Doutez de tout, y compris de ce que je vous dis

Celle-là, je l’ai évidemment piquée à Bouddha, hein. (Elle a longtemps été accrochée dans mon bureau.)

Petit article de mise au point général sur le blog et notamment ce qui s’y trouve concernant la technique d’écriture, afin de clarifier, voire répondre à certaines critiques qui peuvent revenir à mes oreilles. Ces articles sont toujours plus fréquentés, ce qui signifie que de nouveaux visiteurs découvrent toujours davantage l’endroit, ce qui me fait grand plaisir (bienvenue). En revanche, le problème d’un blog, c’est que la discussion se déroule sur la durée (en l’occurrence, depuis des années), et que le ton peut parfois surprendre les nouveaux arrivants, ou, tout simplement, les visiteurs occasionnels peuvent se méprendre sur le discours.

Cet endroit serait un livre, une introduction en clarifierait les présupposés, mais comme on est sur le web, je ne peux guère que consigner tout ça dans un article et m’efforcer de le rendre visible au maximum. Et je me suis rendu compte à ma grande surprise que je ne l’avais jamais vraiment fait ici.

L’approche technique de l’écriture

Ce blog parle entre autres de la technique de l’écriture. Ces articles sont écrits dans une seule optique, qui s’enracine dans leur genèse.

Quand j’aspirais à faire mes premières armes professionnelles, autour de l’an 2000, je ne savais absolument pas par quel bout prendre le travail titanesque que représente un roman. Je pensais qu’il devait bien y avoir des bases techniques qu’il était possible d’acquérir (comme les principes de la perspective pour le dessin, ou de l’harmonie pour la musique, par exemple), et j’en ai trouvé, mais presque tout se trouvait en langue anglaise, rédigé par des Américains. J’ai ruminé, testé cette matière, qui a structuré mes idées, m’a guidé dans certaines voies plus ou moins fécondes, mais j’en ai toujours retiré des leçons (ne serait-ce que : ça ne marche pas pour moi, et j’ai compris pourquoi).  Selon le principe que dans les métiers de création, on ne peut que rarement renvoyer l’ascenseur à ceux qui vous ont mis le pied à l’étrier (car ils restent toujours plus expérimentés que vous), on ne peut payer sa « dette karmique » qu’en s’efforçant de hisser ceux qui viennent après nous. (« You can never pay back, only pay forward. »)

Je m’efforce donc de proposer ici ce que j’aurais aimé trouver quand j’ai commencé. 

Cependant, j’écris nécessairement de mon propre point de vue, et si je crois à une approche plutôt opérante de l’écriture (étant en cela orienté par mes propres présupposés d’écrivain structurel), elle n’est en aucune manière la seule. Le seul principe gouvernant la recherche de l’écriture, par lequel je commence toujours toute intervention, c’est : apprendre à écrire, c’est apprendre à se connaître. Il vaut mieux travailler dans le sens qui nous convient qu’à rebrousse-poil (duh). Sachant par ailleurs que cette cible – se connaître – est nécessairement mouvante ; avec le temps, avec les situations, avec les parcours personnels. La façon de travailler, ce que l’on souhaite aborder, traiter, suivre, les thèmes qui émergent, le rythme, tout cela est gouverné par un seul but : faites ce que vous voulez tant que vous obtenez un livre dont vous soyez content.

La technique ne fera pas de vous un bon écrivain, mais elle peut éventuellement vous garder d’être mauvais. La technique, à force de persévérance, pourra peut-être vous permettre de terminer une histoire ; en débordant sur le développement personnel et la psychologie, elle pourra peut-être vous aider à appréhender ce qu’il y a en vous pour faire apparaître vos motivations au grand jour ; elle peut peut-être simplement constituer un parcours d’introspection constant (c’est mon cas) ; mais elle ne garantit en rien que votre travail soit intéressant ni publiable d’entrée, et je ne vous fais certainement pas cette promesse. En revanche, elle peut peut-être vous éviter un certain nombre de pièges « connus », vous permettre de décoder les conventions acquises par des siècles d’évolution littéraire, prendre de la hauteur, et vous mettre le pied à l’étrier ne serait-ce qu’en vous proposant une direction à essayer, ce qui constitue une amélioration par rapport à pas de direction du tout. (Je reprends ici pas mal ce que j’ai déjà dit dans le tout premier épisode de Procrastination.)

Ce site est un blog

Ce site n’est pas un livre, un manuel, des tablettes gravées dans le marbre où Ma Parole A Force De Loi. C’est un blog, où je ne fais que proposer, diffuser, des réflexions parfois bien abouties (jusqu’à ce qu’elles changent), parfois moins. Parfois, c’est écrit un peu vite parce que je me suis promis de publier un article et je ne les relis pas autant qu’un roman ou une nouvelle (la création de fiction restant mon travail principal). Parfois, je suis au taquet, ravi d’une découverte ou d’un mécanisme que j’ai fini par élucider, et je meurs d’envie de partager mon enthousiasme avec le vaste monde. Cela peut sembler péremptoire. Je le répète : c’est un blog. C’est parfois émotionnel. Je n’écris pas un roman ni un manuel, je lance des os à ronger. Rongez-les – ou pas. Tout ce que je dis est écrit de mon point de vue, et le but, c’est de stimuler la réflexion chez les auteurs, notamment ceux qui se forment (parce que les pros ont déjà leurs outils, même si nous apprenons tous, je crois, toute notre vie).

Derrière toute affirmation, gardez à l’esprit que c’est toujours écrit par une personne avec une approche donnée, en construction perpétuelle comme l’est toujours la création, que les outils d’hier peuvent être dépassés demain (tout comme vous ne vous récitez pas l’alphabet en lisant ceci ; vous avez intégré l’écrit au point de devenir un réflexe), et qu’il serait juste un peu ridicule d’écrire à chaque fois « à mon avis personnel de moi-même et écrit simplement de mon point de vue dont voici l’historique [insérez ici cinquante pages biographiques] ». Je m’efforce de rester dans la proposition et non le finalisme, mais je compte bien conserver une grande liberté de ton (c’est une des raisons pour lesquelles, après environ dix ans de blogging, ça continue à m’amuser), et donc, ayez l’amabilité de faire la part des choses, le cas échéant, en vous rappelant l’esprit dans lequel c’est écrit, et gagnons du temps ensemble.

Rapport de transparence

Il m’est revenu que ce blog, en filigrane, n’était qu’une plate-forme pour me permettre de refourguer des activités commerciales, notamment des interventions. J’avoue que je le prends très mal. Je consacre beaucoup d’énergie à essayer de trouver des solutions équitables, win-win en bon langage de marketeux, qui permettent de proposer du contenu de qualité, tout en rentabilisant un peu l’endroit, sans conflit d’intérêt, sans entacher la confiance que nous avons établie. Car je pourrais consigner tous les jours, auguste lectorat, le temps que je passe ici au lieu de faire des choses qui me rapportent vraiment de l’argent, mais je ne vais pas entrer là-dedans ; sache simplement que c’est : trop.

Dans l’intérêt de la transparence, je vais donc dévoiler totalement ce que je retire, de près ou de loin, de ces articles et du blog en général.

Du plaisir et du karma. Alors déjà, oui, j’aime bien faire mumuse sur Internet. Et surtout, il y a l’aspect dette karmique cité plus haut : je n’ai pas le temps de lire les textes des jeunes auteurs, par exemple. Alors je m’efforce plutôt de proposer des choses, publiquement et librement, qui puissent toucher le plus grand nombre.

Une forme de fidélité. Ce n’est pas nouveau : c’est en toutes lettres dans la charte des commentaires. L’idée, c’est que si vous aimez ce que vous lisez ici, peut-être aurez-vous envie d’essayer un bouquin un jour, et ça me permet de continuer à faire tourner la boutique. Mais rien n’est obligatoire, je ne place aucun contenu derrière une inscription obligatoire à une liste de diffusion, un paywall ou toutes les pratiques modernes d’Internet. Je ne crois pas vous noyer de « hé j’ai sorti un nouveau livre RT plz plz plz » : je pars du principe que si je propose des trucs intéressants, qu’il m’intéresse aussi de traiter, vous resterez, et on sera tous contents (win-win). Je ne retiens personne, je n’oblige personne à venir lire ou commenter. J’observe une grande liberté de parole ici et ça comporte un double tranchant : vous pouvez aussi trouver que je suis un gros connard et jurer de ne jamais me lire. C’est la vie. Au moins, je m’efforce d’être sincère, y compris dans mes erreurs, et d’admettre quand j’ai tort, voire de m’en excuser (c’est arrivé plusieurs fois et ça se reproduira)1.

Le cas des interventions / du coaching etc. Je n’ai aucune structure pour réaliser des ateliers d’écriture, des interventions, des masterclasses. Je ne démarche pas pour cela, et je mets presque un point d’honneur à ne pas le faire, justement parce que je ne souhaite pas que le blog devienne une forme de « produit d’appel ». Pour cette raison, j’en fais moins d’une demi-douzaine par an. Ce n’est donc pas une source principale de revenu (même si elle existe et que je ne crache pas dessus). La façon dont le marché de ces interventions fonctionne, auguste lectorat, est le suivant : je pourrais très largement mieux gagner ma vie en laissant tomber le blog et en animant des ateliers dans ma ville. Je pourrais faire du coaching littéraire – certains collègues le font et gagnent leur vie avec (et très bien pour eux) – pour ma part, ainsi que je l’ai  annoncé, je ne le fais pas, malgré des demandes régulières. Parce que je considère – mais c’est ma réponse, pas celle du voisin – que mon métier reste de créer. Je crois qu’on me demande des interventions parce que, tout simplement, je peux avoir une pensée construite sur l’écriture, et que cela intéresse des gens qui se trouvent être des commanditaires. Mais ça n’est en aucun cas calculé. Je te parle à toi, auguste lectorat, pas à des commanditaires.

Les liens affiliés. À travers la boîte à outils de l’écrivain, je touche une commission sur certaines commandes de logiciels recommandés. Je m’en suis longuement expliqué ici, mais le raisonnement est le suivant : j’écris de toute façon des tests de logiciels qui m’aident dans le boulot, donc, si vous êtes convaincu.e, autant que je touche quelques dollars au passage, ce qui ne vous coûte rien de plus, et qui, moi, m’aide à payer l’hébergement et à continuer à traiter ces outils en profondeur avec des trucs, astuces, cas d’usage et à légitimer un tant soit peu le temps déraisonnable que je passe ici. Win-win. 

J’ai un site depuis plus de dix ans et il n’y JAMAIS eu de bouton « donation », JAMAIS eu de pubs (et là aussi, des offres, j’en reçois). Je voudrais monétiser cet endroit, oh, je pourrais parfaitement le faire, surtout à plus de 10 000 lectures uniques par mois. Mais ça n’est pas l’esprit du lieu, je ne veux pas que ça le devienne, ce n’est pas ce que je veux créer et c’est pour ça que globalement, on s’y sent tous à peu près bien, enfin, je crois.

Je ne vous retiens pas

Ce n’est pas dit de manière agressive. Je l’ai dit, je le répète, tout ceci est subjectif, et lisez toujours les articles, tout particulièrement sur la technique littéraire, avec le grain of salt – la mesure de prudence – qu’il est, de toute façon, toujours de bon aloi d’observer dans ce genre de situation. La majorité de ceux qui vous disent qu’il y a une seule et unique manière de faire veulent vous vendre quelque chose. Qu’il soit dit ici et une fois pour toutes que s’il y a « une » manière de faire, c’est pour moi seulement (et encore, ça évolue avec le temps) ; que je pense qu’un certain nombre de conseils peuvent bénéficier à un grand nombre, mais il y a toujours le contre-exemple, et c’est peut-être vous. Très bien. À vous de voir, vous êtes vous, j’en sais rien, moi.

Tout ce que vous devez faire, c’est : tester, essayer, garder une attitude proactive vis-à-vis de votre pratique créatrice. N’importe quoi tant qu’il y a un résultat dont vous êtes content. C’est la seule chose à faire. Ou pas de résultat, même, si vous ne voulez pas de résultat, vous faites ce que vous voulez, hein.

Bref, le reste n’est que des moyens. Les moyens ne sont que des indications, envers lesquels il s’agit de conserver le juste mélange, propre à chacun, d’assurance (« non, ça ne me va pas, à moi ») et d’humilité (« je ne sais pas, alors je vais écouter avant de juger »).

Le stylo est, et a toujours été, dans votre camp.

Bonne écriture ! 

  1. Il y a certains articles notamment politiques, avec le recul des années, dont je regrette la forme. Ils sont toujours dans les archives, parce que je ne vais pas vous raconter combien je suis lisse et parfait, né hier soir, avec tout le passif et les leçons données par l’existence.
2019-06-04T20:32:59+02:00mardi 13 juin 2017|Technique d'écriture|14 Commentaires

Sept conseils de base au jeune auteur qui veut publier

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C’est une question qui revient souvent ces temps-ci : « J’ai écrit pas mal, je me sens prêt à franchir l’étape de la soumission voire de la publication, aurais-tu des conseils ? »

Ma foi, cela appelle une réponse soit très courte (laquelle est : « beeeeeeen… ») soit très longue (tout le rayon « technique d’écriture » d’une grande librairie américaine). Mais cela ne répond à rien (surtout la première) et l’on doit pouvoir cerner de meilleurs conseils fondamentaux à donner.

Que voici donc, au nombre de sept, parce que le sept, c’est l’alpha, c’est l’oméga, c’est mystique, ça fait genre vérité suprême révélée.

1. Écrivez un bon bouquin

C’est la base absolue. Ce qu’on va juger avant toute chose, c’est la qualité de votre texte, de votre histoire, de vos personnages, l’inventivité, le style, tout ce qui fait une oeuvre aboutie.

Voilà, c’est tout, salut, à la prochaine.

Non, plus sérieusement – ça me fait penser à une anecdote lue sur Facebook à propos d’un jeune DJ qui expliquait à un autre tout son plan marketing, son site web, sa marque, avant d’avoir réalisé la moindre mixtape. Le texte est la base. N’imaginez pas tous les à-côtés de la publication avant de l’avoir fini, peaufiné, relu, re-relu, réécrit, re-re-relu, puis finalement envoyé.

Pour travailler un livre, il y a quantités de conseils un peu partout, à commencer par les aides à l’écriture et la section Technique du présent site.

2. Peaufinez votre manuscrit (plus que ça)

Ça devrait aller avec le point précédent mais cela ressort tellement quand je parle à des éditeurs que cela mérite un point à part entière. Tu n’imagines pas, auguste lectorat (enfin peut-être que si, depuis le temps qu’on se connaît) la quantité de manuscrits illisibles reçus par les services : écrits en gothique, ponctués à l’avenant, orthographiés en SMS, etc.

Travaillez votre livre jusqu’à ce qu’il soit également irréprochable au niveau purement formel : aération, pagination, format, etc. La plupart des services de lecture des grands éditeurs rejettent les soumissions à la page 2 parce que c’est illisible. Ne faites pas le malin en croyant qu’une impression sur vélin vieilli au thé attirera une attention favorable. Cela attirera une attention, c’est certain, mais pas celle que vous espérez.

3. Respectez les règles (et connaissez votre place)

Corollaire du point précédent : les éditeurs qui acceptent des soumissions exposent en général clairement ce qu’ils demandent – relié ou pas, recto-verso ou pas, l’intégralité ou bien trois chapitres pour commencer, etc. Respectez ces règles comme votre livre de culte personnel. Ne pas les respecter est un moyen sûr de se faire refouler sans même une lecture. La plupart des éditeurs reçoivent des dizaines de manuscrits par semaine (voire par jour) ; ces règles existent pour leur faciliter la vie, selon leur mode de travail. Si vous ne respectez pas leur boulot, n’attendez pas qu’ils respectent le vôtre.

Ce qui va avec : laissez l’ego au vestiaire, voire, si possible, enfermé dans une malle en plomb verrouillée à double tour dans la sombre cave de vos ressentiments. En d’autres termes : taisez-vous. En cas de refus, apprenez à l’accepter gracieusement au lieu de râler envers l’éditeur (ce qui vous fait passer pour une diva) – voire, pire, sur Facebook (ce qui vous fait passer pour une diva auprès de l’éditeur ET de vos amis). Vous avez le droit de considérer qu’il a tort, mais le hurler ne changera rien, à part pourrir vos relations avec le monde. Passez à l’éditeur et/ou au projet suivant. Essayez de comprendre ce qui a coincé, dans le livre ou dans le ciblage de votre interlocuteur. Tirez-en des leçons. Puis lâchez prise.

4. Connaissez votre marché (et ciblez-le)

En fait, c’était le premier conseil qui m’est venu, tant il est ignoré, mais je m’en serais voulu de ne pas d’abord insister sur le texte. Néanmoins, c’est un point fondamental. Pour publier dans un domaine (la fantasy, le polar, le dinoporn), il convient de connaître ce domaine, et pas seulement son arsenal narratif, mais aussi son paysage économique.

Qui sont les acteurs importants ? Les compagnies, mais aussi les personnes ? Qui publie quoi ? Quels sont les moyens des uns et des autres ? Et surtout, qui est le plus susceptible de publier ce que je fais ? Là encore, vous n’imaginez le nombre d’erreurs de casting – des autobiographies envoyées à des éditeurs d’imaginaire, voire de la SF envoyée à des revues de fantasy pure (j’en recevais à l’époque d’Asphodale ; je redirigeais les meilleures vers Galaxies, mais vous ne pouvez pas compter là-dessus). Citons l’excellent Grimoire Galactique des Grenouilles réalisé par CoCyclics qui recense tous les éditeurs d’imaginaire. La première chose à faire une fois qu’on a un manuscrit réellement terminé, c’est – eh oui – une étude de marché. Aujourd’hui, un jeune auteur qui veut publier n’a pas le droit de dire « mais je ne sais pas chez qui ».

5. Évitez les projets casse-gueule (pour l’instant)

Okay. Vous avez une grande oeuvre, genre un immense univers de fantasy qui couvre plusieurs millénaires d’histoire avec des passerelles entre tous les textes et une lente évolution de l’univers et… heu…

Bon. Évitez de dire à un éditeur putatif pour votre premier projet « Ceci est le premier volume d’une décalogie ». Désolé d’être lapidaire, mais c’est un risque trop vaste à votre stade. Vous êtes : 1) jeune auteur 2) francophone 3) avec une série en projet. Je suis navré, mais ça fait au moins une tare de trop, sachant qu’un éditeur va miser de l’argent et du temps sur vous pour vous amener à la publication et faire connaître votre travail. Il y en a une dont vous ne vous débarrasserez en principe jamais (francophone) et une autre à laquelle vous ne pouvez rien pour l’instant (jeune) donc essayez de mettre toutes les chances de votre côté. Gardez vos projets ambitieux sous le bras – l’expérience que vous aurez acquise, en plus, vous aidera à mieux les servir par la suite.

Après, il n’est jamais exclu que vous soyez purement génial, sans rien à apprendre, et que votre décalogie soit prise d’entrée avec une avance pharaonique. Je vous le souhaite ! Mais il est toujours plus sûr de partir du principe qu’on ne l’est pas.

6. Faites-vous peut-être la main sur des nouvelles

Cela n’a rien d’obligatoire, mais c’est une idée à envisager. Écrire un roman est évidemment une entreprise de longue haleine, qui a son propre ton, son univers. Quand on fait ses premières armes, la nouvelle permet de dominer plus facilement la dynamique de la narration, de s’essayer à quantité de genres, à se mesurer au retravail… Et évidemment de se mesurer à la concurrence, auteurs professionnels, voire grandes stars mondiales. C’est très formateur. Et en cas d’échec, il est plus facile de se remettre en selle.

7. Montrez votre motivation

Cela ne vous garantira évidemment pas d’être pris, mais posez-vous une question simple : au travail de qui prêterez-vous le plus attention, à celui qui a montré son investissement dans son projet, dans une communauté locale autour d’actions autour du livre, pour la promotion des genres qu’il aime – ou bien au parfait inconnu ? Le parfait inconnu est peut-être génial et sera pris du premier coup ; mais s’impliquer dans la littérature, se passionner pour elle, met en valeur vos compétences – et s’avère riche d’enseignements. Si votre personnalité est agréable, professionnelle, peut-être que les fées de l’édition se pencheront avec un soupçon de bienveillance supplémentaire sur votre berceau – parce qu’on vous sait à présent fiable et de bonne volonté. Encore une fois, cela ne garantit rien, mais se présenter sous son meilleur jour, dynamique, motivé, ne peut pas faire de mal. 

Et puis, de toute façon, cela ne vous coûte rien – il s’agit déjà de ce que vous aimez, non ?

2019-08-28T21:37:34+02:00jeudi 9 juillet 2015|Best Of, Technique d'écriture|32 Commentaires

Inscrivez-vous à la masterclass écriture des Imaginales 2015 – « Du manuscrit à la publication »

Affiche Gregory Deiaunay

Affiche Gregory Deiaunay

Important achtung warning annonce : le festival des mondes imaginaires d’Épinal, les Imaginales, a lieu en fin de mois (site). Depuis quelques années, l’événement propose une masterclass autour du métier de l’écriture, de la technique aux réalités professionnelles, animée par Jean-Claude Dunyach et ton humble serviteur, auguste lectorat (pour les nouveaux venus, c’est moi, ça, hein). Cette journée de formation est bien entendu ouverte à tous, quelle que soit l’expérience de la pratique de l’écriture ; ce qui compte, c’est l’envie.

La masterclass change légèrement cette année de formule. Se déroulant sur une journée pleine (et dense !), elle abordera la thématique « Du manuscrit à la publication » : commencer approcher la pratique professionnelle de l’écriture ?

Après quelques discussions avec les festivaliers, sur les réseaux sociaux, il me faut insister sur le point suivant : inscrivez-vous sans tarder, car les places sont limitées, et l’expérience prouve que la formule évolue toujours. Ne vous dites pas « boeh, je verrai l’année prochaine », car il n’est pas dit que la formation qui vous fait potentiellement envie l’année sera la même l’année n+1.

De quoi s’agit-il plus en détail ? Voici l’annonce postée sur le site du festival, et toutes les modalités pour vous inscrire.

Notre objectif : vous aider à franchir l’échelon professionnel

Cette journée d’échanges et d’enseignement (mercredi 27 mai 2015) vise à armer les jeunes auteurs pour la transition de l’écriture vers la publication : comment passe-t-on de l’envie d’écrire au métier d’écrivain ?

Les sites, livres et forums d’aide à l’écriture se sont multipliés au cours des dix dernières années : il est aujourd’hui plus facile que jamais de travailler sur un livre. Mais comment l’achever, puis l’amener au meilleur niveau de qualité possible ? Comment se corriger, s’améliorer ? Comment, et pourquoi le présenter à un éditeur ? Et l’économie du livre, comment ça marche exactement ?

Passer du statut d’amateur passionné à celui de jeune professionnel de l’écriture, voilà l’ambition de cette journée de formation, à travers des thèmes d’intervention et de débats tels que : approcher l’écriture en songeant aussi au public sans sacrifier le cœur de son histoire ; savoir se lire avec recul pour parfaire son manuscrit ; les relations avec le monde éditorial ; la rémunération des auteurs…

Cette journée de formation est destinée à ceux qui se sont lancés dans la rédaction d’un livre, voire l’ont terminé, et pensent à l’étape suivante, la publication professionnelle ; mais aussi à ceux qui ont envie d’écrire des histoires, et désirent acquérir une vision panoramique du monde de l’édition.

La journée s’articule autour de présentations sur un sujet donné (l’attitude professionnelle, les corrections, les relations avec le monde éditorial…), suivies de longs temps de discussion et de débat autour des difficultés rencontrées au quotidien par les stagiaires.

Inscrivez-vous au plus vite à cette journée de formation aux places limitées : une chance unique proposée par les Imaginales de propulser votre envie de raconter à un niveau supérieur !

Inscriptions et renseignements : info@imaginales.com / 03 29 68 51 86

2015-05-02T18:56:57+02:00lundi 4 mai 2015|À ne pas manquer, Technique d'écriture|10 Commentaires

Je veux écrire. Je démarre par où ?

bad-advice-675x900C’est une question qui revient souvent, et qui paraît simple en apparence, mais à laquelle on trouve soit des réponses très vagues (« mets-toi à écrire, travaille, fais des efforts, mange macrobiotique ») soit très commerciales (« facile ! achète mes cours par correspondance qui feront de toi un auteur de best-seller, seulement 99,99 € ! »). Il faudrait donc tenter de taper entre les deux :

Saurais-tu me conseiller des formations sur l’écriture ? Globalement j’ai des idées, je connais un peu mes points forts et faibles, mais je n’arrive pas à structurer mon projet, peut-être parce que je ne me suis pas encore posé les bonnes questions. Ou un bouquin ?

Si je prends la liberté de reformuler : je débute (ou presque), je veux écrire (commencer / finir mon projet), je prends le problème par quel bout ?

Il s’agira donc ici, pour les grands débutants, de proposer quelques éléments de base, de toutes premières pistes pour pousser au-delà de la simple écriture « pour le tiroir ».

L’art est un mélange de technique et de tripes

Dès lors qu’on veut écrire pour d’autres que soi, on cherche à être compris. Dès lors que l’on cherche à être compris, on cherche à communiquer des intentions (narratives). Dès lors que l’on cherche à communiquer des intentions, il convient de connaître le langage dans lequel on s’exprime. En littérature, ce n’est pas seulement l’orthographe et la grammaire, ce sont aussi, beaucoup, les codes de la narration (qui ne sont en rien des règles, mais permettent de comprendre les attentes d’un lecteur et donc de maîtriser son récit).

Tout art est un équilibre entre :

  • La technique – la domination, disons, de son art, la maîtrise de son langage particulier, de manière à servir au mieux les intentions, les effets que l’on vise à obtenir ;
  • Les tripes – je n’aime pas le terme d’inspiration, qui donne l’impression d’un processus évanescent. Les tripes, c’est l’originalité de sa propre voix ; l’émotion personnelle, le regard individuel sur le monde – tout ce qui fait qu’un auteur, quand il va chercher profondément en lui, est le seul à pouvoir dire ce qu’il a à dire, et joue potentiellement sa vie et son sang dans un texte, parce que ce qu’il a dit a de l’importance pour lui.

La techique se développe, se travaille, s’apprend, potentiellement avec un tiers (cours / atelier / livre / relecteurs / etc.). Cela s’enseigne aussi relativement bien.

Les tripes viennent avec le travail, la maturité, l’affinement du regard. En un sens, elles se « travaillent », mais ne se travaillent qu’à force d’écrire, de se casser les dents, d’apprendre de ses erreurs : c’est un mûrissement individuel.

La technique peut éventuellement atteindre un degré où l’on n’apprend plus grand-chose (comme un musicien virtuose finit par jouer sans trop de difficultés une grande partie du répertoire et plafonne s’il n’essaie pas de pousser plus loin). Les tripes s’apprennent pendant une vie entière et relèvent du parcours de chacun.

Travailler la technique donne de la structure, de l’unité aux tripes, et aide à affiner davantage leur expression.

Apprendre la technique ?

Qu’est-ce qu’on apprend, en gros, dans la technique ? Liste non exhaustive :

  • Construire un personnage
  • Maîtriser un rythme narratif
  • Affiner le style
  • Échafauder une intrigue intéressante
  • Gérer la tension
  • Etc.

Mais le plus important consiste à apprendre à se connaître soi-même pour employer les outils qui correspondent au mieux à sa façon de fonctionner.

kingwritingquoteApprendre seul

Il y a assez peu, en France, de ressources orientées sur l’approche pratique de l’écriture (même si cela évolue lentement), notamment dans la technique narrative. C’est un discours encore très anglo-américain, où les ressources sont légion : la moindre recherche Google livrera trois kilos de sites plus ou moins bien fichus. Être anglophone donne donc, clairement, un atout sur ce plan : l’approche est bien plus « mécaniste » qu’en France. (Une approche à consommer toutefois avec modération.)

Cependant, on commence à avoir pas mal de choses en français d’intérêt. Je vais forcément citer mes propres articles sur l’écriture, qui visent justement ce but (il faut bien que ça serve !) + les présentations des ateliers et masterclasses réalisés par Jean-Claude Dunyach et moi-même dans le cadre des Imaginales, téléchargeables ici. Cela fait déjà pas mal de matériel, qui donnera quantité d’autres pistes pour aller plus loin.

Question livres francophones, la porte d’entrée incontournable me semble être Comment écrire des histoires d’Élisabeth Vonarburg (chroniqué ici). On pourra enchaîner un peu plus tard avec Mes Secrets d’écrivain d’Elisabeth George (chroniqué ici).

Point de vue anglophone, le pendant du Vonarburg me semble être The Art of Fiction de John Gardner (non traduit), chroniqué ici. Le podcast Writing Excuses est un must (parmi les intervenants réguliers, on trouve Brandon Sanderson, devenu un des plus grands noms de la fantasy US).

Et ensuite ? La première règle de Robert Heinlein est : tu dois écrire. Il faut s’y mettre – s’exercer, se faire lire, recueillir des commentaires, apprendre à se relire, et puis recommencer.

Apprendre avec d’autres

On voit apparaître timidement des masters d’« écriture créative » (suscitant la controverse) alors que c’est très accepté outre-Atlantique. Difficile d’en recommander, vu que je ne les connais pas, mais l’apprentissage de la technique dans un cadre universitaire ne me semble pas aberrant.

Beaucoup plus courant en France : les ateliers d’écriture (virtuels, par forum par exemple, ou en personne). Se répartissent grosso modo en deux grandes catégories :

  • Les ateliers « communautaires » – tout le monde est au même niveau ou presque, tout le monde veut s’entraider et progresser. Chaque participant peut proposer des exercices à tour de rôle, et/ou chacun se lit et commente son ressenti sur les textes des autres. Ils peuvent s’apparenter à des cercles de lecture, où l’on lit sa propre production aux autres dans le but d’avoir des premiers retours. Ils sont rarement payants (ou du moins, ils ne dépassent pas la cotisation annuelle à une association).
  • Les ateliers « encadrés » – un responsable d’atelier, parfois quelqu’un du métier, prépare les séances, donne des exercices d’écriture. La lecture est là aussi souvent publique, avec un retour des participants, mais le maître de séance, en principe plus expérimenté, aide à cerner les failles et propose des axes d’amélioration, à la manière d’un travail éditorial. La version la plus poussée de cette formule est la masterclass, où l’on s’approche du cours magistral. Le prix peut être là bien supérieur, et très variable (allant de l’investissement bien placé à l’arnaque pure).

La qualité d’un atelier d’écriture est directement liée à la bonne volonté des participants, et, dans le cas d’un atelier encadré, à celle de son responsable. Un atelier peut constituer une expérience vraiment enrichissante et instructive comme un gâchis de temps et d’argent. Prudence, donc, en particulier si le responsable de votre atelier encadré fait payer ses séances 250 € par personne et qu’il n’a jamais publié que deux livres à compte d’auteur en 1982.

En conclusion

Ce tour d’horizon très sommaire n’a pour vocation que d’aider au tout premier pas ; d’ailleurs, auguste lectorat, n’hésite pas à citer en commentaires tes ressources favorites pour aider les débutants. Le plus important (que je martèle en atelier d’écriture), c’est qu’apprendre à écrire, c’est apprendre à se connaître. Pour savoir :

  • Ce qui a véritablement du sens pour soi à dire, à mettre en scène, pour ne pas oublier le plaisir et découvrir sa propre originalité, son propre discours ;
  • La façon dont on a, soi-même, besoin de travailer pour déverrouiller sa créativité (tous les moyens sont bons – tant qu’ils restent dans le cadre de la loi, hein)

Tout apprentissage doit passer par ces deux filtres, car il n’y a pas de vérité universelle en art. C’est bien pour ça qu’on continue à en faire après plusieurs millénaires.

2018-07-17T16:55:56+02:00lundi 26 janvier 2015|Best Of, Technique d'écriture|53 Commentaires

Il y a photo

Auguste lectorat, tu as peut-être remarqué qu’il me prend la folie des grandeurs; m’imaginant là-haut, aux côtés de Robert Doisneau et Bob Talbot, l’oeil sur l’horizon (ou dans l’objectif), et cheveux au vent.

Ah non. Ça, c’est plus possible.

Bref, j’apprends toujours tranquillement la photographie, qui a ceci d’agréable qu’elle est probablement l’activité créative la plus directement opposée à l’écriture : quand celle-ci nécessite des semaines, voire des mois pour éclore, de même pour la « consommer », la photographie est globalement instantanée dans sa réalisation comme dans sa consommation (si l’on exclut le post-traitement). Je ne parle pas ici de l’apprentissage, qui reste l’oeuvre d’une vie, quelle que soit l’activité, et je ne prétends pas non plus me poser en professionnel dans le cas des images. Mais comme j’ai la chance d’approcher parfois des paysages ou des animaux rares, j’essaie d’en faire profiter la compagnie, et comme j’aime bien faire les choses bien, autant y mettre de l’énergie et réserver une place convenable à cette activité.

Donc, instant logistique :

  • Toutes les photos sont à présent rassemblées dans une catégorie du blog (j’y crois pas comment j’ai été créatif sur le nom). Catégories qui auraient besoin d’un bon lifting, d’ailleurs, mais ce sera pour une autre fois.
  • Le tout étant rassemblé sur Flickr, avec une nouvelle image par semaine.
  • Je tente aussi – parce que c’est à présent possible – le profil personnel sur le site du National Geographic. Je vous ai dit que j’avais la folie des grandeurs. En première approche, je trouve la communauté très sympa, et beaucoup plus active que les autres réseaux photographiques. À voir si la sensation se confirme. Si vous y êtes également, n’hésitez pas à faire signe ! 

nationalgeo

2014-06-04T11:29:18+02:00jeudi 29 mai 2014|Dernières nouvelles|4 Commentaires

Pensées aléatoires : les grands garçons

(Merci à Nico)

(Merci à Nico)

Toujours un peu charrette, alors je regarde dans ma boîte à malices ce que je pourrais bien sortir. Suis retombé sur cette réponse, qui date de juin 2008 (ça nous rajeunit pas), à l’invective suivante vue sur une liste de diffusion littéraire professionnelle :

Ceci étant, la fantasy est un milieu assez spécial, qui abonde en grands garçons post-estudiantins ayant appris l’anglais dans les règles de Donjons et Dragons et qui rêvent de gagner (passer ?) leur vie dans ce monde hors normes, alors pourquoi pas traduire ? (Je grossis un peu le trait bien sûr).

Grossir le trait, c’est rien de le dire.

D&D n’est pas une plus mauvaise source d’apprentissage de l’anglais que James Joyce, surtout pour un adolescent désoeuvré qui aura une motivation pour lire le premier peut-être absente – avant un âge plus mûr – pour le second. Cela le poussera à la meilleure pratique de la langue qui soit: lire, lire sans arrêt, inférer le sens des mots, etc.

De ma génération, je connais justement bon nombre de « garçons post-estudiantins » qui ont appris l’anglais à un âge précoce et qui font aujourd’hui d’excellents professionnels reconnus de la littérature et de la traduction, en indépendant ou en entreprise.

Je trouve ce genre d’image d’Épinal limite insultante; on a déjà assez droit aux clichés « la fantasy, la SF, c’est une littérature d’ados attardés » de la part d’un grand public aux belles intentions, j’avoue que j’espérais bien y échapper parmi cette assemblée éclairée. La fantasy, ce n’est pas que LanceDragon, c’est aussi Robin Hobb, GRR Martin, Jeffrey Ford et j’en passe des auteurs à la plume magnifique, de vrais conteurs avec une finesse psychologique et stylistique souvent inégalée.

Alors, oui, le trait est grossi, c’était dit, mais je pense que vous ne mesurez pas combien ce rabâchage est usant.

2014-02-04T20:01:22+01:00jeudi 6 février 2014|Humeurs aqueuses|26 Commentaires
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