On en sait des trucs à 24 ans

statistics

Oui, vous pouvez cliquer pour agrandir.

Comme je passe progressivement tous mes outils sous matos Apple, je suis amené à plonger un peu dans mes archives, histoire de faire du tri – et mes archives de courriel remontent à 1997, soit – gasp – presque 20 ans d’Internet et de lolcats.

Là, je triais mes brouillons, accumulés au hasard et jamais envoyés, ou bien sauvegardés par erreur à la suite d’un bug de serveur ; une centaine à archiver mais surtout à vider, dont celui-ci rédigé en 2002 :

Hello Cecile,

J’ai reflechi a tes histoires de recensement qui augmentent sur les annees. Je crois avoir saisi pourquoi les reviewers ne sont pas satisfaits du test de Student:
– Les residus ne sont pas distribues normalement
– Les individus statistiques etudies (ici les sites) ne proviennent pas d’echantillons differents: ce sont les memes avec une progression de temps.

Tu pourrais peut-etre essayer plutot le test U de Mann-Whitney ou le test de Wilcoxon, qui sont non-parametriques?

Amities
Lionel

Ça en jette, quand même. Je suis émerveillé d’avoir un jour pu formuler ce genre de théorie. Aujourd’hui, je n’ai qu’une très vague idée de ce que je raconte dans ce brouillon – et je ne sais absolument pas si c’est valide, si ça se trouve, je raconte n’importe quoi (et c’est pour ça que le courrier n’est jamais parti). Je sais que j’ai su ce qu’était un test de Student et je me rappelle vaguement de ce qu’était un test non-paramétrique, mais au-delà du fait que ce ne sont pas les tests qu’on trouve dans Cosmopolitan, j’avoue que j’aurais besoin de me rafraîchir un peu la mémoire avant de piloter de nouveau Statistica comme un petit Mendel en herbe.

Le plus mignon, probablement, c’est qu’à l’époque, je restais focalisé sur la standardisation de mes courriers électroniques qui ne comportaient, à dessein, aucun accent afin d’être lisibles sur le plus grand nombre de terminaux possibles. (À l’Agro, il m’arrivait de lire mes mails sur des terminaux Unix monochromes où tous les accents sortaient comme peu ou prou comme ça : « E=9 »).

Le jour où j’ai accepté d’utiliser les accents comme tout le monde et de perdre un peu d’interopérabilité, je crois que j’ai perdu un peu d’intégrité. Une terrible et tragique pente qui m’a conduit jusqu’à acheter un iPad. Tout a une cause.

Tout.

2016-05-06T14:57:32+02:00mardi 17 mai 2016|Expériences en temps réel|16 Commentaires

Ce à quoi vous avez échappé

De temps en temps, on teste des trucs, par exemple pour répondre à la question : « quelle photo pourrais-je mettre pour illustrer la page du site relative aux projets en cours ? »

Et puis on se dit que c’est rigolo mais que, quand même, ça ne va pas le faire.

Merci F. pour la photo ! ;)

Merci F. pour la photo ! 😉

ALL WORK AND NO PLAY BLAH BLAH

2016-05-04T08:44:10+02:00jeudi 12 mai 2016|Expériences en temps réel|4 Commentaires

Usé par les réseaux

je-trolle-chez-toiLa capture d’écran de droite n’est qu’un exemple parmi beaucoup trop d’autres que je reçois en ce moment. (J’aurais pu laisser le nom en clair, vu que mon profil Facebook est public, mais je ne suis pas du genre à lancer des chasses aux sorcières. On appréciera quand même le mec qui vient troller chez toi sans te connaître, puis, quand tu le rappelles à l’ordre – parce que tu es quand même chez toi -, te bloque en se drapant dans sa dignité blessée.)

Auguste lectorat, tu auras peut-être remarqué un léger changement de ton en ces lieux depuis un ou deux mois. Peut-être un peu plus distant, formel. Ce n’est pas un hasard : je fatigue. L’ambiance sur les réseaux sociaux ces temps-ci me semble fréquemment, disons, regrettable ; la tendance au commérage de l’être humain s’y trouve tristement magnifiée, certains derrière des écrans se sentent pousser des ailes d’audace qu’ils n’auraient jamais face à face. Heureusement, il y a aussi des moments de grâce, parce que, auguste lectorat, tu es beau ; et des tas de jolies choses, de gentillesses pour lesquelles je te remercie profondément, vraiment – espérant être à la hauteur.

Qui ne veut pas être brûlé n’a qu’à pas jouer avec le feu ; j’en ai bien conscience, et si certains articles suscitent l’ire, c’est aussi qu’ils sont sujet à de hautes controverses. Normal. Néanmoins, depuis un an, la proportion de commentaires haineux et insultants que je me retrouve à modérer sur les réseaux sociaux dépasse la mesure de ce que je suis prêt à tolérer dans l’exercice naturel de mes fonctions (c’est-à-dire, en n’étant pas payé pour ça). Le blog ne pose aucun problème : maître de mes lieux, je supprime à tour de bras sans état d’âme.

Je pourrais me consoler en me disant que cela reflète d’autant l’accroissement d’un potentiel auditoire, mais je ne me flatte pas d’une telle importance – les statistiques de lecture affirment le contraire, puisque notre époque est faite de buzz, de communications virales, de réactions instinctives à chaud sur le titre d’un article, il ne s’agit pas d’auditoire mais de passages épisodiques qui parasitent sans rien apporter à personne ; d’ailleurs, certains commentaires extérieurs à la communauté habituelle prouvent de plus en plus fréquemment que leurs auteurs n’ont pas lu ce qu’ils commentent. Je constate également que les actualités sur les parutions suscitent peu d’intérêt et de partages, et que les articles fouillés, comme le diptyque (1, 2) sur la gestion des mails de la semaine dernière, font fréquemment des bides. Que cela n’intéresse personne n’est pas grave en soi – ce qui l’est, c’est le temps que je passe à les écrire en me trompant visiblement d’auditoire. Je m’interroge aussi sur ma communication relative à mon actualité – ça ne soulève guère l’enthousiasme. Veux-tu bien m’aider, auguste lectorat, et me dire ce que tu aimerais voir ? Comment rendre ces informations plus intéressantes ?

J’ai toujours dit que j’arrêterais ce blog s’il ne m’amusait plus, et, sous sa forme actuelle, je commence à me lasser de ne pouvoir aborder un sujet un tant soit peu sensible sans devoir faire ensuite de la modération chirurgicale, en particulier sur Facebook. (Les commentaires étant jumelés entre le site et Facebook, où se déroule le gros des conversations de nos jours, mon profil est obligatoirement public pour respecter, paradoxalement, la vie privée de tous – il est manifeste que les posts sont publics, et donc qu’on doit faire attention à sa parole ; hélas, ça attire tout un éventail d’abrutis, comme le spécimen pointé plus haut.)

Il est donc possible que des choses évoluent par ici. Je tiens à ce mode d’interaction avec tout le monde, je tiens à l’habitude, tenue depuis quatre ans presque sans interruption, de proposer du nouveau chaque jour ouvrable ou presque. Je refuse de laisser une poignée de mal-comprenants me pourrir la vie, mais les choses atteignent un stade où il faut trouver de nouveaux modes de fonctionnement pour ne pas perdre joie, bonheur et lolcats. Pour l’instant, donc, le ton devient un peu plus distancié et se tient sciemment à l’écart de tout terrain miné, le temps que j’aie réfléchi à la question. Qu’est-ce que j’offre ici ? Pourquoi ? Pour quel auditoire ? Le temps est probablement venu de structurer un peu le côté auberge espagnole des débuts (qui remontent à MySpace, olol).

Il est probable que je passe mon profil personnel Facebook en « page officielle » sous peu. J’y ai toujours rechigné, parce que j’aime la proximité que procure un profil personnel, et l’aspect « page officielle » comme « site officiel » pourrait laisser entendre que certains voudraient en ouvrir des non-officiels, ce qui, quand même, nous ferait tous bien marrer. Mais Facebook a retiré les outils qui permettaient d’ouvrir l’audience à tous tout en fermant les commentaires aux extérieurs. Je crains qu’il ne me faille faire comme beaucoup de mes camarades l’ont déjà fait (et je les comprends), à savoir une page publique et un profil personnel réduit, pour clarifier les intentions. Cela n’empêchera pas la page publique de conserver le même ton qu’ici, et de vivre autant que mon profil actuel.

En tout cas, si cette crainte devait se soulever : non, je ne cesserai pas de proposer du contenu relatif à l’écriture. Ce sera peut-être appelé à muter, toutefois. Il y a, avec deux camarades pour qui j’ai beaucoup d’estime et d’amitié, un super projet dans les cartons à ce sujet. Sortie prévue en septembre – mais nous en dirons davantage quand nous aurons accumulé assez de matériel. Surprise !

2016-05-31T18:36:27+02:00mercredi 27 avril 2016|Journal|130 Commentaires

Je passe à l’ennemi (l’Apple de Cthulhu)

Okay__yeah__well__you_can_laugh_at_me.__ipadpro__apple__conversion__changeBon, voici un petit coming out (caveat : post à haute teneur personnelle, passez votre chemin si ma vie ne vous semble pas trépidante – vous avez tort – je trépide beaucoup – à vous de voir) : je me suis trompé.

Ou alors, je vieillis. Bientôt, je me mettrai des écarteurs dans les oreilles, je ressortirai mes chemises de bûcheron (j’en portais dans les années 90 before it was cool), j’irai chez Starbuck et…

Non, en fait, c’est surtout que la technologie a évolué conformément à mes attentes et a atteint la maturité que je commençais à désespérer de lui voir atteindre.

Plus, Windows 10 me rend dépressif.

Auguste lectorat, tu m’as entendu le dire, je me moquais plus ou moins gentiment d’Apple et de son design Gucci, de ses machines hors de prix, de son interface mignonnette, de son manque d’extensibilité, du culte absurde que la marque génère, de son écosystème fermé, de son manque relatif d’innovation… Je me fondais pour cela sur un iPad 4 que j’ai conservé quatre semaines avant de criser sur l’incapacité de faire quoi que ce soit de vaguement productif (du genre partager une page web de Chrome à un service du type Buffer), et de le revendre illico. Et puis les années ont passé.

J’ai une exigence bien particulière : je suis souvent en déplacement et je ne réfléchis bien qu’avec un stylo en main. L’écriture génère une quantité considérable de notes (surtout pour l’écriture d’une trilogie – Léviathan représente une chemise à sangles entière rien qu’en réflexions papier) – et il est hors de question de me trimballer tout ça en voyage. Du coup, je recherche depuis plusieurs années une solution de rédaction numérique idéale qui me permette de transporter et d’ordonner mes idées manuscrites dans le poids d’un seul appareil.

J’ai essayé les Galaxy Note grand format chez Samsung. Moyennant un stylet de meilleure qualité acheté directement chez Wacom, c’était pas mal.

J’ai placé beaucoup d’espoir dans la Surface Pro. Sur le papier, une machine géniale. Dans les faits, une qualité d’écriture dégueulasse (et une chauffe inconfortable). Un super PC miniaturisé, mais : inutilisable pour cette exigence précise.

En désespoir de cause, « foutu pour foutu », j’ai essayé l’iPad Pro et son stylet.

Ça défonce tout. Je suis tombé amoureux. J’ai revendu tout le reste. (Je proposerai probablement un petit test plus détaillé sur le sujet des tablettes, d’ailleurs : ayant à peu près tout eu et tout revendu, je crois pouvoir faire autorité.)

J’ai redécouvert iOS et, moi qui ne jurais que par Android, j’ai trouvé, avec le passage des ans, que tous les obstacles techniques que je déplorais sur l’iPad 4 ont été levés. Les applications communiquent entre elles. On peut réellement contrôler sa machine en profondeur. Le système respecte l’utilisateur (par exemple en demandant l’autorisation de poster des notifications au lieu de les ajouter d’office comme sous Android). Des dizaines d’applications uniques, d’astuces et de hacks donnent à l’ensemble une puissance proprement hallucinante (avec des bijoux tels que Workflow, Dispatch, évidemment Omnifocus et j’en passe). J’ai pu constater, à présent, que la promesse d’Apple (« c’est fait pour bosser, c’est bien conçu, et ça marche ») était remplie au-delà de mes espérances.

J’ai ensuite testé un tout petit Macbook Air, et là aussi, l’expérience a dépassé mes espérances. J’ai jeté au visage du système tout ce que j’ai pu : émulation de machine virtuelle Windows, grosses applications gourmandes, navigateur avec une pelletée d’onglets (en mode : « vas-y, crashe, montre-moi que t’es pourri »), mais l’engin – s’il a ralenti, ce qui est normal – n’a pas planté. D’expérience, je sais que la Surface Pro 3 – pourtant plus puissante – m’aurait claqué dans les doigts avec deux fois moins – pas d’écran bleu, mais un système devenu moisi et nécessitant un redémarrage. Les outils système d’optimisation pour power users sous OS X (Alfred, TextExpander, Hazel, Keyboard Maestro… voir cet article) ridiculisent littéralement les tentatives mal foutues d’émuler le même genre de fonctionnalités sous Windows.

Je me rends compte d’à quel point l’expérience Windows, bien qu’ayant progressé d’année en année, manque de cohérence, de direction, de finition. Passer sous Win10 a nécessité de réinstaller tous mes logiciels musicaux. Depuis quelques mois, ma machine de travail refuse de s’allumer si le clavier USB est branché (WTF ?). L’interface Modern UI avec ses lignes droites, ses angles carrés et ses icônes ultra-simplifiées nous ramènent à une époque où le monochrome n’était pas un choix, comme si trente ans de réflexion sur le langage des interfaces graphiques s’était évanoui, comme si, quelque part chez Microsoft, on avait oublié que l’être humain aime la couleur, les courbes, la douceur. (C’est réellement une doctrine de design : lisez cet article de Steve Clayton exposant les principes actuels gouvernant les interfaces chez Microsoft, les bras m’en tombent – ils ne voient pas combien c’est moche ? Ne fait pas du Bauhaus qui veut…) Sérieusement, auguste lectorat, je déprime de bosser sur un truc pareil à longueur de journée, à tel point qu’installer WindowBlinds est devenu une nécessité vitale, ou bien je me pendais.

La tristitude.

La tristitude.

Oui, Windows marche. Oui, Win10 marche mieux que pas mal de ses ancêtres (avec la possible exception de Seven, certainement la meilleure incarnation). Mais je m’aperçois à quel point un Mac, ça marche tellement mieux. À quel point tout est concentré pour l’usage et l’amélioration desdits usages (même remarque pour iOS), quand Windows et Android fournissent le minimum et à chacun de construire sa solution dessus. C’est la rançon de l’ouverture, bien sûr ; Apple ferme ses systèmes à mort et il est difficile de sortir des sentiers battus, d’où l’impératif d’un système bien développé comme fondation (et ma crise sur l’iPad 4).

Mais en somme, avec les produits Windows et Google, je me bats pour que ça marche exactement comme je voudrais, et je me sens intelligent quand j’ai réussi à faire que tout fonctionne comme je le veux. Mais chez Apple, je découvre que ça fait déjà ce que je veux et que, si je suis malin, je peux faire encore mieux. Je pars de plus haut. Le temps passé à traficoter entraîne une optimisation, pas une pure maintenance pour s’assurer que ça ne va pas me claquer dans les doigts. C’est la promesse d’Apple, et, à ce que j’en vois, l’entreprise la tient d’une façon qui, aujourd’hui, me comble.

Je n’ai plus quinze ans, quand je passais le plus clair de mon temps à jouer à X-Wing sur mon 486. (Je voulais jouer, il fallait un PC ; j’étais sous Mac, avant… un vieux LC avec – luxe ! – 80 Mo de disque dur, sous Système 7 – j’ai évidemment pris une claque en mettant mes doigts sur El Capitan aujourd’hui, tout en retrouvant curieusement mes marques…). Aujourd’hui et depuis des années, j’ai une machine pour jouer, une machine pour travailler, et la machine de travail doit me permettre de produire vite, bien, efficacement et sans erreur. J’accepte de bidouiller une machine de jeu pour l’optimiser. Pas une machine de travail. Tout temps passé à optimiser / réparer / débugger une machine de travail est du temps perdu. Je suis prêt à payer plus cher pour m’éviter cela, parce qu’au final, je m’y retrouve sur l’investissement. 

Et puis oui, après tout, nous passons le plus clair de notre temps sur nos appareils, ordinateurs, téléphones, tablettes. Le design est important, car il dicte en partie l’usage, et donc la fonction de l’objet. S’il y a des gens qui veulent des paillettes sur leur iPhone, chacun son truc – pour ma part, je me satisfais seulement des proportions d’écran de l’iPad, qui sont, à l’usage, parfaites pour un usage professionnel, et c’est ce que je demande.

Donc, je me suis trompé. C’était prévisible, quand on voit le nombre de pros, dans le domaine de l’écriture et de la musique, qui tournent sous Mac ; mais que serait l’informatique sans une bonne petite guéguerre Amiga / Atari ? Même si Windows, je le répète, reste très fonctionnel – mais j’en ai marre du purement fonctionnel ; j’ai envie d’avoir envie. J’aime l’informatique et je passe ma vie dessus pour le boulot ; le confort et l’optimisation sont des exigences non négligeables. J’en ai marre de me faire le malin à économiser 400 euros sur un nouvel ordinateur pour me retrouver à le dépanner 15 minutes par semaine et à me stresser à me demander s’il va retomber en marche. Je suis entré dans un Apple Store avec la timidité d’un adolescent rentrant dans un sex shop, en me demandant si ce serait sale et si mes parents risquaient de me gauler. Si mon âme irait en enfer. Et en fait, c’était bien. C’était douillet, agréable, je me rends compte que ce n’est pas répréhensible, qu’il n’y a pas de honte à ça et même que d’autres partagent la même déviance, avec qui on peut discuter à voix basse. J’embrasse le clan des hipsters. J’assume mon côté fashion victim. De MS-Dos 6.0 à Windows 10, d’Android 2.3 à Mashmallow, après plus de vingt ans de bricolage, de tripatouillage de CONFIG.SYS et d’AUTOEXEC.BAT, d’installations religieuses du Service Pack 1 sur Windows XP pour éviter que l’installation n’explose après cinq minutes de connexion à Internet, je jette l’éponge. Je couve d’un oeil nostalgique mon vieux Mac LC qui trône encore sur une vieille desserte dans l’appartement paternel et j’adresse une tendre pensée à mon vieil Apple //c perdu dans les déménagements, sur lequel j’ai découvert l’informatique à l’âge de six ans, codant ensuite en BASIC sur des disquettes 5  » 1/4.

Je rentre à la maison. Adieu Windows.

2016-04-12T13:07:43+02:00jeudi 14 avril 2016|Journal|106 Commentaires

Volontariat 2016, au contact des étoiles

roscosmosAuguste lectorat, tu as eu la gentillesse de suivre mes humbles aventures de par le monde, notamment en 2011 chez Sea Watch Foundation et en 2012 au Hebridean Whale and Dolphin Trust, sans parler de quelques carnets de voyage. Depuis quelque temps, grandement pris par le travail, j’ai réduit ce genre de découvertes pures, mais cela restait à l’horizon – et quel horizon, puisque mon volontariat de 2016 se déroulera auprès des cieux !

En effet, j’ai répondu présent à l’appel de Roscosmos, l’agence spatiale de la Fédération Russe, laquelle recherche des volontaires sur la période estivale afin de participer à un projet scientifique spatial de grande envergure, et une première mondiale :

Les relevés de Bryn et al. effectués au télescope d’Arecibo ont révélé pour la première fois des courants périodiques animant la magnétosphère de haute altitude ainsi que des pulses sonores cohérents situés dans les fréquences 15 – 35 kHz (ultrasons). Dans ce contexte, Roscosmos, Ltd. recrute douze volontaires pour le projet звездный прилив, dont l’objet vise l’étude de ces courants et de ces clics pour la majeure partie situés au-delà du spectre audible humain.

Profil académique des candidats recherchés :

  • Master ou équivalent en astrophysique ou bien océanographie,
  • Compétences en traitement du signal sonore,
  • Au moins deux (2) publications, scientifiques ou de grand public, témoignant d’une approche novatrice d’une question de société ou historique, ou bien visant à questionner la place de l’humanité dans le cosmos.

Les candidats devront présenter les qualités suivantes :

  • Fort esprit d’équipe,
  • Bon état physique général,
  • Stabilité psychologique,
  • Forte résilience,
  • Ne pas être soutien de famille.

La mention de l’océanographie peut surprendre, mais elle se comprend dès lors qu’on étudie la publication de Bryn (Periodic stellar movement in high altitudes reminds observers of strong magnitude oceanic tides, in International Review of Natural Sciences). En effet, qui dit « mouvement périodique » sous-entend marées, et c’est à ce titre, en raison de mon passé de biologiste marin, que mon profil a été retenu. Mon travail dans la musique électronique m’a également familiarisé avec le traitement du signal, en tout cas, ainsi que je l’ai présenté au sergent recruteur, argument qui a emporté son adhésion, « j’aime les boutons qui font pouit, donnez-m’en plein ».

Je partirai donc le dimanche 12 juin pour la petite ville de мудак, où Roscosmos a établi ses installations les plus modernes, sur un campus partagé avec l’université locale.

staticmap

En effet, la Fédération Russe a développé des technologies innovantes pour pallier le relatifs manque de moyens en comparaison de la NASA ou même de l’Agence Spatiale Européenne ; mais ce sont justement ces innovations, comme l’emploi de personnel volontaire bénévole, l’utilisation de titane de carbone ou encore la réutilisation créative de déchets nucléaires, qui alimentent son dynamisme et lui permettent de conduire des projets d’investigation plus pointus, comme cet étrange phénomène de marée spatiale, accompagné de trains de clics sonores.

Mon lancement se déroulera mardi 14 juin, deux jours après mon arrivée, de sorte que je puisse m’habituer au décalage horaire ainsi qu’à un jeûne prolongé, les moyens modestes du programme interdisant d’emporter des rations de survie ou de l’eau à bord de la sonde spatiale. Celle-ci, baptisée гроб-9, décrira deux orbites complètes durant lesquelles j’ai pour mission de récupérer un maximum de données visuelles et auditives sur ces phénomènes pour l’heure inexpliqués. L’espace y est hélas très exigu, mais mon expérience à bord de navires d’expédition sur des couchettes étroites a convaincu les recruteurs que je correspondais au profil, surtout après qu’ils m’aient fait signé une épaisse liasse de documents en cyrillique en prononçant mon nom avec enthousiasme, quoique de façon un peu approximative – « davaidavai ! »

Voici en effet une photographie extérieure des sondes de classe гроб :

« Nous sommes heureux qu’un écrivain de science-fiction tel que LD ait rejoint les rangs de Roscosmos. Il faut en effet un esprit ouvert, animé pourtant d’une rigueur scientifique certaine, pour s’assurer que les informations recueillies le soient dans le plus pur respect de la méthode empirique, sans se fermer à des hypothèses extroardinaires, a déclaré Piotr Karmannik, sous-directeur attaché aux déploiement opérationnel des ressources projet transversales. J’appelle la presse, comme le public, à ne rien croire des clichés amateur réalisés par le club astronomique du collège de Все-Прут. Ceux- ci sont à l’évidence de grossiers photomontages qui ne sauraient expliquer la présence de trains de clics en haute atmosphère. »

J’irai donc en avoir le coeur net, sachant que je serai repêché dans l’océan Pacifique après mes 48 heures d’expédition, au terme d’une chute atmosphérique atteignant une vitesse de 6700 km/s. Je pourrai compter sur un puissant système d’airbags soviétiques gonflés au méthane d’origine bovine pour amortir ma chute, et, charmante coutume, la sonde est équipée en série d’un rosaire pour les cas où l’astronaute trouverait la foi dans d’éventuels moments de solitude. Mais je suis certain que je n’aurai même pas le temps d’y réfléchir – il n’est prévu nulle période de sommeil afin de rentabiliser au maximum la mission – et que j’aurai mille choses à relater ici-même. Nous nous en reparlerons fin juin !

(Note : pour les lecteurs férus d’astronomie, un des clichés amateurs réalisés par le collège et décriés par le sous-directeur Karmannik peut être visualisé ici.)

2016-04-01T11:07:16+02:00vendredi 1 avril 2016|Expériences en temps réel|12 Commentaires

Sept anglicismes à bannir du langage geek et de l’imaginaire

thank-you-fistingQuoi ? Quoi, j’ai dit « sus aux anglicismes » et « geek » dans la même phrase ? Alors d’une, je l’ai mis en italiques, ce qui explique bien que c’est un emprunt, et de deux, geek n’a pas de réel équivalent en français, vu que ça signifie en gros « mec chelou » ou « débile » en langue anglaise.

Donc bon.

Nous, peuple de l’imaginaire et par extension peuple du jeu vidéo, de la contre-culture, embrassons les nouveautés pour lesquelles il n’y a pas encore de réel vocabulaire (ce qui est beau), un mode de pensée et de construction venu d’ailleurs dans le cas des mécaniques ludiques (ce qui est intéressant) mais oublions au passage que nous avons une langue avec laquelle nous pouvons faire autre chose que manger des glaces, c’est-à-dire parler correctement quand il existe des termes parfaitement valides, a fortiori quand les anglicismes que nous importons sans réfléchir se heurtent à des mots existant déjà, concourant à des phrases qui, franchement, ne veulent plus fucking rien dire. (Là encore, les italiques, vous avez vu ?)

Alors maintenant, ça suffa comme ci, voici sept anglicismes qu’il faut cesser d’utiliser, parce que sérieux, ils vous donnent l’air tarte : les mots que vous employez ne signifient pas ce que vous croyez.

1. Franchise

« J’adore toute la franchise Star Wars. »

Star Wars ne vous fait pas de secrets ! Star Wars vous dit tout ! La franchise, c’est la somme que vous devez payer avant que l’assurance ne couvre les frais, ou bien l’honnêteté dont vous faites preuve pour dire à votre coloc que ses chaussettes puent, mais cela ne désigne en aucun cas une propriété intellectuelle dont on dérive des oeuvres. Une franchise, à la rigueur, c’est le droit d’exercer pour un artisan passé maître (ce qui explique qu’on puisse être franchisé Subway de nos jours, quand il est plus civilisé de servir des poulet teriyaki que des parpaings), mais cela ne s’applique pas à une oeuvre de l’esprit – dans ce cas, on parle de licence, c’est-à-dire une licence d’exploitation pour créer une oeuvre secondaire, ou pour continuer à explorer un univers existant.

2. Achèvement

« J’ai tous les achèvements héroïques de World of Warcraft. »

Les achèvements sont donc une fin en soi ? En même temps… Ahem. Les trophées / exploits / hauts faits / réussites que l’on obtient dans les jeux (les petits défis sans autre récompense qu’un score à la clé) dérivent de l’anglais achievement, mais to achieve signifie réussir, parvenir à. En français, achever, ça veut dire terminer, pas réussir (une réussite est terminée, mais toute terminaison n’est pas réussie, comme, peut-être, celles des neurones des locuteurs qui intervertissent les termes sans distinction). Sinon, quoi, vous avez obtenu des terminaisons dans World of Warcraft ? Ça a l’air tarte, hein ? Bah voilà. Utilisez ce que vous voulez, mais pas achèvement.

3. Disposer de ses ennemis

octopus1« J’ai disposé de toute l’équipe ennemie, je roxxe ! »

Alors un truc, les gens, disposer de, c’est avoir à son service, ou bien donner congé. Comme dans : « Alfred, vous pouvez disposer. » Si j’ai vaincu Sauron, je dis quoi : « Sauron, tu peux disposer ? » RLY ? Et sinon, si je dispose de Sauron, c’est mon majordome. Donc vous avez Sauron comme majordome ? (Oui ? Oh d’accord je ne voulais pas vous agacer excusez-moi de vous demander pardon.) Cet horrible anglicisme vient de dispose of, ce qui signifie se débarrasser de. On poutre, assassine, détruit, se débarrasse de, que sais-je encore, mais disposer, non. Sauf si vous vous débarrassez de vos ennemis au sein du service public via des mises à disposition, mais là, c’est retors.

4. Tiers

« J’ai débloqué le quatrième tiers de l’évolution de ma colonie spatiale. »

Combien y a-t-il de tiers dans un quatre-quarts ? Hein ? Hein ? Trois, bon dieu ! Un tiers, c’est une fraction. Mettre quatre tiers dans un verre, à moins qu’on soit chez Pagnol (et que ça dépende de la grandeur des tiers), ça veut dire remplir le verre et en fiche un tiers de plus sur le comptoir. Celui-là vient de tier qui signifie palier. Cessez d’être grotesque, je vous en prie, quand votre paladin de WoW vient de débloquer son ensemble de raid T27 – tiers vingt-septième ? Sérieusement ? What is this I don’t even. Palier. Palier. Ça me rend fou palier. LOL.

5. Expertise

« J’ai appelé un spécialiste qui nous fera bénéficier de son expertise. »

Expérience, fichtrefoutre, pas expertise ! L’expertise, c’est réservé aux comptables ou aux assurances, c’est une forme d’audit, si l’on veut. Dans tous les autres cas, il s’agit d’expérience. De savoir-faire. Non, dire expertise ne donne pas de cachet à l’expérience. Sinon les moines bouddhistes feraient preuve de patise au lieu de patience, l’équipe de Charlie Hebdo très irrévérencieuse montrerait de l’irrévertise et les méduses qui brillent fort dans l’obscurité illustreraient la bioluminestise.

6. Digital

« J’aimerais vous proposer mes compétences en marketing digital. »

Digital, c’est un doigt brandi bien haut. Oui, je sais, l’usage de digital (traduction directe de digital) a été entériné par l’Académie Française (la même qui nous a offert cédérom et mél, rappelons-nous, hein), mais les dictionnaires recommandent plutôt, et explicitement, numérique. C’est du binaire, ce sont des nombres. Je veux bien qu’on interagisse avec des doigts, mais quand on aura des interfaces neuronales, nos doigts seront au repos, quand les nombres défileront toujours dans la matrice. Soyez dans le coup, prenez une longueur d’avance. Parce que quelqu’un qui a des compétences digitales, ça s’appelle un empoisonneur.

7. Habiletés

« J’ai maximisé toutes les habiletés de mon personnage. »

L’habileté, c’est le caractère de celui qui est habile, adroit ; les habiletés, ce sont les maîtrises de techniques et de savoir-faire. Or, ability en anglais recouvre plutôt les facultés, les capacités, à la rigueur les compétences. Et non, « abilité » n’est pas un mot. Débilité, en revanche, si.

8. Bonus : Âge

slip_carefully« Nous entrons dans un âge digital » (double combo)

Celle-là est plus subtile (d’où le fait qu’elle soit en bonus).

Ce n’est pas parce que le titre du film Ice Age a été traduit bêtement par L’Âge de Glace qu’il faut croire tout ce qu’on raconte au cinéma (d’ailleurs, breaking news, les mammouths ne parlent pas). Age en anglais, c’est une période, voire une ère (mais cela engendrait des confusions avec l’échelle géologique du même nom). On peut parler d’âge mais, dans ce cas, on ajoute plutôt un adjectif, comme pour le « petit âge glaciaire » géologique qui n’était pas tant une « période » à proprement parler, mais un refroidissement.

Alors je veux bien que Période glaciaire, ça n’aurait pas fait un titre très sexy, mais j’ose avancer que L’Âge de Glace, c’est à peine mieux. Ce qui fait l’équilibre d’une formulation ne se trouve pas seulement dans les termes employés mais dans leur conjonction. Ici, la solution était simplement : Âges glaciairesL’âge des glaces, ou autres ; parce que L’Âge de glace, ça évoque un peu « les noces de diamant » de ta grand-mère (récit à rebondissement s’il en est, avec dégel, glaciation, mammouths et tigres à dents de sabre maison).

Bref, sur « âge », se méfier comme l’oiseau qui vient de naître au risque de savonner la pente de la branche sur laquelle on est assis.

Circulez et portez la bonne parole !

2019-09-19T10:37:01+02:00lundi 28 mars 2016|Best Of, Humeurs aqueuses|52 Commentaires

Bruxelles

Tu me connais, auguste lectorat, je ne suis pas du genre à surfer sur l’actualité quand je n’ai manneken_pis_terroristesrien d’intelligent à ajouter. Mais pas envie non plus de rester silencieux, sans un mot de soutien pour la Belgique et Bruxelles. Pas envie de ne rien dire, pas envie de répéter des choses déjà dites non plus, pas envie de faire du clic facile. Alors, simple rediffusion de cet article écrit le 8 janvier 2015, des choses qui ont été dites et redites par d’autres que moi de cent manières différentes, et les idées restent plus ou moins les mêmes.

Une remarque, quand même, par rapport aux diverses inquiétudes défilant sur les réseaux sociaux quant à la décroissance des réactions choquées, dans l’opinion, face à cette barbarie : est-ce à dire que nous serions devenus insensibles ?

Non. Je crois que nous refusons de plus en plus, collectivement, d’avoir peur. Je crois que nous sommes de plus en plus nombreux à refuser de changer quoi que ce soit à nos vies. Je crois que c’est, justement, la marque que la tactique terroriste, sur le long terme, échoue.

2016-03-23T15:14:50+01:00jeudi 24 mars 2016|Humeurs aqueuses|6 Commentaires

Juste en rentrant de Paris

… Un petit mot rapide pour remercier tous les copains, lecteurs, collègues vus ce week-end au Salon du Livre. Pour moi, c’était une première (j’avoue, c’est la première fois que j’y mets les pieds depuis 15 ans de littérature !) et c’était vraiment très sympa ! Merci à la team Critic pour son accueil et pour avoir pris soin de nous sans compter son énergie, grosses bises à tous les camarades du coin de l’imaginaire (L’Atalante, les Indés et tous les autres) et merci à tous les visiteurs !

team_critic_paris_2016

De gauche à droite : LD, Clément Bouhélier, Simon Pinel, Christian Léourier, Laurent Whale (assis), Éric Marcelin, Florence Bury, Sylvie Miller

2016-03-22T10:54:58+01:00mercredi 23 mars 2016|Carnets de voyage|Commentaires fermés sur Juste en rentrant de Paris

Livin’ in the fridge

Ça me fait peur, on dirait un envoyé de Morgoth.

gronsaksmix

N’aie crainte, le grönsaksmix à la Bretonne est assaisonné au beurre et t’aidera à apprécier la saveur des légumes. LEUR JUSTE SAVEUR, TU ENTENDS. Il t’aidera aussi à entendre des voix qui te diront qui tuer et quand.

Mais ce sera notre petit secret.

2016-02-17T16:09:46+01:00mercredi 24 février 2016|Expériences en temps réel|5 Commentaires

La routine des petits métiers parisiens

plonk-replonk-c19d-diaporama

Plonk et Replonk, des gens de goût à visiter de toute urgence

Parce que tu es grand, auguste lectorat, et que mon mur Facebook est public, et qu’il est dommage de ne pas en faire profiter davantage le monde :

2016-02-17T11:29:44+01:00jeudi 18 février 2016|Expériences en temps réel|1 Commentaire
Aller en haut