Rendez-vous la semaine prochaine à la convention de science-fiction !
Yatta ! Un immense merci à tous les bénévoles d’avoir tenu bon la barque en ces temps troubles. Malgré les difficultés de la période, la 47e convention française de science-fiction, qui se tient cette année à Orléans-la-Source, aura bel et bien lieu !
Je suis extrêmement heureux de faire partie des invités, car la convention, c’est une longue et belle tradition de l’imaginaire en France, qui fédère la profession et ses observateurs depuis des décennies. C’est réellement un honneur que de la découvrir ainsi.
J’y serai sur toute la durée de l’événement, soit du jeudi 20 au dimanche 23 août, avec un programme bien rempli :
- Jeudi 20 août, 15h30 : Débat sur la traduction, modéré par Claude Ecken, avec Sara Doke, Sylvie Denis, Jean-Daniel Brèque, Michel Pagel et moi-même ;
- Vendredi 21 août, 14h : Entretien, animé par Jérôme Vincent ;
- Vendredi 21 août, 20h30 : Jeux autour de la traduction, animés par Sara Doke ;
- Samedi 22 août, 11h : Conférence « Procrastination de l’écrivain » (dont le diaporama est d’ores et déjà disponible ici).
Je suis ravi également de proposer une réédition de « Faisabilité et intérêt zootechniques de la métamorphose de masse » dans l’anthologie de la convention, La Voie des voix :
Avec un magnifique sommaire : Sylvie DENIS, Sara DOKE, Laurianne GOURRIER, Noëlle MIRANDE, Jean-Daniel BRÈQUE, Thierry CARDINET, Stéphane DESIENNE, Claude ECKEN, Franck FERRIC, Alain GROUSSET, Chris T. GUERRE TAÏAUT, Bernard HENNINGER et Michel PAGEL. Dans un ouvrage qui ne sera réservé qu’aux membres de la convention. Héhéhé.
Encore merci et bravo à toute l’équipe qui a dû affronter des difficultés que je n’ose imaginer pour obtenir toutes les autorisations nécessaires et adapter la manifestation à la situation actuelle, en plus de toute la complexité d’organiser un événement.
On s’y retrouve donc la semaine prochaine, dès jeudi !
L’exposition virtuelle de la fantasy de la BnF traduite en anglais
La Bibliothèque nationale de France avait proposé l’année dernière une exposition virtuelle splendide, à la fois accessible et fouillée, sur la fantasy : avec un historique, un parcours ludique et un panorama allant jusqu’au paysage français contemporain (j’avais eu l’immense honneur de faire partie des auteurs soumis à la question).
Et maintenant :
Le site est traduit en anglais, ce qui représente un jalon d’envergure pour le travail sur nos genres à l’étranger. Merci, donc, à toute l’équipe de la BnF, d’œuvrer pour la recherche, et la littérature !
Formatage des dialogues : ce que les guillemets permettent et que les tirets interdisent
Aaaah, le formatage typographique des dialogues, le sujet favori des passionnés d’origami et de bateaux en allumettes. Un travail minutieux, obsessionnel, dont l’achèvement confère une impression d’équilibre et de complétude dans le monde.
Et qui suscite la terreur du reste du monde.
Moi, j’ai pas la patience pour les bateaux en allumettes, alors je typographie mes dialogues avec amour à la place. C’est pourquoi le présent blog comporte déjà pas mal de matériel sur le sujet :
- Apprenons à ponctuer des dialogues, 1 : mise en place
- Apprenons à ponctuer des dialogues, 2 : le formatage classique
- Apprenons à ponctuer des dialogues, 3 : le formatage moderne
Ainsi qu’un épisode de Procrastination : s03e18 – Ponctuer des dialogues.
À présent, en tant que Grand Prêtre Missionnaire de l’Église du Guillemets à Chevrons, dans les articles sus-cités, j’ai porté la Seule et Vraie Parole™ de la typographie des dialogues : les guillemets, say mieux, parce qu’on peut faire avec des trucs que l’usage des tirets seuls interdisent. (Voir les articles précédents pour voir de quoi qu’on cause exactement.)
Sauf que, comme on me l’a fait remarqué, je n’ai jamais vraiment prouvé la chose. Dont acte. Oyez, oyez, benedicite amor in excelsis guillemeto.
Idée reçue : les tirets donnent davantage de rythme que les guillemets
Déjà, c’est le premier argument des mécréants tenants du Tiret Cadratin seul : les tirets, par leur incitation à enchaîner les répliques, donneraient des dialogues plus rythmés et nerveux.
— Ah bon ?
— Effectivement.
— Mais comment ?
— Eh bien, un peu comme ça. On enchaîne, on enchaîne, dans le feu de l’action !
— C’est vrai que c’est drôlement rythmé !
— Les didascalies, c’est bon pour Marcel Proust.
Genre comme ça.
Sauf que… les guillemets ne changent rien à cet usage. Pour mémoire, on utilise aussi les tirets avec les guillemets, ils ouvrent et closent juste le dialogue.
« Ah bon ?
— Effectivement.
— Mais comment ?
— Eh bien, un peu comme ça. On enchaîne, on enchaîne, dans le feu de l’action !
— C’est vrai que c’est drôlement rythmé !
— Les didascalies, c’est bon pour Marcel Proust. »
Ça change donc que dalle au rythme.
Maintenant, si ça ne change rien, pourquoi s’ennuyer avec un signe supplémentaire ? Eh bien, parce que :
Les guillemets donnent davantage de flexibilité dans le rythme
« J’aime l’odeur du saucisson au petit matin », lâcha Bob en contemplant l’horizon. Les premiers feux de l’aube ourlaient l’océan. « Avec le café, c’est excellent.
— Ça marche aussi avec les fruits de mer », répliqua Plectrude en désignant son tourteau. Bob retint une grimace ; après tout, il s’efforçait d’être un pluraliste du petit-déjeuner. « Un peu de gorgonzola, et c’est un repas de champion. »
La force des guillemets, c’est la possibilité (et non l’obligation) d’entremêler les flux de la narration et du dialogue dans un rythme quasi-cinématographique et simultané. Mon exemple est un peu lourd en incises, mais c’est pour condenser les deux problèmes que pose l’usage des tirets seuls. Réécrivons donc ce passage avec :
— J’aime l’odeur du saucisson au petit matin, lâcha Bob en contemplant l’horizon. (Les premiers feux de l’aube ourlaient l’océan.) Avec le café, c’est excellent.
Le premier problème apparaît. Une partie de la didascalie appartient au dialogue, ce qui pousse la phrase isolée à devoir être identifiée par des parenthèses. Personnellement, en tant que fan d’origami et de bateaux en allumettes, je trouve ça moche. Mais bon, c’est parfaitement compréhensible. En pluralistes du petit-déjeuner, admettons donc.
Mais, beaucoup plus gênant :
— Ça marche aussi avec les fruits de mer, répliqua Plectrude en désignant son tourteau.
Bob retint une grimace ; après tout, il s’efforçait d’être un pluraliste du petit-déjeuner.
— Un peu de gorgonzola, et c’est un repas de champion.
See what I did there? Qui parle maintenant à votre avis, à la seconde réplique ?
Le formatage en tirets seuls impose que chaque réplique commence sur sa ligne seule. Par conséquent, selon le rythme du récit, le dernier personnage à avoir eu sa didascalie est implicitement considéré comme étant le nouveau locuteur, et de toute façon, l’alternance des tirets impose un passage de relais constant.
Si je veux écrire la seconde partie avec des tirets, je ne coupe pas à la nécessité de repréciser le locuteur :
— Ça marche aussi avec les fruits de mer, répliqua Plectrude en désignant son tourteau.
Bob retint une grimace ; après tout, il s’efforçait d’être un pluraliste du petit-déjeuner.
— Un peu de gorgonzola, reprit la jeune teutonne, et c’est un repas de champion.
Voilà pourquoi les guillemets permettent une économie de moyens et davantage de diversité de rythmes que les tirets seuls. Je me suis régulièrement confronté au problème en traduction. L’anglais utilise uniquement des guillemets (avec une typographie légèrement différent de la nôtre, mais c’est un autre problème) :
“English is awesome, innit?” she exclaimed. “Shakespeare spoke it, they say.”
“True that,” Bob said. “But then again, so does Kim Kardashian.”
Quand les consignes typographiques des éditeurs imposent, de leur côté, l’usage des tirets seuls, je vous garantis une chose : le rythme de l’original ne peut pas être entièrement conservé. Le cas précédent, où la réplique de Plectrude se trouve chassée à la ligne suivante, dictera en traduction l’ajout de précisions absentes de l’original. Sinon, c’est confus, voire on en arrive à des contresens.
-2 points de vie ?
Une image fréquente mais qui ne marche pas : si on se blesse, on peut pas déduire que la blessure est superficielle si on bouge encore normalement. Si on se blesse, même sans réelle gravité, on a MAL, donc de base, on ne bouge plus normalement. Sinon c’est une égratignure.
Départ de tous les réseaux sociaux
It was fun while it lasted.
En fait, non, c’était pas entièrement fun. Surtout les dernières années.
Je ne pensais pas prendre cette décision si vite mais au bout d’un moment, bon, ça n’est pas surprenant, j’ai quitté Facebook, je quitterai Twitter avec sous quinze jours, et tout ce qui est assimilé « réseau social ». (Le compte restera présent mais verrouillé pour éviter le cyber-squatting, et pour conserver l’accès à la messagerie privée qui reste un moyen de communication nécessaire pour certains contacts.)
La raison ? Ma foi, toujours la même : les réseaux sont, d’une, dans mon cas très personnel, un aspirateur à temps de cerveau disponible, de deux, comme les trois polémiques à la semaine le prouvent, il est impossible d’avoir une discussion construite en 280 caractères quand le système est littéralement conçu pour nourrir les réactions instinctives et les outrages.
Concernant Twitter, je ne jette tout de même pas le bébé avec l’eau du bain. Certains mouvements capitaux y sont nés (#MeToo), j’ai pu échanger avec certaines de mes idoles de jeunesse et j’y ai rencontré et échangé avec plein de belles personnes (merci à vous – j’espère qu’on se retrouvera tous ici).
Je tiens spécialement à remercier tous les lecteurs et lectrices, blogueurs et blogueuses, Instagrameurs et chroniqueuses de tous horizons qui aiment les livres, en parlent sur leur fil et à leur communauté voire leurs clients – votre travail au long cours est capital pour faire connaître des auteurs. Merci !
Mais hélas, en ce qui me concerne, en l’espace d’un an et demi, j’ai été : insulté gratuitement, harcelé à deux reprises, et je ne compte plus le temps consacré à modérer des fils qui partaient en sucette ou à essayer de raccommoder des rapports humains mis à mal par un mauvais like ou un mauvais RT. J’ai énormément de mal à lâcher l’affaire dans ce genre de cas, je me bouffe la rate en sauce et avant d’avoir compris ce qui m’arrivait, j’ai passé deux heures obsessionnelles-compulsives à jouer à tape-la-taupe avec mes mentions.
Au bout d’un moment, pourquoi m’infligé-je ça ? Autant quitter Facebook a d’abord été pour moi un geste politique (à ma minuscule échelle, on est d’accord, mais be the change you want to see in the world, tout ça), quitter Twitter est davantage un geste d’hygiène mentale. Je pense en plus qu’il y a de bien meilleures manières de :
- communiquer avec les gens : dans des espaces plus calmes comme des forums ou des commentaires de blogs ;
- parler de son travail : par des événements, des conférences ;
- accomplir son travail, tout court : en bénéficiant du silence et de la temporalité libérées pour se concentrer sur le vrai métier – qui est, et c’est tout : produire, régulièrement, des œuvres de qualité.
Pour paraphraser le temple de Salomon, savoir, oser, écrire… et se taire.
Écrire consiste à s’immerger dans la narration et l’esprit des temps pour en tirer des choses à rapporter à sa tribu ; à se documenter en profondeur, à réfléchir, à imaginer ; l’artiste est pour moi un chaman, et ce chaman-ci a beaucoup plus de mal à entrer en contact avec le Mystère s’il s’inquiète qu’un imbécile comprenne un tweet de travers et lance une campagne d’ostracisation et de désinformation à son égard.
Donc, dorénavant, en ce qui me concerne :
The amateur tweets. The pro writes.
Steven Pressfield, Turning Pro (chroniqué ici)
Je réitère que le site, le blog et Procrastination ne vont nulle part – c’est tout le contraire. Je compte consacrer davantage de temps à mes espaces, au podcast, et proposer toujours davantage de contenu construit (des choses vont arriver en ce sens).
Pour cela, je vous invite forcément très vivement à vous inscrire à la lettre d’informations dont le formulaire se trouve en bas à droite. Un seul mail par mois, juste entre nous, dense et récapitulant l’activité du site sur la période passée, avec toutes les actualités, et quelques réflexions plus personnelles sur l’écriture et les projets en cours !
On se retrouve… très exactement ici, demain matin.
Excuses et pardon sur les réseaux
Une notion fondamentale des réseaux serait qu’on apprenne tous à dire :
- J’ai parlé sous le coup de l’émotion, mes mots ont dépassé ma pensée, désolé
- Je reconnais que tu as pu parler sous le coup de l’émotion, que tes mots ont dépassé ta pensée, passons ensemble à autre chose.