La Route de la Conquête sortira en numérique le 3 NOVEMBRE

Couv. François Baranger

Couv. François Baranger

Un petit retard dans le planning : la version numérique de La Route de la Conquête, initialement annoncée pour l’été, entrera en gare v… heu… sortira en novembre. Il y a eu quelques petits soucis quelque part – je ne sais pas trop où, mais peu importe : ce qui compte, c’est qu’elle sorte bel et bien, et ce sera en novembre. Novembre. Ai-je dit que ce serait novembre ? Mise à jour du 6 octobre : le 3 novembre, pour être précis. 

Pour mémoire, La Route de la Conquête a reçu le prix Exégète en 2015 ; il y figure un court roman et quelques nouvelles idéales pour un tour d’horizon de période dite de l’Empire d’Asrethia. Si vous avez lu Port d’Âmes, c’est une bonne manière de découvrir la réalité de cette époque abordée sous l’angle mythique dans le roman ; si vous avez lu « Le Plateau des chimères » (dans l’anthologie des Imaginales Fées et Automates), La Route de la Conquête explore de façon plus vaste cette période ; si vous avez aimé La Volonté du DragonLa Route de la Conquête est un peu dans le même esprit ; et si vous n’avez rien fait de tout ça, vous êtes quand même ici, et c’est sympa de votre part.

Pour savoir plus avant de quoi il retourne :

La Route de la Conquête (livre)

P. S. : novembre.

2016-11-08T11:27:11+01:00mercredi 28 septembre 2016|À ne pas manquer|8 Commentaires

Des léviathans sonores

Un très, très joli cadeau qui m’est arrivé tout récemment :

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La bande-originale inspirée de la trilogie Léviathan, réalisée par Jérôme Marie, est à présent complète ! Trois beaux volets de musique évocatrice, épique, intimiste qui va de la glace des pôles aux motels des autoroutes californiennes. Je remercie très, très profondément Jérôme Marie pour tout son travail, le temps et le talent qu’il a consacrés à donner une vie sonore et symphonique à la série !

Pour mémoire, tout est disponible sur le site du compositeur pour seulement 3 € par partie – soit un peu moins qu’un CD pour l’intégralité ; elle est pas belle la vie ? Et, comme il l’a annoncé lui-même, nous préparons une édition ultra-super-duper-collector des CD signés, qui n’existera qu’à dix exemplaires. J’en reparlerai ici !

Un autre cadeau un peu plus insolite, mais, de l’infiniment grand au tout petit tout mignon, la concordance est trop belle :

https://www.instagram.com/p/BKlbbmcBrd8/

Je ne suis pas en train de faire des trucs que la morale réprouve à ce pauvre petit torke, c’est un ocarina venu tout droit de Chine. (Un orquarina ?)  Je n’ai plus qu’à apprendre la berceuse de Zelda pour être crédible…

2016-11-18T10:05:43+01:00jeudi 22 septembre 2016|À ne pas manquer|1 Commentaire

Joanne Harris sur le piratage (en français)

lolcat-planning-demiseJoanne Harris, en plus d’être une romancière reconnue, est extrêmement active et fort intéressante sur Twitter. Elle propose régulièrement des séries de tweets sur l’écriture, l’édition, et, vendredi dernier, décortiquait l’argument fallacieux que le piratage n’est pas du vol, c’est de la copie. Histoire de varier les interlocuteurs, et comme j’ai déjà parlé du sujet suffisamment récemment, je lui ai demandé si elle accepterait que je traduise une sélection de ses tweets (vu que nous sommes visiblement d’accord). Accord obtenu, les voici. 

  • L’argument sur le piratage douteux du jour : « Ce n’est pas du vol, c’est de la copie. » *se cogne la tête contre le bureau*
  • « Je vois que tu achètes une Rolex. Et si je te donnais cette copie gratuitement ? » « Vous embauchez quelqu’un ? Et si je faisais ce boulot gratuitement ? »
  • « Vous avez mis vos identifiants bancaires en ligne ? Et si je les copiais, juste pour les envoyer à toutes mes connaissances ? Ce ne serait pas du vol, juste de la COPIE. »
  • « Je sais que j’ai dîné dans votre restaurant, puis que je suis parti sans payer, mais cela vous fera de la BONNE PUBLICITÉ. Cela vous aidera à VENDRE davantage de places. »
  • « Je sais, j’ai volé cette bouteille de vin, mais, bon sang, elle était BIEN TROP CHÈRE pour que je l’achète. »
  • « Ouais, alors ce que je vais faire, c’est manger ce steak, et si je le trouve vraiment bon, je le paierai. Sinon, je l’effacerai, tout simplement. Ça va, non ? »
  • « Tout ce que j’ai fait, c’est copier votre travail et le donner gratuitement. Ce n’est quand même pas ma faute si vous avez mis la clé sous la porte. »
  • Peut-être y a-t-il une idée ici. Voler nécessite une once de réflexion. Les pirates ne sont pas des voleurs. Ce sont des PARASITES.
  • « Je sais que c’est votre boulot, tout ça, mais avez-vous lu ce site web ? Il explique pourquoi je m’y connais TELLEMENT mieux que vous sur le sujet. »
  • Pirater des livres, c’est comme fabriquer de la fausse monnaie. Au bout d’un moment, la valeur se perd. On finit par travailler pour rien. Tout s’effondre.
  • Ici, un troll sur Twitter accuse une diplômée de Cambridge d’ « anti-intellectualisme » PARCE QU’ELLE ESSAIE DE PROTÉGER LES AUTEURS du piratage…
  • « Les Kindles sont chers, alors les livres électroniques devraient être gratuits » revient à dire « j’ai acheté ma maison, alors je peux voler les plantes de mon voisin. »

… Et comme il est difficile (et un peu inutile) de vouloir rester hors de la discussion sur un réseau social, j’ai dévié avec l’utilisateur @adrianshort sur le rôle de l’économie. Je retranscris cette discussion, car elle permet de couper court à un autre argument fallacieux : celui que l’économie doit changer pour légitimer la pratique (ça ne choque personne qu’on s’attaque pour cela à l’un des plus faibles secteurs).

LD : Si seulement les gens mettaient autant d’énergie à justifier le piratage qu’à, mettons, combattre la faim dans le monde. […]

A. S. : Peut-on jamais justifier de voler à manger ou bien NE VOLE PAS À MANGER représente un principe applicable quelles que soient les circonstances ?

LD : Tu ne mourras pas de ne pas voler un livre, mais si tu le fais, l’auteur en mourra peut-être, lui. C’est si difficile à comprendre ?

A. S. : Bien sûr, parce que c’est absurde. Une vente de livre ne transforme pas un auteur affamé en auteur viable.

LD : Le manque massif de ventes nuit à l’économie. C’est aussi pour ça qu’on paie pour se nourrir. Il faut que les gens gagnent leur vie.

A. S. : D’un point de vue économique plus vaste, ces dépenses se sont décalées ailleurs, comme l’équipement informatique et l’accès à Internet. L’économie ne va pas plus mal si les gens achètent de la bière plutôt que des livres, en tout cas pas dans le sens que tu entends.

LD : Alors construis-nous une façon de gagner nos vies avec ta science économique. Pour l’instant, le modèle ne satisfait personne. Je suis tout à fait pour une économie idéale, sincèrement. Mais les gens ont besoin de gagner leur vie AUJOURD’HUI, pas dans une économie idéale.

A. S. : Un revenu de base universel créerait une énorme différence pour les créatifs aux revenus modestes. Je suis pour.

LD : Moi aussi ! Mais on n’y est pas encore, et le monde doit fonctionner dans l’intervalle. Donc, pas de piratage.

A. S. : Les éléments montrant que le piratage empêche quoi que ce soit de fonctionner, d’un point de vue économique ou autre, sont rares.

LD : C’est certainement pour cela que 90% des créatifs martèlent le contraire. Pourquoi seraient-ils au courant ; ce n’est que leur gagne-pain. D’innombrables articles le montrent. Mais je vois que je t’en convaincrai pas.

Depuis le dernier article sur le piratage, qui a soulevé beaucoup d’ire (pour un article plutôt écrit sur un ton chaleureux), il est apparu quelque chose de très net : les maisons d’édition indépendantes, qui proposent des livres électroniques à prix plancher, sans protection, avec un travail de qualité, se font pirater comme les autres. Donc, l’argument pseudo-éthique « je ne pirate que les maisons trop chères / qui verrouillent leurs fichiers / les grands groupes » ne tient absolument pas. Qu’on n’essaie donc pas de justifier le piratage avec une espèce de vague attitude de chevalier blanc ; c’est la démonstration par l’exemple que ce n’est que de la poudre aux yeux, et une malhonnêteté de plus. On pirate parce qu’on pirate, et dès qu’on consomme une œuvre de la sorte, on triche, point.

Si vous souhaitez la source de l’ensemble des échanges :

2016-09-19T23:24:37+02:00mercredi 21 septembre 2016|Le monde du livre|Commentaires fermés sur Joanne Harris sur le piratage (en français)

Retrouvons-nous ce week-end à Cidre et Dragon en Normandie !

Ce week-end a lieu Cidre et Dragon, un grand et vénérable festival de fantasy (10 ans d’existence !) qui célèbre le genre sous toutes ses formes, littérature, arts de la rue, jeu de rôle, etc.

cidre-et-dragon-2016

J’y serai samedi et dimanche : j’espère qu’on s’y retrouvera en nombre, avec costumes et dragons ! Cela s’annonce comme une superbe fête de l’imaginaire à ne pas manquer. Cela se déroule en Normandie, à mi-chemin entre Caen et Cabourg, sur la côte : toutes les informations pratiques sont ici.

Une petite bande-annonce :

À ce week-end !

2016-09-14T13:32:59+02:00lundi 12 septembre 2016|À ne pas manquer|Commentaires fermés sur Retrouvons-nous ce week-end à Cidre et Dragon en Normandie !

Procrastination, un podcast sur l’écriture en 15′ avec Mélanie Fazi et Laurent Genefort

procrastination-logo-seulJoie ! C’est un projet secret avec lequel nous avions un peu teasé, mes camarades et moi : et Elbakin a annoncé l’information, donc nous allons en parler.

Le 15 septembre, avec les sublimes Mélanie Fazi et Laurent Genefort, nous lançons un podcast sur la technique de l’écriture et sur le métier au sens large. Il sera résolument tourné vers la narration et ses techniques, de la conception à la publication en passant bien évidemment par la rédaction, l’édition, etc. et chaque épisode ne durera que quinze minutes (afin de ne pas trop abuser du temps de l’auditeur… et de délivrer un maximum d’informations pour un minimum d’emballage). La formule est clairement inspirée de l’excellent Writing Excuses, podcast américain dirigé par Brandon Sanderson (nous n’avons aucun lien avec eux, mais ils nous ont gentiment permis de construire notre propre podcast en partant de leur exemple).

Le podcast est hébergé par le site de référence Elbakin, bien connu des fans de fantasy, qui nous prête sa plate-forme (et que nous remercions au passage !). Il sera évidemment disponible sur tous les agrégateurs habituels. Nous avons prévu une minimum de 20 épisodes sur l’année pour commencer, sachant qu’ils sortiront toutes les deux semaines, le 1er et le 15 de chaque mois. 

Voici les thèmes des cinq premiers : 

  1. La technique en questions
  2. Où allez-vous chercher tout ça?
  3. Les trois genres de l’imaginaire
  4. C’est pas la taille qui compte
  5. Question de point de vue

Nous espérons que vous apprécierez ce nouveau projet – en tout cas, nous nous amusons beaucoup pour l’instant et nous commençons à trouver un bon rythme. Nous serons très attentifs aux réactions des auditeurs, donc n’hésitez pas à nous transmettre vos questions sur l’écriture et vos avis sur le podcast et son contenu.

Pas d’inquiétude pour le contenu de ce blog, ici ; cela ne changera pas grand-chose (d’autant plus que certains sujets se prêtent mieux à des articles écrits et/ou des illustrations visuelles), à part que je communiquerai bien entendu aussi sur Procrastination au moment de la sortie d’un nouvel épisode. Les deux supports ne se marcheront pas sur les pieds – la raison la plus immédiate étant que Procrastination reflète un débat entre nous trois (avec parfois trois points de vue assez divergents sur la technique, ce qui est tout l’intérêt de la chose), mais qu’ici, c’est moi tout seul, et que je suis certes plus cinglé que toi, mais au point de ne pas être d’accord avec nous-mêmes. (sic)

Lire la news d’Elbakin, et discuter de cette annonce sur le forum d’Elbakin.

Le petit jingle que j’avais publié il y a un mois correspondait en fait à ce projet. Encore une fois, dès publication, n’hésitez pas à nous transmettre vos retours. (Nous verrons à l’usage s’il y a une façon pratique de centraliser le feedback, mais j’imagine que le plus simple sera le forum d’Elbakin.)

Avanti ! 

2016-09-19T18:16:13+02:00lundi 5 septembre 2016|À ne pas manquer, Technique d'écriture|2 Commentaires

Écrire, c’est choisir

Y a des auteurs comme ça. Si.

Nous avons passé six semaines à commenter les célèbres règles de Robert Heinlein sur l’écriture et, la dernière fois, j’avais promis de proposer une règle bonus – la mienne. Il ne s’agit pas d’oser me comparer au maître, mais comme nous sommes dans l’élan de parler de maximes brèves et lapidaires, le moment n’est pas trop mal choisi ; voici ma proposition :

Écrire, c’est choisir. 

Je me la suis formulée ainsi car c’est l’une de mes causes principales de procrastination sur un projet. Les potentialités d’un livre en construction sont toujours splendides et infinies. L’objet est toujours parfait en esprit ; il couvre tous les thèmes souhaités avec adresse, il propose une intrigue haletante, des personnages complexes, il est inventif, bref, il constitue un pavé de marbre blanc supplémentaire sur ce chemin étincelant qui conduit au prix Nobel (ainsi qu’au luxe de se garer en double-file sans risquer de contravention) (non ? C’est pas dans le prix ? Mais alors, quel intérêt ?).

Seul problème : à moins d’écrire des sonnets, un récit est long. Une nouvelle peut se lire en une session, mais il est peu probable que ce soit le cas pour son écriture ; ne parlons même pas d’un roman. Par conséquent, l’écriture d’un livre est sujette aux fluctuations d’humeur, d’énergie, et c’est nécessairement un processus saucissonné en 70 jours environ pour le premier jet (en admettant une vitesse d’écriture à 15 000 signes quotidiens et un bon pavé). Il est impossible de contrôler tout le processus dans ses moindres détails sur le premier jet – ce n’est d’ailleurs pas le but de cette phase de l’écriture. Le récit va prendre son propre élan, sa propre dynamique au fil de la progression ; certains thèmes vont se révéler, d’autres risquent de glisser au second plan. Certains personnages vont se révéler moins complexes qu’espéré, d’autres davantage. C’est normal, car même pour un écrivain structurel (dont ton humble serviteur, auguste lectorat, fait partie), c‘est l’écriture à proprement parler, l’accomplissement du voyage aux côtés des personnages, qui façonne réellement le livre.

Cela signifie qu’à un moment – et idéalement le plus tôt possible – il faut lâcher prise sur les attentes et les espoirs. Faire de son mieux, comme toujours, mais accepter que le livre ne sera peut-être pas forcément tout ce que l’on espère – Bridget Jones dans l’espace avec des batailles spatiales épiques intégrant une réflexion sociale à la Gattaca et métaphorisant Critique de la Raison Pure. (Si vous y arrivez, j’achète direct.) L’histoire passe avant toute autre considération, et cela signifie que certaines exigences de rythme, de cohérence, voire de taille pure du livre, pourront dicter de laisser des pans de côté ou, du moins, qu’il faudra les laisser s’atténuer. Mais à un moment, pour avancer, pour seulement progresser dans le premier jet et cerner ce qu’est ce fichu livre au bout du compte, il faut l’écrire – et pour y arriver, il faudra faire des choix, ou accepter ceux qui s’imposeront en suivant la dynamique du récit. La simplicité n’est pas une mauvaise chose ; less is more.

Écrire, c’est choisir.

La bonne nouvelle, c’est qu’un livre, par sa longueur, sera toujours une œuvre un tant soit peu complexe offrant de multiples facettes. Si les personnages sont crédibles, le décor développé, le rythme réfléchi, alors une certaine densité de l’œuvre émergera de facto, née des choix effectués en amont. Ce ne sera pas forcément cette densité-là qu’on espère de prime abord, c’est possible ; l’expérience de l’écriture intervient au fur et à mesure, et l’on parvient de mieux en mieux à rapprocher le jet de l’œuvre de la cible visée initialement. L’idéal, c’est que le résultat reste motivant et excitant non seulement au bout du compte, mais aussi en cours d’écriture.

2019-06-07T22:42:51+02:00lundi 15 août 2016|Best Of, Technique d'écriture|11 Commentaires

Les cinq règles de l’écriture par Robert Heinlein (4) : Soumets ton travail sur le marché

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Rappel : cet article fait partie d’une série programmée sur les règles de l’écriture de Robert Heinlein. Introduction générale et sommaire

« Soumets ton travail sur le marché »

Okay, celle-là paraît un peu évidente, comme la première, non ? Pour écrire, il faut écrire, pour être acheté, il faut soumettre son travail ?

Eh bien, oui. Merci, fin de l’article, à la semaine prochaine.

Ha ha, que je suis plaisantin.

Avant même de parler de ventes, et de droits d’auteur pharaoniques entraînant des retraites dorées aux Seychelles (protip : ça n’arrive jamais), on soulève ici un autre point de blocage classique de l’écriture : montrer son travail à quelqu’un d’autre (a fortiori, quelqu’un qui pourrait le publier). Écrire strictement pour soi n’est aucunement condamnable et c’est un choix parfaitement compréhensible ; mais, dès qu’on parle de la confrontation avec le regard d’un tiers, on entre dans d’autres eaux. 

Il existe des auteurs qui souffrent d’un type de procrastination bien particulier : ils n’envoient jamais leur travail, par crainte du retour, par crainte de découvrir que leur travail ne serait pas vendable. Autant briser le suspense tout de suite : hélas, dans les premiers temps, il risque de ne pas l’être – cela s’appelle faire ses premières armes. Et, en règle très générale, ce n’est pas parce que ledit travail est trop audacieux, navré (ça arrive, mais tout le monde n’est pas Mark Z. Danielewski) – c’est parce qu’il manque des éléments qu’attendent les éditeurs et les lecteurs derrière eux, c’est-à-dire : une histoire, des personnages, du suspense, le tout rédigé sous une forme compréhensible. Il risque fort, à tout le moins, de manquer de « métier » – et cela s’apprend, mais cela ne s’apprend certainement pas en retardant perpétuellement l’envoi de la première soumission pour la rendre « parfaite » (voir les règles 2 et 3). Breaking news : aucune œuvre littéraire n’est parfaite. Pire encore, elles s’améliorent avec la pratique, imaginez un peu ! Alors, autant travailler.

Une fois l’œuvre terminée au mieux de sa compétence, il faut qu’elle parte, qu’elle sorte, il faut lâcher prise dessus, tout en poursuivant l’apprentissage. « Devenir auteur, c’est trouver un éditeur« , explique Jean-Claude Dunyach dans l’excellente présentation qu’il propose lors de la Masterclass que nous donnons ensemble aux Imaginales et dont le diaporama se trouve disponible sur ce même site – comme tout cela est bien fait, dis donc ! Je t’y renvoie céans, auguste lectorat.

Fort bien. Donc, j’envoie tous azimuts ma production ?

À mon humble avis : non, et c’est un sujet que nous avons déjà abordé en deux longues parties (Délais de réponse, de soumission, soumissions simultanées : partie 1, partie 2). D’autre part, par pitié, respectez les règles de soumission à la lettre.

  • Si un éditeur a momentanément fermé ses soumissions, n’insistez pas.
  • Si un éditeur demande trois chapitres plus synopsis et non le livre entier, envoyez trois chapitres plus synopsis : n’insistez pas.
  • Si un éditeur vous refuse un manuscrit, ne le renvoyez pas dans une version améliorée : n’insistez pas.
  • N’envoyez pas de manuscrit en recommandé, jamais.
  • Documentez-vous sur les éditeurs de votre domaine pour cibler vos envois à ceux qui sont susceptibles de prendre votre livre. (En imaginaire, nous avons de la chance, il existe le Grimoire Galactique des Grenouilles qui les recense.)

Vous n’imaginez pas le nombre de livres qu’un éditeur reçoit chaque semaine – et souvent mal ciblés. N’oubliez jamais qu’il est une entreprise, souvent débordé par la quantité de soumissions : facilitez-lui la vie et disposez-le au mieux pour découvrir votre œuvre. Suivez les règles qu’il demande. Elles vous déplaisent ? Allez ailleurs. Et ne vous imaginez jamais, au grand jamais, génial au point de pouvoir vous dispenser des règles qu’il exige. C’est le meilleur moyen d’être refusé d’entrée de jeu.

Comportez-vous en professionnel si vous souhaitez qu’on vous traite comme tel ! C’est l’indispensable point de départ du métier d’écrivain.

2019-06-07T22:43:14+02:00lundi 1 août 2016|Best Of, Technique d'écriture|1 Commentaire

Les cinq règles de l’écriture par Robert Heinlein (3) : Évite de réécrire, sauf si un éditeur te le demande

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Rappel : cet article fait partie d’une série programmée sur les règles de l’écriture de Robert Heinlein. Introduction générale et sommaire

« Évite de réécrire, sauf si un éditeur te le demande »

OK, alors celle-là est en général la plus mal comprise et/ou la plus controversée. Keuwâh ? Qu’est-ce à dire, tonton Heinlein me recommanderait-il de laisser mes premiers jets intouchés, de les lancer sur le marché à l’attaque du monde sans que je n’en aie changé une seule virgule ?

Non. Et l’interpréter comme ça, c’est un peu de la mauvaise foi pour justifier ta flemme de corriger, laisse-moi te le dire, vilain garnement.

Cette règle met en avant un autre blocage fréquent, après le fait de ne pas commencer et celui de ne pas finir, c’est celui de ne jamais déclarer qu’un travail est terminé. Ou, du moins, terminé au mieux de sa compétence. Aucune œuvre n’est achevée, auguste lectorat, aucune, et ce pour une raison très simple : la création de l’œuvre change le créateur. Elle aiguise son regard (ou bien le pousse au désespoir, mais restons dans un cas positif), elle le change. Et elle lui donne des leçons : elle le confronte à ce qu’il ignorait de lui-même, tant sur son inconscient que sur ses compétences et lacunes d’artisan. La réalisation de l’œuvre a peut-être comblé, ou exacerbé certaines de ces lacunes. Peu importe ; il vient un moment où il faut savoir reconnaître que le temps consacré à corriger, polir, améliorer n’entraîne que des altérations extrêmement marginales (voire contreproductives). Et que s’il existe des lacunes à combler sur cette œuvre, peut-être qu’une autre devra les enseigner. C’est là l’essence de la règle d’Heinlein.

La correction et l’amélioration font partie intégrante du processus d’amélioration d’une œuvre, dans le respect de l’enthousiasme d’origine (c’est capital), mais il convient aussi de savoir la lâcher. Et, une fois qu’elle est lâchée, déclarée « terminée au mieux de sa compétence », il faut passer à autre chose (à la suivante). L’éditeur pourra ensuite, peut-être, apporter son regard extérieur et professionnel pour la porter plus haut encore (s’il est compétent, mais c’est ce qu’on espère) ; mais il doit donc, pour ce faire, partir du meilleur effort de l’auteur. Et ce meilleur effort, l’auteur doit le déclarer et le clore en son âme et conscience. 

Rien n’exclut de revenir à une œuvre terminée, plus tard, pour la regarder sous un éclairage nouveau et peut-être la reprendre ; mais il faut avoir conscience, ce jour-là, que l’on va probablement réaliser une œuvre différente, une collaboration entre le présent et le passé, toujours parce que le créateur évolue, alors que l’œuvre demeure toujours un reflet d’un moment ou, en tout cas, d’un cheminement précis.

2019-06-07T22:43:21+02:00lundi 25 juillet 2016|Best Of, Technique d'écriture|9 Commentaires

Génération Critic (café littéraire à ImaJn’ère 2016)

Jean-Hugues Villacampa, Laurent Genefort, Laurent Whale, LD, Romain d'Huissier, Xavier Dollo (Thomas Geha)

Jean-Hugues Villacampa, Laurent Genefort, Laurent Whale, LD, Romain d’Huissier, Xavier Dollo (Thomas Geha)

Les éditions Critic sont entrées dans la deuxième moitié de leur première décennie ; le festival ImaJn’ère 2016, à Angers, proposait lors de cette table ronde de revenir sur le parcours de cet éditeur – libraire, des débuts prudents à la cadence professionnelle qu’on connaît actuellement, en passant par le succès national du Projet Bleiberg de David S. Khara.

Avec Laurent Genefort, Laurent Whale, Romain d’Huissier, Xavier Dollo a.k.a. Thomas Geha et moi-même, et une animation chaleureuse réalisée par Jean-Hugues Villacampa. Justin Hurle commente le débat sur le site Kulturopat.

2016-07-10T15:30:09+02:00mercredi 20 juillet 2016|Entretiens|Commentaires fermés sur Génération Critic (café littéraire à ImaJn’ère 2016)

Les cinq règles de l’écriture par Robert Heinlein (2) : tu dois finir ce que tu as commencé

Rappel : cet article fait partie d’une série programmée sur les règles de l’écriture de Robert Heinlein. Introduction générale et sommaire

« Tu dois finir ce que tu as commencé »

Fichtre, l’article précédent a généré une longue, longue discussion sur la nature exacte du talent et son rapport au travail. Je t’invite à y passer, auguste lectorat, même si ce n’était pas tellement le sujet (sur lequel il va falloir qu’on revienne ultérieurement).

Pour l’heure, la deuxième règle de Heinlein paraît elle aussi relever de l’évidence – comment soumettre quelque chose d’inachevé ? Mais en pratique, elle ne devient plus aussi évidente, et ce pour deux raisons :

  • Nous avons tous mille choses à faire au quotidien, et
  • L’écriture, j’insiste, c’est LONG (surtout dans le cas du roman).

Un projet est toujours fantastique est beau avant qu’on le commence. Il appartient au territoire du rêve, du possible et, par conséquent, il peut tout être à la fois ; il épouse par essence toute l’envergure des ambitions. L’attaquer n’est pas forcément le plus difficile ; l’enthousiasme est présent, un territoire entier à défricher s’étend devant soi, on se sent prêt à écrire son nom en lettres de feu sur le ciel vierge de nos ambitions, t’vois.

Mais « aucun plan de bataille ne survit à la rencontre avec l’ennemi », et le plus difficile est de poursuivre, quand l’enthousiasme perd son élan, quand on s’aperçoit d’un trou béant dans le scénario, qu’un personnage s’avère inutile ou inintéressant, quand on s’aperçoit, plus prosaïquement, que ce projet va prendre des mois et des mois pour être terminé – bref, quand les difficultés surgissent. Et davantage encore quand aucune solution évidente ne se présente, ou que l’on se rend compte qu’il faudra jeter 200 pages qui ne servent à rien. C’est là que la persistance doit prendre le relais. Écrire est un choix volontaire et l’on ne peut espérer que l’enthousiasme porte seul l’auteur (c’est merveilleux quand cela arrive, mais la majorité des écrivains avouent que cela ne suffit pas à mener à bien la majorité des projets – je sais, pour ma part, que je n’ai rien écrit sans me discipliner sévèrement, parce qu’un énorme fainéant rôde au fond de moi). On retombe sur la première règle, mais si clamer vouloir écrire sans jamais le faire est une maladie commune, commencer dix projets sans jamais en finir aucun en est une autre, plus retorse. 

Dans The Art of Fiction (chroniqué ici), John Gardner décrit le processus de construction d’intrigue comme une « rumination ». L’écriture s’inscrit forcément dans la durée (c’est peut-être l’art le plus « lent » à produire comme à recevoir ; sa réception, d’ailleurs, se déplie forcément de façon séquentielle dans l’esprit du lecteur, un mot à la fois, pour composer une image, une atmosphère, une action). Il faut trouver la façon d’apprivoiser cette temporalité, de l’accepter, de réserver les espaces qui permettent d’avancer sur le projet, page après page, vers la fin.

Est-ce à dire qu’il faut toujours finir un projet ? Même si on se retrouve à le haïr ? Non, bien sûr. Mais il convient d’identifier les causes de cette haine ; est-ce la difficulté qui cause l’écœurement, ou bien une prise de conscience sincère que l’envie a définitivement quitté le navire et ne reviendra pas ? Ce qu’il faut éviter à tout prix, ce sont les projets coincés « dans les limbes » sans décision claire à leur sujet, chercher des dérivatifs dans le démarrage de cent romans qui ne vont jamais nulle part, qui s’évaporent comme une rivière dans le désert. Certains auteurs travaillent sur plusieurs projets en parallèle, mais c’est leur méthode – et c’est assez rare, et il y a là une solide volonté d’achèvement (et la bibliographie pour le prouver).

On peut décider de laisser en plan un projet au profit d’un autre, jugeant qu’il faut davantage de maturation, ou qu’on bute contre un mur infranchissable pour l’heure (Port d’Âmes est resté en plan pendant près de huit ans, le temps que je sache comment retravailler cette histoire, écrite à une époque où je savais bien moins de choses sur le métier ; mais c’était une décision consciente de ma part. Quand le livre est sorti l’année dernière, il a fini réécrit à 75%). On peut décider d’abandonner définitivement un projet qu’on juge avorté. Mais il est capital que la décision soit consciente, et de tenir l’énergie, la discipline, la volonté (rayez la mention inutile) de finir quelque chose, à un moment, si possible avant le siècle prochain.

Hélas, je crois que c’est en se confrontant réellement à cette difficulté qu’on apprend une pierre angulaire du métier d’écrivain : finir.

2019-08-28T21:21:18+02:00lundi 18 juillet 2016|Best Of, Technique d'écriture|5 Commentaires
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