’employer des mots de plus de trois syllabes). Les catégories sont parfois poreuses ; ce qui compte est l’effet sur le lecteur, le transport provoqué  par le « rêve fictionnel », et non un respect borné des catégories.

La première distinction concerne la position du narrateur relativement aux personnages de l’action.

Narrateur intérieur

C’est le cas qui venait immédiatement à l’esprit cité plus haut : le narrateur est un personnage de l’action. Il raconte son histoire, à la première personne, généralement après coup (au passé) ou au présent (déroulé des événements au fur et à mesure).

Narrateur extérieur

Dans ce cas, le narrateur est – par rapport au temps de l’action en tout cas – extérieur à l’histoire, c’est-à-dire qu’il la relate à la façon d’une caméra de cinéma au champ plus ou moins large.

Narrateur omniscient

Le narrateur omniscient tient du démiurge. Il sait tout des tenants et des aboutissants du récit, connaît la moindre pensée de chaque personnage, ce qu’il a mangé le matin et le numéro de la plaque minéralogique de la voiture qui le tuera au chapitre 14. Conserver une forme de suspense peut être difficile dans ces conditions, par exemple dans les relations – et les malentendus – entre individus. Ce narrateur peut être neutre ou non (et souvent, il ne l’est pas) ; il peut se contenter d’un compte-rendu objectif, ou bien avoir une voix propre, émaillant par exemple le récit de remarques plus ou moins intrusives (ressort classique du registre comique, par exemple).

Narrateur aligné

Peut-être l’une des formes les plus faciles à manier. C’est ce qu’on appelle également la narration « personnage-point-de-vue » : l’auteur choisir un (ou plusieurs) personnages et relate l’histoire à la troisième personne, mais à travers ses yeux. Il connaît ses états d’âme et ses secrets, nous les fait partager – mais uniquement les siens. On peut raffiner plus encore la distinction :

  • Narrateur aligné strict : le narrateur ne sait et ne relate que ce que le personnage sait et peut connaître. Les perceptions sont directes. En ce sens, c’est assez voisin du narrateur intérieur, mais facilite les alternances de point de vue. Il laisse transparaître sans filtre le ressenti du personnage qu’il raconte.
  • Narrateur aligné distancié (« caméra à l’épaule ») : le narrateur ressemble à Jiminy Crickett posé sur l’épaule du personnage (mais bon, un Jiminy Crickett qui posséderait des tentacules psychosensitifs enfoncés dans le cortex du personnage). Tout en partageant les connaissances du narrateur aligné strict, son champ de vision est légèrement plus large que celui du personnage dont il relate l’histoire, ce qui permet un peu de recul.

Narrateur ignorant

Le narrateur ne sait rien des motivations, états d’âme, secrets inavouables des personnages dont il assiste aux faits et gestes : il n’a que ses perceptions pour se guider. La plinthe assistant à l’interrogatoire serait probablement un exemple de narrateur ignorant (sauf si elle assiste régulièrement aux 5 à 7 du commissaire avec sa secrétaire sur le bureau, lui donnant un élément d’information sur l’ambiance dans les locaux). Ce narrateur peut là aussi être neutre (compte-rendu strictement objectif) ou non (ce qui serait probablement le cas de notre bas de mur en bois envisageant de porter plinthe – j’en crevais d’envie depuis tout à l’heure – pour attentat à la pudeur).

Pour aller plus loin…

Je ne saurais trop recommander le Comment écrire des histoires, Guide de l’explorateur d’Élisabeth Vonarburg aux éds. Le Griffon d’Argile. En plus d’être un des rares livres de technique en français, il comporte une section très complète sur la problématique du point de vue, une des mieux fichues que j’aie jamais lue, en anglais comme en français. (Critique d’ailleurs sur cet ouvrage à venir.) Pour les intéressés, le livre se commande chez l’éditeur, ici.

2014-08-05T15:23:06+02:00mercredi 3 novembre 2010|Best Of, Technique d'écriture|5 Commentaires

Le dernier arrivant

Les autres postent bien des photos de chats et d’enfants, alors :

Ouep, j’ai perdu vingt ans d’avancée technologique, comme ça, d’un coup, en troquant ma vieille souris faiblissante contre un… trackball. Tandis que les souris occupent des rayonnages entiers, entre le modèle à deux boutons, le modèle à trois boutons, le modèle à quatre boutons, le modèle à cinquante-six boutons programmables, le modèle rose spécial fille qui n’ose pas dire qu’elle fait de l’ordinateur olol mdr, le modèle réduit mais pas tant que ça genre ça rentrera dans la sacoche de ton portable, mais j’y rentre déjà des bouquins monsieur, je peux prendre une souris classique, si si je t’assure, prends celle-là c’est plus petit et elle est plus chère, le modèle à néons, le modèle spécial gamer avec capteur à 56 000 dpi poolé toutes les nanosecondes, fiche USB en or, driver certifié par Cray Industries et compartiment à poids ajustable au microgramme – ensemble à multiplier par deux entre les modèles avec et sans fil – tout en ayant l’étrange et tenace certitude de ne jamais arriver à trouver son bonheur parmi tout ce bordel avant de se dire « bon, tant pis, je vais reprendre une G5, comme d’hab » – tandis que les souris occupent des rayonnages entiers, donc, les modèles de trackball se battent en duel (un duel à trois pour être exact, ce qui fait quoi… une truelle ?).

Je n’ai pas plus trouvé le modèle de mes rêves (il n’avait pas de fil, and real men use wire), mais celui-ci convient.

Je n’utilise pas ce dispositif de pointage préhistorique pour le plaisir de me faire du mal, mais justement, pour le plaisir, a priori, de ne pas m’en faire. À force de manier la souris à longueur de journée (sur le poste de travail), j’ai senti naître une douleur articulaire dans l’épaule, ma position étant optimisée pour la frappe au clavier et la souris me plaçant en porte-à-faux à cause d’un accoudoir de fauteuil mal placé. Un type normal aurait changé de chaise ; un geek change de dispositif de pointage. Trackball égale mouvement minimum. Et puis ça oblige mon cerveau à changer d’habitudes, ce qui est toujours cognitivement intéressant. (Nan, en fait, je déconne, je prépare clandestinement ma formation d’opérateur sonar en sous-marin nucléaire. Chut.)

Je m’y suis fait en deux jours, sans trop jurer. Je l’ai fait quand même tomber une fois (acte manqué, je suppose) et la boule s’est délogée, ce qui m’a permis de constater, ô surprise, que ces engins n’étaient pas restés inactifs alors que le XXIe siècle était occupé à exister : les mouvements du dispositif sont recueillis, non pas par des rouleaux comme jadis, mais par… un capteur optique, comme les souris modernes. Nous avons mis vingt ans à nous affranchir de la boule chez celles-ci, et voilà que même chez le trackball, elle devient purement cosmétique. Décidément, l’interface des machines est de plus en plus découplée de leur réel mode opératoire.

Quelque part, ça me rend triste.

2010-11-02T11:07:02+01:00mardi 2 novembre 2010|Geekeries|3 Commentaires

Le NaNoWriMo commence aujourd’hui !

C’est aujoud’hui que commence le onzième NaNoWriMo, pour un mois marathon d’écriture. Du mal à produire ? Pas le temps, trop fatigué pour travailler sur votre grand récit ? Alors tentez ce défi.

Qu’est-ce que c’est ?

NaNoWriMo est l’acronyme de National Novel Writing Month (mois national pour la rédaction d’un roman). C’est une intiative fondée en 1999 dont le but est simple : chaque auteur à s’inscrire se fixe l’objectif de rédiger en un mois (novembre) un roman de 50 000 mots (300 000 signes). C’est une quantité qui peut impressionner, et c’est le but : le pire ennemi de la rédaction est évidemment la procrastination, mais elle cache un petit cousin, le perfectionnisme, qui est très souvent un frein lors de la rédaction proprement dite. Il ne s’agit évidemment pas de ne rien retoucher au premier jet, qui est souvent amplement améliorable, mais d’écrire ce premier jet sans restriction.

Il arrive fréquemment lors de la rédaction qu’un censeur interne vienne se pencher sur l’épaule pour juger chaque phrase, chaque tournure, et les déclarer ineptes, absurdes, ridicules. On conseille souvent d’étrangler cette voix, qui n’a pas à intervenir à cette étape du travail : elle ne fait que retenir l’envie et l’inspiration, alors qu’il faut au contraire (presque) tout se permettre pour dégager des idées surprenantes, des personnages vivants, bref, l’inspiration. C’est plutôt au moment de la relecture et du retravail (ou, éventuellement, si l’on cale) qu’il convient se montrer critique, soit après coup. (En ce qui me concerne, je suis souvent été agréablement surpris par les passages qui me semblaient affreux la veille au moment de la rédaction : si je m’étais arrêté, je n’aurais fait aucun progrès. Et même quand c’est irrécupérable, j’ai au moins évacué une mauvaise piste.)

Le défi du NaNoWriMo oblige, entre autres, à s’affranchir de ce censeur : pas le temps de l’écouter ! Pendant ce mois, il n’y a plus d’excuses qui tienne : plus de « je n’ai pas le temps », de « ce n’est pas assez bon », ce qui compte avant tout, ici, c’est la quantité.

Comment ça marche ?

Le NaNoWriMo est avant tout un contrat que l’on passe avec soi-même, mais l’importante communauté qui s’est construite autour permet de partager anecdotes, encouragements, astuces pour progresser. Il suffit de s’inscrire (le site comporte une section – partiellement – francophone). Le principe consiste à proclamer un peu partout que l’on s’est inscrit au défi… Histoire de s’obliger à tenir l’engagement.

Qu’est-ce qu’on gagne ?

Ah, société consumériste ! On ne gagne rien, si ce n’est un premier jet complet qu’il n’y a plus qu’à retravailler, et l’assurance qu’on a pu terminer un livre, et donc qu’on pourra le refaire.

L’adresse en clair : http://www.nanowrimo.org/fr

2010-11-01T10:53:01+01:00lundi 1 novembre 2010|Technique d'écriture|7 Commentaires

Question : choix du point de vue

Une autre question qu’on m’a posé de visu, cette fois :

Comment puis-je savoir le meilleur point de vue à adopter pour mon histoire ? J’ai deux personnages, l’un plutôt blasé, l’autre un peu instable sur les bords, qui se complètent et se couvrent mutuellement. J’aimerais bien passer de l’un à l’autre, mais j’aimerais aussi installer leur relation progressivement de manière à ce que le lecteur ne se rende pas compte tout de suite des enjeux de leur association. Si j’alterne les points de vue, est-ce que je ne risque pas de casser mon effet ?

La réponse facile est : si, mais à toi de te débrouiller pour slalomer entre les trous…

Je sais, je sais. Tu l’as bien compris, mais comment fait-on ?

Plus sérieusement, cette réponse lapidaire n’est pas aussi gratuite qu’il y paraît. Chaque histoire a sa propre dynamique et, sans connaître tes personnages moi-même, sans même être toi, je ne peux pas te donner une réponse toute faite qui réglera ton problème. Le choix du point de vue est si central à l’écriture de fiction qu’on pourrait sans problème écrire un livre sur la question. En revanche, il y a peut-être quelques pistes qui pourront t’aider – ce billet sera forcément un peu simpliste et lapidaire, mais j’espère qu’il saura mettre en relief les enjeux.

Tout est subjectif (ou pas)

Le choix du point de vue est une question fondamentale qu’on néglige ou expédie parfois, alors que son choix peut faire ou défaire un récit. En effet, le point de vue dicte en grande partie le ton, et donc la dynamique de l’histoire. Si je traite de l’ascension de l’Everest, je n’écrirai pas le même livre en prenant le point de vue de l’alpiniste (aventure ! danger ! dépassement de soi !) ou de sa femme restée à la maison (soirées thé ! réflexions sur le quotidien ! Madame Bovary !). Tu as donc parfaitement raison de t’interroger en amont de la rédaction.

C’est déjà un premier élément de réponse : si tu prends donc tes personnages en troisième personne « caméra à l’épaule » (personnage-point-de-vue) ou à la première personne, soit les deux formes les plus courantes, tu es limité (approximativement) à leurs perceptions, leurs opinions, leur vision du monde. Ce qui est un atout, car c’est un excellent outil de caractérisation, mais aussi un handicap, si, mettons, tu cherches à cacher un élément à ton lecteur. Prends un récit policier dont l’enjeu est de trouver qui a tué le docteur Lenoir. Si tu passes sur le point de vue du colonel Moutarde, qui sait parfaitement bien qu’il a dézingué Lenoir dans la véranda avec le chandelier, il va être très difficile de le cacher au lecteur à moins d’une bonne raison, et celui-ci risque de se sentir floué si tu n’en dis rien. Mais vu que l’objectif de ton récit est de trouver qui a tué, tu casses la dynamique de ton histoire. Solution : dans ce type de récit, tu ne passes pas sur Moutarde (à moins de tricher : amnésie, folie passagère, etc.).

Dans le cas d’éléments moins centraux, tu peux les dissimuler un moment en faisant diversion avec l’intrigue ; après tout, ton personnage-point-de-vue est là pour raconter ce qu’il lui arrive, pas pour récapituler quinze ans de psychanalyse à chaque fois qu’il sort le lait du frigo, et on veut le voir agir. Mais il faut se montrer très adroit et subtil si tu veux cacher au lecteur des éléments que, selon toute vraisemblance, il devrait savoir : ce genre de dissimulation paraît souvent artificiel, ce qui rompt la suspension d’incrédulité ou brise le « rêve fictionnel », comme dit Gardner.

Mais c’est aussi un atout car tout personnage, comme dans la vie réelle, projette son vécu, sa vision du monde, sur ce qui l’entoure. Là, en revanche, tu as un outil puissant et cohérent pour lui donner, en quelque sorte, des « angles morts » dans sa vision du monde. Un sociopathe ne voit pas la réalité comme le reste de la population, par exemple, ce qui peut parfaitement justifier que des détails, des subtilités dans les relations humaines, lui échappent et donc, si tu réussis bien ton coup, échappent à ton lecteur. De façon plus simple, pourquoi ton protagoniste récapitulerait-il ce qu’il sait pour son seul bénéfice ? Ce sont ses initiatives qui nous l’apprennent, et les conséquences qu’elles entraînent sur sa psyché ; c’est une façon de construire une personnalité par strates successives, in media res.

Le point de vue est le véhicule par lequel on entre dans un récit : si le véhicule a une roue crevée et une fuite d’huile, on restera sur les grandes routes, et tant pis pour les montagnes. Tu peux donc forger ton point de vue en accord avec l’effet que tu cherches à rendre ; il faut alors te poser la question de ton intention narrative, pour réfléchir à la meilleure façon de la transmettre.

La piste active

Holly Lisle propose pour sa part une règle extrêmement simple : il faut choisir le point de vue qui en sait le moins. Je suis méfiant avec les « règles » mais le conseil n’est pas sans mérite. Le plus ignorant, dans une scène, est souvent celui qui a le plus de raisons d’agir (et propose donc la narration la plus intéressante), et celui qui pourra le mieux exposer la situation au lecteur, puisqu’il a lui-même besoin de la comprendre. Il ne faut évidemment pas pousser l’axiome dans ses derniers retranchements (le point de vue de la plinthe lors d’un interrogatoire de police n’a pas grand intérêt, à part peut-être pour du postmoderne) mais, si l’on reprend l’exemple de l’assassinat de Lenoir, on a logiquement envie de suivre l’enquêteur qui devra démêler les faux-semblants, collecter les indices, etc. Bref, c’est une astuce commode qui peut aider à prendre une décision rapide dans les cas simples.

2020-10-12T16:36:43+02:00vendredi 29 octobre 2010|Best Of, Technique d'écriture|13 Commentaires

Festivals de novembre

Ill. P. Druillet

Novembre est souvent le mois connu des amateurs d’imaginaire comme étant celui des Utopiales, le festival international de science-fiction de Nantes ; si vous ne connaissez la manifestation et avez l’occcasion de venir, je ne saurais trop vous recommander de faire le déplacement. Avec littéraure, cinéma, expositions, animations, débats, il y a très amplement de quoi passer un week-end mémorable. Mais ce n’est pas la seule manifestation où j’aurai le plaisir de venir faire mon intéressant :

6 & 7 nov. : La Chapelle de Guinchay (71)

Je serai présent à la première édition du Salon Fantasy, Aventure, Contes et Légendes (site), pour des dédicaces et peut-être une ou deux interventions (à voir). N’hésitez pas à venir soutenir cette initiative locale !

Adresse : Maison de Pays, clos Méziat, 71570 La Chapelle de Guinchay. Entrée libre.

11 au 14 nov. : Nantes (44)

Et je serai donc aux Utopiales, festival international de science-fiction (site), pour des dédicaces et une intervention en café littéraire :

  • Vendredi 12 novembre, 15h30, bar de Madame Spock. La guerre, une question de frontières ? La frontière n’est-elle pas née du point de contact, de conflit, d’opposition, de défense ou d’attaque ? Avec Gérard Klein, Brandon Sanderson, LD. (Je devrais vraisemblablement parler de La Volonté du Dragon et de l’univers d’Évanégyre dans son ensemble. C’est un plateau impressionnant et j’espère être à la hauteur !)

Adresse : Cité Internationale des Congrès Nantes Métropole, 5 rue Valmy, 44000 Nantes.

Prochaines dédicaces et interventions

6 & 7 nov. : La Chapelle de Guinchay (71)

Pour le Salon Fantasy, Aventure, Contes et Légendes (site).

Adresse : Maison de Pays, clos Méziat, 71570 La Chapelle de Guinchay. Entrée libre.


Ill. P. Druillet

11 au 14 nov. : Nantes (44)

Pour les Utopiales, festival international de science-fiction (site).

Dédicaces et une intervention en café littéraire prévue :

  • Ven. 12 nov., 15h30, bar de Madame Spock. La guerre, une question de frontières ? La frontière n’est-elle pas née du point de contact, de conflit, d’opposition, de défense ou d’attaque ? Avec Gérard Klein, Brandon Sanderson, LD.

Adresse : Cité Internationale des Congrès Nantes Métropole, 5 rue Valmy, 44000 Nantes.

2010-10-28T10:09:13+02:00jeudi 28 octobre 2010|Actu|6 Commentaires

Finalistes du prix Julia Verlanger

Ill. P. Druillet

Créé en 1986, ce prix attribué par la fondation du même nom (sous l’égide de la Fondation de France) récompense des romans de SF ou fantasy faisant la part belle à l’aventure et au romanesque.

Les finalistes de cette année sont :

  • La Nuit sans fin, de M. Chadbourn (Orbit), trad. B. Mariot
  • L’Odyssée du temps – 1 de A.C. Clarke &  S. Baxter (Bragelonne), trad. L. Carissimo
  • Cygnis de V. Gessler (L’Atalante )
  • Rien que l’Acier de R. Morgan (Bragelonne), trad. C. Perdereau
  • Nuigrave, L. Murail  (Robert Laffont/Ailleurs&  Demain)
  • Le Nom du Vent, P. Rothfuss (Bragelonne), trad. C. Carrière
  • L’Empire ultime de B. Sanderson (Orbit), trad. M. Fazi
  • Ceci n’est pas un jeu de W. J. Williams (L’Atalante), trad. J.-D. Brèque

Le nom du lauréat sera révélé lors de la cérémonie de remise des prix qui se tiendra pendant le festival Utopiales de Nantes, vendredi 12 novembre à 18h30. Félicitations à tous les sélectionnés !

2010-10-27T09:36:05+02:00mercredi 27 octobre 2010|Le monde du livre|3 Commentaires

Tactique de la grève absolue

Solidarité chez les électrons :

Pour la petite histoire, j’ai vu peu après le personnel brancher un clavier à l’écran en question pour le redémarrer. J’ai regardé l’outil de diagnostic système et figurez-vous que ces écrans sont des PC autonomes sous XP embarquant 1 Go de RAM. 1 giga, quoi, pour faire tourner un pauvre panneau d’affichage en couleurs qui clignotouille. C’est décidé, la prochaine fois je dois ouvrir un PowerPoint de petits chatons, je commande un Cray.

2010-10-26T14:54:46+02:00mardi 26 octobre 2010|Expériences en temps réel|Commentaires fermés sur Tactique de la grève absolue
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