Le meilleur fil de commentaires, le retour

Pendant ce temps, sur Facebook.

L’autre fil de commentaires ultime était celui-là. Il y a maintenant deux fils de commentaires ultimes. Va falloir vivre avec.

(Information si cela préoccupe quelqu’un, mon profil Facebook est public par défaut, donc aucune vie privée n’a été blessée pendant le tournage.)

(Sinon, oui, j’ai maintenant un compte Storify. Les discussions se délocalisant de plus en plus sur les réseaux et ne tenant pas à leur laisser l’exclusivité de nos données ni à perdre de beaux moments, je compte m’en servir de temps en temps.)

2015-09-15T11:44:47+02:00mercredi 16 septembre 2015|Expériences en temps réel|2 Commentaires

Partage, légalité, éthique : questions d’échelle, questions d’usage

lolcat-problem-solved-450x336Dans l’uberisation progressive du monde, nouvelle affaire qui nous touche de près cette fois, Booxup. En résumé, il s’agit d’une application qui permet d’organiser des prêts de livres physiques entre particuliers, en publiant le contenu de sa bibliothèque. Une sorte de méga-bibliothèque communautaire, si l’on veut. La boîte vient juste de recevoir une visite de la direction de la répression des fraudes (DGCCRF) pour étudier au juste la légalité de cette histoire. Et la presse – dont Actualitté, que je ne félicite pas sur ce coup – comme le public de hurler :

« WAT ? Prêter des livres entre particuliers est une habitude vieille comme le monde. En quoi la loi vient-elle s’en mêler ? »

Suivent toutes les récriminations habituelles mal dégrossies sur l’ingérence des autorités, la propriété intellectuelle qui empêche de danser en rond, etc. Déclarations grandiloquentes de la liberté de prêter ce qui nous appartient, jusqu’à voir, parfois, dans le prêt un acte d’un fondamental altruisme.

Moui. Une minute, et un peu de réflexion, s’il nous plaît à tous. La question du prêt des livres est-elle remise en question par les pouvoirs publics ? Grands dieux (et bordel), non. Donc, du calme. Parce qu’entre les envolées d’un lyrisme tremblotant du co-fondateur de Booxup, David Mennesson, et l’indignation populaire, il y a, en gros, de fortes chances qu’on nous prenne pour des jambons.

Pour commencer, la DGCCRF n’a lancé aucune procédure contre Booxup. Il s’agit juste d’un procès-verbal – d’une visite visant à constater la nature de l’activité. « Bonjour, que faites-vous ? » Booxup n’est absolument pas en danger – et même, loin de là, l’entreprise a plutôt reçu un coup de publicité (mais tend à se draper dans sa superbe, avec de grands yeux humides qui attirent forcément la sympathie d’un public contestataire).

Pourquoi toute cette agitation ? Pour démêler le vrai du faux, commençons par donner un peu de contexte et un peu de bon sens.

Quelle est l’échelle en question ?

Pourquoi la DGCCRF s’intéresse-t-elle à Booxup quand personne ne s’intéresse à nos tantes qui se font circuler Cinquante nuances de Grey sous le manteau ?

Pour une raison très simple, et une dimension, sacré bon sang, que tout le monde oublie en permanence dans les questions sur la circulation des biens / informations / services à l’heure d’Internet. Elle est la même que pour Uber, que pour le téléchargement illégal, etc.

Prenons justement ce dernier exemple, comme il a – grosso modo – quinze ans et qu’on commence à avoir un peu de recul dessus. Jadis, on copiait les albums des copains sur cassette, on se les filait dans la cour du lycée, etc. Quand le téléchargement illégal est arrivé, plus ou moins la même rhétorique s’est posée :

« WAT ? Copier des albums entre particuliers est une habitude vieille comme le monde. En quoi la loi vient-elle s’en mêler ? »

La différence se situe dans l’échelle de l’échange. Répétons cela bien fort pour le graver en lettres de feu au sommet du mont Sinaï : la différence se situe dans l’échelle de l’échange (bon sang).

Quand je copie un album pour le filer dans la cour du lycée, par défaut, je le file à une connaissance. Cela se produit dans un cercle réduit, lequel porte même un nom dans le droit, tiens donc : le cercle privé. C’est le même mécanisme qui me permet d’organiser une lecture publique d’un livre chez moi, mais pas d’ouvrir un théâtre (que l’entrée soit payante ou pas).

Dans le premier cas, j’ai affaire à des connaissances. Dans le deuxième, à des inconnus. 

La légalité / éthique / problématique de la libération des échanges porte d’abord sur ce point. Elle ne porte pas sur la pratique en soi, mais sur l’envergure de celle-ci. Je partage une chanson en mp3 avec un ami, je reste dans le cercle privé1. Je la mets à disposition sur un réseau pour que le monde entier y ait accès, on n’est plus dans la même intention ni dans la même envergure. Je sors du cercle privé. Je peux conduire mon pote à l’aéroport, mais si je mets en relation des inconnus et pioche ma commission au passage, je viens cogner en frontal le système établi des taxis (que ce soit judicieux ou pas est une autre histoire).

Pourquoi les lois sur le droit d’auteur existent-elles, à la fin ? À l’origine, pour protégér les droits du créateur sur son oeuvre (voir ici pour une définition détaillée et la différence avec le copyright), et par extension ceux qui la distribuent et prennent le risque financier (éditeur en premier lieu). À terme, pour protéger la culture en protégeant ceux et celles qui la font, en leur permettant une juste rémunération. Ni plus ni moins.

Bien. Maintenant, revenons à l’exemple de Booxup. Prêter un livre à un ami n’est pas un mal en soi – personne n’a rien dit de tel. Mais, quand on ouvre sa bibliothèque aux quatre vents, ou qu’on télécharge Ninja Eliminator chez un amateur de films de bon goût en Chine, dès lors qu’on se met en relation avec des inconnus, on entre dans une toute autre catégorie : on sort du cercle privé. (C’est la question de propriété intellectuelle qui a volé en éclats avec la généralisation des échanges pair à pair et personne n’a encore trouvé de réponse – j’avais bien une idée, mais…)

Maintenant, auguste lectorat, je t’en prie : avec moi, voyons plus loin que le bout de notre nez. La question de la légalité ou pas des pratiques de Booxup ne relève pas du principe de prêt de livre, mais de l’envergure avec laquelle on le fait.

Point. Barre.

Parce que le principe de prêt de livre est encadré par des lois, et l’État tant honni investit même chaque année des milliards pour les rendre accessibles : ça s’appelle des bibliothèques, avec des professionnels qui entretiennent un fonds, le recommandent, font oeuvre culturelle. (D’ailleurs, j’ai envie de dire : à quoi sert Booxup, au bout du compte ?) Et – ô surprise – les acteurs de la chaîne du livre touchent quelques piécettes sur cette distribution de leur travail.

Mais avec Booxup ? Que dalle. Booxup arrive, met en relation ses clients internautes (qui, je le rappelle, sortent du cercle privé), et la chaîne du livre ne peut que grimacer (ou accepter de danser pour se faire un peu de communication en organisant des concours ou des partenariats parce qu’elle ne peut pas trop faire autre chose que suivre, au risque d’être brûlée en place publique si elle s’y oppose – moi, tu le sais, auguste lectorat, je préfère les flammes de l’honnêteté aux sourires léchés du communicant, et puis je m’en fous, j’ai une combinaison en kevlar et un fusil à canon scié sous le comptoir de mon bar).

Si Booxup était une association à but non lucratif, on pourrait arguer qu’on entre dans une zone grise. Un travail de passionnés, rassemblant des membres qui se connaissent, ou apprennent à se connaître, comme à la MJC du quartier. On pourrait s’interroger sur le bien-fondé d’une telle initiative, on pourrait peut-être même grogner devant cette distribution parallèle, mais on pourrait retenir à Booxup le principe de la bonne foi.

Usage et propriété sont dans un bateau

lolcats-its-mine-has-my-name-on-itL’argument opposé en général à ce stade de la discussion, c’est : « Ah, alors, tu es contre les bouquinistes, alors ? Le marché du livre d’occasion ? Sale rapiat ! » (Je prends alors un air pincé, mais je m’efforce de rester calme.)

Petit rappel fondamental sur la propriété : elle se divise (pour faire très simple) en deux volets : l’usage (jouissance du bien dont il est question) et la propriété à proprement parler. C’est patent dans le cas de l’immobilier : si vous louez un appartement, vous en avez l’usage, mais évidemment pas la propriété.

Dans le cas d’une bibliothèque publique, quand vous empruntez un livre, vous en avez la jouissance pour un temps défini, mais il ne vous appartient pas (vous pouvez le lire, pas le découper en petits morceaux).

C’est en échange de cette jouissance de leurs oeuvres, proposée au public, que les créateurs touchent un droit indexé sur les volumes en bibliothèque. Un bouquiniste n’a rien à voir là-dedans : lui, il revend des livres (la propriété) dont découle la possibilité d’en jouir (mais ça vous regarde) (sans arrière-pensée salace), mais il n’est pas là pour vous en permettre l’usage (sinon, il ferme boutique – un libraire qui fait bibliothèque ne gagne pas sa vie ; merci, captain Obvious !).

Voilà d’où découlent les interrogations qui portent sur Booxup. L’entreprise opère visiblement dans un vide juridique. Comme dit précédemment, ce serait une structure à but non lucratif, on n’aurait peut-être pas grand-chose à redire sur la question du principe.

Mais ce n’est pas tout. Et c’est là qu’on s’énerve.

Booxup n’est pas votre ami

Devine quoi, auguste lectorat ? Booxup vient de lever 310 000 euros. Oui, madame.

David Mennesson a beau prétendre que

quand il y a levée de fonds, il y a capitalisation, et quand il y a capitalisation – par le seul jeu des écritures comptables – l’entreprise prend de la valeur. Il y a donc profit pour les actionnaires, qu’on l’admette ou non (même s’il est putatif, c’est la base de la spéculation et de la notion d’investissement), et celui-ci se réalise non seulement sur un vide juridique, mais sur le travail des créateurs et des acteurs économiques de la chaîne du livre – le tout drapé dans un discours libriste d’autant plus horripilant qu’il est parfaitement hypocrite, comme on va le voir – mais une casserole à la fois.

J’ai une triste nouvelle, la dernière fois que j’avais vérifié, l’argent ne tombait pas du ciel et on n’en donnait pas contre rien. Personnellement, quand je lève 310 000 brouzoufs (ce que je fais tous les matins entre mon plongeon dans ma piscine de lait d’ânesse et le balayage des billets que le vent a soufflé contre ma porte pendant la nuit), ce n’est pas pour aller planter des nèfles. C’est pour préparer une bonne grosse revente bien juteuse d’un portefeuille clients avant que la bulle n’éclate tout en posant la main sur le coeur et en proclamant : « je fais ça pour la culture ! pour favoriser l’échange entre les hommes ! prêter des livres est une pratique ancestrale, et maintenant, nous mettons cette habitude à votre portée ! power to the people ! help, help, I’m being repressed! » 

Rien ne le prouve, non, mais gageons que David Mennesson, associé à un ancien de l’ESSEC qui a travaillé dans des « environnements challengeants » (oh, sérieusement ?), ne peut, allez, quand même pas l’ignorer. Faire tourner un serveur web – même un gros serveur – ça se fait avec mille fois moins de thunes. Oui, mille fois moins. Combien de cet argent retournera dans la poche des créateurs, lesquelles rendent cette activité possible ? Des éditeurs ? Zéro. Nada. Zilch.

J’ai posé la question au fondateur, ce qui a entraîné une discussion fort édifiante.  

310 kiloboules pour du développement Android et de la com’, c’est du beau développement Android et de la belle com’, je peux vous dire : les soirées pizza du développement vont probablement être arrosées au Dom Pérignon.

Surtout, où est, sacré bon sang, le code source de cette dite appli « libre » ? Et si c’est une appli libre, pourquoi ne pas faire appel à la communauté du libre, dès le début, pour accélérer le développement ? Pourquoi lever des fonds privés, si c’est « libre » ?

Parce que ça ne l’est pas. Une application n’est pas libre s’il est dans le projet de la rendre libre. Ça s’appelle au mieux de la démagogie, au pire prendre les gens pour des imbéciles. Ce n’est pas parce que je prétends très fort qu’il ne pleut pas que je n’attraperai pas une pneumonie en restant sous l’orage. « Mais si, vous êtes libre, monsieur Voltaire. Bah, disons que vous sortirez bien un jour de la Bastille ; vous allez pas chipoter, c’est pareil. »

Le développement libre, en principe, fonctionne sur la base d’une idée d’un petit nombre, qui libère aussitôt son travail pour bâtir une communauté et décentraliser le développement. L’idée est d’accélérer et faciliter le travail par la collaboration. Lever des fonds pour développer et faire de la communication, c’est précisément l’inverse d’un projet libre. C’est un projet bien fermé qui garde bien au chaud sa base de données utilisateurs pour en faire… nul ne sait quoi. (Mais j’ai bien une idée, dont l’indice est « 310 000 euros ».)

Perspectives : allez ailleurs (là où c’est vraiment libre)

Que Booxup paie sa redevance à la SOFIA sur le modèle des bibliothèques – et il y a de quoi faire avec 310 kiloeuros (comme le disent les diplômés de l’ESSEC), sachant que la SOFIA en a perçu 16 millions en 2011, par exemple (le rapport de proportionnalité n’est pas si énorme) – et l’on ne trouverait strictement rien à redire. On applaudirait même. Là, on aurait une initiative innovante. Une vraie bonne idée.

Non, ici, on se tape un discours démago ; or, j’aime assez peu qu’on me prenne pour un abruti, et encore moins qu’on prenne le public, dans son ensemble, pour une assemblée colombophile en lui martelant le mot « libre » comme si ça suffisait à transformer le plomb en or. Je dois être vieux jeu, mais ça me dérange un peu qu’on endosse le discours libertaire (jusqu’au hashtag créé pour l’occasion qui ne veut rien dire, #FreeYourBooks – parce qu’ils étaient prisonniers, avant ?) pour, en réalité, leverager (t’as vu, moi aussi je parle l’ESSEC) de l’investissement de la façon la plus capitalistique qui soit.

Or, il se trouve qu’un projet vraiment libre de partage de bibliothèques physiques, ça existe (merci à Neil Jomunsi pour la découverte). Ça s’appelle inventaire.io, ça marche très bien (d’après les retours) et c’est vraiment open source. Le code se télécharge sur la page d’accueil, et la base s’appuie sur les données Wikidata.

Cela pose-t-il les mêmes problèmes d’envergure et de propriété que précédemment ? Oui, mais déjà, les données appartiennent réellement aux utilisateurs et nul ne gagne rien là-dessus ; il s’agit d’une forme de bibliothèque communautaire entre proches, ce qui est parfaitement honorable… et une bonne idée. Pour moi, ça, c’est légitime.

Que Booxup paie la chaîne du livre, ou bien qu’on fasse appel à un vrai projet libre comme inventaire.io. Mais on ne peut pas avoir le livre, l’argent du livre et le sourire de l’auteur.

  1. Une telle copie n’est pas tant autorisée que constitue une exception au droit, mais n’entrons pas ici dans ces subtilités.
2015-09-15T09:30:49+02:00mardi 15 septembre 2015|Le monde du livre|28 Commentaires

Ce qu’il advient d’un manuscrit terminé

Auguste lectorat, je te présente le manuscrit de Port d’Âmes :

manuspda

Yep, 500 pages passées à la déchiqueteuse, ça prend un poil plus de place que sous forme plane (mais ça paraît étonnamment moins lourd).

Je détruis systématiquement mes propres versions annotées à fins de correction de mes propres manuscrits (mais pas celles annotées par les beta-lecteurs, qui rassemblent leurs impressions de lecture, ce qui est précieux à conserver, et aussi par respect pour leur travail). Le livre est sorti, fini, il représente un moment dans le temps et un projet achevé. J’aime couper cet ultime pont avec le récit qui se trouve en librairie ; il est à présent dans la nature, et vit sa vie dans l’esprit de ses lecteurs. Pour moi, il est temps d’avancer, de passer à autre chose, de prolonger éventuellement l’univers dont il est question – mais cette histoire, placée sur le papier, lancée un peu comme une bouteille à la mer, a été fixée, comme une photographie. Il y a, dans ma tête comme sur un cliché, un avant et un après ; mais ceux-là, par définition, restent changeants, en flux, tant qu’ils n’auront pas été fixés à leur tour – et il n’y a généralement pas de raison de le faire ; l’histoire intéressante n’était pas là.

C’est tout l’inverse d’une destruction, contrairement aux apparences. C’est la reconnaissance qu’un livre est terminé, que j’ai fait tout ce que j’avais à, ou pouvais, faire dessus. Il existe et est diffusé. Il est temps d’en accompagner la vie, comme des autres et, dans le laboratoire, d’envisager de nouvelles choses. N’est pas mort ce qui à jamais est publié, et au long des rentrées littéraires étranges, même la mort peut mourir. Tout ça tout ça. 

2015-09-13T16:07:16+02:00lundi 14 septembre 2015|Journal|37 Commentaires

La photo de la semaine : le piton de la Fournaise en éruption

De retour, je reprends les habitudes du vendredi, avec une (espérons) zoulie image hebdomadaire.

Cette fois, la dernière éruption en date du piton de la Fournaise à la Réunion. Nous n’étions pas du bon côté (et je n’avais pas mon téléobjectif, mais le spectacle était quand même impressionnant.

Piton de la Fournaise erupting

2015-09-11T00:00:21+02:00vendredi 11 septembre 2015|Photo|1 Commentaire

Ne me cherchez pas

travelcatJe n’y suis pas, ou du moins, plus.

Je rentre en métropole.

Have phear.

(Et si tu te demandes, auguste lectorat, pourquoi je n’ai quasiment pas fait d’article sur mon séjour à la Réunion, c’est que cette période ne s’est pas déroulée sous les meilleurs auspices, avec des tas de petits soucis de logistique et d’organisation qui m’ont un peu ôté l’envie de raconter quoi que ce soit. Rien de grave, mais du saoulant. Heureusement, ça sera bon pour quand j’y retournerai – fin novembre.)

2015-09-08T15:31:13+02:00mercredi 9 septembre 2015|Carnets de voyage|2 Commentaires

Déclencheurs 2015, post-mortem

Auguste lectorat, je ne suis pas très fier de toi.

Examinons les statistiques de mon humble demeure :

stats-decl_2015-1 stats-decl_2015-8

Même en admettant que le premier article ait simplement suscité la curiosité et/ou que la série ait été prise en retard, l’effondrement est patent. (pending. pardon.) Ce que j’ai constaté au fil de ces deux mois d’été.

Loin de moi l’idée de faire la morale – ni de faire les gros yeux – mais je la/les ferai au prochain jeune auteur qui osera proférer ces mots honnis : « j’ai plein de projets, je veux écrire sérieusement, mais j’ai pas le temps. » (« Ma vie est trop compliquée. »)

On traverse parfois des périodes difficiles où l’on entre en mode survie et où l’écriture, franchement, devient la dernière roue du carrosse. Normal. On peut aussi vouloir écrire comme un simple loisir, tourner des idées dans sa tête, et s’y mettre une fois de temps en temps sans perspective de long terme. Rien de plus légitime et l’on adopte alors le rythme qu’on souhaite.

Je te parle à toi, l’auteur qui prétend avoir le feu sacré, mille histoires et univers à en faire pâlir d’envie J. J. Abrams, Philip K. Dick et Flaubert (pourquoi Flaubert ? J’en sais rien, pourquoi ces questions ?), qui aspires à la publication voire vas bientôt publier une décalogie qui aura le statut de nouveau classique, mais qui ne trouves jamais le temps. Et je te prends fermement par l’épaule, et je plonge mon regard fou dans le tien, l’haleine fleurant bon le saucisson Label Rouge :

Je sais ce qui te bloque, mec. (ou nana. Mais pour l’effet, « mec » est plus percutant. Arrête de me déconcentrer, steuplaît.) Comme abordé en introduction, écrire prend du temps. Du fucking temps, t’entends ? (Euphonie ?) Écrire, c’est comme lire : c’est un sport contemplatif, c’est une activité qui s’inscrit sur la durée, comme un voyage ou la voile. La gratification n’est pas immédiate, comme quand tu écoutes du Britney Spears ou que tu regardes Les Ch’tis se maravent à St-Tropez. Tu écris une phrase, un paragraphe, tu as juste un bout de truc en devenir, où tout est possible et où rien n’est. Tu écris un chapitre, tu as à peine une brique du mur, et tu te dis : bordel, c’est pas bientôt fini ? Eh bien non. Ça commence juste, et c’est ça qui ronge. Tu lis un chapitre, tu as à peine cinq minutes de l’épisode de la semaine de L’Amour du Risque. Et c’est pour ça que la littérature est condamnée – excuse, c’est le saucisson qui parle, je disais, c’est pour ça que la littérature s’apparente de plus en plus, dans notre monde hypercon et necté, à la cultivation d’un jardin zen, à la pleine conscience, à la réservation d’une zone personnelle protégée inscrite dans l’espace et dans le temps pour créer (écrire) et recevoir (lire). Et c’est rare, et c’est précieux, et c’est salutaire. C’était le but de ces déclencheurs, avant toute chose : te le faire tâter. Écrire prend du temps, du temps, plus de temps encore, et encore du temps. Écrire, c’est forger un sabre japonais dont on trempe l’acier deux cents fois. Écrire, c’est s’enfermer avec régularité, pendant des mois, parfois des années, pour produire une oeuvre finie, parce que si tu ne l’écris pas, personne ne l’écrira à ta place, parce que tu es unique, avec des trucs à toi dedans à dire, et que si tu ne les dis pas, si tu ne fais pas partager ton rêve, il disparaîtra à jamais de l’univers, sauf si tu crois à l’Éternel Retour, mais perso, tu vois, je suis plutôt incrédule ascendant mouais sur ce point !

Allez ! Viens, va, je t’offre une bière.

Comment ça, tu acceptes ? Échec, saligaud : tu devrais dire, fichtrefoutre, j’ai compris, senpai, je m’en vais tout de suite m’enfermer chez moi pour écrire deux pages !

2015-09-04T07:52:15+02:00lundi 7 septembre 2015|Technique d'écriture|19 Commentaires

Surmonter l’angoisse de la page blanche, façon Robert Sheckley

Photo John Henley (CC-By-SA)

Photo John Henley (CC-By-SA)

Mike Resnick a confié qu’un jour, Robert Sheckley (La Dimension des Miracles) lui expliqua sa méthode pour gérer l’angoisse de la page blanche :

Il se donnait un minimum de 5000 mots à écrire par jour, même s’il se contentait d’écrire 2500 fois son nom. Les jours où il se sentait bloqué, il commençait effectivement par écrire son nom ; après avoir noté 800 ou 900 fois « Robert Sheckley », une voix interne disait « Ah, et puis zut – si tu es parti pour rester assis à écrire ça, autant que tu racontes une histoire ». D’après Bob, ça ne ratait jamais.

(Les personnes à prénom ou nom composé sont peut-être désavantagées par cette technique.)

[Source]

 

2015-09-03T09:55:38+02:00vendredi 4 septembre 2015|Technique d'écriture|11 Commentaires

Psycho Starship Rampage sortira le 28 septembre et la bande originale suivra

Psycho Starship Rampage, le rogue-like (jeu d’aventure) qui se joue comme un shmup (jeu de tir) et dont j’assure la partie sonore et musicale sous l’alias Wildphinn et apporte ma modeste pierre au game design, avance beaucoup, beaucoup, beaucoup. À tel point que nous avons plein de nouvelles à annoncer, dont une date de sortie.

C’est quoi, PSR ? Commençons par une petite bande-annonce :

https://www.youtube.com/watch?v=fLxIEbHp92M

La grande nouvelle, d’abord : sortie le 28 septembre sur Steam et itch.io (jouez sans DRM, mais obtenez une clé Steam). La page magasin est d’ores et déjà disponible ici (et vous pouvez précommander, si le coeur vous en dit).

Je sortirai la bande-originale du jeu peu après sous forme numérique, à télécharger sur les sites principaux (iTunes, Amazon, Google Play…) ou en streaming (Spotify, Deezer). Les infos seront disponibles sur le site Wildphinn et la page Facebook dédiée : n’hésitez pas à suivre dès maintenant pour ne pas manquer les infos. Au programme : de l’électro façon jeu des années 90, mais réalisée avec les moyens actuels ; quelques extraits ci-dessous pour vous faire une idée sur la page Soundcloud correspondante :

Avec une jolie jaquette (merci à Morgane Esnault, la talentueuse graphiste du jeu, pour m’avoir permis d’emprunter les assets du jeu) :

OST-cover-small

Sera-t-il possible de voir le jeu en vrai avant sa sortie ? Tout à fait. Une parte de l’équipe de Ballistic Frogs (dont mon humble pomme) serons à l’Indie Games Play de Paris le 19 septembre. Voir ici pour les détails pratiques et les billets (9 / 5 euros) ; il y aura quatorze autres studios indépendants, avec les pépites du jeu vidéo de demain !

Un événement à ne pas manquer si vous cherchez de nouveaux plaisirs de jeu à vous mettre sous la dent, surtout qui sortent un peu des chemins battus et rebattus par les grosses productions.

Pour découvrir en détail – et en français ! – le jeu, voici une belle session par Pr. Oz qui détaille les mécanismes pas à pas et montre son fonctionnement :

https://www.youtube.com/watch?v=oMmE9go8Ixo

2015-09-01T09:52:19+02:00mercredi 2 septembre 2015|Alias Wildphinn|3 Commentaires
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