Fragments d’une fantasy antique disponible à la précommande

L’anthologie Fragments d’une fantasy antique, dirigée par David K. Nouvel aux éditions Mnémos, est maintenant disponible en pré-commande. Elle sortira le 5 octobre prochain.

Cette anthologie a été montée à l’occasion du colloque « L’Antiquité aux sources de l’imaginaire contemporain » qui s’est déroulé au printemps dernier (voir la table ronde où participait votre humble serviteur). J’y propose pour ma part un court texte rédigé à la façon d’un article scientifique intitulé (on respire un bon coup) « Intérêt et faisabilité zootechniques de la métamorphose de masse ».

L’anthologie génère déjà des retours très positifs, témoin cette critique sur Babelio qui lui donne 4/5. Vous pouvez vous la procurer chez toutes les bonnes librairies ou bien en ligne (sur Amazon).

Quatrième de couverture

Neuf écrivains explorent l’Antiquité comme source de la Fantasy.

N’avez-vous jamais rêvé de…

Devenir le plus grand architecte du monde?

Trouver des fragments perdus d’un roman à succès?

Vous venger des Dieux… ou bien devenir leur détective privé atitré?

Toucher un objet et savoir tout de son histoire?

Répondre à la célèbre énigme du Sphinx?

Mettre un terme à la faim dans le monde?

Ou aimer un bel Apollon au point de l’avoir dans la peau?

Neufs auteurs français, guidés par Homère et Virgile, sont partis en expédition dans le royaume d’Hypnos cueillir pour vous ces quelques fragments de rêves, et, telle une Pénélope des temps modernes, les ont tissés pour en faire des histoires, belles et vives, sanglantes et graves, anciennes et modernes. Ils ont, lors de leur périple, parcouru les immenses domaines de Rome et d’Athènes, parlé aux Dieux, mangé à la table de Trimalchion et se sont reposés sur les bords du Vésuve endormi. De retour sur nos rivages, ils sont maintenant le souffle contemporain des Muses. Écoutez leur chant, lisez leur prose, dégustez-les. Ils sont à vous.

Ces huit nouvelles ont été écrites dans le cadre du colloque « L’Antiquité greco-latine aux sources de l’imaginaire contemporain » (7-9 juin 2012), organisé avec le soutien de l’École Pratique des Hautes Études et de l’Université de Rouen, afin de démontrer la vivacité de l’héritage greco-latin dans les fictions contemporaines de Fantastique, Fantasy et Science-fiction.

Sommaire

  • Fabien CLAVEL : « Sur un fragment perdu du Satyricon »
  • Jeanne-A DEBATS : « Le miroir d’Electre »
  • Romain ASPE : « Le Labyrinthe »
  • Rachel TANNER : « Le Sphynx »
  • Lionel DAVOUST : « Faisabilité et intérêt zootechniques de la métamorphose de masse »
  • Nicolas DELONG : « Les Dieux veulent, les Dieux prennent »
  • Sylvie MILLER et Philippe WARD : « Voir Pompéi et mourir »
  • Nathalie DAU : « A couteau »
2012-08-30T16:04:30+02:00vendredi 31 août 2012|À ne pas manquer|2 Commentaires

Résultats du prix Rosny Aîné 2012

Couv. Gilles Francescano

Les lauréats du prix ont été désignés à la convention annuelle de fantasy et de science-fiction qui s’est tenue à Semoy le week-end dernier :

  • Roman : Roland C. Wagner, pour Rêves de Gloire (L’Atalante). J’ai appris que certains finalistes s’étaient desistés en hommage à sa mémoire ; pour ma part, je préfère celui qui consiste à proclamer qu’il a été le meilleur.
  • Nouvelle : Ugo Bellagamba, « Le poliorcète repenti » (in Galaxies n°14/56)

Le prix Alain Le Bussy (prix récompensant une nouvelle) a été remis à Olivier Caruso pour « Les Quatre Saisons de la baleine » et le prix Cyrano à Philippe Curval.

[Source]

2012-08-30T16:04:37+02:00jeudi 30 août 2012|Le monde du livre|10 Commentaires

Écrire des distances réalistes

La corvette légère Blagazurienne mesurait quatorze kilomètres…

L’archiduc Fanfrenouille aimait les grands espaces ; sa salle de bal couvrait bien quinze mille mètres carrés…

Dans un sprint désespéré, Dick Ultimate couvrit les huit cent mètres qui le séparaient de Ranjo Terrorist…

Y a un truc qui coince. (Et si vous pensez que tout va bien dans les phrases précédentes, vous avez d’autant plus besoin de lire cet article !)

La description moderne en narration s’efforce de se passer autant que possible de l’inventaire des distances, parce que cela devient vite fastidieux (« L’artefact Très Ancien et Très Dangereux avait la forme d’un parallélépipède de dix centimètres par trois sur deux de hauteur ; il se trouvait dans une salle de trois mètres de côté, dont la hauteur sous plafond loi Carrez était égale à deux mètres cinquante-deux »), mais il subsiste nombre de situations où un chiffre brut seul parle davantage que toutes les métaphores du monde, qu’il s’agisse de parler de gigantisme d’une machine, d’un champ de bataille, ou du microcosme.

Le problème – et on le voit fréquemment en mer avec les observateurs inexpérimentés, quand il s’agit de juger l’écart entre le navire et le dauphin que l’on vient d’apercevoir -, c’est que l’oeil est un mauvais estimateur, et que notre idée des distances est extrêmement subjective, variable d’une personne à l’autre. Et, même sans tomber dans l’absurdité des exemples précédents, un chiffre légèrement invraisemblable peut ruiner une description. Prudence, donc, en la matière.

Heureusement, il existe un outil tout simple qui permet de se rendre compte de la crédibilité d’un chiffre, et cela sans sortir de chez soi – car il n’est pas question de se confronter à la réalité, hein ? On écrit, on n’est pas là pour sortir. Il s’agit d’un gadget d’une immense utilité pour l’écrivain, qui se cache dans les fonctions « labs » de Google Maps.

J’ai nommé : l’outil de mesure des distances. Activez-le.

Ce petit gadget ajoute une règle près de l’échelle de la carte sous Google Maps. Pour l’utiliser, cliquez gauche sur un point de la carte, puis sur un autre : Google Maps vous donne obligeamment la distance séparant les deux points.

À quoi ça sert dans notre contexte ? Eh bien, au-delà de l’intérêt de pouvoir juger des distances réelles si votre récit se déroule dans un contexte contemporain, cela offre un point de comparaison évident entre l’imagination de l’auteur et des points de repères immédiatement accessibles. Hum, quatorze kilomètres pour une corvette blagazurienne ? Mais la rue qui passe en bas de chez moi, qui me semble interminable au moment de rapporter le pain, mesure seulement trois cents mètres. Cela ne représenterait-il pas une meilleure, et surtout, plus vraisemblable envergure ?

Un petit détail amusant à signaler, qui apparaît quand on demande à Google de mesurer de très longues distances :

Non, la courbure de la ligne « droite » n’est pas un bug. C’est un effet de la rotondité de la Terre, et une conséquence du fait qu’une carte est projetée sur un plan. Le trajet le plus court épouse la sphère terrestre, ce qui se traduit par une courbe sur la carte. (Pour ceux qui voudraient s’intéresser au phénomène, il s’agit de la trajectoire orthodromique, bien connue en navigation. Caveat, faut aimer la trigonométrie.)

Et voilà, vous êtes armés pour peupler convenablement la géographie de vos mondes imaginaires et de vos engins de destruction massifs. N’hésitez pas à partager vos anecdotes en commentaires.

2018-07-17T16:57:22+02:00mercredi 29 août 2012|Best Of, Technique d'écriture|12 Commentaires

Fragments d’une fantasy antique sur Babelio

Lionel Davoust prend des risques, mais signe un des textes les plus réussis : « Faisabilité et intérêt zootechniques de la métamorphose de masse » fourmille de références antiques, mais démontre surtout de l’immense érudition de son auteur et de son incroyable sens de l’humour.

Un article de Dinoysos89 sur l’anthologie Fragments d’une fantasy antique, à lire sur Babelio.

2012-08-27T17:24:16+02:00mardi 28 août 2012|Revue de presse|Commentaires fermés sur Fragments d’une fantasy antique sur Babelio

Lundi, c’est déclencheurs (9) : un coup de théâtre

Rappel des règles du jeu : il s’agit d’écrire pendant vingt minutes sur un, ou plusieurs éléments, remaniés ou non, de la liste ci-dessous. L’article initial de la série se trouve ici.

Les rebondissements, les coups de théâtre, les « twists » forment le sel de la fiction et ce qui maintient le lecteur sur ses gardes. Comment emploierez-vous un des « twists » suivants ?

Déclencheurs : « twists »

  1. Double identité
  2. Dévoilement d’une faction inconnue
  3. Défection d’un adversaire
  4. Trahison d’un allié
  5. Déclenchement d’un amour improbable
  6. Tout cela n’est qu’une pièce d’un problème bien plus vaste
  7. En fait, il fallait tout comprendre à l’envers
  8. En fait, nous sommes condamnés à brêve échéance
  9. En fait, les gentils sont méchants et vice-versa
  10. Interruption par une nouvelle offensive
2014-08-27T16:05:50+02:00lundi 27 août 2012|Technique d'écriture|5 Commentaires

Léviathan : La Nuit sur Froggy’s Delight

Couv. service artistique Seuil Image © Bertrand Desprez / Agence VU

Oui, je me répète certainement, ce livre est dans ma liste des « ch » qui font des bulles dans mon cœur (chef-d’œuvre, chéri, chaton, chocolat, champagne…). Vivement le troisième ! Le dernier ? Non ! Il ne faut pas que cette histoire s’arrête !

Un article de Nathalie Bachelerie à lire sur Froggy’s Delight.

2012-08-19T18:53:27+02:00vendredi 24 août 2012|Revue de presse|Commentaires fermés sur Léviathan : La Nuit sur Froggy’s Delight

Question : Pourquoi n’es-tu pas traduit en anglais ?

Comme promis, je me relance à écrire davantage sur l’écriture (j’aime ces tautologies), mais aussi l’édition au sens large et le monde du livre. « No fish is an island », dit-on en écologie marine, et le métier d’écrivain ne se conçoit pas sans son écosystème. Au-delà des aspects purement créatifs, je vais donc m’efforcer de parler aussi de ce qui va autour : soit la facette « métier » de l’expression, très mal connue en général. Et puisque j’ai une brouette de questions auxquelles j’ai promis de répondre, je vais commencer par celle qui revient le plus souvent…

Pourquoi n’es-tu pas traduit en anglais ?

C’est pour quand la traduction ?

Tu peux t’en charger toi-même, non ?

Aaaah, la traduction en langue anglaise. Le Graal de tout auteur étranger, les portes perlées du Paradis et de la reconnaissance internationale, celles qui ouvrent les deals à 25 millions de dollars avec Pixar, les adaptations à Bollywood avec Ashwarya Rai, en théâtre Nô à Tokyo et en comédie musicale muette pour les bénédictins ayant fait voeu de silence. Être traduit en anglais, c’est franchir le seuil de la lingua franca, c’est l’assurance statistiques d’être lu, et donc repéré, par un public bien plus vaste, parce que tout le monde parle anglais, et pas le français. Alors, il faut se faire traduire, hein ? Et tu l’es ?

Non ?

(À ce stade de la discussion, en général, l’interlocuteur adopte une moue dubitative. La traduction décuple le lectorat ; c’est tellement évident que, si tu n’en as pas, quelque chose cloche forcément chez toi. Genre tu souffres d’odeurs corporelles chroniques qui empêchent ton éditeur de rester suffisamment longtemps dans la même pièce pour te faire signer le contrat, ou alors tu es secrètement insupportable – comme tous les créateurs, on le sait bien – je le savais ! je le savais ! -, ou alors tu es chroniquement malchanceux et c’est contagieux alors reste loin de moi je te prie, ou pire. Tes livres. Sont. Mauvais. Et tu vas vouloir me les vendre. Mon dieu, comment me tirer de ce mauvais pas ? Vite, parlons-lui de mes enfants.)

Non, parce que ce n’est pas si simple.

J’ai trois nouvelles traduites, « Devant » et « L’Île close » en anglais, dont seule la deuxième a donné lieu à une véritable diffusion aux États-Unis, ainsi que « Bataille pour un souvenir » en Pologne. Et cette chance est déjà extrêmement rare pour un auteur français.

Les obstacles

Alors, pourquoi cela n’arrive-t-il pas souvent ?

  • La difficulté de lire la langue. Comme dit plus haut, presque tout le monde parle anglais, et beaucoup d’acteurs de l’édition le lisent. Une langue plus exotique, comme le français ou le moldovalaque, est bien plus rare. Il y a bien entendu des exceptions, mais on ne peut compter dessus. Pour se faire repérer ou publier, il faut envoyer un texte dans un idiome intelligible. En-dehors de la France, celui-ci est la plupart du temps l’anglais. Donc il faut être traduit d’abord. Ce qui résoud un peu la question, hein.
  • Le prix d’une traduction. Une traduction de qualité, ça se paie. Tout le monde ne peut pas s’improviser traducteur littéraire, c’est un métier, et un professionnel a un coût. Ce coût est souvent supérieur à l’à-valoir de l’auteur. Et c’est à l’éditeur importateur de payer ce chantier (en principe). Ce qui augmente drastiquement le risque financier, et donc, la prudence est de mise ; on tentera plus facilement de publier un auteur obscur dans sa propre langue, bien sûr.
  • L’envergure de l’offre anglaise. On raconte qu’autrefois, quand on demandait aux éditeurs américains pourquoi ils n’importaient pas davantage d’étrangers, ils répondaient : « Pourquoi traduire ce que nous avons déjà ? » En 2004, sur le sol américain, on estime que sur 185 000 titres de littérature adulte publiés, seuls… 874 étaient des traductions, soit 0,005% (hou yeah). C’est un effet mécanique : tout le monde parle anglais ; beaucoup le lisent ; la taille du marché rend viable des niches économiques restreintes partout ailleurs. Donc, pensent les Américains, il n’y a pas d’intérêt à payer davantage pour ce qu’ils croient avoir déjà. (Même si l’idée est fausse, sinon ils ne traduiraient rien, et ils le savent.)

Ce n’est évidemment pas pour prétendre que c’est infaisable, loin de là : plusieurs auteurs français, David Khara, Pierre Pevel, Jean-Claude Dunyach, Mélanie Fazi, Jess Kaan, Léa Silhol, votre serviteur et encore d’autres ont déjà franchi le seuil, une diffusion plus ou moins vaste. Les lamentations qu’on entend parfois sur la prétendue impossibilité de la chose sont fausses. OK, c’est dur, mais pas infaisable.

Pour que cela se produise, autant que j’en sache, il convient de résoudre les problèmes principaux exposés ci-dessus.

  • Trouver quelqu’un qui lise et apprécie le français (c’est surtout ce qui m’est arrivé). C’est aussi le rôle du département droits étrangers d’un éditeur : cela réclame de connaître les bonnes personnes, et beaucoup de patience…
  • Faire le pari de payer la traduction soi-même en espérant se rembourser sur la vente à l’étranger. Ça marche assez bien, mais ça risque de donner de mauvaises habitudes aux angolphones qui risquent d’oublier, à la longue, que la traduction est à la charge de l’importateur.
  • Connaître une notoriété suffisante pour être repéré par les éditeurs (devenir un best-seller, quoi).
  • Mettre en valeur la littérature étrangère auprès des pays anglophones. Impossible de ne pas mentionner le travail de fourmi et constant réalisé par la critique et éditrice Cheryl Morgan, qui siège au jury des SF&F Translation Awards, chargés de récompenser la qualité de traductions étrangères en imaginaire.
  • Se traduire soi-même.

Se traduire soi-même ?

Ce dernier point mérite un peu de développement, car c’est souvent ce qui ressort quand je discute de la chose. Si l’on sait traduire vers le français, pourquoi ne pas se traduire soi-même dans l’autre sens ? (La même moue dubitative que précédemment accompagne généralement cette question : si ce n’est pas fait, c’est qu’il y a forcément quelque chose qui cloche.)

Eh bien, ça non plus, ce n’est pas aussi simple.

  • On ne connaît aucune langue aussi bien que sa langue maternelle. Même un bilingue a plus d’assurance dans l’une ou l’autre. il y a une pratique, un bain culturel, dont il est quasiment impossible de bénéficier dans plus d’une langue. Même si l’on connaît extrêmement bien une culture étrangère, créer dans celle-ci nécessite une intimité avec le langage bien supérieure à la compréhension profonde. Traduire vers une autre langue que la sienne est un défi extrêmement périlleux que les traducteurs refusent très généralement.
  • Mais c’est possible quand même. On peut avoir un niveau de maîtrise qui permet l’exercice, cela arrive, et, de toute façon, l’auteur ne viendra pas râler s’il se trahit tout seul. Certains créent aussi directement en anglais : Aliette de Bodard par exemple. Pour ma part, je me suis chargé de traduire « Devant » tout seul, et j’ai terminé avec une mention honorable à l’Eurocon 2009 : je n’ai donc probablement pas trop raté mon coup. Hélas, pour la plupart des auteurs, ce n’est pas envisageable. Mais j’aimerais retenter l’expérience, sauf que…
  • … Traduire prend du temps et de l’argent. Je ne peux parler que de mon cas, car c’est ce que je connais le mieux, et ce point constitue mon principal obstacle. Une traduction d’un solide pavé, de l’anglais vers le français, me prend environ six mois. Six mois pendant lesquels on me paie… Si je devais traduire un Léviathan, par exemple, il faudrait que je bloque six mois, six mois pendant lesquels je n’écrirais rien de nouveau – ce qui est un peu déprimant – et pour travailler sans certitude de publication ni rémunération. J’ai plus urgent et plus sûr à faire, tout simplement.

En conclusion

Voilà pourquoi ce n’est pas évident : cela n’a rien à voir avec une maladie honteuse ou un trait de caractère fondamentalement tordu. Cependant, les réussites sont présentes, existent, et montrent que la barrière n’est pas infranchissable. Mais elle existe quand même ; avec des journées de 72h, ce serait déjà réglé.

C’est peut-être ça, la maladie honteuse : ne pas avoir de journées de 72h.

Auguste lectorat, amis de l’édition, n’hésitez pas à partager votre expérience en commentaires, vos idées, vos remarques.

2014-08-30T18:32:11+02:00jeudi 23 août 2012|Best Of, Le monde du livre|41 Commentaires

Peut-être de dernières secondes de paix

La réalité est bien entendu plus complexe. Mais cela donne à réfléchir.

Julien Assange, le très poursuivi et controversé rédacteur en chef de Wikileaks est actuellement au centre d’un conflit diplomatique opposant l’Équateur et la Grande-Bretagne. Les premiers lui accordent l’asile politique, ce qui n’est pas du tout du goût des seconds, qui menacent de répliquer par une intervention armée.

Évidemment, ça fâche.

Nous souhaitons être très clairs, nous ne sommes pas une colonie britannique. Le temps des colonies est terminé […] Si l’intervention mentionnée dans le communiqué officiel britannique se produit, elle sera considérée par l’Equateur comme un acte inamical, hostile et intolérable, ainsi que comme une agression contre notre souveraineté, ce qui nous obligerait à répliquer par les moyens diplomatiques les plus fermes. – Source

C’est dans l’air que les inégalités sociales, les disparités de rémunération, les répercussions de la crise économique, les horreurs générées par le capitalisme sans contrôle, la haine envers l’Occident née de la misère forment un très dangereux cocktail qui monte doucement vers l’ébullition et des paroles de « révolution » ou de « guerre » ne se trouvent plus seulement prononcées par les alarmistes.

Quand je vois Assange détenu par un État souverain et qu’un autre menace ni plus ni moins d’une violation de celle-ci pour récupérer un homme qui – à tort ou à raison, c’est un autre débat – a poussé à l’extrême l’idéal de libre circulation de l’information, je frémis. Je me rappelle qu’un autre type est mort assassiné il y a presque un siècle et que, par le jeu des alliances, cet événement tragique mais relativement isolé a plongé l’Europe dans une guerre atroce. Assange symbolise un enjeu majeur du début du XXIe siècle, celui du contrôle de l’information. Car, selon les mots d’Orwell, « qui contrôle le présent contrôle le passé ; qui contrôle le passé contrôle l’avenir ». Cela va bien au-delà des questions de propriété intellectuelle ou du fantasme de geek ; il y a les colossaux enjeux économiques liés au contrôle de l’information personnelle du citoyen (qu’on constate le succès de Google et Facebook, deux régies publicitaires, pour mesurer leur poids), la tentation du contrôle et du fichage des citoyens par les États, même démocratiques, sous couvert d’épouvantails rhétoriques. Assange ne peut pas rester impuni. Sans même parler d’éthique et en constatant les faits seuls, il est la faille dans le système, l’épine dans le pied, une faille qu’il faut écraser, effacer, au risque de saper l’ensemble des édifices politiques actuels.

C’est trop gros, et pourtant. Une part de moi-même ne peut s’empêcher de souhaiter ne pas assister à un fragment d’histoire en train de s’écrire. Que le symbole controversé qu’est Assange et les actions irréfléchies des États ne forment pas le prétexte à l’explosion tant prophétisée du cocktail et déclenchent une cascade de dominos comme en 1914 avec l’assassinat du pauvre archiduc Ferdinand qui ne se serait probablement jamais douté que sa mort conduise des États prétendus civilisés à la guerre. Qu’en 2090, un gosse comme moi cent ans avant ne s’interroge sur la cause incroyablement stupide d’une boucherie, preuve de la sottise humaine – une espèce qui a manifestement besoin de se baigner dans son propre sang pour apprendre des leçons.

Des leçons pour lesquelles sa mémoire semble toujours tristement courte.

2012-08-18T19:13:12+02:00mardi 21 août 2012|Humeurs aqueuses|26 Commentaires

Lundi, c’est déclencheurs (8) : un conflit indirect

Rappel des règles du jeu : il s’agit d’écrire pendant vingt minutes sur un, ou plusieurs éléments, remaniés ou non, de la liste ci-dessous. L’article initial de la série se trouve ici.

Ces conflits indirects forment des moments de friction, où la tension narrative se développe, où les personnages se complexifient, réagissent à la frustration. Comment ? Qu’est-ce que cela révèle sur leur nature profonde ? Quelle différence ressentez-vous par rapport au premier exercice de la série, où l’affontement était direct ?

Déclencheurs : conflit indirect

  1. Retardé par les éléments
  2. On ne s’aime pas mais on bosse ensemble
  3. Je t’aime, mais ce n’est pas réciproque
  4. On s’aime et ça rend tout très compliqué
  5. D’accord sur la finalité, pas sur les moyens
  6. Se justifier à un supérieur
  7. Négociation difficile
  8. Personne ne m’écoute jamais
  9. Trop de pression sur mes épaules
  10. Gagner ta confiance
2014-08-27T16:05:57+02:00lundi 20 août 2012|Technique d'écriture|4 Commentaires
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