Asreth represent
Car il en était question, que cela m’avait été demandé, et surtout que j’en avais envie :
Steampunk rules !
Et merci d’être venus en si grand nombre samedi à Critic pour la première signature de La Route de la Conquête !
Car il en était question, que cela m’avait été demandé, et surtout que j’en avais envie :
Steampunk rules !
Et merci d’être venus en si grand nombre samedi à Critic pour la première signature de La Route de la Conquête !
Ô, grisaille funeste des matins humides de septembre, poids du cartable sur le dos ou à la main, irritation du col de chemise sur la nuque, léger étranglement de la cravate. Fichtre diantre ! Papa, je ne veux pas aller à l’école.
Fi donc, c’est aussi la reprise des activités et le retour chez soi, loin des mers estivales nappées de crème solaire. Pour moi aussi, c’est la rentrée ; et donc, ainsi qu’il se doit, il est déjà temps de faire le point sur ce qui va arriver dans les mois suivants – et il va s’en passer, des choses.
Jusqu’ici, la grande nouvelle, c’est évidemment la sortie de La Route de la Conquête, dont j’ai déjà amplement parlé, et je vais donc aller en festival ici ou là avec le livre sous le bras. (Quelques dates déjà présentes ici, d’autres à venir.) Il y a aussi l’anthologie Bardes et Sirènes, sortie en mai.
Maintenant, il se passe plein d’autres choses. Dont je ne peux parler encore qu’à mots couverts, mais cela ne fait pas de mal de dresser un vague panorama des mois à venir afin que tu saches, auguste lectorat, dans quoi tu mets les pieds, toi qui entres ici oublie toute espérance, etc.
L’autre grosse nouvelle, que j’annoncerai enfin officiellement lundi, c’est qu’à ma grande surprise, le versant musical décolle à très grande vitesse. C’est un vrai soulagement de pouvoir enfin sortir de ma tête tous ces morceaux qui m’obsèdent et tournent en boucle dans ma tête depuis des années, et je suis à chaque fois ravi de l’efficacité que la technique a acquis. Plus de prise de tête sur les entrées/sorties, le contrôle MIDI, la gestion des patches comme autrefois (ce qui avait conduit à une mise en retrait de ma part, la mort dans l’âme: pas assez de temps, pas la place chez moi pour quinze synthés modulaires). On travaille, on fait du son, et on ne perd pas de temps à se battre contre les machines. J’ai déjà produit en dix fois moins de temps bien mieux que ce que j’avais jamais réalisé jusqu’ici.
Il se prépare de chouettes choses dans ce domaine, et je dirai donc tout lundi. Pour des questions de lisibilité, cette activité se déroulera sous un alias : les noms de domaine, pages Facebook, comptes Twitter sont pris. Il n’y a plus qu’à.
Aaaah, panneaux de sécurité dans les pays anglo-américains, mes amours contrariées, destinées plus à la protection juridique qu’à la protection des personnes.
Or doncques :
D’accord. Okay. Oui, c’est, heu, c’est vrai.
… mais, attends, recule :
ATTENTION LA DOUCHE PEUT PROJETER DE L’EAU QUI FINIRA SOUS TES PIEDS SI ELLE VIENT SUR TA TÊTE.
Newton approuve.
Difficile de ne pas penser à ce grand classique.
Le week-end se termine déjà, auguste lectorat, et quand tu liras ces mots, je serai déjà en train de me préparer à retraverser la Manche. Je risquerais grandement les redites par rapport à vendredi, aussi n’entrerai-je pas dans le détail ; il me suffira de dire pêle-mêle…
… qu’il existe un genre littéraire appelé lablit, où la découverte scientifique et la vie des chercheurs forment le coeur de l’intrigue ; au même titre qu’il existe des romans sur le milieu médical, ou les avocats.
… qu’on peut steampunker l’objet de son choix lors d’ateliers plutôt réservés aux enfants. Mais que les adultes sont admis. Et je ne l’ai appris qu’après coup.
… qu’une Worldcon, c’est un bon endroit pour discuter tranquillement avec les camarades de France. Parce que se voir en France, c’est trop facile.
… et c’est aussi celle de discuter avec tous les camarades d’ailleurs. Parce que se voir en France, c’est trop difficile.
… « Il me semble que faire appel à une catastrophe [dans les récits scientifiques] est trop facile. C’est comme un roman policier dont on ignore le meurtrier à la fin. » – Gregory Benford.
… que la Worldcon, c’est probablement le seul endroit où l’on peut entendre à la fois parler de littérature, et aussi de jeu vidéo sous l’aspect technique de la création et du financement, de musique de jeu comme une vraie forme artistique, de synthèse sonore et de musique électronique sous l’angle des liens avec la SF, des thèmes philosophiques et environnementaux abordés dans les anime de robots géants, de littératures de l’imaginaire arabes, et j’en passe beaucoup, beaucoup beaucoup.
… je proposerai dans quelques jours quelques idées sur notre débat de vendredi concernant la traduction de l’imaginaire étranger vers l’anglais.
Quelques photos (pourries, prises au portable) valent mieux qu’un long discours !
Bon ! Tu te rappelles, auguste lectorat, que les chroniques d’événements ne sont pas mon truc ? Hein ?
Cela étant dit, je m’y risque quand même. Je l’avais fait en 2009 pour celle de Montréal, et une convention mondiale, c’est un événement très particulier.
Une Worldcon est avant tout une institution de longue date (c’est la 72ème cette année) qui porte en elle toute l’histoire du genre – presque un siècle d’imaginaire. Les géants d’hier (et d’aujourd’hui) ont participé aux Worldcons, les Asimov, Vance, Sturgeon, et c’est peut-être l’impression la plus marquante que l’on a quand on y met les pieds : un mélange de révérence pour l’imaginaire, la conscience étrangement aiguë – plus qu’ailleurs – de poursuivre humblement une longue chaîne d’histoire, et la célébration la plus joyeuse et la plus geek qu’on puisse imaginer sur le sujet. Une Worldcon, c’est une célébration et une déclaration d’amour au genre, dans toute son identité, du merchandising le plus kitsch aux livres les plus beaux, des T-shirts les plus surréalistes aux cosplays les plus réussis, c’est l’endroit où l’on peut comparer la puissance de feu d’un destroyer stellaire à celle de l’Enterprise avec le plus grand sérieux, où l’on trouve des sujets de débats archi-pointus qui feraient frémir d’angoisse tout organisateur de festival normalement constitué, c’est le « peuple de la SF » – pour reprendre l’expression de notre regretté camarade Roland C. Wagner – dans tout ce qu’il a de barbes mal taillées et de robes à dentelles, de rêve et de réflexion, d’improbable, de touchant et de beau.

Là, c’est la queue pour retirer son accréditation. Si mon réveil avait sonné comme prévu, je n’aurais peut-être pas dû attendre une heure.
Car une Worldcon ne fonctionne pas sur le principe d’un festival classique tels qu’on les connaît en France : fondée principalement sur les inscriptions à l’avance, par définition, elle n’attire que les vrais fans d’imaginaire et ne s’adresse qu’à eux. Ce qui permet des débats et des activités qui font rêver tout passionné : des tables rondes pointues sur les langages fictifs ou le réalisme des armes médiévales ; des séries de conférences sur la biologie spéculative ; la place du jeu vidéo dans l’imaginaire ; des activités pour les enfants qui apprennent à construire un TARDIS. Le programme est bourré au dernier degré : à chaque heure, il se passe bien une quinzaine de choses en parallèle, mais c’est suffisamment bien conçu pour ne pas se marcher sur les pieds.
Une Worldcon a ses traditions, ses usages, qu’on découvre peu à peu ; celle de Montréal m’y avait déjà un peu formé. Le « fan village » présente quantité d’activités associatives, en particulier les villes candidates pour les années à venir – principalement Américaines, mais il y a Helsinki avec une forte proposition en 2017, Dublin en 2019, la Nouvelle-Zélande en 2020 et même Paris en 2023. Au-dessus, les boutiques et stands d’éditeurs donnent envie d’hypothéquer sa maison et son chien pour acheter bijoux artisanaux, T-shirts improbables ou bien belles éditions de classiques.
Evidemment, on n’est pas là que pour donner des sous à la filière, il y aussi quantité de choses à voir et pour ma part, cette année, j’ai décidé de m’octroyer un luxe particulier : clairement, je fais mon gros touriste. Je vais voir des trucs improbables, ou que j’ai toujours voulu approfondir sans m’en donner le temps. Bien sûr, cela entraîne des échecs rigolos comme cette discussion que je pensais prévue autour de l’imaginaire comme aide au développement personnel (j’espérais entendre des histoires de thérapie réussies, pour fourbir mes armes contre ceux qui dénigrent la littérature de genre) et était en réalité une session d’anecdotes échangées avec la salle sur le fandom de l’imaginaire comme aide au développement personnel (sujet intéressant aussi, mais pas du tout ce que je venais voir – ça m’apprendra à lire trop vite). Une session sur les réfugiés en SF et dans le monde réel a fait progresser mes réflexions sur le sujet (difficile d’écrire sur des guerres, même fictives, sans y songer beaucoup). Egalement des échanges sur le sujet du langage, de la cryptozoologie, de la biologie fictive…
Et bien sûr, il y a le plaisir de retrouver les amis de la délégation française (un record, 200 personnes cette année !) : blogueurs, éditeurs, camarades traducteurs et auteurs, attrapés au vol, comme toujours. Au total, j’ai entendu le chiffre de 6000 inscrits à LonCon – une grande fraternité de l’imaginaire où G.R.R. Martin paye son badge comme son lecteur dévoué, tous rassemblés avec le même bagage culturel, la même passion, où l’on peut, à l’échelle de l’échantillon mondial ainsi représenté, rêver collectivement à d’autres mondes de magie, de technologie ou d’inexplicable, avec ce mélange de profond sérieux et de jeu débridé que seul l’imaginaire propose.
(Pour mémoire, je suis ce soir en débat à la Worldcon à 20h sur le thème de la traduction de l’imaginaire étranger en anglais, ses défis, sa réalisation et ses obstacles. Venez nombreux, que l’on montre au monde que nos voix comptent aussi !)
Quand soudain, dans le dossier spam :
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C’est presque un exploit de poésie urbaine que d’arriver à cumuler tant de niveaux de glauque et de mauvais goût en si peu de mots.
Voici ma vie :
« Bonjour, je voudrais commander deux pizzas, au nom de Davoust.
— D’accord, monsieur Badouste.
— Non, Davoust.
— Pardon, Pavouste ?
— Non, Davoust.
— Ah, Labrouste.
— Non, Davoust.
— Ah OK, Ladouste.
— Non, Davoust.
— Ah d’accord, Sabouste.
— Vous savez quoi, laissez tomber. Mettez plutôt… »
Haaaah.
J’en ai définitivement marre de ressentir la négativité ambiante et de la lire dans la presse. Tout va mal, on va tous mourir, rien ne sert de se battre: si, au contraire, bon sang, ce qui nous tue, c’est le défaitisme, c’est la peur, ce sont ceux qui, au nom de la raison, de la norme, ou par jalousie et impuissance, nous empêchent de rêver plus grand, plus haut, plus vaste, qui nous donnent perdants avant même d’être descendus dans l’arène. Il n’y a que deux choses à leur dire : 1) va te faire foutre ; 2) merci, car rien que pour t’emmerder, maintenant, je vais réussir. On n’a qu’une vie: au nom de quoi, bon sang, se priverait-on de tenter des projets fous, des aventures immenses, au nom de quoi, de qui, de quelle morale, de quelle divinité étriquante, se retiendrait-on de vivre ? Au nom de quelle attente ? L’attente d’être plus sage, plus expérimenté ? On le sera toujours davantage demain. Un jour, il faut agir, agir maintenant, car demain, nous serons morts, et ce sera toujours trop tôt ; et ce jour-là, tout sera fini, plus de crédits dans la machine, plus temps de tenter.
Il vaut mieux tenter et échouer. Pour ma part, même si je me vautre, même si je me rate, j’aimerais, au minimum, qu’on dise de moi : « il s’est peut-être planté, mais il aura essayé. »
La réussite n’est jamais garantie. Mais putain, on peut donner tout ce qu’on a, et que faire d’autre ? Peut-on se devoir plus, et oserait-on se satisfaire de moins ?
Ce qui ne veut pas dire foncer stupidement et sans préparation. Le funambule ne regarde pas en bas, mais il n’oublie pas non plus la magnésie sur les pieds. C’est toute la différence avec lui dire inutilement : « mec ! tu vas tomber. »
Pour fêter la fin d’un livre, il arrive que je m’offre un péché mignon. En effet, c’est en général une période assez tendue, ce qui pousse mécaniquement l’esprit vers des échappatoires : mille autres projets semblent subitement indispensables plutôt que d’affronter la difficulté de celui en cours. Je me tiens néanmoins la dragée haute, avec une promesse cependant : si ces projets semblent toujours aussi indispensables à la fin du livre en cours, alors je me les offre en récompense une fois le livre fini.
Sauf que celui-là me colle à l’esprit depuis des années. Autrefois, quand le monde était jeune (encore au XXe siècle), parallèlement à écrire, à commencer à ordonner des briques d’univers, je tripatouillais des potentiomètres et des enveloppes de filtre en rêvant de posséder des trucs comme ça :

Ville Hyvönen, dérivé de Clusternote, CC-BY-SA-2.0
(C’est donc un ARP 2600, synthétiseur mythique des années 70-80 qui s’échange aujourd’hui sur le marché de l’occasion aux alentours de 7500 €…)
J’ai eu quelques synthés, j’ai même joué dans quelques groupes dans mes années étudiantes, mais sans grande compétence : globalement, je joue mal de tout (je manque de patience, et donc de pratique). Par contre, façonner du son et jeter quelque part ces centaines de lignes mélodiques qui viennent régulièrement me hanter l’esprit a toujours été une envie de longue date, sur laquelle j’avais plus ou moins fait une croix en raison du casse-tête décourageant qu’était la technique du home studio (câbler un studio avec des synthés et des expandeurs en audio et en MIDI, réussir à configurer et piloter tout ça pouvait prendre des heures à la moindre session de travail).
Avance rapide sur quinze ans : l’informatique a tellement progressé qu’aujourd’hui, on peut avoir l’équivalent de dizaines de milliers d’euros de sons et de matériel physique émulés dans un simple ordinateur à travers un studio numérique type Ableton Live.
Donc voilà :

Cette portion de l’espace de mon bureau est mieux occupée ainsi qu’à servir de vide-poche monumental où la stratification géologique peut parfois remonter à cinq ans d’archives. J’ai à peine reçu les joujoux (qui coûtent une fraction d’un vrai synthétiseur physique) et commencé à reprendre contact avec ces bons vieux LFO, enveloppes ADSR et arpégiateurs, mais une chose est sûre, je m’éclate. Toutes les barrières technologiques qui me décourageaient il y a quinze ans sont tombées entre temps et on ne passe plus sa vie à se battre contre les machines, mais à s’en servir.
Je n’ai strictement aucune idée de ma compétence générale dans ce domaine, et si mes petits pouic pouic buzz buzz ne sortent jamais de mon disque dur, ce n’est pas un problème. La création a pour première vocation celle de nourrir l’âme de son créateur, et c’est bien le rôle que j’entends lui faire jouer.
La traduction, il n’y a pas à dire, c’est un métier…

(Vu à Sao Filipe, Cap-Vert.)